Commode a écrit :
1) Est-ce que les bustes que vous nous avez montré Thersite, sont contemporains (donc sculpté de son vivant, ou peu après sa mort)?
Oui, ils sont contemporains ; c’est précisément la raison qui me les a fait sélectionner, et non des œuvres plus tardives, romaines. Le style est typique du début de l’époque hellénistique (même s’il s’agit toute deux de copies romaines du Ier, l’imitation d’un modèle hellénistique semble hors de doute, d’autant que les deux portraits se ressemblent beaucoup), dans le rendu des chairs et de la chevelure en particulier ; compare tout particulièrement la tête de Copenhague avec la tête d’Alexandre du Getty Museum qui j’avais posté
ici.
C’est d’ailleurs tellement proche stylistiquement parlant qu’on peut se demander s’il ne s’agit pas d’une imitation consciente de la statuaire d’Alexandre, auquel Pyrrhus était immanquablement comparé… à tort pour le physique :
Lucien,
Contre un ignorant bibliomane, 21 :
« . . . quand on voit Pyrrhus, roi d'Épire, prince remarquable, du reste, se laisser gâter par ses courtisans, sous prétexte de ressemblance, au point de croire qu'il était tout le portrait d'Alexandre ? Cependant, pour parler avec les musiciens, il y avait entre eux la distance de plus de deux octaves, comme je m'en suis convaincu en voyant un portrait de Pyrrhus ; et, malgré cela, il s'imaginait que chacun de ses traits rappelait ceux du roi de Macédoine. . . . Telle était l'erreur de Pyrrhus, telle l'opinion qu'il avait de lui ; et il n'y avait personne qui ne la partageât, personne qui ne fut atteint de la même maladie, jusqu'à ce qu'un jour à Larissa, une bonne femme étrangère, en lui disant la vérité, le guérît de cette pituite. Pyrrhus, lui ayant montré les portraits de Philippe, de Perdiccas, d'Alexandre, de Cassandre et d'autres rois, lui demanda auquel il ressemblait, convaincu qu'elle allait désigner Alexandre ; mais elle, après quelques moments d'hésitation : "A Batrachion, dit-elle, le cuisinier !" Il y avait, en effet, à Larissa un cuisinier nommé Batrachion qui ressemblait à Pyrrhus. » L’identification à Pyrrhus ne fait pas de doute : la tête de Naples provenait d’une série romaine représentant les grands vaincus des Romains, et toutes deux sont ceintes de feuilles de chênes, le symbole de l’Epire (cf. Zeus de Dodone, et la numismatique).
Maintenant, je ne suis pas historien de l’art, je n’a donc plus d’avis que ça, je fais confiance aux datations proposées par les notices des musées.
Commode a écrit :
2) Question de vocabulaire : qu'est-ce qu'on entend par mâchoire soudée?
Plutarque,
Pyrrhus, 3 :
« Pyrrhus n’avait pas plusieurs dents en haut ; sa mâchoire supérieure formait un seul os continu, où de légères entailles marquaient la division des dents. » Commode a écrit :
3) Encore sur son physique, il me semble avoir lu . . . qu'il était grand et avait le teint pâle. . . . Et ce qui m'interpelle c'est que l'on parle de sa taille, est-ce moi où finalement durant l'Antiquité, on parlait très peu de la taille (ici c'est donc une exception) des individus lorsqu'on parlait de leur physique?
On ne parle de la taille que si elle est remarquable, tout simplement. Mais je ne vois pas trop d’où proviennent les détails que tu donnes. Sans source à la clé, je ne leur prêterais aucune créance. Par contre il était carré, un costaud : Plutarque,
Pyrrhus, 24 :
« Transporté de colère, il traverse ses bataillons, et prévenant le Barbare, il lui porte sur la tête un si grand coup d'épée, qu'autant par la force de son bras que par l'excellente trempe de son arme, la lame pénétra si avant, que dans le même instant les deux parties du corps tombèrent des deux côtés. Un si terrible fait d'armes empêcha les Barbares d'avancer. Frappés de terreur et d'admiration, ils regardèrent Pyrrhus comme un dieu, et ne le troublèrent plus dans sa marche. » A ne pas prendre au sens propre bien sûr ; je présume que la source est Proxénos, son contemporain et sans doute historiographe, qui doit être à l’origine de tous les traits grandiloquents, homériques, concernant l’héroïsme exacerbé de Pyrrhus. (Il m’amuse d’ailleurs particulièrement cet auteur, car il offre un exemple typique de réécriture de la mythologie à des fins politiques : il propose une nouvelle et originale généalogie royale molosse qui valorise notre Pyrrhus et ses ambitions péloponnésiennes.) Au-delà de l’exagération (les romans de chevalerie offrent d’ailleurs mes mêmes illustrations, je songe en particulier à Robert Bruce qui est crédité du même exploit !), Proxénos l’a sans doute connu personnellement ; et puis vu la vie qu’il a mené, nul doute à mes yeux qu’il devait avoir une sacré carrure.
