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La phalange
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Auteur :  Mr-ionman [ 31 Mars 2010 14:00 ]
Sujet du message :  Re: La phalange

D'accord. J'ai pu lire Asclépiodote. Très compliqué parfois, mais assez intéressant ! On se demande vraiment quelle est la nature du livre, surement un livre de cours destinés aux officiers ?

Merci pour le lien.


Edit : Je suis en train de me battre pour trouver un article d'E. L. Wheeler intitulé 'Legion vs. phalanx : the credibility of Polybius 18.28-32' article délivré à la 124e réunion de l'American Philological Association, en décembre 1992. Introuvable... J'ai envoyé un mail à l'association mais sans grand espoir. J'ai l'impression que je vais y trouver des choses intéressantes :/

Auteur :  Thersite [ 02 Avr 2010 11:20 ]
Sujet du message :  Re: La phalange

Son organisation et son principe même est assez étrange, c'est clair. D'un côté, les manœuvres qu'il détaille, les formations, les ordres qu'il liste, les grades, etc. sont une réalité, personnellement je n'ai aucun doute à ce sujet. Il semble alors s'adresser à l'aristocratie locale au sens large, tout ces petits nobles qui envisagent une carrière dans l'armée où ils formeront les cadres inférieurs. Car Asclépiodote écrit clairement pour de futurs officiers subalternes. D'où son soin aussi de présenter même rapidement toutes les possibilités de carrières, y compris dans les éléphants ou les chars, même s'il va très vite.
Mais d'un autre côté, l'introduction est franchement déroutante, déconnectée de toute réalité, lorsqu'il classe les corps d'armée en trois groupes qui se veulent exclusifs et qui ne le sont pas, plus loin lorsqu'il donne des proportions pour chaque arme, ou bien lorsqu'il catalogue différentes appellations en court dans plusieurs armées ou époques, au final, on ne sait plus vraiment ni à qui il s'adresse ni quel est son but.

Aussi, je me demande s'il ne s'agit pas d'un travail de seconde main (un peu comme Elien), c'est-à-dire le remploi d'un authentique manuel, que je crois séleucide, mâtiné de considérations personnelles et compilé parfois avec d'autres manuels d'origine variée (par exemple dans son développement sur le rhombe thessalien, qui autant que je sache ne fut pas utilisé en dehors de la Thessalie). Le fait que l'auteur nous soit à peu près inconnu n'aide pas. On veut y reconnaître un disciple de Posidonios, c'est possible mais finalement très fragile ; si tel est le cas néanmoins, force est de constater que l'armée qu'il décrit n'existe plus à son époque, ce qui confirme mon opinion d'une double rédaction, tandis que son maître Posidonios a lui-même écrit un traité de tactique qui posait sans doute les mêmes problèmes. Dans ce cas, notre Asclépiodote aurait adapté Posidonios, qui lui même a compilé autour d'un noyau séleucide original. Si le Traité doit être attribué à cet Asclépiodote (ce qui n'est pas du tout sûr), il date du Ier av., mais l'original séleucide doit dater du IIe av. J'ignore si l'épigraphie invalide mon château de carte...

Auteur :  Mr-ionman [ 04 Avr 2010 10:30 ]
Sujet du message :  Re: La phalange

On a une introduction assez intéressante concernant l'histoire de ce manuel et de l'auteur, s'il existe, dans l'édition des Belles Lettres.

Y a-t-il vraiment un auteur s'appelant Asclépiodote ou avons-nous affaire avec un compilateur et donc un ouvrage hétéroclite... J'ai également aperçu l'hypothèse d'un disciple de Posidonios effectivement.

Aucune réponse formelle !

Auteur :  Mr-ionman [ 07 Avr 2010 10:36 ]
Sujet du message :  Re: La phalange

Rigoumont a écrit :
Merci Thersite. Je n'avais effectivement pas bien lu la fin dela description. :oops:
Ce système de bague forcée dont tu parles devrait probablement permettre de bloquer les emboitements et de donner un rigidité satisfaisante au tout.
J'ai lu un article sur les pièces métalliques d'une sarisse dans un magazine hollandais. Je vais remettre la main dessus pour voir si je peux alimenter le débat. :wink:



Alors, as-tu remis la main dessus :wink: ?

Auteur :  Rigoumont [ 07 Avr 2010 14:37 ]
Sujet du message :  Re: La phalange

Mr-ionman a écrit :

Alors, as-tu remis la main dessus :wink: ?

Ah oui, oups... j'avais complètement zappé avec le boulot! :oops:

Bon je regarde ça tantôt... :wink:

Auteur :  Mr-ionman [ 22 Avr 2010 13:57 ]
Sujet du message :  Re: La phalange

Les promesses Rigoumont, les promesses !! L'as-tu retrouvé :wink: ?

