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 Sujet du message : Julian l'Apostat
Message Publié : 11 Jan 2005 9:18 
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Hérodote
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Inscription : 27 Déc 2004 19:33
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Quand en 361 Julian, dit l’Apostat, fut reconnu comme seul souverain de l'Empire, il avait abandonné déjà la religion chrétienne et revenu au paganisme de ses ancêtres.
Dès 361, l'empereur Julien promulgua un édit imposant la tolérance universelle, tant à l'égard des anciens cultes païens que pour les sectes et hérésies chrétiennes. Certains voient dans cette mesure une arme pour affaiblir le Christianisme. Quelques historiens chrétiens pensent que Julien, s'il avait régné plus longtemps, aurait persécuté les Chrétiens. Qu’est ce que vous pensez?

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La mort n'a qu'un instant, et la vie en a mille.
Richelieu


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Message Publié : 11 Jan 2005 20:40 
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Philippe de Commines
Philippe de Commines

Inscription : 17 Mars 2004 23:16
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Je pense qu'il faut avant tout conserver un esprit critique sur l'oeuvre de Jacques Benoist-Méchin, du moins de sa série sur le rève le plus long de l'Histoire.

Certes, ses ouvrages comportent des hypothèses intéressantes et tout à fait plausibles. Mais il y a un moment où, probablement sous l'effet de substances hallucinogènes :wink: , il plane complètement.

L'édit de tolérance de Julien était-il le prélude à de nouvelles persécutions contre les chrétiens ?

Je ne sais point mais cela aurait été tout à fait possible. Non pas tant en raison de la personnalité de Julien que de la logique même du pouvoir impérial.

Ce qui doit nous éclairer, c'est que cet édit de tolérance n'était pas le premier. Je veux dire par là que l'édit de Milan (313) n'avait à ma connaissance pas été abrogé.

Derrière les mots et les déclarations d'intentions, il faut donc observer les pratiques.

Le fait est qu'après l'édit de Milan, sans pour autant devenir la religion officielle ou la religion unique, le christianisme était la religion favorisée par les empereurs qui étaient chrétiens depuis la mort de Constantin (ses 3 fils). Grâce à la faveur impériale, le christianisme progressait beaucoup aux dépens des religions païennes traditionnelles.

Julien qui avait pour projet d'établir une espèce de dogme païen, en s'inspirant de certains aspects ou de certaines pratiques spécifiques au christianisme, voulait rénover le paganisme.

Si son objectif était de redonner vigueur au christianisme, il aurait forcément été conduit à abaisser les Eglises chrétiennes et la place que le clergé avait pu prendre auprès des instances du pouvoir.

Cela en soi, constituait une agression pour l'Eglise chrétienne. On comprend qu'à des fins polémiques, le retrait de la faveur impériale et la tentative de faire reculer le christianisme, même par des voies non-violentes, ait été dénoncé comme une persécution.

Selon moi, une véritable persécution aurait été possible si Julien avait constaté l'échec de sa politique de restauration du paganisme ou si le christianisme avait continué de progresser.


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Message Publié : 11 Jan 2005 21:44 
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Grégoire de Tours
Grégoire de Tours
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Inscription : 14 Avr 2004 1:48
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Localisation : Pas de Calais
On a tendance à accorder trop de crédit aux dires des sources chrétiennes de l'époque qui dépeignent Julien sous des traits peu flatteurs.
Ammien Marcellin ou Libanios, sans être objectifs, loin de là, nous permettent de nuancer ce portrait.

Il faut savoir qu'à Rome, malgré la politique de Constantin et de ses successeurs, le paganisme reste profondément ancré et très puissant. Julien n'a pas voulu éliminer le christianisme, ni dénaturer l'Edit de Milan, le christianisme reste toléré, mais il veut rendre sa place au paganisme, qu'il estime indissociable de la grandeur de Rome. Il me semble impossible, au vu du caractère même du souverain qu'il prévoyat une quelconque persécution, les Chrétiens étaient devenus bien trop importants et puissants à son époque. Sa politique n'eut cependant que peu de succès, surtout dans l'Orient romain. celà lui coûta peut-être la fidélité de son armée (sauf ses fidèles légions gauloises), et probablement la vie (certaines théories disent qu'il fut tué par un de ses soldats chrétiens, sans que ce fut explicite dans les sources --> voir plus bas)

