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Message Publié : 20 Mars 2004 20:54 
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Philippe de Commines
Philippe de Commines

Inscription : 17 Mars 2004 23:16
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Sujet tout simplement mais difficile de faire une réponse qui embrasse tous les points soulevés tant différents sujets ont été soulevés par les précédentes interventions.

Quelques ouvrages de référence, d'abord.

"Naissance de la noblesse" de Karl-Ferdinand Werner.
Ce livre fait justice du mythe des invasions barbares et des images d'Epinal montrant des guerriers avec casque à pointe emportant de force sur leur cheval de riches et belles jeunes femmes romaines tout de blanc vétues.

Et surtout, "l'histoire brisée" d'Aldo Schiavone.

La "chute de l'empire" de 476, ou plutôt la déposition du dernier empereur fantôche, c'est tout simplement le moment où ceux qui avaient le pouvoir en occident, à savoir les chefs romanisés des armées romaines pour l'essentiel constituées de fédérés barbares, ont décidé de tirer les conséquences d'un état de fait. A savoir qu'il n'y avait plus d'empire en occident et qu'il était plus commode de mettre fin à ce qui n'était plus qu'une fiction.

L'organisation du pouvoir impérial, ou plutôt ce qu'il en restait, a donc alors symboliquement disparu en occident. Mais comme l'un de vous a dit, le monde romain ne s'est pas volatilisé. La société était romaine. Les gens avaient toujours le sentiment d'être dans l'empire romain.

Les rois barbares, comme Clovis, j'étaient roi que de leurs tribus. Ils gouvernaient la population "romaine", à savoir 95% de la population, avec des titres et pouvoirs romains : patrice, ...etc.

Le fait que l'armée romaine était composée d'anciens barbares mal romanisés était certainement un facteur de fragilité parce que, si on peut être anachronique, on dirait qu'ils n'avaient pas, pour l'empire, l'attachement qu'ils avaient pour leur tribu.
Pour reprendre un écrivain comme Jean Dutourd, qui est certes très partisan mais sait aussi voir les faits, l'empire romain est tombé parce que c'était une société mais pas une nation.

Avant d'en venir aux causes, je veux quand même faire un sort à la prétendue respponsabilité du christinanisme dans la chute de l'empire.

D'abord, comme il a été relevé, tout le monde ne s'est pas retrouvé chrétien en 313, par décret de Constantin, ni même sous Théodose à la fin du 4ème siècle.
Ensuite, n'exagérons pas : tout le monde ne s'est pas retrouvé dans un monastère.
Surtout, la christianisastion de l'espace romain, surtout en occident, a été un processus multi-séculaire. Le christinanisme était une religion d'abord et surtout implantée en orient. Il a d'abord triomphé là-bas.
Les carolingiens et leurs successeurs ont eux été confrontés aux problèmes d'accaparation des biens par les églises et les monastères : pas les romains.
Surtout, le christianisme a été choisi par Constantin parce qu'il y a vu à juste titre, outre une force politique décisive, un facteur d'unification et de renouveau culturel pour l'empire. La meilleure preuve, c'est qu'il ne nous est finalement resté qu'une chose de l'empire romain, de l'espace romain, c'est le christianisme. Avant, l'empire unifiait l'Europe. Ensuite, la société romaine est devenue chrétienne et l'occident romain n'a plus eu qu'une caractéristique commune : le christianisme.

Mon avis sur les causes maintenant. :)


La militarisation du pouvoir ?

Mais depuis la 1ère guerre civile en 88 av JC, le pouvoir à Rome est militaire, la vie civique s'étiolant pour se voir de plus en plus éclipsée par la dimension militaire du pouvoir.
Depuis le conflit de Marius et Sylla, le pouvoir a été acquis par la force militaire et le fondement du pouvoir à Rome était l'armée.
D'où Pompée tenait-il sa force ? De ses campagnes militaires : vétérans, richesses et clientèles à la clé.
Pourquoi César a-t-il fait la guerre des Gaules ? Pour acquérir les mêmes arguments sonnants et trébuchants que Pompée.
Pourquoi Antoine et Auguste ? Parce que le 1er était le principal chef césarien en mars 44 et parce que le second était son héritier et a récupéré les fidélités des soldats de son père adoptif.
Pourquoi Vespasien ? Parce qu'il était le chef de la principale et de la plus aguerrie armée romaine : celle qui avait gagné la guerre de Judée.