Commode a écrit :
4) Pourquoi Rome . . . retiendra moins Pyrrhus que d'autres grands adversaires (par exemple . . . Hannibal . . .) ?
Je ne suis pas du tout d’accord : notre Pyrrhis au contraire est l'héritier quasi exclusif de la tradition des Romains, qu’il a fasciné (et qui lui ont forgé une excellente réputation morale, voir par exemple l’anecdote du maître d’école). Les historiens grecs sont beaucoup plus mitigés ou critiques, sans pour autant être hostiles (Hiéronymos de Cardia ou Timée par exemple), et encore de nos jours, seul le volet latin de sa vie est connu (comme en témoigne d'ailleurs tes remarques et celles d'Arcadius), reconnu. Pourtant, ce n’est qu’un épisode parmi d’autres de sa vie d’aventurier, et pas forcément le plus important à ses yeux ; d’ailleurs, il n’a jamais souhaité menacer Rome, seule l’Italie du Sud l’intéresse. Il a vécu un peu plus de 45 ans, mais passe seulement trois ans en Italie, en deux séjours (280-278 ; 275). A titre de comparaison, il guerroie 11 ans en Macédoine, et 3 ans également en Sicile. L’épisode italien n’est qu’une étape, pas forcément majeure à ses yeux. Et pourtant, la mémoire collective ne le retient que comme l’ennemi des Romains ! Et ce parce que pour les Latins, il restera une référence systématique.
Ceci dit, cette impression qu'Arcadius semble partager, tient surtout au hasard de la conservation des sources, puisque aucune monographie latine d’ampleur n’a été conservée, alors que l’épopée d’Hannibal bénéficie des 10 livres de Tite-Live en particulier. Mais rappelons que l’expédition de Pyrrhus en Italie occupait quasi l’intégralité des livres XIII et XIV de Tite-Live, perdus ; sans parler de l’annalistique, sinistrée (où Ennius tient une place de choix, par sa date, par son origine messapienne, et par son influence dans la création de la légende nationale romaine; or il consacre un livre à Pyrrhus, qui doit être la base de notre vulgate).
Notre image reste celle du Pyrrhus des Latins (dont la triste expression « victoire à la Pyrrhus », à l’encontre de laquelle j’avais déjà eu l’occasion de mettre en garde sur le sujet homonyme
victoire à la Pyrrhus ; mais aussi son « classement » parmi les plus grand stratèges, qui s’intègre à la geste non tant d’Hannibal que surtout celle de Scipion ; tout le battage sur les éléphants de Pyrrhus est là aussi une spécificité latine, alors que les Grecs étaient déjà blasés à ce sujet) ; a contrario le Pyrrhus vu par les Grecs n’a pratiquement aucune prise sur notre imaginaire, paradoxalement. Les historiens grecs qui se sont penchés sur son cas, nombreux et prestigieux (Hiéronymos, Timée, Phylarque, pour ne citer que les plus célèbres contemporains), ont tous disparus, même les fragments conservés ne concernent que rarement notre bonhomme. Historiographiquement, notre vision est gravement tronquée, tributaires d’un Denys d’Halicarnasse qui ne s’intéresse qu’au volet romain, et d’un Plutarque d’époque impérial déjà victime de la vulgate latine, et qui ne s’intéresse guère à l’histoire proprement dite. Heureusement Pausanias et quelques autres sortent un peu du lot, mais que d’intermédiaires pour finalement si peu !
D’ailleurs, la comparaison avec l’image d’Hannibal dans l’historiographie latine tourne largement en faveur de Pyrrhus, le roi chevaleresque par excellence, digne adversaire des vertueux Romains dont il est bien entendu, en tant que champion de la vertu, amener à célébrer lui-même sans cesse la si remarquable cité du Latium et ses ô combien vertueux habitants (sic !), alors qu’Hannibal reste un vil, sournois, fourbe et cruel barbare, en dépit de ses qualités.
