Egorov a écrit :
Par delà des bilans "comptables"de ces études, la méthode employée par les historiens-statisticiens ne devient-elle pas non plus à son tour sujet à des contestations de partisans "d'autres méthodes " ?
Chaque méthode s'ouvre à des critiques.
Le témoignage contemporain :
LES PLUS Qui mieux qu'un témoin peut parler de ce qui se passe...
LES MOINS Le témoin est totalement faillible ; il peut être partisan, vantard, honteux, malhonnête... Et comment a-t-il tenu ses comptes ? Autant on peut accroire les témoignages de petits massacres, de petits tas d'un petit nombre de crânes de vaincus, autant les dénombrements de foules laissent... sceptiques.
Les études démographiques :
LES PLUS Lorsqu'elles sont tenues à jour par des civilisation comptables (genre Chine), on peut déjà les prendre au sérieux ; dans ce cas, la disparition de millions d'habitants entre deux dates témoignent de désastres quand, au pire, les populations devraient stagner ;
LES MOINS Tous les expatriés, émigrés, déportés risquent de faire partie du lot des morts et disparus... Et
quid des envahisseurs ? Lorsqu'elles sont effectuées a posteriori, elles peuvent être absolument fantaisistes (populations amérindiennes précolombiennes assenées sans AUCUN support ni étude...) ou biaisée par la faillibilité de méthodes de comptage qui ne sont pas au point (extrapolations inadéquates, etc).
Décompte des cadavres, tombes ou de registres de décès :
LES PLUS Solide étayage mais c'est le comptage
a minima, quelques cadavres auront disparus dans la nature. C'est quand même le travail de décompte le plus sérieux. En général, il est surtout réalisé sur les militaires, car les dirigeants ont besoin de conserver des traces des budgets militaires, donc du nombre de solats employés.
LES MOINS Léger mais réel : les civils sont souvent oubliés des décomptes.
L'appel des morts et disparus :
LES PLUS Les avantages du témoignage contemporain et du décompte des cadavres ;
LES MOINS Leurs inconvénients sont réunis aussi.
Extrapolations :
LES PLUS Comble les trous...
LES MOINS Totalement faillibles : il suffit qu'un élément de la règle de trois soit faux, et c'est bidon.
Estimations moyennes (ou médianes) des estimations précédentes :
LES PLUS Consensuelles, pas de responsabilité ;
LES MOINS Le risque d'écarter les estimations douteuses, celui de ne pas les écarter, celui d'écarter les estimations qui "dérangent"...
Actuellement, je pense que le mieux est encore de recouper différentes sources (
as always) issues de différents modes de calculs.
Egorov a écrit :
A mon humble avis on déplace la discorde sur un autre terrain que celui du but recherché.
Il faut néanmoins garder ces doutes en vue et ne jamais oublier que ces décomptes sont inexacts, pour ne pas dire faux, mais qu'on le sait et qu'on n'a rien de mieux pour en parler. D'ailleurs, ce qui compte davantage que le 1/10e de mort (comme dans : 65.451,47 morts), c'est l'
ordre de grandeur. Non ?
Egorov a écrit :
Les chiffres des bilans sont sans cesse contestés selon les "besoins" que l'on veut leur faire dire.
Même moi, je truque des calculs pour tomber sur quelque chose de potable. Exemple : untel dit que l'événement A tue
x+20.000 personnes, tandis qu'un autre affirme que les événements A+B n'ont tué que
x personnes... Mathématiquement, l'événement B a ressucité 20.000 macchabées... ! Dans la réalité, c'est impossible !
Quand on fait des moyennes, ce genre de choses arrive assez régulièrement...
Egorov a écrit :
Il est évident que chaque historien sérieux ne peut, dans un ouvrage, parler d'estimations "à la louche". Aussi, à chaque fois que l'on voudra des sources fiables, devra-t'on sortir la calculette et les tableurs Excel pour vérifier la probité des chiffres annoncés.
lol
Qu'aurais-je fais sans Excel ? Sûrement pas ces décomptes morbides...
Pour répondre à la question :
1. L'honnête historien doit citer ses sources ou, s'il est auteur de ses chiffres mais veut se défendre d'affabulation, peut (c'est si rare dans un bouquin d'Histoire car ça casse le rythme de l'ouvrage), comme un scientifique, exposer intégralement son calcul.
2. Une autre méthode est d'exposer la fourchette de l'estimation (entre
x et
y morts). Cela dit, les estimations les plus extrêmes (basses comme hautes) sont souvent le fait d'auteurs partisans... On peut alors ajouter la moyenne des estimations retenues (auquel cas on peut, par rigueur intellectuelle, exposer toutes ses estimations avec leurs sources). Certains, plutôt qu'une valeur moyenne, présentent une valeur médiane : on élimine les deux estimations les plus extrêmes, puis les deux suivantes, et ainsi de suite, jusqu'à ne retenir qu'une ou deux estimations finales, les plus éloignées des extrêmes (là encore, on se devrait d'exposer toutes les estimations retenues avec leurs sources, afin que le lecteur puisse reconstituer le calcul...).