Même les Antonins, malgré leur habile propagande tentant à travestir leur pouvoir en un retour à la république ancestrale, n'ont pas échappé à la règle. Pourquoi Trajan a-t-il été choisi comme héritier par Nerva dès 96 ? parce qu'il était le plus puissant des généraux romains.

La rupture dynastique de 68 ?
Mais c'est ignorer que Rome ne s'est jamais avouée comme une monarchie et que même la monarchie avouée a toujours refusé d'instituer le principe d'hérédité. Les julio-claudiens ont été ressentis par toutes les autres grandes familles de la vieille noblesse romaine comme des imposteurs parce que les autres ne pouvaient pas admettre la rupture de la parité entre aristocrates. N'oublions pas, en plus, en nous plaçant à la fin de la vie de César et au début du pouvoir d'Auguste, que les Julii n'étaient pas la plus prestigieuse des familles de la noblesse.
Le triomphe des Julii, c'est César. Mais avant que César, les Julii comptaient bien peu face aux Cornelii, aux Claudii, aux Metelli, aux Domitii. Ce n'est d'ailleurs pas pour rien qu'Auguste a épousé Livie : son père était un Claudius adopté par les Livii et ainsi il s'alliait avec une des plus grandes gentes patriciennes romaines lui qui n'était que le fils d'un plébéien sans grand passé si ce n'est d'être le petit-neveu de César.
Le pouvoir à Rome était militaire depuis longtemps. Le génie de César et Auguste, qui fait qu'on les a retenus comme les géants historiques qu'on connait, c'est d'avoir su trouver la clé qui permettait de donner corps au système de pouvoir impérial dont Rome avait besoin : en alliant pouvoir militaire et légitimité populaire.

La non-conquête de la Germanie et le testament d'Auguste ?

Certes, une frontière plus courte aurait été plus facilement défendable. Mais n'oublions pas les raisons du testament d'Auguste. Il a essayé sans succès de conquérirt la Germanie. Les plus grands généraux romains s'y sont non pas cassés les dents mais s'y sont acharnés sans résultats décisifs : Tibère, Drusus, Germanicus. Et il y aura d'autres tentatives sous les flaviens je crois.
La Germanie n'était pas la Gaule. Elle était peu peuplée, essentiellement couverte de forêts. Et qu'aurait-elle rapporté à l'empire en échange des immmenses dépenses engagées pour la conquérir ?
Jusrte avant le désastre de Varus, Rome avait porté sa domination jusqu'à l'Elbe. Et pourtant elle a fait ensuite un repli stratégique sur le Rhin.
Le problème de la germanie, c'est que même en anéantissant les tribus frontalières qui refusaient de se soumettre ou qui se soulevaient, Rome ne réglait pas définitivement le problème parce qu'il arrivait d'autres tribus d'orient ou du nord.


Constantin et son installation en orient ?

Mais quand il a inauguré Constantinople, Rome avait depuis près d'un siècle cessé d'être la capitale de fait de l'empire et les empereurs se trouvaient très souvent occupés en orient par les guerres.
Avant Constantinople, il y a eu Nicomédie.
Une 2ème capitale a été créée en orient parce que les empereurs avaient besoin de résider près des principaux théatres d'opérations militaires.
Et aussi parce que l'orient était devenu la partie la plus riche de l'empire.


Les causes de la chute de l'empire d'occident sont avant tout structurelles.

Je retiens quelques dates dans le désordre.

