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Message Publié : 06 Août 2006 15:36 
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Jean Mabillon
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Ce fil serait une liste des connaissances et thèses historiques--j'insiste sur ce dernier mot--largement acceptées à une époque donnée par les historiens et dans les milieux universitaires et intellectuels, ayant fait depuis l'objet d'une totale remise en cause, ou au moins sérieusement controversées.
Ces notions peuvent être, ou pas, passées dans la culture populaire et éventuellement continuer à y perdurer, bien qu'elles aient été depuis infirmées ou mises en doute par les historiens.

Un exemple
- les théories de Winckelmann--un des fondateurs de l'histoire de l'art et de l'archéologie au 18ème, ses livres sont à l'origine du renouveau néo-classique de la fin de ce siècle et ont, entre autres, influencé le peintre David.
Ses thèses sur la spécificité de l'art grec peuvent être résumées dans la citation ci-dessous

''La caractéristique universelle et essentielle de tout chef-d’œuvre grec est en dernier lieu une noble simplicité et une grandeur sereine, tant dans la position que dans l’expression. De même que les profondeurs de l’océan restent imperturbablement calmes, quelle que soit l’agitation de la surface, l’expression des figures représentées par les Grecs dénote toujours une âme grande et posée, quelles que soient les passions auxquelles elles sont soumises.''

Le probleme est que Winckelmann n'avait jamais eu un accès direct aux chefs d'oeuvre de l'art grec, qu'il n'était jamais allé en Grèce, et qu'il n'en connaissait essentiellement que les copies des collections romaines--il habita Rome après sa conversion au catholicisme.
Et l'art grec se résumait pour lui à la période classique, qui était celle qu'avaient privilégiée les fouilles de son époque, fouilles limitées à Athènes, Egine, Bassae.
Selon lui, l'apogée artistique de la sculpture grecque se situait au 5ème siècle av. J.C, avec en particulier les oeuvres de Praxitèle ou de Phidias.--Il n'accorde que peu de place aux périodes archaïques et hellénistiques, peu représentées dans les découvertes archéologiques et selon lui artistiquement inférieures.
Ou dans le cas du Laocoon auquel il consacre des pages importantes, pourtant de la période hellénistique, Winckelmann le rattache à son idéal esthétique de sobriété et de sérenité par un tour de passe passe rhétorique.
Et enfin, dans l'élaboration de sa définition de l'art grec, il a ignoré totalement l'art de la poterie, et la peinture, cette dernière de toute façon très mal connue à son époque.
A la fin du 18ème siècle, on découvre que des bas reliefs ont été peints. Au 19ème siécle, Clarke et Dodwell vont découvrir des traces de pigments colorés et dores sur les statues grecques de l'époque classique.
Ces bas-reliefs et ces statues, censées être blanches et dépouillées selon la définition winckelmannienne du canon classique--étaient en fait polychromes, peinturlurées de couleurs vives.
cette découverte donna lieu à une controverse passionnée--le ''débat de la polychromie''-- et à des révisions déchirantes; certains historiens de l'art et tenants de l'idéal classique se résignèrent difficilement à accepter l'évidence et à abandonner une théorie si simple, qui traçait des frontières historiques et artistiques si nettes entre l'apollonien et le dyonisiaque, entre l'art classique ''supérieur''et purement grec et des styles de statuaire plus baroques/expressifs considérés comme archaiques, décadents/orientalisants, et de moindre valeur artistique.

http://arts.ens-lsh.fr/peintureancienne ... _p1_04.htm


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Message Publié : 06 Août 2006 17:00 
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Un sujet fort intéressant, Tonnerre.

Trois "erreurs" de ce type, assez connues, me viennent à l'esprit :

- La "loi salique" dont les Valois auraient argué aux alentours de 1328, afin de ruiner les prétentions anglaises au trône de France. Je crois que cette thèse a été invalidée à la fin du XIXe s. Si mes souvenirs sont bons, il me semble que cette "légende" a été forgée au XVe s. dans l'entourage de Charles VII. (Cf. Colette BEAUNE, Naissance de la nation France, Gallimard.)

- Les terreurs de l'An Mil. Selon Jean Delumeau (La peur en Occident), une légende qui "a la vie dure et dont il faut régulièrement tordre le cou". Les angoisses eschatologiques se rencontrent en effet surtout à la fin du Moyen Âge.

- Les procès de sorcellerie qui seraient typiques du Moyen Âge. En réalité, les bûchers de sorciers et sorcières se sont surtout allumés à la fin du XVIe et au début du XVIIe s.
(Cf. ce sujet : http://www.passion-histoire.net/phpBB3_Fr/viewtopic.php?t=4710.)

PJ


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Message Publié : 07 Août 2006 13:28 
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Jean Mabillon
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Inscription : 04 Juin 2006 12:47
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Localisation : Centre
Merci PJ. j'ai personnellement associcié bûchers de sorcières et Moyen Age pendant longtemps.
Un autre exemple, qui m'a donné l'idée d'ouvrir ce fil, la notion que la syphilis aurait été importée en Europe lorsque Christophe Colomb et les équipages espagnols qui l'accompagnaient sont rentrés d'Amérique en Espagne.
Cette théorie, qui a longtemps prévalu, est maintenant largement abandonnée suite à des découvertes archéologiques analysées grâce à des techniques de datation mais elle perdure dans le grand public.

