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Message Publié : 26 Mai 2016 16:06 
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Pierre de L'Estoile
Pierre de L'Estoile
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Bonjour,
On était parti sur le physique des germains, et on a dérivé sur leur organisation sociale et politique aussi pour ne pas perdre cette discussion trés intéressante et la prolongée je vouspropose ce fil :

Almayrac a écrit :
Brennus a écrit :
une société sans pouvoir exécutif fort, aux communautés dispersées, et très attachée à la principale institution des sociétés germaniques traditionnelles: l'assemblée des hommes libres. Même l'aristocratie (qui n'existe pas en Islande où se sont installés beaucoup de familles fuyant justement la mise en place d'un Etat royal en Norvège) avait un pouvoir plus que relatif, et soumis aux aléas et fluctuations de sa clientèle. On retrouve exactement le même fonctionnement général chez les Celtes et les germains antique (si on se réfère à Tacite).


Est-ce que cet état primitif de la société : l'assemblée des hommes libres, à quelques chose à voir avec l'organisation primitive de la cité grecque ? Sachant que les grecs ont établis des comptoirs sur la route de l'ambre, n'y aurait-il pas eu une influence ?


Pédro a écrit :
Je ne crois pas qu'il faille voir partout des influences. Les civilisations humaines ont été creatrices ade systemes politiques au sein desquels on perçoit similitudes, proximités et divergence. L'assemblée des hommes libres en armes se rencontre largement dans les sociétés anciennes pour ne pas chercher partout de la cité classique. A mon sens ça serait comme dire que le système de don contre don que l'on rencontre très largement aurait été influencé par la féodalité. Je caricature mais c'est faire ressortir l'idée d'évolutions convergente qui me semble plus porteuse.


Brennus a écrit :
Citer :
Est-ce que cet état primitif de la société : l'assemblée des hommes libres, à quelques chose à voir avec l'organisation primitive de la cité grecque ? Sachant que les grecs ont établis des comptoirs sur la route de l'ambre, n'y aurait-il pas eu une influence ?


Je pense qu'il faut faire attention en parlant "d'état primitif". Cela laisse penser à une linéarité, voire comme je le disais, à un déterminisme, qui est au mieux illusoire.

Je pense qu'une société peu passer de l'un à l'autre, puis de l'autre à l'un en fonction des circonstances. Lors d'une période de troubles ou de changement, une société a peut-être d'avantage tendance à s'en remettre à une élite guerrière tandis qu'une période plus stable amène une plus grande partie de la société à revendiquer des responsabilités et un pouvoir de décision.

Les cités grecques ont eu le mécanisme inverse, chronologiquement, que les celtes ou les germains: de systèmes aristocratiques/ royaux, on passe à des systèmes où l'assemblée, qu'elle soit oligarchique, aristocratique ou démocratique, prime sur les éxécutants.

On sait peut de chose de l'organisation politique des Celtes/Gaulois, mais ils semblent être allé de l'un à l'autre au long du Ier millénaire: princes du Hallstatt, aristocratie guerrière à la Tène (l'assemblée des hommes libres devaient y tenir une place importante) mais mêlée de royauté, royauté celtique bien spécifique (en Irlande, les rois, qui règnent sur de tous petits territoire, sont élus par l'assemblée.... comme chez les germains, il peut être sacrifié, en tant que garant de l'harmonie entre le spirituel et le temporel, si la situation est mauvaise durant son règne), et système oligarchique basé sur un "sénat" et des magistrats avec la civilisation des oppida.

Mais je pense qu'on ne peut pas parler "d'état primitif": une société s'organise en fonction des aléas et des circonstances et de tout l'affect et le passif de ses composantes qui décident ou non de s'organiser de telle manière à un instant T. Seul l'Orient, l'Asie, et les civilisations précolombienne se sont dôté dès le début d'institutions rigides où le monarque est tout puissant et inaliénable. Au point où on se demande si cette assemblée des hommes libres n'est pas une spécificité indo européenne (sachant que beaucoup de civilisation dites prilmitives ont une organisation sociale qui s'en rapproche, où le conseil des anciens ou autre type d'assemblée est primordial dans la prise de décision).