212 et l'édit de Caracalla.
En donnant la citoyenneté à tous les hommes libres de l'empire, Caracalla a fortement aggravé le problème de recrutement de l'armée romaine. L'armée avait toujours été un moyen de promotion sociale. Des non-citoyens s'y engageaient parce que c'était pour eux un moyen d'acquérir la citoyenneté et un statut juridique privilégié.
A compter du moment où il n'y avait plus de besoin de passer par la case armée pour devenir citoyen, l'armée n'attirait plus. Et ce phénomène a puissament contribué à la barbarisation de l'armée, même si l'armée romaine a toujours eu recours à des auxiliaires non-romains, y compris à l'âge d'or de la république.
Mais quand on n'a plus rien à gagner à une carrière militaire, on n'en voit plus que les inconvénients, et notamment le peu de confort ainsi que le risque de mourir prématurément. On préfère laisser aux provinciaux d'abord puis aux barbares ensuite le soin de défendre l'empire.

33-30 et la logique de conquête de pouvoir d'Auguste.
En effet, Auguste a effectué un virage à 180° par rapport à la politique de son grand tonton. Pour s'imposer contre Antoine, il a joué le "nationalisme" italien et la défense des valeurs traditionnelles, L'Italie contre un mythique orient barbare prêt à fondre sur la malheureuse et fragile Italie avec l'immonde Cléopatre et son soi-disant pitoyable amant (qui a en réalité fait une seul bourde : celle de laisser l'Italie à Octave au lieu de s'assurer qu'elle reste neutralisée, en partie commune, comme il était prévu).

Or en agissant ainsi, Auguste a considérablement ralenti, peut-être de manière décisive et fatale, la politique de fusion et d'intégration qui était celle de César.
Peut-être aussi n'a-t-il pas compris ou pas voulu reprendre ce que plusieurs historiens considèrent comme un dessein possible de César : tout en prenant compte des différences culturelles fondamentales entre occident latin (et appelé à être complètement latinisé dans l'orbite romaine) et orient grec, mettre en place uns structure de pouvoir qui aurait favorisé les rapprochements à long terme comme avec la double-monarchie égyptienne qui aurait pu l'inspirer.

Autre cause de la chute de l'empire : ses guerres incessantes avec les parthes puis les sassanides, avec des empereurs toujours obnubilés par la figure d'Alexandre.
Le résultat, c'est que Rome a du faire face au double problème des perses et des germains et s'y est épuisée. Même un empire aux immenses ressources comme Rome ne pouvait faire face durablement à de telles charges militaires. Il aurait fallu un bon accord de statu quo avec les perses pour faire face en Europe.

Autre élément factuel et peut-être être l'ultime chance ratée de l'empire : la succession catastrophique de Théodose 1er avec les cours de ses 2 fils qui ne songeaient qu'à se tirer dans les pattes au lieu de se soutenir mutuellement.

Foncièrement, par delà tous les accidents historiques, il y a 2 raisons fondamentales à la chute de Rome : la société, l'économie et la politique.

Le système romain que nous admirons, qui avait atteint un niveau de raffinement, de développement et de technique qu'il faudra environ un millénaire pour retrouver, était incroyablement inégalitaire.
Il ne profitait qu'au monde urbain et même à une élite de riches. Qui avait intérêt au maintien du pouvoir impérial ? Ceux qui en retiraient des bénéfices, c'est à dire une minorité, non négligeable certes mais une minorité trop faible quand même.

La démographie était en crise depuis le milieu de 2ème siècle : cela a beaucoup joué. L'empire était finalement relativement peu peuplé au regard de son étendue géographique. Il manquait de bras, aussi bien pour cultiver que pour combattre, au point qu'il a fallu aggraver le statut des hommes pour les lier héréditairement à leur profession : à la terre ou à l'armée.

Enfin l'économie. Ou plutôt l'absence de souci économique.
Il n'y avait pas de pensée économique dans l'antiquité. L'empire romain était un système prédateur qui se nourrissait de conquêtes, d'esclaves et de tributs pris parmi les vaincus.
Pas d'accumulation, pas de réinvestissement dans une logique de croissance : les surplus étaient pour l'essentiel dilapidé dans l'évergétisme qui nous a donné des constructions magnifiques (quoique se ressemblant toutes) mais improductives.
L'empire ayant cessé d'avancer, il a fini par griller toutes les richesses accumulées et a manqué de carburant et de dynamique, le tout aggravé par la crise démographique.
Sur l'économie, je schématise beaucoup mais lisez donc Aldo Schiavone. :D

Politiquement, enfin, Rome n'a jamais su se doter du système impérial stable qui aurait évité les innombrables guerres civiles et sécessions régionales conduites par des généraux romains.
La faute à qui ? Au grand Auguste lui-même qui, contrairement à son immense grand tonton, a choisi l'ambigüité et le non-dit institutionnel pour garantir la durée de son pouvoir.