En 1494, les troupes françaises de Charles VIII entrent en Italie et occupent Rome le dernier jour de l'année.
En juillet 1495 a lieu la bataille de Fornoue, c'est à ce moment qu'apparait le premier signalement descriptif d'un mal nouveau et effrayant qui se répand chez les soldats, qui sera appellé ''mal de Naples'' par les Français et ''mal français'' par les Italiens.
L'auteur de cette première description est un médecin militaire vènitien nommé Cunano, qui parle de soldats présentant des ''pustules'', des ''vésicules'' évoluant en ''ulcérations rongeantes,'' appelées plus tard chancres.
Les malades se plaignent aussi de douleurs intenses dans les membres, avec la sensation que leurs os sont brisés. Le caractére vénérien de la transmission de la maladie est tout de suite repéré par un autre médecin vénitien, Benedetto.
Les soldats démobilisés de Charles VIII répandent ensuite la maladie en France, et de là elle se répand dans toute l'Europe.
Et certes Christophe Colomb est rentré de son premier voyage le 16 janvier 1493, mais aucun témoignage des participants de cette expédition ne signale parmi les équipages une maladie comportant ces symptômes.
Il faudra attendre 1526 pour voir l'hypothèse américaine faire son apparition, dans la ''Relation sommaire de l'histoire naturelle des Indes'' de Gonzalo Fernandez de Oviedo y Valdes, nommé surintendant des mines d'or et d'argent du Nouveau monde par le roi d'Espagne, et qui a ce titre y a séjourné dix ans.
Oviedo était à la cour quand Christophe Colomb y a été reçu en triomphateur par Ferdinand et Isabelle. Il a recueuilli de visu les témoignages des membres de l'expédition, et il a eu des contacts avec des Amérindiens. C'est sur les dires des compagnons de CC qu'il se base pour affirmer dans son histoire des Indes que cette maladie des ''bubas'' --pustules--y est commune mais sous une forme bien moins virulente qu'en Europe.
Hypothèse reprise par le médecin Diaz de Isla en 1539 dans son traité sur la maladie, dont il voit la source dans l'île d'Hispaniola, aujourd'hui Haïti.
Bartolome de Las Casas séjourne à Hispaniola et reprend cette hypothèse dans son ''Histoire générale des Indes''.
L'origine américaine de la maladie, ainsi établie par 2 historiens et un médecin, qui affirment baser leurs conclusions sur des témoignages directs, est désormais acquise, malgré quelques voix discordantes.
Montesquieu et Voltaire la reprennent à leur compte au 18ème siècle.
Mais à la fin du 19ème siècle, cette thèse est contestée, et la contestation s'amplifie au 20ème siècle.
En Allemagne, Karl Sudhof met en évidence que des médecins européens prescrivaient dès le 13éme siècle des traitements au mercure pour des maladies dont les symptômes ressemblaient à ceux de la syphilis.
Au 20ème siècle, on se bat à coup d'ossements: les pro-américains cherchent à trouver des traces de lésions osseuses syphylitiques sur des squelettes précolombiens; les antiaméricains, ou unicistes, recherchent ces traces sur des squelettes européens antérieurs à 1495, et en trouvent, un peu partout.
Au lieu dit Ferme de Costebelle dans le Var, sépultures du 3/4ème siècle ap. JC, on trouve des squelettes présentant des ''signes osseux de tréponématose'', idem en Grande Bretagne, à Gloucester, Norwich, en Italie dans la colonie grecque de Métaponte--580/250 av. JC--en France, à Cambrai et dans le Val de Marne, ces dernieres du 700/550 av. JC.
Les hypothèses actuelles ont abandonné l'explication américaine; elles privilégient une origine africaine, les marins européens ayant rapporté cet agent infectieux d'Afrique équatoriale, tant vers l'Europe que vers les Amériques.
IL Y a plusieurs types de tréponèmes présents en Afrique, l'un d'entre eux étant endémique chez les primates.
Une forme de tréponématose humaine primitive est endémique en Afrique sous le nom de pian.
Il y aurait eu évolution/mutation vers une forme essentiellement vénérienne de la maladie avec le changement d'aire géographique, et le port de vêtements affectant les manifestations cutanées. J'ai vu aussi la thèse d'un virus déterminant une déficience immunitaire associé au tréponème.
Sources: Le mal de Naples, de Claude Quétel, et articles médicaux dont
http://66.249.93.104/search?q=cache:2KW ... 7&ie=UTF-8


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Message Publié : 07 Août 2006 21:50 
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Salluste
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Inscription : 05 Juin 2006 21:55
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Dans ce domaine, l'époque historique qui détient le pompon est le Moyen Age occidental et plus précisément la société féodale !

Terreurs de l'an mil et sorcières comme on l'a dit, mais aussi les droits de cuissage, de grenouillage, ravage, prélassement, le droit de vie ou de mort sur les serfs, la femme sans âme, etc, etc...
Il faut dire que l'époque a eu le triste privilège d'avoir dans ses détracteurs de nombreux partis qui se sont relayés depuis en visant d'autres adversaires politiques à travers elle :
- la monarchie centralisatrice (contre l"anarchie féodale")
- le "parti" protestant qui voulait atteindre ainsi l'Eglise
- les philosophes du XVIIIe siècle, pour attaquer en fait la monarchie et l'Eglise
- les républicains et anti-cléricaux au XIXe siècle, pour les mêmes raisons.

On voit qu'avec tant de polémistes (dont certains talentueux et dont notre époque a hérité des valeurs) attachés à le noircir, il aurait été bien difficile à ce Moyen Age de s'en sortir indemne… :roll:

Là encore dernièrement, je vois dans la présentation d'un jeu vidéo : "l'Europe se sort lentement des griffes du Moyen Age". Nan mais faut arrêter le délire :?