On a tendance à occulter également le sort réservé par les chrétiens au païens à la fin du IVe siècle, qui n'étaient même plus tolérés sous Théodose. De nombreux historiens païens tels Ammien furent déchus sous la dynastie Valentinienne. Sans parler de persécution, nombre de grandes familles romaines, païennes, furent ravalés au rang de citoyens de seconde zone, et à ce titre, l'usurpation d'Eugène, manigancée par Argobast en 392, apparaît comme une tentative de surfer sur les vestiges du paganisme pour détrôner Théodose. Nombre de paîens de l'époque se raccrochèrent ainsi à Eugène comme à l'espoir chimérique d'une restauration des anciens rites païens, eux qui étaient, peut-être à raison, convaincus que le christianisme avait fait disparaître la Rome éternelle.


Pour finir, petit extrait de ma maîtrise sur les théories concernant la mort de Julien.

Citer :
C'est à la mi-juin, sous une chaleur accablante que débute la retraite. Harcelées par l'armée perse, les troupes romaines sont ralenties par des combats indécis, au cours desquels il est vrai, les Perses subissent des pertes importantes. Le 26 juin, au cours de l'un d'eux, Julien trouve la mort, portant à quatre le nombre d'empereurs romains tombés en Perse, et comme c'est le cas pour ses prédécesseurs, les circonstances de sa mort restent énigmatiques. Nous savons de façon sûre qu'il fut tué par la lance d’un cavalier non identifié, alors qu'il encourageait ses troupes sans porter d’armure. Plusieurs thèses sont émises par les auteurs, Ammien donne un récit détaillé de la mort de l'empereur, accusant implicitement des cavaliers perses en déroute . Théodoret avoue ne pas connaître la vérité, mais émet l’hypothèse d’un être invisible, un des nomades qui étaient appelés Ishmaelites ou encore d’un homme de troupe ne pouvant plus endurer les souffrances de la famine . Philostorgius rapporte qu'il fut tué de la lance d'un sarrasin allié des Perses . Libanius quant à lui, s'il ne connaît pas le nom de l'assassin est en revanche convaincu que ce n'est pas l'œuvre de l'ennemi car aucun n'a été récompensé pour avoir tué l'Empereur, il pense qu'il fut victime d'une conspiration dans ses propres rangs . Il est vrai que, mis à part les troupes gauloises, la plupart de ses soldats, en particulier les chrétiens, ne l'appréciaient guère

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Victi, vincimus.


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Message Publié : 11 Jan 2005 23:34 
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Tite-Live
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Inscription : 05 Juil 2003 19:40
Message(s) : 314
Localisation : Augustobona Tricassium (Troyes)
Caesar Scipio a écrit :
Je pense qu'il faut avant tout conserver un esprit critique sur l'oeuvre de Jacques Benoist-Méchin, du moins de sa série sur le rève le plus long de l'Histoire. Certes, ses ouvrages comportent des hypothèses intéressantes et tout à fait plausibles. Mais il y a un moment où, probablement sous l'effet de substances hallucinogènes , il plane complètement.


Pourriez-vous nous en dire un petit peu plus sur les hypothèses de Benoist-Méchin ainsi que sur ses "délires" (façon de parler...) en la matière, s'il vous plait?
Merci.

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"Nous autres civilisations, nous savons maintenant que nous sommes mortelles". Paul Valéry

"C'était à Mégara, faubourg de Carthage, dans les jardins d'Hamilcar". Gustave Flaubert


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Message Publié : 12 Jan 2005 8:24 
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Philippe de Commines
Philippe de Commines

Inscription : 17 Mars 2004 23:16
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Je faisais allusion à sa fixation sur le rève le plus long de l'Histoire, celui de la fusion de l'orient et de l'occident.

Benoist-Méchin prête à des personnages dont la plupart des personnages de l'Antiquité des préoccupations ou projets qui sont celles de notre époque contemporaine.