César était peut-être un homme trop pressé qui a brusqué non pas ses concitoyens mais les sénateurs prétendant eux aussi au pouvoir. Auguste lui s'est avéré trop prudent et l'ambiguité qui a été le prix de son acceptation résignée par le parti sénatorial a peut-être fait perdre un temps précieux et empêché de doter Rome des institutions nécessaires.


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Message Publié : 24 Mars 2004 23:28 
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Jean-Pierre Vernant
Jean-Pierre Vernant

Inscription : 17 Oct 2003 18:37
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Faute de temps pour tout lire j'espère ne pas faire que de la redite !
La première conclusion de Richardot, j'y verrais une histoire de verre à moitié vide ou plein. Voici un empire étendu de l'Ecosse à l'Iraq qui se maintient plus de quatre siècles - unique et inimaginable à notre époque. La chute de l'empire d'Occident c'est aussi le maintien de celui d'Orient, la capitale matériellement indéfendable soumise à des flots d'invasions contre la capitale facile à défendre et moins attaquée etc.
Cinq cents ans ! Dieu que c'est long ! L'empire est tombé parce qu'il ne pouvait éternellement tenir l'Eurasie hors de ses frontières. Limes ! Légions ! D'abord des forces puis des mots. D'autant plus des mots que les premiers barbares à réussir le passage de la frontière ne le firent pas en ennemis mais en fédérés, sincèrement désireux d'adopter la vie et la prospérité romaines, et de la défendre face à des ennemis jugés simples pillards. Pacifiquement, puis plus durement ils voulurent leur par du gâteau - et la cuisine prit feu.
L'empire d'Occident a disparu parce que le monde bougeait. Devrait-il donc être encore là ?


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Message Publié : 22 Avr 2004 14:12 
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Polybe
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Inscription : 22 Avr 2004 13:25
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J'apporte mon petit grain de sel en espérant ne pas répéter inutilement certains points. L'économie romaine reposait sur les nombreux esclaves que les romains se procuraient grace aux conquêtes. Or, celles-ci ont été arrêtées, un territoire trop grand étant trop difficile à gérer. A cet égard, je pense qu'un assimilation des germains aurait été vraiment impossible : les chemins étaient presque inexistants, ceux-ci se déplacaient sur les fleuves (sur de légères embarcations, un peu comme les indiens en Amazonie :)), et si l'on fait référence aux gaulois, plusieurs révoltes ont eu lieu des années après la conquête définitive du territoire. Pour en revenir aux esclaves, l'empire arrêtant ses conquêtes a vu diminuer son nombre d'esclaves, esclaves qui étaient le moteur économique véritable du pays. Autrement dit, selon je ne sais plus quel(s) auteur(s) d'ailleurs, l'Empire romain a raté sa révolution industrielle. Dommage, on aurait gagné plusieurs siècles d'avancée scientifique. ;)

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Une armée de cerfs conduite par un lion est plus redoutable qu'une armée de lions conduite par un cerf. (Plutarque)


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Message Publié : 05 Mai 2004 0:07 
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Grégoire de Tours
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Caesar Scipio a écrit :
Autre cause de la chute de l'empire : ses guerres incessantes avec les parthes puis les sassanides

Je pense même que c'est la cause principale de la chute de l'empire. Les guerres contre l'empire sassanide ont entraîné des pertes financières et humaines énormes. Ce manque d'argent et de soldats seront fatals...


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Message Publié : 05 Mai 2004 8:34 
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Dans un numéro de "Sciences & Vie", une hypothèse était avancée en ce qui concerne la décadence de Rome : les romains auraient été atteint de saturnisme. En effet, ils étaient de très grand consommateurs de vins, lesquelles étaient stockés ou au contact de plomb. Sans compter les "décoctions" à base de diverses produits chimiques que les romains appréciaient pour leur soi-disante vertus therapeutiques.


