CEN_EMB a écrit :
Effectivement, la solidité de la ligne et sa densité sont déterminantes pour absorber le choc. Mais contrairement aux visions hollywoodiennes de la chose un cheval, même un groupe de chevaux, ne peuvent percer une ligne d'infanterie déployée et prête à les recevoir derrière des armes d'hast et des boucliers avant le Xe siècle au plus tôt, et jusqu'au XIVe siècle au plus tard.
Je ne connais pas assez la guerre médiévale mais j'ai lu, chez Contamine je crois, que l'art de la guerre médiéval est très influencé par Végèce qui préconisait les ordres minces qui sont bien plus sensibles aux charges de cavalerie. Je m'explique mal le succès de cet auteur d'ailleurs ; son ouvrage est à la fois une compilation de traités anciens mâtinés de réflexions personnelles complètement à coté de la plaque. Son obsession en plein IVe siècle est de restaurer l'armée romaine ancienne... un fétiche plus qu'une pensée pertinente...
CEN_EMB a écrit :
D'ailleurs, la légion romaine tardo-républicaine ou du début du principat impérial, pourtant un exemple particulièrement brillant de coopération interarmes et de complémentarité des fonctions opérationnelles, ne dispose que d'une petite aile de cavalerie (120 cavaliers de mémoire) qui servent à des tâches de reconnaissance, d'éclairage ou au service d'estafettes. Si les Romains utilisent des cavaliers auxiliaires barbares (les fameux cavaliers germains de César, les cavaliers thraces de Rhémétalcès en Pannonie), ce n'est pas pour leur capacité à briser une ligne d'infanterie organisée, c'est pour s'assurer de la suprématie sur la cavalerie adverse et opérer des actions de raid dans la profondeur tout en augmentant significativement la sûreté de ses forces.
Les Parties à Carrhae ont compris la méthode et c'est précisément le défaut de la cavalerie et des armes de jet qui vont condamner l'armée de Crassus. L'alliance du harcèlement d'archers montés et de la cavalerie lourde fera un joli échec et mat à cette organisation. Le harcèlement est une arme redoutable contre ces formations lourdes, par définition plus statiques. Les Spartiates sont poussés à la reddition à Sphactérie par le même procédé. Et c'est d'ailleurs les enseignements de la lutte de contre guérilla qui poussa les Romains à s'adapter ; au IVe siècle ils possèdent bien plus d'unités légères et les troupes lourdes combattent volontiers légèrement équipés pour conserver davantage de mobilité.
Narduccio a écrit :
De nombreux historiens, quand ils parlent de la naissance de la phalange, insistent sur la géographie du lieu où elle est née. La Grèce, qu'elle soit continentale ou insulaire, n'est pas une région de grandes plaines où une cavalerie peut s'exprimer, mais bien une somme de lieux confinés où les endroits où on peut se battre en terrain découvert sont relativement rares. Bref, c'est un "outil" né dans un contexte particulier qui va ensuite se révéler comme apportant une certaine efficacité même dans d'autres conditions. C'est la cohésion des combattants qui détermine la résilience de l'ensemble, puis son efficacité.
C'est la thèse de Victor Davis Hanson si je ne m'abuse. Elle est séduisante mais oublie complètement le volet social ; les cités Etats grecques voient l'importance politique des citoyens libres s'accroitre face aux aristocrates cavaliers (conducteurs de char dans l'Iliade). Or ce sont eux qui vont constituer les rangs de ces phalanges d'égaux.
Plus largement je trouve la thèse d'Hanson très très fragile... On a peu d'indications précise sur les guerres grecques avant celle du Pélopponèse et étrangement celle ci correspond assez mal à l'idée d'une humanisation de la guerre.... d'ailleurs toute thèse d'une guerre fraiche et joyeuse est rarement correcte...