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Message Publié : 02 Oct 2005 11:57 
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Eginhard
Eginhard

Inscription : 25 Mai 2004 21:35
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On a souvent dit que le principat mis en place par Auguste était un régime sans nom, une monarchie qui ne se disait pas.

Quels sont les fondements du pouvoir du prince?
A partir de 23 av JC, Auguste abandonne le consulat. Est-ce qu'il ne gouverne que par sa seule auctoritas que personne ne cherche à remettre en cause ou bien a-t-il des pouvoirs officiels?
Quels sont les évolutions des pouvoirs officiels et non-officiels des empereurs durant les deux premiers siècles de l'empire?


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Message Publié : 04 Oct 2005 20:12 
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Philippe de Commines
Philippe de Commines

Inscription : 17 Mars 2004 23:16
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Fondements juridiques du principat à entre 23 et 12 BCE ?

1 - l'imperium proconsulaire majus et infinitum, avec une particularité : le fait que Auguste avait "obtenu", par exception aux principes juridiques traditionnels, de conserver son imperium proconsulaire (qui n'est qu'un imperium militiae) à l'intérieur de pomoerium (l'enceinte sacrée et symbolique de l'Urbs, qui était inférieure à la surface couverte par la ville de Rome proprement dite). De cette façon, plus besoin de recouvrir des consulats

2 - la puissance tribunitienne, qui lui permettait de bloquer les décisions de tous les magistrats qu'il n'aurait pas approuvées (inutile de dire qu'en raison même de ce pouvoir, aucun magistrat n'osait prendre de décision contraire aux volontés d'Auguste. Sinon, le véto tribunitien du princeps aurait été un désaveu quasi mortel pour le magistrat en question).

A noter que la combinaison de cet imperium proconsulaire majeur et infini (qui ne tombait pas dans l'Urbs) avec la puissance tribunitienne qui s'exerçait partour et non pas seulement à Rome, donnait, "en creux", à Auguste à peu près les mêmes pouvoirs que César détenait avec le titre si honni de dictateur.

3 - le titre de prince du Sénat qui l'autorisait à donner son avis en premier. Or Auguste princeps, ce n'était pas la même chose que les principes du Sénat qu'il y a eu avant 49 BCE.

4 - le grand pontificat récupéré en 12 BCE à la mort de Lépide.


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Message Publié : 08 Oct 2005 18:32 
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Eginhard
Eginhard

Inscription : 25 Mai 2004 21:35
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Merci pour ces précisions

Caesar Scipio a écrit :
1 - l'imperium proconsulaire majus et infinitum, avec une particularité : le fait que Auguste avait "obtenu", par exception aux principes juridiques traditionnels, de conserver son imperium proconsulaire (qui n'est qu'un imperium militiae) à l'intérieur de pomoerium (l'enceinte sacrée et symbolique de l'Urbs, qui était inférieure à la surface couverte par la ville de Rome proprement dite). De cette façon, plus besoin de recouvrir des consulats

Cet imperium proconsulaire s'appliquait-il aux provinces sénatoriales? Quant à l'Italie, qui n'était pas une province, qu'en était-il?

Et quelle est l'évolution de ces pouvoirs au cours de l'histoire de l'empire romain? L'imperium proconsulaire et la puissance tribunicienne restent-ils les deux fondements principaux du pouvoir impérial ou bien y a-t-il un changement des institutions, une redéfintion des institutions? Le principat va-t-il devoir garder durant toute son existence ce caractère caché, non avoué?


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Message Publié : 10 Oct 2005 23:11 
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Philippe de Commines
Philippe de Commines

Inscription : 17 Mars 2004 23:16
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La recherche historique a montré que l'hypothèse de Mommsen, celle d'une séparation entre les provinces impériales et les provinces sénatoriales, était erronée.