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Message Publié : 05 Mai 2004 10:02 
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Grégoire de Tours
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Ce problème du saturnisme est connu depuis longtemps... Le problème relevant surtout de conduites d'eau en plomb je crois...

Mais de là à croire que le plomb fut à l'origine de la chute de l'Empire romain, je n'y crois pas trop...

Keikoz

_________________
Dubitando ad veritatem pervenimus
Cicéron, De officiis


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Message Publié : 05 Mai 2004 13:25 
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C'est sûr, mais cela peut expliquer peut-être la folie de certains, je pense à Caligula par exemple (et il y en a d'autres)


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Message Publié : 05 Mai 2004 17:02 
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Grégoire de Tours
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Personnellement je suis très sceptique sur ce "mythe" d'intoxication au plomb... Cela ressort périodiquement dans des revues variées mais cette tentative d'explication "déterministe" toxique me laisse dubitatif...

Par contre la démographie est en effet un facteur improtant de même que les bouleversements observés au niveau de la paysannerie. La création de latifundia de plus en plus grandes avec des cultures "extensives" ont conduit à déposséder l'agriculteur de sa terre et ce qui a fait la force de l'Empire se retournera contre lui à l'heure des invasions... Cela a été particulièrement vrai en Asie Mineure sous Byzance ce me semble...puisque cela retentira sur le recrutement des Légions...

Amicalement


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Message Publié : 05 Mai 2004 22:03 
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Polybe
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Inscription : 20 Avr 2004 17:38
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le saturnisme comtemporain prend la forme du cathodique, lors d'une hyppothétique chute de l'occident on ne pourra dire que c'est LA cause, mais une des causes; tout en sachant que la racine du problème est bien plus enfouit que celà.
Je vous avouerai la passion avec laquelle j'ai lu de nombreux Post des différents membres sur ce sujet... et les choses ne sont pas simples, de multiples facteurs entent en jeu; que je schématiserai à celà (veuillez m'en excuser):
1-La décadence
2-L'envie des "barbares" face à la culture et la richesse de l'empire
3-Le monothéïsme, en opposition au paganisme impérial(et son unité martiale et incarnée par un seul homme)

Ce que j'entend par décadence, ce n'est pas les orgies et autres "frivolités" (qui sont conséquences), mais plutôt la possibilité d'une civilisation de réfléchir sur elle même (étant éloigner des obligeances nutricionelles primaires), et par la même occasion découvrir sa futilité (voire son inutilité finale et divine).


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 Sujet du message : Un avis de Paul Veyne
Message Publié : 14 Nov 2005 16:08 
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Pierre de L'Estoile
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Inscription : 05 Oct 2005 20:39
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Localisation : Lyon-Vénissieux
Le grand historien du monde gréco-latin Paul Veyne a donné il y a peu une passionnante conférénce à Lyon sur la civilisation greco-latine.
A la fin de la conférence quelques questions ont été posés notamment sur cette disparition de l'empire.
Pour le grand maitre, l'empire était trop grand pour pouvoir être défendu.
Quand il fallait défendre le front du Danuble, le front du Rhin était désarmé et affaiblit de même que le front de la Dacie ou d'Orient.
Il refute le thème de la décadence.
Effectivement les empereurs romains du 3° siècle sont d'une aussi haute qualité que ceux du 1° siècle, notamment Dioclétien, Constantin, Théodose, Julien.
On ne rencontre plus à cette époque d'empereurs fous comme Néron ou Caligula.
Les guerres civiles semblent moins meurtrières.
En revanche au 4° siècle c'est quand même la chute, notamment avec Honorius en occident.
Mais au fond la question que l'on peut se poser est comment un empire aussi immense a t-il pu tenir aussi longtemps, compte tenu du fait que les jambes des hommes et des chevaux étaient le seul moyen de déplacement à l'époque.
Un si grand empire de l'Ecosse à l'Irak, du Portugal à la Bulgarie ne pouvait pas durer éternellement car trop dur à défendre.
De + peut-on considérer qu'il y avait vraiment des romains en dehors de Rome ?
Cet empire était centrée sur une ville qui s'était imposée par une très dure conquête.
Il était un peu inévitable que les différents peuples, subjugués de force, ne fasse rien pour le défendre.


