Une explication légèrement différente (à vrai dire, j'ignore si les théories de S. Reinach sont encore "up to date")
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Ainsi nous lisons dans Hérodote que les Phocéens, sur le point de partir pour la Corse sans esprit de retour, jetèrent dans la mer une grande masse de fer rougie au feu et jurèrent de ne pas revenir à Phocée avant que cette masse de fer ne reparût à leurs yeux. Le prétendu serment des Phocéens est l’explication proposée par Hérodote ; cette explication est mauvaise. Qu’on veuille bien se souvenir des chaînes de fer rougies au feu jetées dans l’Hellespont par Xerxès ; les masses de fer incandescent, (...), jetées dans la mer par les Phocéens, ne répondent pas à une autre idée. Nous ne savons pas si ces (...) étaient des anneaux ou affectaient la forme de liens ; mais, quoi qu’il en soit, c’étaient des offrandes faites à la mer par des navigateurs qui, partant pour un long voyage, avaient besoin de sa bienveillance. Bien entendu, les Phocéens n’inventèrent pas ce rite pour la circonstance ; c’était un vieux rite de départ, une cérémonie de propitiation, une sorte de mainmise magique sur la mer.
Au siècle même d’Hérodote, nous voyons Aristide qui, après avoir fait jurer aux Ioniens l’observation des articles de la confédération athénienne et l’avoir juré lui-même au nom des Athéniens, jette à la mer des masses de fer incandescentes. Ni Aristote ni Plutarque, qui rapportent ce fait ,n’en proposent d’explication ; ils auraient pu cependant, à l’exemple d’Hérodote, imaginer un serment d’Aristide, par exemple que l’alliance durerait tant que le fer ne remonterait pas du fond de la mer. Peut-être Aristide ne savait-il pas lui-même ce qu’il faisait ; il se conformait seulement à un vieil usage des navigateurs ioniens, à un rite en vigueur dont la Méditerranée orientale, consistant à prendre la mer à témoin par une offrande incandescente, à l’associer aux desseins qu’elle devait seconder de sa bienveillance, d’autant qu’en l’espèce c’est bien la domination de la mer qui était enjeu.
Source : Salomon Reinach, Cultes, mythes et religions, t. II, Éd. Ernest Leroux, Paris, 1906, pp. 206-219.
http://www.psychanalyse-paris.com/Le-ma ... a-mer.html