Ce que je ne comprends pas c'est pourquoi avec un tel taux supposé d'éducation dans nos sociétés modernes, les mythes ne sont pas rectifiés à l'école...


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Message Publié : 07 Août 2006 23:08 
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Jean Froissart
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Inscription : 28 Avr 2006 23:02
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Tonnerre a écrit :
la notion que la syphilis aurait été importée en Europe lorsque Christophe Colomb et les équipages espagnols qui l'accompagnaient sont rentrés d'Amérique en Espagne.
Cette théorie, qui a longtemps prévalu, est maintenant largement abandonnée suite à des découvertes archéologiques analysées grâce à des techniques de datation mais elle perdure dans le grand public.

Excusez-moi, mais les mots "largement abandonnée" me paraissent largement infondés. Il se trouve que j'étudie un peu la question depuis plusieurs année, et jusqu'à présent, je n'ai trouvé aucune raison sérieuse pour remettre en cause l'hypothèse de l'importation américaine. Même le lien que vous indiquez ne donne pas d'arguments scientifiques convaincants.

D'ailleurs, la suite de vos propos sont plus mesurés. Vous expliquez qu'il y a plusieurs hypothèses, ce qui est la vérité.

1. Ne pas faire d'amalgame entre plusieurs maladies
En lisant les articles de ceux qui sont contre la thèse de l'importation américaine, je me suis rendu compte, qu'ils prennent la liberté de parler de plusieurs maladies différentes.
C'est une erreur, car il ne faut pas mélanger syphilis, bejel, pian, pinta, tupi, yaws, frambesia, et autres maladies dues à un spirochète.
Les symptômes ne sont pas les mêmes, ni les modes de transmission, ni les populations touchées. Par exemple, la syphilis est vénérienne, alors que bejel et pinta ne le sont pas. Le bejel touche principalement des enfants et non pas des adultes.
Dans l'article dont vous avez donné le lien, l'amalgame est justifié par la phrase "on connaissait mal les autres tréponématoses, Bejel, Pian et Pinta, et surtout on ne connaissait pas leur unicité, établie par Hudson en 1958". C'est une "unicité" très relative, et qui ne s'applique pas dans le cas des troupes françaises de Charles VIII, car ils n'ont pas été victime d'une maladie infantile ni d'une maladie non-vénérienne. Il est clair qu'ils ont eu la syphilis, et pas le bejel, ni le pinta, ni le pian africain.

2. Ne pas faire d'amalgame entre plusieurs périodes
Dans les articles de ceux qui sont contre la thèse de l'importation américaine, je me suis rendu compte, qu'ils prennent la liberté de parler d'époques très différentes.
Au lieu de se focaliser sur 1494, ou sur le 15ème siècle, ils parlent d'époques très différentes, n'hésitant pas à remonter jusqu'à l'age de fer et la préhistoire.
Ils déclarent que si les hommes préhistoriques européens avaient la syphilis, alors ce n'est pas étonnant qu'elle se soit manifestée à nouveau en 1494. C'est un pas qui est franchi allégrement, au mépris des sources historiques européennes, qui mentionnent de manière très claire l'apparition soudaine d'une nouvelle maladie. Il subsite beaucoup de documents écrits par les médecins grecs, romains, itlaiens, français, espangols, allemands, avant 1494. Aucun ne décrit une maladie semblable à la syphilis. Aucun. Donc, en admettant que la syphilis ait existé pendant la préhistoire en Europe, il faut reconnaître, que la maladie avait totalement disparu du continent en 1494 et qu'elle ait venu de l'extérieur.

3. Ne pas faire d'amalgame entre les analyses osseuses
Les opposants à la thèse de l'importation américaine se basent essentiellement sur l'analyse d'ossements. Cette méthode est très discutable d'un point de vue scientifique. La mesure des minéraux dans les os ou l'examen de marques superficielles, laisse place à beaucoup d'interprétations différentes. Il est scientifiquement impossible d'affirmer qu'une marque, ou qu'un léger excès de vitamine A provient de la syphilis. Et pourtant, c'est sur des analyses aussi fragiles que se basent les opposants de la thèse de l'importation américaine. D'ailleurs, ces analyses ne vont pas toutes dans le même sens, et ne concordent pas avec les affirmations de l'auteur de l'article dont vous avez donné le lien. Par exemple, les chercheurs de l'Ohio ont mis en évidence un très grand nombre de malades au nouveau-monde avant l'arrivée de Christophe Colomb, ce qui contredit la phrase "le caractère exceptionnel des manifestations sérologiques de la syphilis dans les populations indiennes, l’existence dans le nouveau monde d’un seul tréponème réputé autochtone et par ailleurs sans tropisme viscéral". Mais, il existe aussi des documents historiques incontestables qui rapportent l'existence de la syphilis au nouveau monde. D'ailleurs, les mots "pinta" et "tupi" sont des mots indiens pour désigner les maladies dues aux tréponèmes avant l'arrivé des européens.

4. Ne pas faire d'amalgame entre les historiens et les pseudo-historiens
Les opposants à la thèse de l'importation américaine cherchent des éléments qui vont dans leur sens. Il est intéressant de regarder qui ils sont, comment leurs études sont financées, quels sont leurs intérêts pour leur carrière, etc. Il semble qu'ils ne soient pas libres, ni désintéressés. J'ai constaté que pour certains d'entre eux, critiquer la thèse de l'importation américaine leur rapporte des avantages qui ne sont pas négligeables. Par ailleurs, ils ne sont pas des historiens, mais des médecins, des biologistes, des journalistes.

