Le sujet est intéressant, mais nous sortons complètement (c'est un peu de ma faute!) des premières mythologies et de la préhistoire. Il faudrait plutôt voir dans une "histoire du Beau" ou quelque chose dans ce goût-là dans un autre sous-forum. Je vais quand même répondre, à charge pour un modérateur de déplacer ce bout du fil
Prévôt de Lascaux a écrit :
Merci de votre réponse, mais j'ai du mal à l'assimiler …
Par exemple : L'Éphèbe de Marathon (IV av J.C. École du second classicisme) n'aurait donc pas été créé par Praxitèle pour décorer "artistiquement" une salle de gymnase (si j'ai bonne mémoire ) ?
Certes, Praxitèle crée du beau, mais il n'est pas gratuit, c'est-à-dire qu'il ne renvoie pas à lui-même : le gymnase, dans la cité grecque antique, est un lieu éminemment civique puisqu'il sert à l'éducation et à la formation des futurs citoyens que sont les jeunes garçons, enfin sortis du gynécée (monde exclusivement féminin). Quand Praxitèle propose sa représentation d'un Ephèbe pour décorer une salle du gymnase, il propose un modèle idéal de citoyen : beau, aux lignes corporelles équilibrées, en bonne santé, une figure qui se rapproche des représentations des dieux et des héros mythologiques. On est dans la représentation de la cité "idéale" à travers le citoyen "idéal". J'emploie le mot "idéal" par référence aux "Idées" platoniciennes. Dans la civilisation grecque, le "beau" n'est pas séparable du "Bien" (on dit "kalos k(ai) agathos") ce qui lui donne avant tout une valeur morale, la valeur esthétique découlant "naturellement" de cette valeur morale, et le tout inscrit dans une réflexion sur la cité et le politique.
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À mon souvenir, "ART" se dit "technis" (ou plutôt technès ?) en grec, et ce qui est "technique" ne sous-entend-t- il pas une "belle" réalisation ?
En art, la "technique" résume tout ce qui concerne l'habileté dans l'agencement des éléments et dans la mise en œuvre des procédés.
C'est bien "technè", qui désigne en fait le travail de l'artisan : l'artiste étant un technicien habile (et intelligent, car on compte aussi la conception de l'objet), mais le "beau" n'est pas sous-entendu dans cette notion-là.
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Certains auteurs du XIXe ont peut-être modifié la connotation du terme "beau", mais on ne peut l'étendre, à mon avis, au monde entier et à toutes les cultures.
Encore plus difficilement à Cro-Magnon !
Il n'y a pas que les auteurs du XIXe siècle qui ont "modifié" la connotation du terme Beau. Chaque civilisation développe sa propre conception. On peut même imaginer des civilisations où la notion de "beau" n'existe pas, car je ne vois effectivement pas pourquoi elle serait universelle.
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Pour en revenir aux "Vinci, Michel-Ange, Boticelli", quels sont les écrits qu'ils ont pu laisser pour permettre d'apercevoir qu'ils exprimaient à travers leurs œuvres " une transcendance divine, ou des angoisses eschatologiques". Merci de m'éclairer un peu sur ces "grands" hommes que je ne connais pas particulièrement sur ce plan.
Pour eux, je m'appuie sur le contexte culturel de leur époque et la nature de leurs oeuvres. Delumeau, dans la
Peur en Occident (XVe-XVIIIe s), a abordé le cas de Michel-Ange. Je prendrai le temps de rechercher ce qu'il en a dit.
Mais simplement en considérant que ces artistes ont travaillé sur commande, comme les autres artistes de la même époque d'ailleurs, que les commanditaires étaient l'Eglise catholique ou les dirigeants contemporains, les sujets traités correspondent forcément à un sens voulu et recherché par les commanditaires, auquel l'artiste adhère d'une certaine façon et qu'il va rendre à sa manière.
Il faut aussi que je retrouve ce que dit Michelet à propos du même Michel-Ange, et qui montre une vision très romantique de l'artiste.