Il faudrait cependant se pencher plus en détail sur l’historique de l’image de Pyrrhus auprès des Romains : au fur et à mesure des siècles, la menace qu’a fait peser le petit roi d’Epire sur la capitale de l’empire universelle a été de plus en plus minimisée, et c’est ainsi qu’on arrive aux « victoires à la Pyrrhus » absurdes (Frontin, II.3.19, au sujet de la victoire de l’Epirote à Ausculum : « Il y avait quarante mille hommes dans chaque armée ; les ennemis perdirent la moitié de leur monde, et les Romains cinq mille hommes. ») (
) Il est possible que sa place dans l’histoire romaine ait baissée avec le temps, sous l’empire, davantage que celle d’Hannibal ; mais il n’a jamais été effacé, et surtout, il reste surévalué par rapport à la menace réelle et sa place dans l’histoire de la péninsule (encore une fois, il n’a jamais eu de visée sur Rome elle-même, qui reste périphérique dans ses ambitions, et l’Italie n’est qu’un chapitre de son histoire, et pas forcément le plus important à ses yeux, loin de là). Mais Hannibal est aussi d’une autre envergure, quantitativement parlant (il est resté 15 ans, et la guerre était d’une toute autre ampleur).
Commode a écrit :
5) Est-ce que Thersite, vous pouvez nous parlé de son enfance . . .?
C’est un peu compliqué… Encore bébé, il se retrouve « réfugié politique », pour être balloté ensuite d’un coin à l’autre, dépendant du bon vouloir de souverains étrangers qui le manipulent selon leur propre besoin. Il a passé 20 ans à devoir avaler des couleuvres et à serrer les dents… Son père Eacide (le neveu d’Olympias) se retrouve de fait impliqué dans les remous de la succession d’Alexandre ; manque de bol, c’est dans le camp des vaincus et il est chassé du trône… En 317, voilà donc Pyrrhus âgé d'à peine deux ans menacé de perdre la vie précocement ; mais il eut la chance de trouver un protecteur dans Glaucias, le roi d’Illyrie, qui le recueille et l’élèvera. Je cède la parole à Plutarque, qui nous livre un récit épique des premières aventures de Pyrrhus :
« 2 Les Molosses s'étant révoltés, chassèrent Éacides, mirent sur le trône le fils de Néoptolème, et firent périr les amis d'Éacides qu'ils avaient en leur pouvoir. Pyrrhus était encore à la mamelle, et les meurtriers le cherchaient pour le faire mourir. Mais Androclidès et Angélos l'ayant dérobé à leurs recherches, prirent la fuite, accompagnés de quelques esclaves et de nourrices, dont l'enfant avait besoin. Ce cortège nécessaire mettait de l'embarras et de la lenteur dans leur marche; et, se voyant près d'être atteints par leurs ennemis, ils remirent l'enfant entre les mains d'Androcléon, d'Hippias et de Néandrès, trois jeunes gens robustes et fidèles, en leur ordonnant de fuir le plus vite qu'ils pourraient, et de gagner Mégare, ville de Macédoine. Pour eux, en employant tour à tour les prières et la résistance, ils arrêtèrent jusqu'au soir ceux qui les poursuivaient. Après s'en être délivrés avec beaucoup de peine, ils coururent rejoindre les jeunes hommes qu'ils avaient chargés de Pyrrhus. Vers le coucher du soleil, ils se croyaient au terme de leur espérance, lorsqu'ils s'en virent tout à coup plus éloignés que jamais. La rivière qui baigne les murs de la ville coulait avec une effrayante rapidité. Ils cherchèrent un gué pour la passer; mais partout ils la trouvèrent impraticable : enflée par des pluies abondantes, elle roulait avec violence ses eaux troubles et bourbeuses ; et l'obscurité de la nuit rendait encore les objets plus horribles. Ils désespéraient de pouvoir seuls passer l'enfant et les femmes, lorsqu'ils entendirent, de l'autre côté de la rivière, des gens du pays, qu'ils prièrent de les aider à la traverser: ils leur montraient Pyrrhus, et, criant de toutes leurs forces, ils les conjuraient de venir à leur secours. Mais le bruit causé par la rapidité du fleuve les empêchait d'être entendus de ces gens-là; et ils furent quelque temps, les uns à crier, les autres à prêter l'oreille inutilement. Enfin, quelqu'un de la suite de Pyrrhus imagine d'arracher une écorce de chêne, sur laquelle il écrit, avec l'ardillon d'une agrafe, la situation du prince et le besoin qu'il avait d'être secouru : ensuite, roulant l'écorce autour d'une pierre, afin de lui donner du poids, il la lance à l'autre rive. Selon d'autres, il la darda avec un javelot, autour duquel il l'avait attachée. Les gens arrêtés à l'autre bord ayant lu ce qui était écrit sur l'écorce, et voyant combien le danger était pressant, coupèrent à la hâte des arbres qu'ils lièrent ensemble, et sur lesquels ils traversèrent la rivière. Le premier qui aborda à l'autre rive se nommait par hasard Achille; il prit l'enfant, et le passa; ses compagnons firent passer les autres comme ils se trouvaient.