Je dois confesser que ma lecture de la plupart de ses oeuvres (Alexandre, Cléopatre, Julien, Frédéric II, ...etc) remonte à une dizaine d'années. Souvenirs donc très généraux sur ces oeuvres.

Mon impression globale est néanmoins la suivante. Comparé à des oeuvres d'historiens, l'oeuvre de Benoist-Méchin, c'est l'Histoire version Dallas (la série télé), et version collection Arlequin, le tout assaisonné de "délires", en effet. :wink:

Je me souviens que son Frédéric II est tout simplement distrayant à côté de la biographie qu'Ernst Kantorowicz a écrite.

Quand Alexandre le grand veut conquérir un empire et fonder les bases de son empire sur un condominium, sous son égide, entre le peuple macédonien et les élites perses (et seulement perses), Benoist-Méchin - comme bien d'autres dans sa foulée qui prennent leurs rèves pour des réalités de l'Histoire antique - en fait un projet de fusion de tous les peuples de l'humanité.

J'ai en revanche lu tout récemment son Cléopatre que j'ai acheté. La 1ère partie, sur César, est très bonne, même si elle émet certaines hypothèses plus qu'osées. Mais la seconde partie, sur Antoine, s'enfonce jusqu'à devenir à mon sens désastreuse. Avec des morceaux choisis du style "Cléopatre n'a plus que mépris pour cet homme, qu'elle continue néanmoins d'aimer mais qui ne se montre pas capable de se concentrer sur l'objectif prioritaire, la lutte contre Octavien, et d'y travailler avec intelligence."


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Message Publié : 12 Jan 2005 9:06 
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Hérodote
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Inscription : 29 Déc 2004 14:17
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À mon avis l'édit de tolérance de Julien n’était pas le prélude à de nouvelles persécutions contre les chrétiens. Certes que toute religion porte nécessairement en elle les germes de l'intolérance et au fanatisme mais Julien était bien un mystique. Un mystique païen, évidemment, mais un vrai mystique quand même, absolument convaincu de la vérité de sa foi, du bien-fondé de ses convictions, de l'utilité de sa politique religieuse et aussi de la réalité de ses visions. De plus, au cours de son bref règne, Julien avait déjà dû faire appel à toutes les ressources de sa philosophie pour garder son sang-froid face aux innombrables provocations chrétiennes. Par exemple, citons, entre autres :

- Profanation puis incendie du temple de Daphné, près d'Antioche.
- Destruction du temple de la Fortune à Césarée de Cappadoce.
- Destruction à Pessinonte, sous ses propres yeux, de l'autel de Cybèle, mère des dieux, une divinité à la gloire de laquelle il avait composé un traité.

Cependant, Julien ne se vengea de ces affronts que par un pamphlet génial, le Misopogon . Cette satire, autant dirigée contre sa propre personne que contre les frivoles habitants d'Antioche, constitue un véritable chef d'œuvre. Un document psychologique de tout premier ordre et de lecture très agréable.

Je ne puis résister à vous livrer un extrait de cet ouvrage :

"Quant au flot s'insultes que vous avez déversé contre ma personne dans vos couplets satiriques, tant en privé qu'en public, je vous autorise, en venant - comme je l'ai fait - de m'accuser moi-même, d'user encore dans ce domaine d'une plus grande franchise. Non, jamais je ne vous ferai pour cela le moindre mal : ni exécution, ni flagellation, ni fers, ni prison, ni punition. À quoi bon ! Puisque cette démonstration que, mes amis et moi, nous venons de donner d'une vie vertueuse, est pour vous dénuée de tout intérêt et parfaitement inopportune (…) j'ai décidé de quitter cette ville et de m'éloigner. Non que je sois convaincu, assurément, de plaire en tous points à ceux chez qui je me rends, mais parce que j'estime préférable, dans le cas où je n'obtiendrais pas chez eux la réputation d'homme de bien, de faire bénéficier chacun à tour de rôle de mon fâcheux caractère". (Julien, Misopogon, 37. Trad. Christian Lacombrade, Éd. "Les Belles Lettres", 1964).


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