Isidore a écrit :
Nebuchadnezar a écrit :
À la FNAC, je suis régulièrement frappé par la pile que forment Les Croisades vues par les Arabes, d'Amin Maalouf. Il doit bien se vendre. C'est vrai qu'il est très bien écrit, en dépit de ses carences méthodologiques.
Je ne sais pas à quoi c'est du : culture FNAC que se refile les chefs de rayons Histoire entre eux, comportement inconscient ou bien politique en centrale. Dans le dernier cas ce ne serait que pour les Il doit y avoir un coté sanglot de l'homme blanc, le geste militant facile.
Tout cela rassemblé, Isidore. Je pense que vous avez touché juste sur tous ces points - ajoutons que Maalouf est un auteur médiatisé et qu'il est membre de ce petit cénacle d'intellectuels de plateau télé que les téléspectateurs voient régulièrement, ce qui le rend familier du grand public. Et puis, la librairie n'étant pas au beau fixe, quand on vend entre 15 et 20 exemplaires d'un bouquin chaque mois, on hésite à le retirer des tables, forcément. Mais je parie mon auriculaire que la plupart des libraires Fnac ne l'ont pas lu - et seraient bien en peine d'en parler autrement qu'en reprenant la quatrième de couverture.
nico86 a écrit :
Comment se comporte les livres consacrés au régionalisme ?
Comment se vendent les livres historiques de poche - Points histoire aux éditions du Seuil - Tempus ?
Comment évolue les comportements et les goûts des amateurs de livres d'histoire ? sont ils plus avisés qu'auparavant ?
Le régionalisme se porte très bien, il me semble. Je serais bien en peine de développer plus avant, mais de nombreux éditeurs régionaux publient des nouveautés régulièrement et trouvent à vendre leurs ouvrages. C'est un secteur très dynamique. Etant en région parisienne, je prends peu d'ouvrages traitant de sujets régionaux, hors la Bretagne (j'ai beaucoup de client bretons) ou certains ouvrages pointus sur la résistance dans telle ou telle région de France.
Le poche, évidemment, porte les rayons d'histoire - le fond, surtout. Les collections sont nombreuses, et les éditeurs français sont souvent très investis. On pense aux collections Champs, de Flammarion, Points Histoire, chez Seuil, ou Tempus, la collection poche de Perrin. Le poche, c'est aussi l'achat d'impulsion - prix réduit, et un client passe le cap, achetant un ouvrage sur les trois derniers siècles de Constantinople ou la biographie de Martha Goebbels, quand bien même ces thèmes se seraient pas dans son habituel champ d'intérêt.
La richesse des collections poche en France est véritablement un atout indéniable pour la bonne santé de l'histoire dans les librairies françaises.
Sur le comportement des lecteurs, je ne suis pas certain qu'il ait beaucoup changé dans les dix dernières années. Je relisais il y a peu le livre de A. Prost,
12 leçons sur l'histoire, et il me semble que ses remarques restent pertinentes, les lecteurs d'histoire demeurant assez nombreux, et les rayons très dynamiques.
Tous les éditeurs ont maintenu leurs collections d'histoire (Flammarion, Seuil, Perrin, Fayard, etc.) et la plupart maintiennent un assez haut niveau d'exigence. Pas un éditeur n'imaginerait abandonner ses collections d'histoire - à l'inverse des sciences humaines en général, qui souffrent depuis une dizaine d'années.
Des éditeurs tentent également des voies originales, qui ne satisferont peut-être pas un lecteur pointu mais trouvent un public d'amateurs très réceptif - je pense au bouquin
Les grands z'héros de l'histoire, au très beau succès. Sans doute pas très sérieux, mais amusant.
Les lecteurs s'informent, viennent chercher des livres précis, parfois assez pointus. Ils se promènent, feuillètent, se montrent assez curieux, se laissent tenter par un poche, un achat imprévu, sont demandeurs de conseils, pour peu que le titulaire du rayon semblent s'y connaitre un peu.
Je remarque une abondance nouvelle d'une histoire destinée au "très grand public" - avec des éditeurs qui s'engouffrent dans la brèche de l'initiation à l'histoire, pas toujours de façon très heureuse. Quand un éditeur comme Marabout se targue de lancer une collection d'histoire grand public, on peut craindre le pire. Et ses ouvrages consacrés à l'histoire de France, à la Rome antique, à la Grèce classique, sont en effet des catastrophes. Mais ils se vendent, pour peu qu'un librairie se contente de les mettre sur ses tables. Les clients ne font pas toujours la part des choses.
Les ouvrages titrés "Introduction à l'histoire de France", ou n'importe quelle variante, se multiplient, depuis deux ans - avec peu de bonheur, il est vrai.
Ce qui montre toutefois une véritable apétance du public pour l'histoire, qui reste, comme le disait Prost, une spécificité française.
Après, le bon grain ou l'ivraie, il en va de l'histoire comme en toutes choses.