Nombreux sont les auteurs de l’Antiquité qui évoquent l’Hyperborée et Thulé. Parmi les plus connus : Homère, Aristéas de Proconnèse, Eschyle, Pindare, Hérodote, Hécatée d’Abdère, Callimaque, Apollonius de Rhodes, Eratosthènes, Pausanias, Diodore de Sicile, Virgile, Strabon, Ovide, Sénèque, Pline l’ancien, Plutarque, Ptolémée, Pomponius Mela, Jamblique, Avienus, etc...
L'Hyperborée :
L'historien grec Hérodote (5ème siècle AV.JC) situe les hyperboréens dans le nord de la Russie (peuples finno-ougriens).
Hyperborée vient du grec Hyperéa “qui est en haut” et Borée “vent du Nord”, d’où : ”au-dela du vent du nord”, ou bien “sous le vent” du Nord .
Pour Hécathée d'Abdère, cité par l'historien grec Diodore de Sicile, elle était une île, Elixoïa (l'Île des Saules, Hélicé) face à la Celtique (elle correspondait donc à la Grande-Bretagne) :
«...Nous croyons qu'il n'est pas hors de propos de discuter de la légende des Hyperboréens. Selon ceux qui ont écrit sur les anciens mythes, Hécatée d'Abdère et certains autres disent que dans les régions situées au delà des Celtes, il y a dans l'Océan une île pas plus grande que la Sicile. Cette île est située au nord, et est habitée par les Hyperboréens, qui sont appelés par ce nom car ils sont au delà du souffle de Borée (vent du nord) ; et l'île est à la fois fertile et productrice de toute culture, et s'il arrive que le climat soit tempéré, elle produit deux récoltes chaque année. Mieux encore, la légende suivante est racontée, la concernant : Leto est naît sur cette île, et c'est pour cette raison qu'Apollon est honoré par eux plus que les autres dieux ; et les habitants sont considérés comme des prêtres d'Apollon, d'après l'habitude qu'ils ont de prier le dieu chaque jour, continuellement et en chanson, et de l'honorer avec excès. Et il y a aussi sur l'île à la fois une magnifique enceinte consacrée à Apollon et un remarquable temple qui est orné de nombreuses offrandes votives et qui est de forme circulaire. De plus, il y a une ville qui est consacrée au dieu, et dont la majorité des habitants sont des joueurs de cithare ; et ceux-ci jouent continuellement de leur instrument dans le temple et chantent des hymnes de louange au dieu, glorifiant ses actes, aussi Apollon est-il honoré chez eux plus que les autres dieux. Ils sont, pour ainsi dire, des prêtres d’Apollon parce que ce dieu est quotidiennement célébré sans trève par des chants et honoré de façon remarquable.»
« Les Hyperboréens ont une langue particulière et des sentiments très favorables aux Grecs, surtout aux Athéniens et aux Déliens ; il ont conservé ces bons sentiments en héritage depuis l’antiquité… »
« On dit aussi que la Lune semble toute proche de leur île et qu’on y distingue un relief, comme sur la Terre, et que le Dieu visite cette île tous les dix-neuf ans, période dans laquelle s’accomplit le retour des étoiles à la même place dans le ciel ; cette période étant appelée par les Grecs Année Métonienne. À la date de ce retour, il joue de la Lyre et danse tout le temps, depuis l’équinoxe de printemps jusqu’au lever des Pléiades, pour exprimer la Joie des Ses Succès.Le gouvernement de cette ville et la garde du temple sont confiés à des rois appelés Boréades, les descendants et les successeurs de Borée. » (Diodore de Sicile, Bibliothèque historique XLVII , 1er siècle AV.JC.)
(On notera que le temple circulaire correspond probablement à Stonehenge.)
Apollon passait, croyait-on, les mois d'hiver parmi eux, et sa mère, Léto, serait née dans leur pays. Persée leur rendit visite alors qu'il cherchait la Gorgone, et Héraclès, selon la légende, poursuivit jusque chez eux la biche de Cérynie. Pour Pindare, c'était un peuple bienheureux, habitant une sorte de pays enchanté et ignorant les maladies humaines.