Il est donc intéressant de se poser des questions, mais il ne faut pas trop vite abandonner les "anciennes" hypothèses.


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Message Publié : 08 Août 2006 0:00 
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Je suis d'accord avec vos propos, Foulques. D'autant que les trois exemples que j'ai cités plus haut concernent tous le Moyen Âge... Et ce n'était pas volontaire !

Ecartelé entre une "légende noire" et une "légende rose", le Moyen Âge fait vendre... A condition de choisir entre les deux ! Même un roman de qualité - et peu avare d'érudition - comme Le Nom de la Rose d'Umberto Eco fait la part belle à la légende noire. Ce n'était peut-être pas l'intention de l'auteur, mais il y a le risque que les bûchers allumés par l'Inquisiteur Bernardo Gui frappent davantage que l'esprit éclairé de Guillaume de Baskerville ! Bref, le Moyen Âge des historiens aura, encore et sans doute, beaucoup de mal à s'imposer au Moyen Âge des écrivains et des cinéastes.

Ajoutons à cela le fait que le Moyen Âge sert aisément de repoussoir pour qui veut stigmatiser un comportement "barbare". Il n'y a qu'à voir l'adjectif "moyenâgeux" qui a fini par prendre ce dernier sens et que l'on n'ose même plus employer autrement que dans un sens péjoratif.

Foulques a écrit :
Ce que je ne comprends pas c'est pourquoi avec un tel taux supposé d'éducation dans nos sociétés modernes, les mythes ne sont pas rectifiés à l'école...

Pour ce qui est du Moyen Âge, cela est en partie dû au fait que cette période ne figure guère aux programmes d'histoire. On l'étudie en classe de Cinquième et on l'évoque en Seconde, voilà tout. Et encore, je ne parle que pour l'enseignement général... Car, en lycée professionnel, aucun élève ne se frottera plus au Moyen Âge ! Eventuellement en première année de Bac Pro où est vaguement abordée la formation du territoire français... en guise de préambule à la géographie de la France ! Ceci étant, ces remarques valent aussi pour les périodes ancienne et moderne qui ne sont pas davantage prisées par les programmes.

PJ


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Message Publié : 08 Août 2006 0:30 
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C'est pas que je veuille tirer la couverture sur ma section; mais la préhistoire ? Vous ne trouvez pas que cette époque est aussi bien placée sur le plan: mythes, légendes, ect ...
n'importe quel quidam se croit autorisé de prétendre que les hommes préhistoriques étaient des brutes, bêtes et écervelées. Sans parler du prétendu génocide des gentils néanderthals par les méchant sapiens (normal qu'il soit méchant puisque l'homme moderne ...). Ne parlons pas des extra-terrestres qui seraient venus éduquer cette espèce de singe mal dégrossi que nous avons comme ancètre. Des Atlantes qui avaient une civilisation que l'on peut qualifier de post-moderne, cela il y a au moins 15 à 20 millénaires. D'ailleurs, ne tenaient-ils pas leurs savoirs des habitants de Mù qui le tenaient des Vénusiens ? Et ainsi de suite.
Bref, ce serait risible si ce n'était pas l'indication que beaucoup de gens tiennent pour sensée n'importe quel faribole. Ils savent qu'il ne faut pas avoir peur de se servir des méningues que l'on a entre nos 2 oreilles ??? :wink:


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Message Publié : 08 Août 2006 12:30 
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Jean Mabillon
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Inscription : 04 Juin 2006 12:47
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Localisation : Centre
De tous les articles RECENTS que j'ai lus--une quinzaine, surtout en anglais car on trouve davantage d'articles sur cette question des origines de la syphilis dans cette langue--aucun ne reprend TELLE QUELLE la thèse de l'origine américaine de la syphilis telle qu'elle a été proposée au 16ème siècle et reprise ensuite jusqu'au 19ème.
Un seul, pas des plus récents--97 je peux donner la ref.--, fait état de travaux/découvertes étayant la thèse américaine, et ses conclusions ont été controuvées depuis.
Ca donne l'ompression d'un combat d'arrière garde, et cela justifie le ''largement abandonnée'', cad pas complètement mais majoritairement.

L'avancement de l'état des connaissances sur cette maladie et les diverses tréponématoses, ce que l'on a appris des mutations des agents infectieux, les découvertes archéologiques et les nouvelles méthodes de datation, tout cela ne permet toujours pas de résoudre avec certitude le problèmes des origines de cette maladie.
Mais sur la base de ces connaissances modernes, il n'est plus possible de s'en tenir à la théorie américaine originale simple ''la syphilis, importation totalement américaine, n'existait pas en Europe avant Colomb.''
A noter tout de même que cette théorie américaine tardive de l'origine de la maladie arrangeait tout le monde en Europe--au début de la maladie , tout les peuples se renvoyaient la balle, pour les Espagnols et les Italiens, c'était ''le mal français'', pour les français, c'était ''le mal de Naples''. On l'a aussi attribué à diverses minorités, mais rejetter l'origine du mal loin des Européens, sur des sauvages était une solution psychologiquement plus ''avantageuse''.
Plus tard, des tenants de la théorie du bon sauvage ont rejetté la thèse américaine pour les raisons inverses.