Le seule état "primitif" d'une société, le dénominateur commun de toute société en tous temps et en tous lieux, la cellule de base, sa composante inaliénable, c'est la famille....... Le reste est lié à de nombreux facteurs dont les repères culturels et moraux, la démographie, la violence........etc. Et il faut se rappeler que dans les sociétés germaniques antiques et médiévales, l'homme libre n'a d'existence qu'à travers son clan ou sa parentèle. Chez les Scandinaves, une personne sans parentèle, sans attache familiale est un "vagr", un errant, et n'a quasiment aucune existence juridique.


Pédro a écrit :
En Orient ou dans d'autres sphère civilisationnelles ce qui manque sans doute ce sont des traces claires de systèmes antérieurs, et pour cause, au moyen orient on parle de périodes très reculées dont les sources correspondent, comme en Egypte d'ailleurs à l'époque où s'est constitué un pouvoir central fort.

En tout cas vous faites bien de le rappeler ; il n'y a pas de linéarité dans le processus et on ne sort pas d'une organisation ridicule et primitive pour s'élever vers les lumières de la civilisation.

De nombreux paramètres peuvent expliquer la formation d'une nouvelle entité politique et ces facteurs peuvent être assez conjoncturels, donc peu anticipables dans un modèle. On peut cerner des mécaniques mais on ne peut pas dégager des lois absolues.

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Message Publié : 26 Mai 2016 16:18 
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Pierre de L'Estoile
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Brennus a écrit :
en Irlande, les rois, qui règnent sur de tous petits territoire, sont élus par l'assemblée.... comme chez les germains, il peut être sacrifié, en tant que garant de l'harmonie entre le spirituel et le temporel, si la situation est mauvaise durant son règne

Avez vous des exemples (Celtes et Germanique) sur ce sujet ?

Je connaissait la légende mais à part dans le folklore je n'ai rien trouvé.

la légende des rois "claudiquant" (les Chlodomir, Chlovis etc...) se sont des rois dont on luxait la hanche pour les empêcher de fuir sans être rapidement ratrapé en cas de faillite du peuple (famine, peste, etc...). On les retrouve figurés la main sur la hanche comme dans les cartes du tarot de Marseilles par exemple.
Est ce qu'il y a une source qui confirme l'origine de cette légende.

Dans quelle mesure avaient-il des comptes à rendre avant d'être sacrifié ?

Quelle autorité était en mesure d'ordonner le sacrifice ?

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Message Publié : 26 Mai 2016 18:32 
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Jean-Pierre Vernant
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Almayrac a écrit :
en Irlande, les rois, qui règnent sur de tous petits territoire, sont élus par l'assemblée.... comme chez les germains, il peut être sacrifié, en tant que garant de l'harmonie entre le spirituel et le temporel, si la situation est mauvaise durant son règne


Cela me fait repenser à mes cours d'ethnologie à la fac. Le prof nous avait montré combien, dans certaines sociétés, les chefs sont pratiquement sans autorité et doivent offrir beaucoup pour recevoir bien peu dans les relations de don. Il nous avait pris l'exemple des eskimos dont les chefs, pour être élus par la communauté devaient rassembler des richesses à partager entre tous. Ils avaient des sortes de pouvoir d'arbitrage mais risquaient de se faire zigouiller en cas de mécontentement vis à vis de leurs jugements...

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Scribant reliqua potiores, aetate doctrinisque florentes. quos id, si libuerit, adgressuros, procudere linguas ad maiores moneo stilos. Amm. XXXI, 16, 9.