Selon une tradition, deux vierges hyperboréennes Opis ("regard" ou "visage") et Argé / Hécaerge, ("tire au loin"), (ou Hyperoché et Laodicé), étaient venues à Délos avec Léto, Apollon et Artémis, et moururent dans l’île. Par la suite, comme les deux jeunes filles n'étaient jamais revenues, les Hyperboréens envoyèrent leurs offrandes à Délos par l'entremise d'intermédiaires et enveloppées dans de la paille de blé.
Par la suite, les romains situeront plutôt l'Hyperborée en Scandinavie.
Au 1er siècle AP.JC, Pline écrit : « Le pays des Hyperboréens se situe à la même hauteur que la Bretagne. Le jour le plus long y dure 17 heures (Histoire Naturelle VI-39). Les Glaesaria que nous appelons Electrides ( îles de l'ambre) sont composées de 23 îles à proximité d'une presqu'île (Jütland). » (Histoire Naturelle IV–16).
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Thulé :
En 330 av. JC, un explorateur du nom de Pythés fit voile depuis Marseille afin de découvrir où le monde s'arrêtait dans cette direction. Il dépassa les Iles Britanniques, puis la mer du Nord et lors de son voyage de retour, mentionna une île du nom de "Thulé" ou "Ultima Thulé" dont il avait entendu parlé ou découvert lui-même.On pense qu'il s'agissait de l'Islande.
Voguant de cap en cap, il remonta vers le nord le long des côtes d'Ibérie et Lusitanie, (Espagne et Portugal), et, continuant de faire le tour de ces côtes, en comptant cinq jours de navigation depuis Gadès (Cadix) jusqu’au cap Sacré (cap Saint-Vincent) , il parcourut ainsi les côtes de l’Aquitaine et de l’Armorique qu’il doubla pour entrer dans le canal que l’on nomme aujourd’hui la Manche. (Strabon, liv. I, p. 63, liv. III, p. 148.)
Au-delà du canal, il suivit les côtes orientales des îles Britanniques, et lorsqu’il fut à la partie la plus septentrionale, poussant toujours vers le nord, il s’avança en six journées de navigation jusqu’à un pays que les barbares nommaient Thulé, et où la durée du jour solsticial était de 24 heures ; ce qui suppose 66 degrés 30 minutes de latitude septentrionale. (Pline, liv. II, c. 75 ; IV, c. 16 ; VI, c. 34 ; Cleomedes de sphaera).
Selon Strabon : « Pythéas nous dit que Thulé est à une distance de six jours de navigation de la Bretagne en direction du nord et qu’elle est proche de la mer gelée. »
Selon Geminos : « Il apparaîtrait que Pythéas le Massaliote était en fait allé dans ces régions. Il dit, à propos des observations qu’il a notées dans de l’océan : Les barbares nous ont désigné en plusieurs occasions l’endroit où le soleil disparaît. A cet endroit, la nuit est extrêmement courte : deux heures pour les uns, ou trois pour d’autres, et juste après le soleil se lève à nouveau. »
Pline dit que Thulé est « la plus reculée de toutes les îles »
« Durant les jours de solstice quand le soleil vient proche du sommet du monde, à cause de la route enfermée de la lumière, la terre en dessous a des jours continuels de six mois autant que des nuits continuelles en hiver quand il est en direction opposée. »
Par la suite, les romains situeront Thulé plutôt en Scandinavie (ainsi qu'ils le faisaient pour les hyperboréens) :
En 555, l'historien grec Procope, décrivant la guerre qui sévit entre les Romains et les Goths, parle de la Scandinavie en l'appelant Thulé et dit que parmi ses habitants il y a des gens qu'il appelle des skrithiphinoi (skrid finns = finno-ougriens lapons). Vers 750 Paulus Diaconus les mentionne également en précisant qu'ils pratiquent la chasse, qu'ils utilisent des planches de bois pour se déplacer, et qu'ils ont des animaux qui ressemblent aux cerfs (c'est-à-dire des rennes).
Bien plus tard, sous le règne de Louis le Pieux, le géographe irlandais Dicuil composera le fameux Liber de mensura orbis terrae (dans lequel il reprenait les connaissances des Romains et d’Isidore de Séville) et dans lequel il identifie l'Islande à l’ultima Thulé.
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