Quelques extraits d'un article de J.Y. Camus, et quelques sources sur la revue et ce que l'on appelle Nouvelle Droite.
L'article relativise le poids et le danger de celle-ci, à juste titre, finalement.
"Dès que le GRECE fut connu au-delà des cercles fréquentés jadis par ses fondateurs, il fut d'ailleurs en bute à des critiques virulentes, venues dès 1974 des milieux maurrassiens et catholiques , puis de la gauche, qui voyaient en lui, alors avec quelque raison, un néo-fascisme ou un surgeon de l'extrême-droite française de toujours, cherchant à sortir du ghetto politique non par un renouveau de la pensée, mais par une tactique de travestissement des idées, de dissimulation et de double discours. Cette accusation a constitué l'argument majeur des controverses autour de la « nouvelle droite » depuis trente ans. Il me semble pourtant qu'elle n'est plus vraiment justifiée. Il est possible de reprocher à la « nouvelle droite » de valoriser dans ses revues des auteurs dont elle n'indique pas clairement les liens (passés ou présents) avec le national-socialisme ou les mouvements de l'extrême-droite radicale ; d'avoir inclus dans le comité de patronage de sa revue théorique, Nouvelle école, des personnes de la même provenance idéologique ; de ne pas citer, en appui de telle ou telle note de lecture publiée dans Eléments, l'activité politique d'un auteur recensé de manière laudative. Toutes ces critiques ont été exprimées, notamment, par Pierre-André Taguieff dans un article de 1981qui a fait date et qui était intitulé sans ambages « l'héritage nazi de la Nouvelle droite ».
"La réalité est complexe : la « nouvelle droite » a bien des racines dans la droite « radicale » : les nationalistes révolutionnaires au sens de Sternhell ; les non-conformistes des années 30 et la Konservative Revolution allemande. Nombre de ses animateurs, passés et actuels, ont effectivement milité dans ce que, faute de mieux, on appellera l'extrême-droite nationaliste-européenne des années 60-70. Mais elle n'en est ni l'héritière directe ni le clône et leur est irréductible. Ceux de ses cadres qui ont voulu continuer à inscrire leur réflexion dans le cadre de la politique partisane l'ont quittée, soit pour d'obscures carrières de technocrates au service de la droite de gouvernement, soit pour l'aventure frontiste dans laquelle ils retrouvaient condensées toutes les tentations mortelles de l'extrême- droite."
"La vérité au fond, n'est-elle pas que la « nouvelle droite » forme une droite insaisissable, inclassable ? Comment la cerner ? Tout d'abord, il y a cet extraordinaire essai de classification entrepris dans le numéro de Eléments de février 1999 et dans lequel sont recensées pas moins de 36 familles de la droite, définies par une devise ; un adversaire principal ; des auteurs de référence ; une époque emblématique à laquelle chacune se réfère ; des personnages admirés et des films préférés. L'entreprise peut prêter à sourire, si l'on s'en tient aux critères topologiques de la science politique. Elle n'en est pas moins fort pertinente, car elle caractérise chaque droite par son style, et la droite est avant tout, en France en tout cas, affaire d'attitude et de style. A qui donc emprunte la « nouvelle droite », parmi ces familles-là ? Selon nous, un peu à la « droite personnaliste et communautarienne » ; un peu aux « nationaux- révolutionnaires » et aux « fédéralistes européens » ; un peu à la droite « bio- hygiéniste », aux « régionalistes » et aux « folkistes ». Pour avoir une idée aussi précise que possible du paysage mental néo-droitier, il faut croiser ces données avec les
indications précieuses fournies par la monumentale Bibliographie générale des droites françaises élaborée par Alain de Benoist."
"Dans l'état actuel de ce parcours intellectuel non encore achevé, non fixé, on voit bien l'apport des droites révolutionnaires, qui n'empêche pas l'ouverture sur des univers intellectuels très étrangers à l'extrême- droite. Encore faut-il préciser qu'il s'agit-là des références personnelles d'Alain de Benoist et que nombre des autres animateurs de la « nouvelle droite », parmi la génération des pionniers et des cadres des années 70-80, sont incontestablement davantage reliés au cadre conceptuel des extrême- droites traditionnelles."
"La gauche a l'habitude fâcheuse de ne considérer l'extrême-droite qu'en termes de « danger ». De ce point de vue, soyons rassurés : la « nouvelle droite » ne menace pas la démocratie. Elle n'a pas réussi à contrebalancer le pouvoir culturel de la gauche qui, par contre, est sérieusement ébranlé par le consensus large qui s'est établi autour des idées de la droite néo-libérale."
"Et à avoir comme adversaire une droite aussi invertébrée, la gauche du même coup, n'en est que plus paresseuse, plus consensuelle. Elle oublie l'exigence et l'urgence de transformation sociale et répète l'air du temps... La « nouvelle droite » a payé au prix fort de l'isolement le fait d'avoir tenu des positions paradoxales. Elle s'est, au moins, inscrite dans la durée et restera sans doute dans l'histoire des idées politiques, comme la seule entreprise d'élaboration d'une vision du monde, à partir des décombres de l'extrême- droite activiste des années 60."
Source : J.Y. Camus, 2006,
http://tempspresents.wordpress.com/2008 ... de-pensee/De son côté, G. Châton, MCF en Sc. Po. à Angers, en parle dans un article (auquel je n'ai pas encore eu accès), cité (correctement ?) sur Wikipédia :
- Gwendal Châton, « L'histoire au prisme d'une mémoire des droites extrêmes : Enquête sur l'Histoire et La Nouvelle Revue d'Histoire, deux revues de Dominique Venner », dans Michel J. (dir.), Mémoires et Histoires. Des identités personnelles aux politiques de reconnaissance, Rennes, Presses universitaires de Rennes, coll. « Essais », 2005, pp. 213-243.
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http://fr.wikipedia.org/wiki/Dominique_Venner