Auteur :  Mr-ionman [ 26 Avr 2010 16:27 ]
Sujet du message :  Re: La phalange

Une question pour vous.

A Pydna, de combien d'éléphants disposaient les Romains ? Je lis 22, je lis 34. En gros je ne lis rien du tout...


Une idée ?

Auteur :  Thersite [ 26 Avr 2010 17:25 ]
Sujet du message :  Re: La phalange

Ne lire que les sources, toujours les sources, rien que les sources !
En fait, les deux sont valables, car Tite-Live, le seul à chiffrer ces éléphants, n'est pas explicite.

A l'été 171, les Romains obtiennent un puissant corps auxiliaire numide, commandé par le fils de Massinissa, Misagène, accompagné entre autres de 22 éléphants (TL, XLII.62.2).
Puis au printemps 170, les envoyés de Massinissa à Rome promettent de nouveaux renforts, entre autres 12 éléphants supplémentaires (TL, XLIII.6.13). Le problème, c'est que l'historien latin ne signale pas par la suite l'arrivée en Macédoine de ces renforts, et que si les éléphants apparaissent régulièrement dans la campagne, il n'offre plus d'autres précisions numériques.
Par conséquent, la promesse a-t-elle été suivie d'effet ou non ? Selon que l'on se fie à la parole de Massinissa ou non, on peut se contenter prudemment du chiffre de 22 pachydermes assurés ou accepter celui de 34 éléphants probables.

Auteur :  Mr-ionman [ 27 Avr 2010 10:16 ]
Sujet du message :  Re: La phalange

Crois-moi je les lis et relie en ce moment même lol . Mais je n'ai retranscrit que les passages des batailles, je n'ai plus les livres sous la main pour le moment (en dehors des ressources électroniques...).

Sachant que c'est assez fastidieux et long de retourner voir chez Tite-Live pour un simple chiffre, je n'avais pas le courage :/

Je me suis déjà pris la tête sur son décompte des forces de Magnésie, horrible :mrgreen:

Merci beaucoup en tout cas !

Auteur :  Mr-ionman [ 27 Avr 2010 15:17 ]
Sujet du message :  Re: La phalange

Sinon petite question. Que l'idée que la phalange des derniers rois de Macédoine est plus rigide et monolithique que la phalange de Philippe II et d'Alexandre, je n'arrive pas à me faire un avis. Mes connaissances de la phalange d'Alexandre et de son équipement sont faibles.

En quoi serait-elle plus rigide et monolithique ? Et quelle purent être les évolutions de l'armement offensif et défensif du phalangite ? Cette dernière question est difficile puisque d'une époque comme de l'autre on ne peut avoir de réponse tranchée.

Auteur :  Thersite [ 27 Avr 2010 16:56 ]
Sujet du message :  Re: La phalange

Des évolutions, il y a en eu, c'est certain. Polybe en particulier signale les variations dans la taille des sarisses (même si on ne peut pas exclure que pour une partie des mesures qu'il donne, le problème soit une simple traduction des unités de mesure, tantôt en pied attique, tantôt en pied macédonien, etc.).
Alexandre de son côté a effectué de nombreuses réformes tout au long de son règne, tant dans l'armement (les armures individuelles par exemple, allégées) que dans la structure interne des unités (la créations des chiliarquies de 1000 hommes ; la suppression du recrutement régional, etc). Mais ces réformes ont-elles été appliquées en Macédoine ? Rien de moins sûr, et rares furent les hommes de son armée à revenir au pays.

J'avais lancé l'hypothèse, contre les idées reçues, au contraire d'un allègement de la phalange entre le début et la fin du IIIe, avec l'apparition d'un nouveau bouclier plus petit, plus léger que l'original, dans la seconde moitié du IIIe, en m'appuyant sur trois constats spectaculaires :

La phalange ne s'exporte pas avant la fin du IIIe. Pendant plus d'un siècle, elle reste le monopole des armées macédoniennes (et diadoque bien entendu), alors que théoriquement leur armement est censé être plus efficace et moins cher. Et pourtant, en dépit de ses succès militaires spectaculaire, aucun autre état n'adopte ce système. Et tout à coup à la fin du IIIe :
a) dans la décennie 220, Cléomène réforme l'armée spartiate, lui imposant l'armement macédonien, réforme jointe à l'intégration de milliers et périèques et même d'hilotes armés aux frais de l'état.
b) en 222, les Mégalopolitains sont armées à la macédonienne aux frais d'Antigonos
c) en 218/217, les sujets égyptiens et libyens des lagides sont massivement armés à la macédonienne, il combattront pour la première fois à Raphia ;
d) vers 209, c'est au tour de la Ligue achéenne de franchir le paix, avec les réformes de Philopoemen.

