J'avais posté
ici, dans un vieux sujet, un exemple de l'étude de Saint Augustin sur le texte biblique, à propos, entre autres, de l'inceste d'Ève avec ses enfants.
Il identifie les incohérences de l'histoire, puis émet des hypothèses pour la rendre plausible. Comme il le dit :
"l’Histoire sainte n’était pas obligé de mentionner tous les hommes qui pouvaient exister alors, mais seulement ceux qui servaient à son sujet." C'est donc le sujet qui prime, sur l'exactitude.
Isidore a écrit :
Attention à la notion de vérité dans le langage de l'Eglise. Elle ne doit pas être comprise comme la réalité, même si parfois elle peut en partie la recouvrir.
En effet. Comme l'Église se réserve le droit d'interpréter la Bible, les fidèles sont invités à croire que celle-ci dit la vérité, sachant qu'un prêtre est toujours là pour indiquer de quelle vérité il s'agit
De la sorte, il n'est pas utile de confronter le texte à la vérification scientifique de son sens littéral.
Citer :
Il y a beaucoup d'approches possibles de la notion de Vérité. Mais l'Eglise enseigne ainsi, dans les paroisses, et pas seulement dans les universités de théologie que la vaste majorité des récits de l'AT sont des allégories.
À la suite des philosophes antiques, les théologiens catholiques ont défini plusieurs niveaux de lecture de la Bible. Voici ce qu'en dit Saint Thomas d'Aquin (les gras sont de moi).
Thomas d'Aquin, dans la Somme Théologique a écrit :
L'auteur de l'Écriture sainte est Dieu. Or, il est au pouvoir de Dieu d'employer, pour signifier quelque chose, non seulement des mots, ce que peut faire aussi l'homme, mais également les choses elles-mêmes. Pour cette raison, alors que dans toutes les sciences ce sont les mots qui ont valeur significative, celle-ci a en propre que les choses mêmes signifiées par les mots employés signifient à leur tour quelque chose. La première signification, celle par laquelle les mots signifient certaines choses, correspond au premier sens, qui est le sens historique ou littéral. La signification par laquelle les choses signifiées par les mots signifient encore d'autres choses, c'est ce qu'on appelle le sens spirituel, qui est fondé sur le sens littéral et le suppose. A son tour, le sens spirituel se divise en trois sens distincts. En effet, dit l'Apôtre (He 7, 19), la loi ancienne est une figure de la loi nouvelle, et la loi nouvelle elle-même, ajoute Denys, est une figure de la gloire à venir ; en outre, dans la loi nouvelle, ce qui a lieu dans le chef est le signe de ce que nous-mêmes devons faire. Donc, lorsque les réalités de la loi ancienne signifient celles de la loi nouvelle, on a le sens allégorique ; quand les choses réalisées dans le Christ, ou dans ce qui signifie le Christ, sont le signe de ce que nous devons faire, on a le sens moral; pour autant, enfin que ces mêmes choses signifient ce qui existe dans la gloire éternelle, on a le sens anagogique. Comme, d'autre part, le sens littéral est celui que l'auteur entend signifier, et comme l'auteur de l'Écriture sainte est Dieu, qui comprend simultanément toutes choses dans la simple saisie de son intelligence, il n'y a pas d'obstacle à dire, à la suite de S. Augustin, que selon le sens littéral, même dans une seule "lettre" de l'Écriture, il y a plusieurs sens ... Il n'y aura pas non plus de confusion dans l'Écriture, car tous les sens sont fondés sur l'unique sens littéral, et l'on ne pourra argumenter qu'à partir de lui, à l'exclusion des sens allégoriques ... Trois des sens énumérés ici par S. Augustin se rapportent au seul sens littéral : l'histoire, l'étiologie et l'analogie. Il y a histoire, explique S. Augustin, lorsqu'une chose est exposée pour elle-même. Il y a étiologie quand la cause de ce dont on parle est indiquée : ainsi lorsque le Seigneur explique pourquoi Moïse donna licence aux Juifs de répudier leurs épouses, c'est-à-dire en raison de la dureté de leur coeur (Mt 19, 8). Il y a analogie enfin quand on fait voir que la vérité d'un passage de l'Écriture n'est pas opposée à la vérité d'un autre passage. Reste l'allégorie qui, à elle seule, dans l'énumération de S. Augustin, tient la place des trois sens spirituels ... Le sens parabolique est inclus dans le sens littéral; car par les mots on peut signifier quelque chose au sens propre, et quelque chose au sens figuré; et, dans ce cas, le sens littéral ne désigne pas la figure elle-même, mais ce qu'elle représente. Quand, en effet, l'Écriture parle du bras de Dieu, le sens littéral n'est pas qu'il y ait en Dieu un bras corporel, mais ce qui est signifié par ce membre, à savoir une puissance active. Cela montre bien que, dans le sens littéral de l'Écriture, il ne peut jamais y avoir de fausseté.
Ainsi, il n'est jamais question de contester le sens littéral, mais de le prendre sous le bon angle pour ne pas le prendre en défaut.