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 Sujet du message : Re: Un avis de Paul Veyne
Message Publié : 15 Nov 2005 12:33 
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Grégoire de Tours
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Inscription : 14 Avr 2004 1:48
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Localisation : Pas de Calais
Citer :
Le grand historien du monde gréco-latin Paul Veyne a donné il y a peu une passionnante conférénce à Lyon sur la civilisation greco-latine.
A la fin de la conférence quelques questions ont été posés notamment sur cette disparition de l'empire.
Pour le grand maitre, l'empire était trop grand pour pouvoir être défendu.
Quand il fallait défendre le front du Danuble, le front du Rhin était désarmé et affaiblit de même que le front de la Dacie ou d'Orient.
Il refute le thème de la décadence.


Il a raison, d'ailleurs l'armée n'a jamais été aussi nombreuse qu'au IVe siècle. Le fait est que si l'Empire n'était pas beaucoup plus vaste que sous le Haut-Empire, les menaces qu'il affrontait étaient bien pus nombreuses. Les barbares germaniques à l'Ouest, les Sassanides sur l'Euphrate. Sans parler d'une forte instabilité interne et une tendance aux pronunciamentos.

Citer :
Effectivement les empereurs romains du 3° siècle sont d'une aussi haute qualité que ceux du 1° siècle, notamment Dioclétien, Constantin, Théodose, Julien.
On ne rencontre plus à cette époque d'empereurs fous comme Néron ou Caligula.


La plupart sont des empereurs du IV e siècle, et certains étaient quand même assez gratinés! Elagabale ou Carin ne resteront pas dans les annales pour leur valeur! Maintenant, il est vrai qu'il y eut de très bons empereurs, qui malheureusement ne furent pas toujours aidés par les circonstances comme Gallien qui fut un valeureux soldat ou Aurélien qui en 5 ans restaura l'Empire mais fut assassiné trop tot pour stabiliser totalement la situation.

Citer :
Les guerres civiles semblent moins meurtrières.


Pas d'accord, la bataille de Mursa en 351 entre Constance II et Magnence saigne litteralement à blanc les légions romaines. Le nombre de morts est énorme,la guerre entre Constantin et Licinius n'a pas fait de bien non plus à l'Empire, quant à la bataille d'Aquilée entre théodose et l'usurpateur Eugène, elle se solda par de lourdes pertes de part et d'autre. L'armée très affaiblie après Andrinople n'avait pas besoin de ça, même si ce furent surtout des contingents barbares qui combattirent.

Citer :
En revanche au 4° siècle c'est quand même la chute, notamment avec Honorius en occident.


C'est au Ve siècle que ça se passe.

Citer :
Mais au fond la question que l'on peut se poser est comment un empire aussi immense a t-il pu tenir aussi longtemps, compte tenu du fait que les jambes des hommes et des chevaux étaient le seul moyen de déplacement à l'époque.
Un si grand empire de l'Ecosse à l'Irak, du Portugal à la Bulgarie ne pouvait pas durer éternellement car trop dur à défendre.


Vous savez, il n'y avait pas qu'une armée qui parcourait tout l'Empire, les légions étaient disséminées aux frontières durant le Haut Empire, et par la suite fut crée le comitatus, des troupes de choc très mobiles qui patrouillaient dans l'Empire, prêtes à intervenir, tandis que les limitanei gardaient les frontières.

Citer :
De + peut-on considérer qu'il y avait vraiment des romains en dehors de Rome ?


Dès 212 l'Edit de Caracalla donnela citoyenneté romaine aux hommes libres de l'Empire...