Il y avait en réalité les provinces de l'empereur et celles du peuple. Mais en outre, l'empereur pouvait intervenir dans les provinces du peuple (celles dont les gouverneurs étaient des proconsuls ou des propréteurs, par opposition aux légats, aux préfets ou aux procurateurs des provinces impériales).

Pourquoi ? Parce que son imperium supérieur à celui de tous les autres magistrats ou promagistrats lui permettait d'intervenir partout. Il n'y avait pas de cloisonnement hermétique entre les 2 catégories de provinces : ces 2 catégories visaient surtout à distinguer le mode de désignation des gouverneurs. Le contrôle de l'empereur était plus direct et plus étroit sur les provinces ou étaient stationnées des armées légionnaires.

Hors le pomérium, donc y compris en Italie, l'imperium d'Auguste s'appliquait. Dans l'enceinte sacrée et symbolique de la ville, dans ses relations avec les citoyens de l'Urbs (ainsi d'ailleurs qu'avec tous les citoyens romains puisqu'à la différence des tribuns de la plèbe, le princeps exerçait sa puissance tribunintienne dans ses relations avec tous les citoyens et pas seulement avec ceux vivant dans la ville de Rome), c'est surtout par sa puissance tribunitienne qu'il exerçait légalement son pouvoir.

La puissance tribunitienne restent bien le fondement du régime impérial. Tous les empereurs datent leur pouvoir en fonction de leurs années de puissance tribunitienne. Et imperator est le terme principal de leur titulature. Ce n'est pas pour rien que les termes "empire" et "empereur" se sont imposés et sont passés à la postérité.

Ceci dit, les institutions ont bien sûr évolué, comme toutes les institutions. Il y a eu un glissement du pouvoir et, au fur et à mesure que le principat d'enracinait, la dimension monarchique du pouvoir de renforçait et il était moins nécessaire de la cacher. Les empereurs ont ainsi formellement pris avec Domitien puis conservé définitivement la puissance censorienne perpétuelle qu'ils n'exerçaient auparavant qu'au cas par cas. Contrairement à l'image d'Epinal des Antonins prétendus restaurateurs d'un régime plus modéré et plus républicain, la tendance à la divinisation de la fonction et de la personne impériale n'a cessé de se développer.

Je ne sais pas si on peut dire de telle manière que le principat a été un régime caché. Le principat était plutôt une fiction visant à rendre acceptable pour les anciennes classes dirigeantes de la ville romaine la réalité d'un pouvoir où l'élément monarchique était devenu dominant.


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Message Publié : 16 Oct 2005 20:52 
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Eginhard
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Inscription : 25 Mai 2004 21:35
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Caesar Scipio a écrit :
Je ne sais pas si on peut dire de telle manière que le principat a été un régime caché. Le principat était plutôt une fiction visant à rendre acceptable pour les anciennes classes dirigeantes de la ville romaine la réalité d'un pouvoir où l'élément monarchique était devenu dominant.

A partir du moment où Auguste avait suffisamment assis son pouvoir, acquis un prestige et une supériorité qui dépassait de si loin ses congénères, et même à partir du moment où le principat s'était suffisamment enraciné au Ier siècle, quelle était l'utilité de continuer à ménager ces anciennes classes dirigeantes de la ville et donc de déguiser ce pouvoir pour le leur rendre acceptable?
Y avait-il un vrai risque pour un empereur de la fin du Ier siècle ou du IIè siècle s'il avait clamé haut et fort la vraie nature de son pouvoir? Les élites sénatoriales avaient-elles encore quelque moyen de s'opposer à cette monarchie?


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Message Publié : 16 Oct 2005 22:14 
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Philippe de Commines
Philippe de Commines

Inscription : 17 Mars 2004 23:16
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Contrairement à une idée reçue, les peuples n'aiment ni les révolutions ni les tables rases. C'est plutôt le mythe d'un passé idéalisé et d'un retour à l'âge d'or qui a la vie dure.

