Vous restaurez là un sujet un peu ancien...
Pour répondre à vos questions :
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On voit bien que c'est l'Allemagne qui est le véritable acteur permettant "d'Européanniser" le conflit puisque sans sa participation la France ne voudra pas entrer en guerre.
La réponse est clairement oui, vous l'avez bien compris. C'est pour cela que ceux qui affirment, ailleurs, que l'Allemagne espérait un conflit local en 1914 n'ont rien compris à la période, tout simplement. Avec sa position hégémonique politiquement et militairement, tout acte décidé et réalisé à Berlin avait des répercussions, par ricochets, sur les autres grandes puissances européennes, alliées ou non à l'Empire d'Allemagne. Les diplomates et militaires allemands le savaient bien.
La France n'aurait pas bougé si l'Allemagne n'était pas de la partie au moment de la crise austro-serbe, l'Angleterre sans doute pas davantage.
C'est le soutien apporté par Belin à Vienne qui entraine l'engrenage, chose qui ne s'était pas vraiment produit en 1908 - encore que ce sont les Russes qui s'étaient "dégonflés", donc Berlin n'a pas eu à gronder pour appuyer Vienne et Pest.
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L'Allemagne était-elle prête, opérationnelement, à entrer en guerre et appliquer le plan schlieffen ? Qu'elle était l'état de son armée ? Même question relativement aux autres armées mais surtout française
Sans entrer dans des chiffres précis, cette course aux armements est connue. C'est l'Allemagne qui l'inaugure dès 1875 afin d'avoir une puissance militaire capable de maintenir son existence (l'Empire s'est fait par la guerre comme nous le savons tous) et qu'aucune puissance ne puisse contester son hégémonie sur le continent. Les autres pays suivent ensuite la cadence, même l'Italie se ruine pratiquement au début des années 1890 pour suivre le
forcing mené au sein de la Triplice.
La France se jette aussi dans la course, d'abord pour reconstituer une armée digne de ce nom (entre 1872 et 1890 essentiellement), puis pour "coller" à la puissance rivale d'outre-Rhin. Certains spécialistes militaires estiment - du moins c'était l'opinion de Moltke à l'époque - que 1887 était la dernière année où l'Allemagne dépassait encore nettement la France d'un point de vue militaire (armement et organisation). On sait ce qu'a tenté de faire Bismarck à cette date...
Cette course aux armements - mêlée à la création de deux blocs en Europe - contribue finalement à un effet de dissuasion. C'est l'équilibre de la terreur et malheur à celui qui osera mettre le feu aux poudres ! Aujourd'hui on enseigne souvent les deux systèmes d'alliances comme représentatifs d'une volonté d'en découdre d'un côté comme de l'autre, rien n'est plus faux ! Ces deux systèmes ont été d'abord pensés pour offrir un équilibre en Europe et préserver la paix. Cela a tout de même tenu pendant plus de 20 ans...
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Autre élément, en 1914 les hommes politiques de tous les pays savaient qu'une guerre allait éclater, il y avait comme une sorte de résignation. Etait ce le cas en 1908 ?
Non, pas vraiment. En lisant les dépêches diplomatiques de la période 1871-1914, on peut se rendre compte que le ton est à peu près identique en 1887, en 1908, voire en 1914, bref à chaque grande crise européenne. En réalité, les Français et les Allemands redoutent une guerre depuis la fin de la dernière, c'est-à-dire celle de 1870-1871... Pourquoi en 1914 cela explose ? je serai tenté de dire que c'est d'une part parce que les Russes ne veulent plus avaler de nouveaux plats indigestes concoctés à la sauce berlinoise et viennoise et parce que la politique extérieure allemande menée depuis 1898 n'a fait que de lui fabriquer de nouveaux ennemis. Jamais au début des années 1890, on aurait pensé l'Angleterre disposé à tirer son épée du fourreau contre l'Allemagne, la Roumanie se rapprocher de Saint-Pétersbourg, encore moins l'Italie faire défection à son puissant allié.