Citer :
Cet empire était centrée sur une ville qui s'était imposée par une très dure conquête.
Il était un peu inévitable que les différents peuples, subjugués de force, ne fasse rien pour le défendre


95% d'entre eux étaient totalement intégrés à la romanité et étaient fiers d'être des Romains. Ils n'étaient pas exploités par Rome mais contribuaient et profitaient de son rayonnement. Pourquoi se seraient ils révoltés? Depuis 212 ils étaient citoyens romains. Etre romain présentait de très nombreux avantages, Rome n'était pas une métropole colonisarice et les provinciaux n'étaient pas des colonisés opprimés! Ce sont les menaces extérieures qui ont détruit l'Empire, ainsi que l'échec d'une assimilation rapide de fédérés germaniques trop nombreux.

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Victi, vincimus.


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Message Publié : 16 Nov 2005 0:00 
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Philippe de Commines
Philippe de Commines

Inscription : 17 Mars 2004 23:16
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D'accord avec vous Aurelianus, sauf sur le dernier point.

Je ne pense pas que 95% des hommes libres, effectivement citoyens depuis l'édit de Caracalla, étaient totalement intégrés à la romanité. Nous sommes excessivement influencés par l'historiographie antique qui nous fait imaginer que tout le monde vivait comme les élites romanisées et avait les mêmes références culturelles que les élites romanisées.

Pour des raisons économiques et sociales d'une part et culturelles d'autre part.

Sur le plan économique et social, la romanité était avant tout un phénomène urbain. Même s'il y a eu un exceptionnel niveau d'urbanisation sous l'empire romain, la grande majorité continuait de vivre à la campagne. Et la plupart des ruraux vivaient dans des conditions variant entre un seuil de subsistance péniblement atteint et la misère, voire la famine. Beaucoup de zones de l'empire n'étaient absolument pas intégrées dans les réseaux d'échanges lointain qui nous ont tant fasciné.
Il y avait une partie d'économie qu'on va qualifier de "développée", en tout cas qui permettait une certaine abondance pour les élites, grâce à l'esclavage.
Et il y avait une autre partie d'économie complètement archaïque, qui n'était qu'une économie de subsistance on ne peut plus basique et peu efficace.

Sur le plan culturel, tout le bassin oriental de la Méditerranée était de culture grecque, et la culture romano-latine n'a jamais réussi à y prendre le dessus.


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Message Publié : 23 Août 2006 13:45 
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Grégoire de Tours
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Inscription : 26 Juin 2006 20:03
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Pour paraphrasé Saint Augustin qui dit quelque chose de similaire: l'homme n'est pas éternel, il vit puis il meurt, et tout ce qui est fait par les hommes naît et meurt, ce qui est le cas de l'empire romain.

Cause plus rationel, à la fin de l'empire, il y eu plusieurs empereur jeune et donc incapable de régner vraiment, c'est notament le cas de Valentinien III (même il y avait des régents), qui est pour moi le dernier vrai empereur car malgré le désastre il avait encore une autonomie, mais probablement parce qu'il est né dans le luxe et le pouvoir, il était quelqu'un d'orgueilleux, sans sa mère et Aetius il n'était rien, ce qui ne l'empêcha pas d'assassiner ce dernier et de causer sa propre mort. J'en parle car c'est sous son règne que Rome chute définitivement.

Il y a aussi une autre cause non-négligeable: les romains, sur l'enssemble de l'empire était probablement assez nombreux pour vaincre tous les barbares réunis, mais pourquoi cette ressource humaine ne fût pas utilisé? Tout simplement parce que les pauvres devaient payer des impôts pour les riches, qui eux ne payaient pas d'impôts, quand on sait ça, on comprend pourquoi la majorité des romains qui étaient pauvres, n'étaient pas motivé de ce battre contre des barbares, qui eux n'avaient pas ces règles de taxe imposé aux pauvres.


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Message Publié : 31 Août 2006 9:54 
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Plutarque
Plutarque

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Localisation : Paris
Concernant le sujet de la chute de l'empire romain, je signale deux publications venant de sortir et vraiment très interessantes.

Le jour des barbares (Flammarion). Récit de la celebre victoire des goths sur les Romains à Andrinople le 9 aout 378 et véritable tournant historique, plus fort que la déposition de Romulus Augustule en 476, finalement plus anecdotique.

Et puis le numéro 94 de Sciences et Vie sur "La Chute Rome". De nombreux articles passionnants.

_________________
Charles-Audouin Pascaud


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