Les chercheurs ACTUELS proposent des thèses différentes mais ils sont grosso modo d'accord sur un point--le processus est plus complexe que la version présentée originellement.
IL existe depuis très longtemps un peu partout dans le monde des formes de tréponématoses à transmission non vénérienne, bejel dans le Moyen Orient, pinta aux Amériques, yaws dans une variété de pays tropicaux humides. L'hypothèse de mutations à partir de ces formes originelles est assez probable.
Des thèses avancent une évolution de la maladie en plusieurs endroits y compris Europe, et surtout, mutation de formes de transmission non vénériennes à vénériennes, avec influence dans ces processus des brassages de populations, entre autres Amériques/Europe, etc.
Mais surtout, les traces de lésions syphilitiques sur des ossements de provenance très diverses sont maintenant trop nombreuses pour que l'on puisse les écarter, comme on l'a fait au début, ou les expliquer par des anomalies génétiques hyperrares.
La question qui demeure sur ces dernières découvertes--sur les fouilles anglaises et italiennes--est la suivante: ces lésions sont reconnues comme de nature syphilitique mais s'agit-il de syphilis vénérienne?
L'énigme à résoudre étant la mutation--ou et quand-- du yaws à la syphilis à transmission vénérienne, qui serait à l'origine de l'épidémie du 16ème siècle.

Qes ref en vitesse

http://query.nytimes.com/gst/fullpage.h ... A964958260 res=9E0CE0D61E3AF934A25752C1A964958260&sec=health&pagewanted=printhttp://www.pbs.org/wnet/secrets/case_syphilis/index.html
http://www.findarticles.com/p/articles/ ... 9541/pg_12
http://66.249.93.104/search?q=cache:FzE ... 4&ie=UTF-8
http://www.scielo.cl/scielo.php?pid=S07 ... ci_arttext
http://www.pbs.org/wnet/secrets/case_sy ... rview.html

http://fr.encarta.msn.com/encyclopedia_ ... hilis.html
http://66.249.93.104/search?q=cache:2KW ... 7&ie=UTF-8
http://news.bbc.co.uk/1/hi/health/1359758.stm


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Message Publié : 08 Août 2006 15:47 
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Jean Mabillon
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n'importe quel quidam se croit autorisé de prétendre que les hommes préhistoriques étaient des brutes, bêtes et écervelées. Sans parler du prétendu génocide des gentils néanderthals par les méchant sapiens (normal qu'il soit méchant puisque l'homme moderne ...). Ne parlons pas des extra-terrestres qui seraient venus éduquer cette espèce de singe mal dégrossi que nous avons comme ancètre


Narduccio, en effet, la préhistoire doit être un terrain giboyeux de ce point de vue. :)
Pourriez-vous citer des exemples?
J'entends, pas d'histoires d'extraterrestres, :non: mais de découvertes, connaissances ou théories, largement adoptées à une époque dans le milieu des spécialistes''préhistoriens'', qui ont été infirmées par des travaux plus récents?


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Message Publié : 08 Août 2006 17:26 
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L'exemple le plus fameux en préhistoire, c'est l'homme de Néanderthal. Il a eu tous les statut possibles et inimaginables. Depuis le cosaques russe qui serait mort dans la grotte en passant par celui d'une espèce de gorille manieur de casses-têtes. Les scientifiques ont petit à petit découvert la réalité de cet autre humain, mais ils se sont logtemps fourvoyés sur des voies de garages. Ne parlont pas des visions qu'ont eu de Néanderthal les non-scientifiques.

Mais, si on veut pousser l'analyse, on se rend compte qu'en fait, le problème, c'est la persistance des visions que l'on a de quelques chose même des decennies après que cela soit infirmés par les historiens ou les scientifiques.
Prenons un exemple plus moderne : le mythe du coup de poignard dans le dos. Dès 1919/20, des officiers allemands donnent corps à ce mythe. Or, ils connaissent la réalité, l'armée allemande qui se débande au milieu de l'automne 1918. Si les Alliés l'avaient voulus, ils auraient pu refuser l'armistice et en quelques mois, ils auraient pu camper à Berlin. En quelques mois, parce qu'entre la frontière et Berlin, il n'y avait plus de corps militaires constitués. Mais cela les officiers allemands ne veulent pas que ça se sache; d'où le mythe du coup de poignard dans le dos. Sachant le nombre d'Allemands sous les drapeaux, sachants que la plupart d'entre eux firent partie de ces soldats qui sur les routes d'octobre/novembre 18 cherchaient à entrer à la maison, il semblerait logique que ce mythe ne devait pas tenir plus de quelques semaines. Il tient encore, nombreux sont les personnes qui croient que l'armée allemande à tenue la ligne jusqu'au 11/11/1918 à 11h. Dites quelque chose, écrivez-le, même si cela vous parait énorme, dans 30, 50 ou 100 ans, il y aura encore des gens pour croire que cela est vrai.


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Message Publié : 08 Août 2006 19:05 
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Jean Mabillon
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Mais, si on veut pousser l'analyse, on se rend compte qu'en fait, le problème, c'est la persistance des visions que l'on a de quelques chose même des decennies après que cela soit infirmés par les historiens ou les scientifiques.


En effet, c'est une des caractéristiques de ces théses ayant fait l'unanimité à un moment donné; mêmes si des faits patents les infirment ensuite sans l'ombre d'un doute, le démenti ne sort pas des milieux spécialisés, et elles continuent à être acceptées dans le grand public; c'est ce que j'appellerai l'effet rémanence.
pour l'histoire Winckelmann comme pour l'origine américaine de la syphilis, c'est le cas.

