C'est d'abord a cette phrase de Florian que je reagis : "Je ne suis pas convaincu qu'il faille distinguer les philosophes du tout-un-chacun: tous sont Grecs et ont donc des valeurs communes."
Qu'est-ce qui est, dans la production, de l'ordre du social, qu'est-ce qui est de l'ordre de l'individuel, voila une question sur laquelle butent tellement les sciences dite de l'Homme qu'elles ont choisi de ne pas choisir, et fonder des disciplines scientifiques qui approfondissent chacun des multiples termes de cette alternative qui n'apparait duelle qu'en surface.
La question se pose de facon encore plus aigue en ce qui concerne une production individuelle, par exemple intellectuelle, qui a traverse les siecles. Cette perennite, et par consequent, la consecration de son a-temporalite qui est au fond tout SAUF "normal" n'est-elle pas deja en soi le signe que quelque chose distingue forcement cette oeuvre du reste de sa production contemporaine ?
Que dit donc l'oeuvre philosophique, pour continuer sur cet exemple, de son temps ?
Le philosophe a-t-il d'abord pour ambition d'inscrire sa pensee dans une contemporanite ? Est-il neanmoins "malgre lui" sujet a l'environnement culturel ? Quelle est exactement la part de cette "culture" que l'education enseigne, et comment se definit-elle ? Cette part est-elle necessairement differente selon les environnements ou constitue-t-elle un fond culturel commun ? etc. etc.
Pour prendre un exemple, de quels philosophes peut-on dire qu'ils ont reellement marque leur temps, au point que leur oeuvre ne fut pas sans influence sur le cours de l'histoire positive ?
Marx, sans doute. Rousseau, surement. Et pas grand-monde d'autre.
Or, j'ai lu tout recemment une etude de l'oeuvre de Rousseau par un psychanalyste. Non seulement, ca apporte forcement un autre regard sur l'oeuvre elle-meme, bien entendu. Mais par extension, la methodologie analytique eclaire a quel point toute oeuvre, toute theorie, aussi rationnellement construite soit-elle, en dit sans doute bien plus sur son auteur lui-meme que sur quoi que ce soit d'autre.
Ce qui ne veut pas dire que, ce faisant, elle ne dise rien "des autres"
Maintenant, pour revenir a cette question connexe des "mentalites", Le Vieux, il existe effectivement une tradition de la pensee politique qui oppose Athenes a Sparte, opposition fondee sur le clivage societes ouvertes / societes fermees que formalise par exemple K.Popper.
Mais si vous en avez l'occasion, et ne serait-ce que pour l'anecdote, je vous propose la lecture de l'etude (courte) qu'un anthropologue feru d'hellenisme du nom de Georges Devereux a consacre a Sparte. Il introduit une nouvelle perspective qui deplace le lieu de ce fameux rapport entre social et individu, en theorisant les societes "pathogenes" : Selon lui, Sparte est le modele de la societe "folle" dans laquelle, pour survivre, il faut etre fou ou s'efforcer/pretendre de l'etre.
Enfin bref. Tout cela pour dire que cette question est celle-la meme qui fonde une eventuelle interdisciplinarite entre les sciences humaines, sociales et ici, l'histoire. Elle est donc tres riche de perspectives sans doute, mais aussi... foisonnante.