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Message Publié : 27 Mai 2016 6:40 
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Grégoire de Tours
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Almayrac a écrit :
la légende des rois "claudiquant" (les Chlodomir, Chlovis etc...) se sont des rois dont on luxait la hanche pour les empêcher de fuir sans être rapidement ratrapé en cas de faillite du peuple (famine, peste, etc...). On les retrouve figurés la main sur la hanche comme dans les cartes du tarot de Marseilles par exemple.
Est ce qu'il y a une source qui confirme l'origine de cette légende.


Je n'avais jamais entendu parlé de cette légende, si elle existe réellement. Hormis évidemment pour Sigebert le Boiteux, roi franc de Cologne cité par Grégoire de Tours, mais se pourrait que ce ne soit qu'une mauvaise interprétation pour son surnom Sigebertus (sive) Cludio, id est Sigebert dit Clodion, prit pour un adjectif.


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Message Publié : 27 Mai 2016 11:42 
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Pierre de L'Estoile
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Laurent Frédéric a écrit :
Almayrac a écrit :
la légende des rois "claudiquant" (les Chlodomir, Chlovis etc...) se sont des rois dont on luxait la hanche pour les empêcher de fuir sans être rapidement ratrapé en cas de faillite du peuple (famine, peste, etc...). On les retrouve figurés la main sur la hanche comme dans les cartes du tarot de Marseilles par exemple.
Est ce qu'il y a une source qui confirme l'origine de cette légende.


Je n'avais jamais entendu parlé de cette légende, si elle existe réellement. Hormis évidemment pour Sigebert le Boiteux, roi franc de Cologne cité par Grégoire de Tours, mais se pourrait que ce ne soit qu'une mauvaise interprétation pour son surnom Sigebertus (sive) Cludio, id est Sigebert dit Clodion, prit pour un adjectif.


ça ne m'étonne pas qu'un jeu de mot, ou d'une confusion entre le latin et le tudesque soit à l'origine d'une légende, c'est assez fréquent dans les mythes et le folklore. Cludio dans ce cas est un adjectif, en tudesque Hlod = gloire, soit Sigbert le glorieux avec la confusion du latin Claudicare = claudiquer, ça devient pour des générations de moine copistes Sigbert le boiteux :wink:

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Message Publié : 27 Mai 2016 12:20 
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Jean-Pierre Vernant
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Inscription : 08 Juin 2009 10:56
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C'est assez typique des tentatives d'explication linguistiques médiévales.

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Message Publié : 29 Mai 2016 11:50 
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Grégoire de Tours
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Citer :
Avez vous des exemples (Celtes et Germanique) sur ce sujet ?

Je connaissait la légende mais à part dans le folklore je n'ai rien trouvé.


Il me semble qu'il y en a dans la saga des rois de Norvège, notamment parmi les semi légendaire Ynglingar de Suède.

Mais c'est un thème courant de ces civilisations: le roi incarne le lien entre le divin et les hommes. En tant que tel, il est le garant de la prospérité de son peuple. Dans les légendes irlandaises, lorsque le roi gouverne bien, les animaux sont très féconds, on fait des récoltes miraculeuses, et la nature en général est très généreuse. A contrario un roi "mauvais" voit son règne marqué par les calamités, famine, épidémies, guerres..... Le roi est responsable de ces calamités. Entre un bon roi, cela veut dire être généreux, redistribuer efficacement les richesses et être victorieux à la guerre.

On retrouve ce motif en filigrane dans la légende du roi Arthur et de la quête du Graal (c'est très bien mis en avant dans le film de Borman) qui sont avant tout issus de mythes celtiques (galois surtout) qui ont été ajouté de thèmes chrétiens et médiévaux tout au long du Moyen Age.