On peut se demander si la durabilité contre toute évidence de ces thèses n'est pas, parfois et en partie, liée comme je l'ai souligné, à leur côté ''avantageux'' pour les populations concernées.
Autrement dit, certaines hypothèses, croyances etc. perdurent bien qu'invalidées, ou très insuffisamment démontrées, parce qu'elles valorisent, déculpabilisent, rassurent, confortent dans le sentiment de leur supériorité les groupes concernés.
j'ai souligné comment la thèse de la syphilis américaine, arrivée ''sur le marché'' 30 ans après le début de l'épidémie et après qu'un certain nombre d'explications intraeuropéennes aient été avancées, arrangeait tout le monde en Europe et permettait, sur le mode paranoiaque en quelque sorte, de rejetter le mal à l'extérieur.
Cela dans le contexte d'une maladie qui était vue comme une punition divine frappant l'impureté, la fornication, l'adultère. Ce n'était pas indifférent de pouvoir dire: la source de l'impureté, ce n'est pas nous, c'est l'autre. Et des écrits proposant la thèse américaine insistent sur la lasciveté naturelle des Indiennes, les moeurs dissolues de ces peuples, etc.
IL y a quelque chose du même ordre à l'oeuvre dans l'histoire Winckelmann. Dire que l'art grec, produit par des élites blanches, supposées fondatrices de la civilisation occidentale, incarne la mesure, la grandeur, l'ordre, le contrôle sur les forces brutes, qu'il est supérieur aux autres formes stylistiques primitives ou orientalisantes, et nettement distinct d'elles, ce n'est pas neutre politiquement.
D'ailleurs, les thèses de Winckelmann sont citées par Gobineau à l'appui des siennes.


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Message Publié : 08 Août 2006 19:08 
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Jean Froissart
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Merci Tonnerre pour ces nouveaux liens et pour vos explications complémentaires.

Peut-être qu'il faudrait démarrer un fil spécifique sur cette question, quoique je n'ai pas grand chose à ajouter par rapport à ce que je'ai dit, à savoir principalement, que c'est actuellement un château de cartes qui repose essentiellement sur une analyse d'ossements qui n'est pas fiable, comme le reconnaissent les auteurs eux-mêmes (Bruce et Christine Rotschild).

Tonerre a écrit :
Mais sur la base de ces connaissances modernes, il n'est plus possible de s'en tenir à la théorie américaine originale simple ''la syphilis, importation totalement américaine, n'existait pas en Europe avant Colomb.''

De quelles "connaissances modernes" parlez-vous? Pourriez-vous être plus précis ?
Connaissez-vous l'analyse des ossements ? Pouvez-vous la décrire ? Pouvez-vous expliquez pourquoi cette méthode serait fiable selon vous pour reconnaître la syphilis ?
Selon moi, personne n'a apporté la preuve qu'il ait existé un seul européen porteur de la syphilis entre l'an -300 et l'an 1494. Il est possible que certains européens ait été victimes tréponématoses qui ne soient pas des syphilis, mais il est uniquement question ici de la maladie de la syphilis, pas des autres tréponématoses.
Si vous avez une preuve, alors donnez-là, mais pas avec des mots vagues du genre "recherches archéologiques". Préciser le site archéologique, le nom d'au moins un chercheur, l'année de la découverte, et si possible un article dans lequel est consignée cette découverte.

Tonnerre a écrit :
A noter tout de même que cette théorie américaine tardive de l'origine de la maladie arrangeait tout le monde en Europe--au début de la maladie , tout les peuples se renvoyaient la balle, pour les Espagnols et les Italiens, c'était ''le mal français'', pour les français, c'était ''le mal de Naples''. On l'a aussi attribué à diverses minorités, mais rejeter l'origine du mal loin des Européens, sur des sauvages était une solution psychologiquement plus ''avantageuse''.

Et inversement, la théorie non-américaine peut aussi être psychologiquement avantageuse. Bien sûr, il peut y avoir de l'intox d'un côté comme de l'autre. Mais moi qui m'intéresse depuis plusieurs années à l'histoire, et à l'histoire de la médecine en particulier, je peux vous assurer que de tous temps, il y a aussi eu des hommes sérieux qui ont étudié les maladies sans préjugés, sans se soucier de la psychologie. Par exemple, Girolamo Fracostoro, est un homme sans parti pris, en plus d'être un incroyable génie.
La découverte des Amériques a entraîné des échanges dans les deux sens qui sont indéniables et ont concerné non seulement la flore et la faune, mais aussi les microbes. Personne ne nie que la tomate, la pomme de terre, le mais existaient en Amérique et pas en Europe, et qu'inversement, le blé, les choux existaient en Eurasie et pas en Amérique. Personne ne nie que les européens ont apporté des maladies inconnues en Amérique. Mais étrangement, les américains n'auraient eu aucune maladie que les européens n'auraient pas connue.

Tonnerre a écrit :
Les chercheurs ACTUELS proposent des thèses différentes

Quels chercheurs ? Des noms ? Sont-ils sérieux ? Sont-ils des historiens ? Sont-ils désintéressés ?

Tonnerre a écrit :
IL existe depuis très longtemps un peu partout dans le monde des formes de tréponématoses à transmission non vénérienne, bejel dans le Moyen Orient, pinta aux Amériques, yaws dans une variété de pays tropicaux humides. L'hypothèse de mutations à partir de ces formes originelles est assez probable.