Quelle rupture avec le siècle qui précède ! Que c'est-il donc passé pour que tout à coup, le système macédonien devienne compétitif ?
Or justement, en parallèle, on constate une évolution sémantique. Les troupes d'élites de toutes les armées hellénistiques, appelées sous Alexandre et les premiers diadoques "Hypaspistes", "Portes-boucliers", se batisent désormais "Peltastes", "Porteurs de pelte". Certes, la pelte macédonienne n'est pas la pelte thrace, mais cela dénote une évolution du bouclier, devenu plus petit, plus maniable. Qui dit bouclier plus petit dit coût moins élevé ; qui dit coût moins élevé dit compétitivité et capacité à armer beaucoup de monde, et du coup s'explique la soudaine expansion géographique des phalanges à la fin du IIIe, en particulier dans un contexte où l'état doit brutalement armer beaucoup d'hommes (Sparte, Mégalopolis, Egypte). A cette date et grâce à une diminution de la taille du bouclier, le sarissophore est devenu meilleur marché que l'hoplite.

Cette évolution, qui je pense à commencer chez les Séleucides, qui ont toujours intégré de nombreux indigènes dans leurs armées, se poursuivra pour aboutir au bouclier riquiqui décrit par Asclépiodote et consorts, qui décrit un bouclier vraisemblablement séleucide d'une soixantaine de centimètres, très différent de ceux que le sarcophage de Sidon par exemple représente.
Mais toute ce scénario est très théorique et personnel et demanderait à être confirmé par l'archéologie...

Moralité, contrairement à l'idée reçue, je ne crois pas que l'armée de Philippe V soit structurellement et matériellement "plus rigide et monolithique" que celle de Philippe II et d'Alexandre III, au contraire, son armement la rend peut-être plus maniable.

La différence est ailleurs : dans les hommes qui la composent. L'armée d'Alexandre (on connait très peu celle de Philippe) est composée des vétérans des guerres de Philippe, et après son passage en Asie, elle est de fait formée de professionnels, qui vivent sur le pied de guerre au quotidien pendant des décennies.
A l'inverse, l'armée de Persée est composée de bleusaille qui n'ont soit aucune expérience, soit très peu, une ou deux campagnes en Thrace ou en Illyrie. On ne peut pas demander les mêmes manœuvres à ces deux groupes d'hommes. D'où leur aspect plus lente, plus passive : on ne leur demande que de tenir leur ligne. Ce qui contraste par contre avec les opérations menées par les Peltastes de Philippe V, où l'on retrouve la variété et l'audace des hypaspistes : eux sont des professionnels.
Ce caractère est encore renforcé par les recrutements de Persée, massifs ; il a vraiment raclé les fonds de tiroirs pour alignée la plus nombreux armée macédonienne jamais réunie.
On peut y ajouter les "Leucaspides" à la qualité douteuse, et qui selon ma pomme sont formés de sujets indigènes armés à la macédonienne. Quelle différence avec l'armée de Philippe composée de pezhétaires, qualificatif aristocratique qui dénote au moins le prestige du fantassin sous son règne, assimilé aux Hétaires nobles de la cavalerie, et reflétant sans doute en partie leur origine sociale (de petits nobles, qui fournissent leur équipements et qui sont enterrés avec, cf. la tombe de l'article qui nous a occupé plus haut).
Le statut social des guerriers n'est donc plus le même ; leur prestige et leur esprit de corps non plus, avec l'intégration de tout et n'importe quoi pour gonfler les effectifs ; enfin l'expérience n'est plus la même. Donc leur emploi diffère sensiblement, on ne peut pas leur demander des miracles.

Auteur :  Mr-ionman [ 27 Avr 2010 21:29 ]
Sujet du message :  Re: La phalange

Merci encore ! Je rejoins tes hypothèses, toutes ou presque.

Le règne de Philippe V, et celui de son père avant lui, sont marqués par des guerres très régulières. Je trouve difficile de penser que les hommes de la phalange en 197 (et les années précédentes) soient peu expérimentés. Philippe domine les premières années de la deuxième guerre de Macédoine. Par son énergie et sa rapidité, il est partout, sur tous les fronts. Ses phalangites devaient être à la hauteur de l'homme comme ses Peltastes le furent. En 197, il recrute des très jeunes et des très vieux pour son armée de campagne. Ils ne devaient pas former la totalité de sa phalange de 16.000 hommes, et d'autre part ses soldats mobilisés dans les garnisons de Grèce et d'Asie Mineure devait avoir servi depuis quelques années déjà, j'imagine.

D'ailleurs je lui reprocherai ceci, de ne pas avoir évacuer les places fortes de Corinthe et du Sud de la Thessalie. Si son optique était de jouer la guerre sur une grande bataille, bien entendu.