3. Sauvés ainsi du péril, et hors de la poursuite de leurs ennemis, ils se rendent en Illyrie, auprès du roi Glaucias, qu'ils trouvent assis dans son palais avec sa femme, et ils posent l'enfant à terre au milieu de la salle. Le prince, qui redoutait Cassandre, ennemi déclaré d'Éacides, resta longtemps pensif, gardant le silence, et délibérant en lui-même sur le parti qu'il devait prendre. Pendant ce temps-là Pyrrhus, s'étant traîné de lui-même, saisit de ses mains la robe de Glaucias, et, se dressant sur ses pieds, atteignit les genoux du roi, qui d'abord se mit à rire, et ensuite fut touché de pitié, croyant voir dans cet enfant un suppliant qui lui demandait la vie les larmes aux yeux. Quelques auteurs disent que Pyrrhus ne se traîna point vers Glaucias; mais qu'ayant gagné l'autel des dieux domestiques, il se leva, et l'embrassa de ses mains. Glaucias, trouvant quelque chose de divin dans cette circonstance, prit le jeune Pyrrhus, le mit entre les mains de sa femme, et lui ordonna de l'élever avec ses enfants. Peu de temps après ses ennemis l'ayant redemandé, et Cassandre même ayant offert deux cents talents pour le ravoir, Glaucias refusa de le rendre; et lorsque ce jeune prince eut atteint l'âge de douze ans, il le ramena en Épire à la tête d'une armée, et le remit sur le trône. »Ou plus sobrement, Justin, XVII.3.17sq. :
« . . . et envoyé en exil pour cette raison, il laissa sur le trône son fils Pyrrhos, un bébé de deux ans à peine. Alors qu'on le recherchait pour le tuer par haine de son père, il fut enlevé en cachette et apporté chez les Illyriens; il fut remis pour être élevé à Béroè, l'épouse du roi Glaucias, qui était aussi elle-même de la famille des Éacides. Soit qu'il eut pris pitié de son sort, soit qu'il eut été séduit par la gentillesse du bébé, le roi l'y protégea longtemps contre Cassandre, le roi de Macédoine, qui le réclamait sous menace d'une guerre; il l'aida aussi en lui rendant le service de l'adopter. »Je ne sais pas trop s’il faut parler de chance ou de malchance dans ce cirque, en tout cas ça commençait fort. Heureusement que les Illyriens ne portent pas les Macédoniens dans leur cœur, et que le marmot pouvait être un atout pour les ambitions de Glaucias sur la côte adriatique (Epidamne et Apollonie, contre lesquelles ils se cassent les dents depuis des siècles)… Ce qu’il faut retenir, c’est que ce sont les Taulantiens qui s’occupent de son éducation ; leur cour est très hellénisée, mais il est vraisemblable qu’il n’a pas pu bénéficier des mêmes maîtres que s’il avait pu rester en Grèce, même exilé (comme Philippe de Macédoine à Thèbes, où il découvre la philosophie pythagoricienne entre autres, dont il saura tirer partie à son retour). Ce n’est pas pour autant qu’il est un « barbare », il sera capable de citer Homère, donc son éducation dû être tout ce qu’il y a de plus classique, hellénique, mais plus sobre et simple qu’à la cour des diadoques. Et il grandit selon toute vraisemblance en nourrissant une hostilité évidente à l’égard de la Macédoine et de Cassandre, dont il n’était pas prêt d’oublier l’action.
Pendant ce temps, son père tente de profiter des querelles intestines épirotes pour tirer son épingle du jeu, mais ne réussit qu’à se faire tuer en 313. Le voilà orphelin. . . Il lui reste par contre une gentille maman, thessalienne (d'où l'importance de la Thessalie dans sa carrière).
