GrandsPins a écrit :
C'est bien le problème: beaucoup de ces soi-disant patriotes qui voulaient punir l'acte de trahison et d'espionnage ont soit sciemment fermé les yeux sur les culpabilités avérées et complicités dont a bénéficié Esterhazy, soit y ont participé activement, notamment Sandherr.
Ce ne sont que ceux qui arpentaient les parquets du 2nd bureau qui savaient ce qui c'était vraiment passé et encore, pas tous. En succédant à un Sandheer malade, Picquart n'a même pas été informé par Henry de la plupart des affaires sensibles dont s'occupait alors le 2nd bureau. Ce dernier ne semblait d'ailleurs pas fonctionner comme un service normal d'une administration publique, tant l'opacité régnait.
De plus, selon certains historiens, Esterhazy aurait été une sorte d'agent double chargé d'intoxiquer les services allemands, mais les preuves manquent pour étayer cette théorie. Ce qui est certain c'est que le fait qu'il ait pu couler ainsi ses vieux jours tranquillement à l'étranger n'est pas anodin : il a dû rendre des services qui ont pu le protéger. A savoir même si ce fameux "bordereau" n'était pas un faux dont le but était de placer le contre-espionnage allemand sur une piste erronée.
GrandsPins a écrit :
Sandherr, Esterhazy, du Paty de Clam, Henry, Gonse, Mercier, Billot, de Pellieux et Boisdeffre
Je pense qu'il ne faut pas mettre tout le monde dans le même sac.
Sandheer et Henry sont deux parjures par excellence car c'est de la manière dont ils ont mené certaines affaires lorsqu'ils étaient responsables du 2nd bureau. Paty du Calm était un officier zélé rompu aux habitudes douteuses qui semblaient régner au sein du 2nd bureau. Je rappelle qu'il avait conclu au manque de preuves pour poursuivre Dreyfus, mais la
Libre Parole était déjà entrée dans la danse, puis Mercier semble avoir ajouté une pression venue d'en haut.
Gonse a souhaité étouffer l'affaire une fois l'innocence de Dreyfus prouvé par Picquart, c'est clair, mais pas Boisdeffre, qui ne s'en ai jamais occupé. En tant que chef de l'EMA il ne s'est pas intéressé à cela et a laissé Gonse à la manoeuvre, ce qui s'est révélé être finalement une lourde faute.
Mercier a agi comme un politique : persuadé de la culpabilité de Dreyfus pour des motifs politiques et, finalement, d'orgueil, il ne cessera de l'incriminer même lorsque son innocence fut prouvée. Plus obtus et buté, on n'a vu personne d'autre de sa trempe. C'est lui qui a fait pression pour qu'on ne cesse de poursuivre le capitaine Dreyfus en 1894, alors que des doutes planaient déjà au sein du 2nd bureau.
GrandsPins a écrit :
les autres conspirationnistes
Dans ces cercles étroits du contre-espionnage, que seuls certains connaissent bien (et certainement pas un Mercier, un Boisdeffre ou un Billot), il n'y a pas de place pour une véritable conspiration. Des pratiques douteuses, malhonnête et opaques ont été menées pour condamner un pseudo-coupable auteur d'un document dont la véracité reste encore à prouver. Leur choix s'est finalement fixé sur un innocent, le ministre en ajoute une couche : pas de doute, c'est bien lui ! Nous sommes en 1894.
Le politique et les instances supérieures de l'armée ont préféré ne pas rouvrir l'enquête pour ne pas déshonorer l'armée française, quitte à pousser les mensonges toujours plus en avant (comme le "faux-Henry", tellement grossier qu'on peut encore se demander aujourd'hui comment il a pu "passer" au départ...) et à se déconsidérer devant l'opinion publique - là, le rôle de Gonse semble patent. Nous sommes en 1898 (Gonse n'était pas en 1ère ligne en 1894, il apparait en 1895-1896 lorsque Picquart vient le chercher, mais là encore il adopte une attitude contradictoire : il semble tout d'abord suivre Picquart pour mettre en accusation Esterhazy, puis se rétracte : lui a-t-on fait comprendre qu'Esterhazy avait agi sur ordre ? dans quel but ? maintenant que le scandale risque de devenir public, que faire ?).