crazystory a écrit :
La lecture de
l'article de DR Grimes me laisse mal à l'aise. La définition du mot "complot" est en cause. Il cite les exemples suivants :
1- Le complot de la NASA qui n'aurait jamais envoyé d'astronautes sur la lune
2- Le complot des scientifiques défendant la thèse du réchauffement de la planète dû au CO2
3- Le complot des industries pharmaceutiques pour produire des vaccins inutiles
4- Le complot de l'existence d'un remède caché contre le cancer
Exemple 1 : les complotistes sauraient qu'un événement décrit comme réel aurait été inventé et mis en scène, et leur mensonge consisterait à faire croire à l'événement réel plutôt qu'à la fiction inventée.
Exemple 2 : les complotistes sauraient que le réchauffement a d'autres causes que le CO2 et leur mensonge consisterait à accuser le CO2.
Sur ces deux exemples, la nature du mensonge est tellement différente qu'on ne peut évidement pas comparer. Dans le cas 1, il s'agit d'imaginer et construire un ensemble cohérent de faits innombrables (préparation des vols, les vols eux même, les images, les échantillons recueillis, les echos des lasers sur les réflecteurs laissés sur la lune...), dans le second cas il s'agit de NE PAS imaginer qu'il y ait d'autres causes que le CO2 au réchauffement. Cas 1, on construit de toutes pièces une fiction d'une complexité inouïe, cas 2 on se contente de regarder ailleurs sans mettre en cause une construction existante. Donc évidemment, la théorie sur "la probabilité de fuites" de M. Grimes ne peut pas s'appliquer de manière identique. Quelqu'un qui sait, dans le cas 1, peut évidemment très facilement "lacher le morceau". Dans le cas 2, c'est plutôt l'inverse qui se produit : s'il est réel que le CO2 n'est pas le responsable du réchauffement, très peu de personnes n'ont qu'une vague idée de ce qui peut se passer, et si c'est le cas, soit ils ne disent rien, soit ils parlent et savent que, puisqu'ils sont à contre courant du paradigme, on va les prendre pour des idiots. Dans le premier cas, ce sont évidemment les complotistes qui seraient pris pour des idiots, dans le second cas ceux qui dénoncent le complot. Donc l'existence d'un paradigme et les attitudes de la masse vis à vis du paradigme sont les paramètres à prendre en compte.
J'avais déjà écrit sur ce forum qu'au nord de la Méditerranée, écrire que Jésus n'est pas mort sur la croix est une thèse complotiste. Le faire au sud de la Méditerranée est simplement le fait d'un bon croyant qui a lu correctement le Coran. Donc sur ce cas précis, le calcul de M. Grimes est tout simplement inopérant. Ceux qui écrivent des livres vendus au nord de la Méditerranée pour expliquer comment la crucifixion a pu se dérouler et Jésus s'en sortir vivant sont des hérétiques, qu'on moque pour leur incapacité à suivre l'opinion généralement admise. Ceux qui écrivent dans des livres vendus au sud de la Méditerranée que Jésus est réellement mort, et puisque des témoins l'ont vu plus tard bien vivant il n'a pu que ressusciter... que dis-je, personne évidemment ne va faire ça, c'est bien trop risqué ! Mais si on inverse les prédicats, par rapport à la situation géographique, on voit bien que ce qui est complot d'un côté de la Méditerranée est vérité universellement admise de l'autre côté, et vice-versa.
Exemple 3 : On prétend avoir un médicament efficace (le vaccin) alors qu'on sait qu'on ne donne qu'un truc inutile.
Exemple 4 : On prétend ne pas avoir de médicament efficace, alors qu'on cache la formule qui permettrait de la fabriquer
Le complot dans l'exemple 3 consiste à dire que le traitement est efficace bien qu'il ne le soit pas, alors que dans l'exemple 4 le complot consiste à dire qu'il n'existe pas de traitement efficace. Dans l'exemple 3 à inventer des statistiques, etc. donc une multitude de faits. Dans l'exemple 4 à dire qu'on n'a pas connaissance de faits. C'est évidemment complètement différent quand à la probabilité d'avoir une "fuite" ! On en revient aux mathématiques : un de mes professeurs m'avait dit un jour qu'on ne peut pas démontrer qu'une chose n'existe pas : on ne peut que conjecturer qu'une chose n'existe pas, jusqu'au jour où quelqu'un trouvera la chose en question !
Je prends donc avec beaucoup de précautions les démonstrations de M. Grimes. Et en particulier quand on commence à les appliquer à des événements historiques récents... pardon, j'arrête pour ne pas transgresser la charte du forum.
C'est une approche intéressante mais je ne pense pas que les différences que vous pointez entre les différents exemples soient si grandes que cela.
Dans les 3 derniers exemples cités, il s'agit de cacher ou de révéler des faits fondés sur des études scientifiques (on est donc loin de la croyance indémontrable du type religieux où seule la reconnaissance par le public serait importante). Il faut considérer (c'est le présupposé non exprimé de la méthode de Grimes) que la méthode scientifique reste le référentiel commun permettant de juger de la véracité ou non d'une affirmation, et donc de démontrer la présence d'un complot. C'est peut-être limitatif mais il faut reconnaître que beaucoup de théories du complot présentent comme une interprétation apparemment objective, sinon scientifique, des faits.
Or dans l'exemple 2, il ne suffit pas de regarder ailleurs, il faut aussi avoir caché toute étude qui démontrerait que le réchauffement est dû à autre chose que le CO2, ou qui démontrerait qu'il n'y a pas de réchauffement ; et plus important, il faudrait cacher que toutes les études démontrant qu'il y a un réchauffement dû au CO2 sont fausses. Donc au final pas mal de choses à cacher et qui, si elles sont révélées, mettent à jour l'imposture.
De même pour les exemples 3 et 4, l'hypothèse d'un complot suppose à chaque fois que l'on cache des études. Bien entendu tout labo fait des études sur les produits qu'il met (ou pas) sur le marché. (S'il n'en fait pas, c'est qu'il ne sait pas, donc il ne cache rien et donc pas de complot.
Et de même les organismes type OMS font des études. Dans les deux cas, il y a complot si des études ont été cachées (études montrant que le vaccin ne sert à rien, ou étude montrant que le médicament est efficace), et le complot sera révélé si les études cachées sont révélées.
La notion de complexité que vous indiquez est importante, mais elle me semble au moins partiellement prise en compte (d'un point de vue théorique du moins, on peut toujours contester les chiffres de Grimes) par la variable du nombre de personnes dans le complot et la notion de probabilité de fuite par personne et par unité de temps. On peut certes imaginer qu'une personne qui passe ses journées à faire par exemple des photos de navette spatiale dans un studio de cinéma aura plus de chances de se trahir qu'une personne qui doit "simplement" bidonner ou étouffer une étude (encore que...). Mais globalement cela ne me choque pas de penser que c'est plutôt parce qu'il faut mettre plus de monde dans le secret que les montages les plus complexes seront plus rapidement découverts.