En 307, à l’âge de 12 ans, une nouvelle révolution chez les versatiles Epirotes ramène Pyrrhus sur le trône, avec le soutient intéressé de son père adoptif, en profitant de l’arrivée de Démétrios Poliorcète qui vient caresser les reins de Cassandre. Enfin, sur le trône… à moitié, puisqu’il est trop jeune pour régner et d’anonymes tuteurs prennent les choses en main. En particulier, sa sœur Deidamie épouse Démétrios, ce qui ouvrir de belle perspective pour le jeune prince, mais qui est à double tranchant, puisque le cas Cassandre n’est pas réglé.
Et donc en 302 (il a alors 17 ans), à l'occasion d'une visite à Glaucias (pour le mariage d'un de ses fils), tandis que son allié Démétrios est rappelé en Asie, à nouveau une révolution éclate et paf, le voilà une fois de plus exilé tandis que son cousin Néoptolème, proche de Cassandre, récupère le trône. Il ne reste donc plus qu’une chose à faire pour Pyrrhus : rejoindre seul son beau-frère et combattre contre leur ennemi commun. Et c’est ainsi qu’il fait ses premières armes en participant à la bataille d’Ipsos, où il se fait déjà remarquer. Ce qui est intéressant, c’est qu’il a l’occasion de côtoyer pendant plusieurs mois directement de très grands stratèges, Démétrios lui-même et son père Antigonos Monophthalmos, héritiers de la science militaire macédonienne portée à son apogée par Alexandre. Il a pris là des leçons de stratégie et de tactique auprès de maîtres en la matière, et il saura en tirer le meilleur parti à l'avenir. Manque de pot, une fois de plus, il est dans le camp des vaincus, mais reste néanmoins fidèle à Démétrios qu’il accompagne en Grèce.
En 299, nouveau tournant capital : il est envoyé comme otage par Démétrios à Alexandrie, afin de dissocier les vainqueurs de la veille, avec succès. C’est une aubaine pour Pyrrhus (mais qui n'a pas forcément apprécié de se faire jeter de cette manière...), qui va avoir l’occasion d’une part de faire des rencontres importantes, à commencer par Bérénice, l’épouse royale dont il eut l’intelligence de comprendre l’influence (Bérénice et les princesses macédoniennes en général sont de sacrées bonnes-femmes, très éloignées de l’image que l’on a des femmes grecques effacées et soumises), qui ira jusqu’à lui offrir en mariage Antigona, la fille qu’elle avait eu d’un premier mariage ; et Ptolémée lui-même qui va beaucoup l’apprécier. Mais aussi d'autre part, il va être immergé dans la brillante vie intellectuelle d’Alexandrie, déjà particulièrement active à cette date. Il va y polir sont éducation un peu frustre qu’il avait reçu en Illyrie et en Epire.
Toujours est-il qu’après avoir été la marionnette de Glaucias, puis de Démétrios, le voilà tombé sous la coupe (bienveillante certes, mais toujours intéressée) du puissant roi d’Egypte. Par chance, la mort de Cassandre en 298 redistribue les cartes, et Pyrrhus voit enfin l’occasion de reprendre son héritage. A force d’insister, et grâce tout particulièrement au zèle de sa nouvelle épouse dévouée, il parvient à arracher quelques sous et troupes à Ptolémée. Autrement dit, Pyrrhus passait officiellement du camp de Démétrios (son épouse Deidamie, la sœur de Pyrrhus, était morte entre temps, ce qui les a encore un peu plus éloigné l'un de l'autre) à celui de Ptolémée. Arrivé comme otage, il repart comme hôte, allié et membre de la famille ! Il s’empare du trône définitivement en 297, à l’âge de 22 ans. Les choses sérieuses vont pouvoir commencer, et entre autres il ne tardera pas à se brouiller ouvertement avec Démétrios qui avait lui saisit le trône de Macédoine.
PS: je découvre le message d'Arcadius rédigé en même temps. Je ne suis pas du tout d'accord sur la part négligeable accordé à Pyrrhus dans l'analistique républicaine, bien au contraire, je suis convaincu que ce sont eux qui l'ont sur-valorisé et lui ont accordé une place disproportionée dans la geste nationale romaine en cours d'écriture. Absence de données (Tite-Live, snif) ne signifie pas silence des sources perdues. Faut que j'y réfléchisse et que je ressorte le Peter...