Le problème du recrutement macédonien est essentiel pour la question de l'expérience des effectifs. Je n'ai plus toutes les données en tête mais le livre de M. Hatzopoulos sur l'Organisation de l'armée macédonienne sous les Antigonides est très important.

Auteur :  Thersite [ 28 Avr 2010 15:29 ]
Sujet du message :  Re: La phalange

On est bien d'accord, mes dernières remarques concernent Persée, qui est le seul dont la phalange puisse être étiquetée "rigide et monolithique". Durant toute la campagne, elle a un rôle incroyablement passif, il n'ose jamais l'engager même lorsque les conditions sont favorables, ses quelques succès sont dus à sa cavalerie et ses troupes légères.
Par contre la phalange de Philippe V ne mérite pas du tout un tel jugement de valeur. Peu auparavant dans la guerre contre Cléomène, puis pendant la Guerre des Alliés, dans ses campagnes asiatiques ou contre les Romains, on voit Philippe V emmener sa phalange d'un coin à l'autre de la péninsule au pas de course ; on la voit traverser manu militari à gué des fleuves tenus par l'ennemi ; on la voit repousser la plus redoutable armée grecque du moment des crètes de Sellasia ; on les voit opérer en coopération avec les Agrianes, les Thraces ou les Illyriens ; tantôt sur 16 rang, tantôt sur 32; tantôt seuls tantôt alternés avec les Illyriens ; Philippe va même en faire des marins (ce qui sera une grave erreur). Donc non, la phalange de Philippe n'est en rien "rigide et monolithique", elle combat efficacement sur tous les terrains imaginables. On ne le répètera jamais assez, mais Cynoscéphale n'est pas une vrai bataille, c'est un accident, un accrochage qui a mal tourné, qui ne remet nullement en cause l'efficacité ou le courage des phalangites tombés à cette occasion dans une embuscade alors qu'ils croyaient surprendre l'adversaire. Philippe V est un très bon stratège, extrêmement dynamique et audacieux, un des personnages les plus intéressants d'une époque riche en personnalités, mais parfois un peu brouillon, ce qui lui a valu souvent des déconvenues, comme à Cynoscéphale.

Le bouquin d'Hatzopoulos, je ne le connais pas. J'en ai entendu parlé, je crois qu'il exploite énormément l'épigraphie macédonienne qui a renouvelée ces dernières années notre vision interne de la Macédoine, mais que je n'ai jamais eu sous les yeux. Il me semble que Rigoumont avait ouvert un sujet sur le forum consacré à ce livre justement ; sujet qui n'a bénéficié d'aucune réponse si je me souviens bien...
Quels sont ses conclusions ?
En particulier sur les Peltastes ?

Auteur :  Mr-ionman [ 28 Avr 2010 16:46 ]
Sujet du message :  Re: La phalange

Effectivement, son 'mémoire' comme il l'appelle s'appuie essentiellement sur les nouvelles découvertes épigraphiques du règlement militaire macédonien. Je ne résiste pas à partager les documents que j'ai scanné pour mes propres besoins, ici concernant les Peltastes. Je ne sais pas si c'est hors charte... Ca serait logique :oops: .


http://www.weplug.com/images_1/b6eb824e ... 153628.jpg
http://www.weplug.com/images_1/61982c9c ... 153628.jpg
http://www.weplug.com/images_1/6bb2c691 ... 153629.jpg
http://www.weplug.com/images_1/c5ff427c ... 153630.jpg


Ses conclusions sont que ces documents épigraphiques plus ou moins récents sur l'armée Macédonienne montre la grande dimension de l'État de Droit Macédonien, contre ce que peut en dire Polybe. On y voit une séparation entre le Macédonien dans l'armée et le même Macédonien dans le civil. Car justement les droits du soldat dans le civil (foyer, famille) sont bien présents et respectés, ce qui renforce le lien du soldat avec son roi, sa fidélité. Philippe V apparait comme un grand législateur, un grand et intelligent réformateur. Le troisième Κτίστης après Perdiccas I et Philippe II. Si Polybe et ses disciples ont réussi pendant 2000 ans à ternir la figure de Philippe, ces découvertes qui s'ajoutent au catalogue épigraphique existant permettent sa réhabilitation.

Auteur :  Mr-ionman [ 28 Mai 2010 8:59 ]
Sujet du message :  Re: La phalange

Lorsque j'ai parlé d'une double ligne déployée par une armée hellénistique, je viens de retrouver : c'est Alexandre à Gaugamèles.

Citer :
In this way had Alexander marshalled his army in front; but he also posted a second array, so that his phalanx might be a double one.


Arrien, Annabase, III, 12.

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