Ce motif mythique reflète simplement le très faible pouvoir du roi dans ces sociétés. Le pouvoir n'est pas conçu comme monolithique et unique et encore moins absolu. C'est pour cela que ces peuples n'avaient pas l'idée de constituer de véritables Etats: que ce soient les tuath irlandais, les petits royaumes scandinaves, on a jamais réellement d'administration de ce territoire: on est dans un système avant tout privé, basé sur un clientélisme qui repose sur la possession des richesses, du bétail surtout pour les Celtes insulaires, de la puissance guerrière, du contrôle des axes commerciaux (c'est le cas des princes du Hallstatt qui étaient probablement des sortes de roitelets "à l'irlandaise", bref, tout ce qui permet de s'assurer des richesses à redistribuer, et ainsi conserver sa clientèle et son influence.

Tant qu'un puissant personnage est capable de conserver autour de lui suffisamment de richesses, on le laissera à loisir être roi. Mais qu'il perde cette influence, qu'il fasse preuve d'avarice, de faiblesse.... et il peut tout à fait être destitué, sachant que cette destitution prend souvent une forme plutôt macabre.......; Et ça n'est pas propre aux germains et celtes. Jusqu'à une époque avancée de la République, Rome n'était pas tendre avec ses dirigeants qui avaient faillis ou qui étaient soupçonné de remettre en cause les institutions républicaines. Chez les Grecs, à Athènes, ostraciser le dernier homme fort en date était quasiment devenu une institution et certains furent jugés et condamnés après leurs mandats (la fin de ce "pauvre" Miltiade, vainqueur à Marathon, mort de la gangrène dans une geôle athénienne).

Après, celtes et germains avaient conservé les aspects religieux et mythique de la fonction royale. Mais ce n'est guère que l'imperium romain, inspiré de modèles orientaux, qui finit par sacraliser la personne du dirigeant. Le Christianisme parachèvera cette conception monolithique et très hiérarchisé du pouvoir, où le dirigeant est "lieutenant de Dieu sur terre". Alexandre non plus ne s'y était pas trompé en se proclamant pharaon. Dans le modèle indo européen, le pouvoir est partagé et même dans un régime monarchique, le pouvoir du roi est très relatif, on est loin du dieu roi oriental.

Mais il faut se garder d'imaginer que les sociétés Celtes ou germaniques étaient des sociétés plus ou moins démocratiques. Tous les hommes libres participent à l'assemblée, mais le système de clientélisme fait que l'aristocratie guerrière, ou tout du moins certaines familles dominantes, prend l'essentiel des décisions. Cependant, comme je le disais, il n'y a aucun appareil d'Etat, aucune administration, aucune police ("l'armée" n'est que l'assemblage des clientèles des plus puissants, tout hommes libre, chez les gaulois par exemple, devant paraître armé aux assemblées), et on ignore tout d'une éventuelle fiscalité (excepté les rentes et dons que l'on tire de ses propriétés). Femmes, enfants et esclaves sont bien entendu exclus de l'assemblée.

Ces sociétés sont donc un assemblage de petites communautés qui vivent en fonction de liens privés et d'un droit plus ou moins coutumier décidé et tranché en assemblée. Ces assemblée sont d'ailleurs autant des institutions politique que des foires, des cours de justice et de grandes fêtes plus ou moins connotées religieusement.


Citer :
Le prof nous avait montré combien, dans certaines sociétés, les chefs sont pratiquement sans autorité et doivent offrir beaucoup pour recevoir bien peu dans les relations de don. Il nous avait pris l'exemple des eskimos dont les chefs, pour être élus par la communauté devaient rassembler des richesses à partager entre tous. Ils avaient des sortes de pouvoir d'arbitrage mais risquaient de se faire zigouiller en cas de mécontentement vis à vis de leurs jugements...


On est très proche de ce que devait être le roi celte, germain ou scandinave. Et effectivement, on exigeait beaucoup d'un roi et il avait peu de réelles prérogatives en retour (et quand on parle de roi, il en va de même pour les autres incarnations personnelles du pouvoir de ces société: tiern irlandais et autres jarl scandinaves.... il n'y avait d'ailleurs pas beaucoup de différences avec ce qu'on appelait un roi).


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