Des mutations existent, mais il ne faut pas tout mélanger.
Vous proposez une mutation du béjel vers la syphilis, ou une mutation de la pinta vers la syphilis. Comment s'opèrerait l'une ou l'autre de ces deux mutations ? Donnez des détails. Connaissez-vous au moins ces deux spirochètes ? Connaît-on leur ADN ? Quelle partie de leur ADN doit-être modifiée pour transformer un spirochète de bejel en un spirochète de syphilis ? Dans la nature, les mutations peuvent sembler nombreuses si l'on considère des périodes de plusieurs millions d'années, mais elles sont très rares, si l'on considère des périodes de quelques siècles.
A-t-on déjà vu en laboratoire un spirochète de bejel ou de pinta muter en un spirochète de syphilis ?
Si oui, alors, ce serait une preuve extraordinaire, et j'adhèrerais aussitôt à votre idée.
Cependant, non seulement, il faudrait qu'une telle mutation se produise, mais qu'en plus elle est lieue juste après le retour des marins de Christophe Colomb, et juste dans la ville où ces marins sont revenus. Quelles coïncidences !

Tonnerre a écrit :
Des thèses avancent une évolution de la maladie en plusieurs endroits y compris Europe, et surtout, mutation de formes de transmission non vénériennes à vénériennes.

Des thèses, mais aucune preuve. La science a besoin de preuves.

Tonnerre a écrit :
Mais surtout, les traces de lésions syphilitiques sur des ossements de provenance très diverses sont maintenant trop nombreuses pour que l'on puisse les écarter

Comment ça "trop nombreuses" ?
Oui, nous avons quelques traces de lésions que l'on soupçonne avoir été causées par un tréponème. Mais, il est mensonger d'affirmer que ces lésions sont d'origine syphilitique.

Tonnerre a écrit :
s'agit-il de syphilis vénérienne?

Une syphilis qui ne serait pas vénériennne, cela n'a aucun sens. C'est E.H. Hudson qui pense qu'un cas de béjel observé en 1929 chez des bédouins serait une syphilis non-vénérienne. Mais c'est comme une maladie cardiaque qui ne concernerait pas le coeur mais le foie, ou comme un bateau qui n'irait pas sur l'eau, ou un avion qui ne volerait pas. En jouant sur les mots, on peut dire n'importe quoi. Cela devient de la poésie, pas de la science.

Tonnerre a écrit :
Un seul, pas des plus récents--97 je peux donner la ref.--, fait état de travaux/découvertes étayant la thèse américaine
Pourquoi faut-il des découvertes récentes pour confirmer ce qui a déjà été démontré ? Faut-il des découvertes récentes pour confirmer l'assassinat d'Henri IV ?
Par ailleurs, pourquoi rejeter les personnes qui croient à la thèse américaine, comme par exemple Alfred Crosby, George Armelagos, Brenda Baker, John Verano, Robert J. Knell, Livingstone, Steinbock, et moi ?


Maintenant, quelques mots à propos de vos liens :

Le premier lien pointe sur un article d'un journaliste, John Noble Wilford. Il rapporte que des ossements d'un cimetière à Metapento, en Italie du sud, et les ossements de deux squelettes en Angleterre ont quelques trous comme ceux des vers dans le bois.

Il précise que c'est la première fois que de tels trous ont été découverts en Europe, alors que l'on aurait découvert de nombreux os avec des trous en Amérique. Le cimetière italien date de 600 av. J.C à 250 av. J.C. La découverte italienne a été faite par Dr. Maciej Henneberg et Renata Henneberg, anatomistes d'Afrique du Sud. En fait, les ossements n'ont pas de trous. Il y a seize crânes un peu plus épais que la normale, sept os longs ayant des marques, et des dents dont l'émail est défectueux. Les anatomistes précisent "we are not sure of our findings", et "we cannot tell whether the infection was veneral or not". Dr. Alfred W. Crosby de l'université du Texas déclare "As long as all we've got is bone deformations, I don't think we are getting anywhere in solving the origins of syphilis".

Les deux squelettes troués d'Angleterre ont été examinés par le Dr. Donald J. Ortner, américain, qui prétend qu'ils sont antérieurs à 1492 sans donner aucune date. Ce Dr. Ortner n'a pas des méthodes scientifiques, comme le montre sa déclaration "I've argued for a long time that it ought to be in Europe, and it was just a matter of finding it." Autrement dit, il a un parti pris initial, qu'il cherche ensuite à confirmer. Deux autres américains, les Dr. Armelagos et Dr. Brenda J. Baker, ont retrouvé plusieurs ossements troués en Amérique, mais aucun en Europe. Ces deux américains croient à la thèse de l'importation américaine de la syphilis.

Le journaliste évoque la possible confusion entre la lèpre et la syphilis. C'est une méconnaissance de la qualité des médecins de l'antiquité et du moyen âge. Ce n'est pas parce qu'ils suivaient Aristote et faisaient des saignés qu'ils étaient tous stupides au point de confondre la lèpre et la syphilis. Les deux maladies présentent des symptômes suffisamment différents pour que la confusion soit impossible sauf peut-être pour quelques médecins débutants, mais en aucun cas pour Hyppocrate, Galien, et les autres grands médecins.

Bref, cet article ne démolit pas du tout la thèse de l'importation américaine. Au contraire, il la conforte en montrant que les preuves contre cette thèse sont très très subtiles, et même les anatomistes sud-africains se gardent bien de conclure contre la thèse.

Le deuxième lien est un article de Theodor Rosebury, qui n'est pas non plus un historien, bien qu'il tente de faire de l'histoire. Il part dans tous les sens. Il est difficile de le suivre. Il donne des sources mais elles ne concernent qu'une petite partie de ses suppositions. J'ai beaucoup de mal à comprendre cet article et à voir où sont les preuves sur lesquels il se base pour dire que la syphilis existait en Europe avant le voyage de Christophe Colomb, et pour dire qu'il est impossible que les marins aient ramené la syphilis.