Quelle était l'utilité pour Auguste de continuer de ménager les anciennes classes dirigeantes et de déguiser ce pouvoir pour le leur rendre acceptable ?

Je ne peux qu'émettre des variantes sur des hypothèses et analyses déjà développées par les historiens.

Pour être solide, un pouvoir doit être un minimum acceptable.

Le peuple des citoyens romains, tout particulièrement celui des habitants de l'Urbs, était attaché à un régime mal défini appelé la république. Parce qu'il était persuadé que c'était ce régime qui avait fait la grandeur de leur cité, petite bourgade du Latium devenue en quelques siècles la maîtresse du monde. Même si le régime républicain était un régime oligarchique de classes très inégalement hiérarchisées (principe d'égalité géométrique), les citoyens romains se considéraient comme des hommes libres et en tiraient une grande fierté, par comparaison à ceux qui vivaient sous un roi qui était un maître.

Personne ne sait ce qu'aurait finalement été la solution institutionnelle adoptée par César s'il n'avait pas été assassiné en 44. En revanche, le succès de son assassinat a conduit à la conclusion (à mon sens erronée car fortuite) que son système de pouvoir était trop ouvertement monarchique pour être acceptable.

Surtout au gré des circonstances, Auguste a eu le coup de génie (comme César l'avait lui-même commencé en se présentant en restaurateur des moeurs vertueuses et austères) d'habiller son pouvoir sous la forme d'une restauration. Mais la restauration n'a jamais existé autrement que sous la forme d'une propagande. Et personne d'informé et d'éduqué n'a jamais été dupé de la prétendue restauration. Ce qui était finalement le plus important pour tous, c'était le retour de la paix civile après 19 ans de guerre civile et un siècle de discordes civiles.

D'une certaine façon, en étant de fait un monarque et de droit un magistrat défenseur du peuple (puissance tribunitienne), Auguste faisait coup double et garantissait un pouvoir monarchique en le rendant institutionnellement populaire puisque les tribuns avaient toujours été les défenseurs du peuple face au pouvoir des magistrats aristocrates. Et il puisait dans des termes anciens et familiers pour habiller son pouvoir nouveau.


Y avait-il un risque pour un empereur de la fin du Ier siècle ou du IIè siècle s'il avait clamé haut et fort la vraie nature de son pouvoir?

Il y avait un risque pour tout empereur qui clamait haut et fort son pouvoir ou qui le cachait. Auguste, présenté comme le modèle du monarque caché a été l'objet de nombreux complots qui ont tous échoué. Ma théorie est que, de l'échec de ces complots bien réels mais ni plus ni moins que celui des ides de mars 44, on a conclu à tort que le pouvoir monarchique plus discret d'Auguste était accepté et plus acceptable que le pouvoir monarchique moins caché que César.
La différence notable entre les 2 pouvoirs, c'est qu'Auguste était beaucoup plus méfiant que son grand-oncle trompe-la-mort, pressé et trop agacé par les résistances à son pouvoir pour prendre conscience que des hommes sans espoir réel ni projet vraiment réfléchi iraient jusqu'au bout d'un complot dont il pensait qu'il serait nuisible à l'Etat et au peuple.


Les élites sénatoriales avaient-elles encore quelque moyen de s'opposer à cette monarchie?

Pas vraiment selon moi. Sauf dans le cas où un empereur trop maladroit se serait coupé du soutien populaire à Rome même et dans les armées.


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Message Publié : 22 Oct 2005 19:09 
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Polybe
Polybe

Inscription : 22 Oct 2005 12:54
Message(s) : 105
Je dirai pour ma part qu'il faut voir aussi "l'auctoritas" qui est un fondement juridique informet fondamental

Le Princeps a une autorité telle qu'on ne peut attaquer ses décisions et dès Auguste la cause est étendue le Sénat je pourra jamais récupérer la réalité du pouvoir

_________________
Ma vie est pour toi, mon sang pour l'Empereur et toute ma vie à l'honneur


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