Le troisième lien est un article de Robert J. Knell, qui affirme que la syphilis est bien apparue en 1495. Il ne remet absolument pas en cause la théorie de l'importation américaine.

Le quatrième lien est un article de Conrado Rodríguez-Martín qui affirme qu'il est difficile de savoir si la thèse américaine est vraie ou fausse. On ne peut donc pas le classer parmi les adversaires de la thèse américaine. Il rapporte même qu'un certain Livingstone pense qu'une souche particulièrement virulent fut ramenée d'Amérique par les marins. Un certain Steinbock est aussi opposé à l'existence de la syphilis avant 1495. Le cas du squelette de Norwich est douteux, ainsi que le cas du cimetière de Costebelle. C'est donc un article qui ne remet pas en cause la théorie de l'importation américaine.

Le cinquième lien évoque un article d'une ancienne infirmière, Charlotte Roberts, dont le titre "Secret of the dead" laisse présagé qu'il s'agit plus d'une nouvelle de science-fiction que d'un article scientifique. Cet article donne des noms de sites archéologiques, mais n'apporte aucune preuve.

Le sixième article renvoie vers Encarta qui est une encyclopédie contenant dix fois plus d'erreurs que Wikipedia, qui n'est déjà pas exempt d'erreur. Malgré tout Encarta ne réfute pas du tout l'hypothèse américaine. Encarta dit qu'il existe aussi deux autres hypothèses, mais ne fait pas le choix pour l'une plutôt que pour l'autre. Encarta dit que la syphilis aurait pu être confondue avec la lèpre. Comme je l'ai dit plus haut, cet argument ne me convainc pas du tout, car il implique un très mauvais sens de l'observation des médecins, ce qui n'était pas le cas. Ils se trompaient souvent sur les remèdes, mais très peu sur les observations.

Le dernier lien est celui que vous aviez déjà donné. C'est l'article de L.J. ANDRE. Il est ancien médecin militaire à l'institut Pasteur de Brazzaville, puis directeur à l'institut de médecine tropicale de Marseille. Il est maintenant à la retraite et fait des recherches sur le sida. Il s'est toujours intéressé à l'immunologie, d'abord pour lutter contre l'amibiase, où il a obtenu un certain succès. Puis contre le malaria, où l'immunologie est hélas de peu de secours. Puis contre le sida, où l'immunologie n'apporte pas non plus le remède souhaité.
Dans son article, il tente de promouvoir une thèse pour le moins audacieuse qui serait que les marins de Christophe Colomb n'auraient pas ramenés en Europe la syphilis, mais une chose qui causerait une défaillance du système immunitaire contre la syphilis. Pourquoi faire compliqué quand on peut faire simple ? Pourquoi faire appel à une chose inconnue ? Bien sûr cette hypothèse ne tient pas debout. C'est comme de dire, que les défenses immunitaires acquises par la prise d'un vaccin contre la tuberculose peuvent soudainement être totalement supprimées par une chose venant d'ailleurs. Il est vrai que les corticoïdes sont des substances qui réduisent les défenses immunitaires, mais je n'ai jamais entendu parler de micro-organismes vivants qui agiraient de même. Par ailleurs, les immunodéficiences existent de manière naturelle de tous temps pour un très faible pourcentage de la population. Les pauvres êtres immunodéprimés du moyen-âge et de l'antiquité auraient dû attraper la syphilis, ce qui n'a jamais été rapporté. L. J. André n'apporte absolument aucune preuve, juste une nouvelle hypothèse.

Excusez-moi pour cette discussion. Je suis tout prêt à vous croire. Je voudrais seulement des preuves solides. :)


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Message Publié : 08 Août 2006 22:33 
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Salluste
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Inscription : 05 Juin 2006 21:55
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PJ57 a écrit :
Ajoutons à cela le fait que le Moyen Âge sert aisément de repoussoir pour qui veut stigmatiser un comportement "barbare". Il n'y a qu'à voir l'adjectif "moyenâgeux" qui a fini par prendre ce dernier sens et que l'on n'ose même plus employer autrement que dans un sens péjoratif.PJ

Absolument ! Et avant même ce mot il y en avait un autre : "gothique", à la connotation péjorative.

Pour ceux qui ne connaissent pas bien le Moyen Age et cherchent un bon livre d'introduction, je conseille "Pour en finir avec le Moyen Age" de Régine Pernoud (points histoire au Seuil, Paris). 150 pages d'érudition et d'intelligence dans une langue claire et accessible.


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Message Publié : 09 Août 2006 10:15 
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Localisation : Alsace, Zillisheim
Un des mythes les plus populaires, car validé par plusieurs films : l'ouvrier ou l'architecte égyptien que l'on tue pour sceller le secret de la pyramide. Un de nos contributeurs vient encore de s'y refèrer il y a peu : http://passion-histoire.net/phpBB3_Fr/viewtopic.php?p=128876#128876


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Message Publié : 09 Août 2006 17:43 
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Inscription : 27 Oct 2005 19:48
Message(s) : 232
Localisation : paris
Narduccio a écrit :
Un des mythes les plus populaires, car validé par plusieurs films : l'ouvrier ou l'architecte égyptien que l'on tue pour sceller le secret de la pyramide. Un de nos contributeurs vient encore de s'y refèrer il y a peu : http://passion-histoire.net/phpBB3_Fr/viewtopic.php?p=128876#128876
N'y aurait il eu aucune évolution ? A ce compte là, facile dans quelques siècles, de faire de la loi des 35 heures un contre exemple de Germinal.


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