Karolvs a écrit :
Oui. Le Zollverein a permis de prendre conscience de l’intérêt qu’il y aurait à unifier l’Allemagne
Goya a écrit :
S'ils ont choisi à ce moment de faire une union douanière , c'est qu'ils ne souhaitaient pas plus.
Vous vous trompez.
Que faites vous de la confédération d’Allemagne du Nord ?
En vérité, une majorité d’Allemands souhaitaient plus. Un opposant libéral de Mayence, critiquant l'alliance de son Prince Electeur de Mayence avec la "bureaucratique et particulariste" armée de son voisin de Hesse-Darmstadt, a dit ceci : «Je préfère la plus dure des armées prussiennes à cette misère micro-étatique » ("Lieber das schärfste preußische Militärregiment als diese kleinstaatliche Misere." Cette opinion était assez largement partagée en Allemagne. La majorité des Allemands (on appelait ce « parti » les "néo-prussiens" ont salué leur annexion avec plus de soulagement que de réticence, malgré la politique aggressive de Bismarck.
Goya a écrit :
Donc ils n'ont pas voulu être une " puissance " mais seulement améliorer leurs échanges économiques.
«Donc » ils n’ont pas voulu être une puissance ?
En histoire, il faut se méfier de la conjonction de coordination « donc ».
Pourquoi, selon vous, les Etats allemands ont-ils voulu améliorer leurs échanges commerciaux ? Pour faire joli ?
Goya a écrit :
Comment s'est ensuite fait le passage à une toute autre conception ? Est-ce par des "prises de conscience " ? Ou par la montée en puissance d'un lobby qui voulait autre chose ? L'émergence d'un lobby militaro-industriel ?
Il n’y a pas eu de passage d’une conception de l’Allemagne (Zollverein) à une autre conception de l’Allemagne (unification), déclenchée par une subite « prise de conscience ».
Les Allemands étaient conscients de la «misère micro-étatique » depuis assez longtemps.
Par ailleurs, Zollverein (union douanière) et unification ont ceci de commun, qu’ils consistent tous deux, en quelque sorte, à «supprimer» des frontières intérieures. Le Zollverein n’était pas une autre conception ; c’était un pas vers l’union.
Goya a écrit :
Vous avez dit dans un autre message :" N’oubliez tout de même pas que la politique qui a été menée après l'unification de l'Allemagne a induit de réels progrès économiques et sociaux pour les Allemands "
On a dit la même chose de Hitler...Les autoroutes...Les Volkswagen...Du travail pour tous... Mais au sein d'une société embrigadée qui prépare la guerre !
Attention aux amalgames… vous raisonnez comme si le IIème reich (empire des kaisers) et le IIIème Reich (régime nazi) étaient peu ou prou le même type de régime.
Certes, les deux régimes étaient autoritaires et aucun ne fonctionnait de manière démocratique. Mais le régime du Kaiser, qui s’est engagé dans la voie d’une certaine social-démocratie après Bismarck, n’avait pas grand-chose de comparable à celui de Hitler. Les différences paraissent assez évidentes, pour qu’on n’ait pas besoin de s’étendre là-dessus ici.
A propos des progrès économiques et sociaux induits par les deux régimes : les mesures prises par les gouvernements du Kaiser notamment dans le domaine social (assurance maladie, retraite…) sont des faits que l’historien ne peut pas nier. Et l’historien ne peut pas nier non-plus que Hitler a résolu le problème du chômage en Allemagne grâce à une politique intensive de réarmement et de grands travaux. Dire cela, ce n’est pas faire l’apologie de ces régimes autoritaires (dont je ne suis pas admiratif !) et cela ne transforme pas le nazisme en bienfaiteur de l’humanité ou le militarisme autoritaire prussien en champion de la paix…
Karolvs a écrit :
C'était quelque chose, le service militaire sous le Kaiser !
Goya a écrit :
Vous semblez admiratif...
S’il y a quelque chose que les Alsaciens-Lorrains ont trouvé insupportable en 1871-1918, c’était le service pour le Kaiser : un service militaire extrêmement dur. Or, je suis de Moselle. Vous semble-t-il toujours que je suis admiratif ?
Roy-Henry a écrit :
Oui, mais je pensais aussi à l'annexion de l'Alsace-Lorraine, sans plébiscite !
Karolvs a écrit :
Prise de guerre.
N’importe qui en aurait fait autant. Napoléon 1er avait-t-il organisé un plébiscite dans les provinces européennes qu’il avait intégrées à l’empire ?
Goya a écrit :
C'est en effet un point commun . C'est comme cela que les impérialismes procèdent pour affirmer le droit des peuples ...
Le droit des peuples est une notion récente. Ici, c’est le pangermanisme du vainqueur qui a réglé le sort de l’Alsace-Lorraine : le traité de Francfort a donné aux Alsaciens-Lorrains jusqu’au 31 octobre 1872 pour se prononcer en faveur de leur citoyenneté française et quitter le pays. Passé ce délai, ils ont été considérés comme sujets allemands. Environ 250 000 personnes ont ainsi quitté l’alsace-Lorraine allemande.
Karolvs a écrit :
Guillaume Ier et Bismarck ont voulu l’unité de l’Allemagne pour en faire une puissance. Pas spécialement une puissance aggressive ; mais surtout une puissance capable de défendre les Allemands (référence aux autres empires qui les entouraient et menaçaient les principautés allemandes).
Goya a écrit :
Il n'y a pas beaucoup d'exemples de puissances qui ne soient aggressives (peut-être la Confédération Suisse au moyen-âge ) mais en règle générale elles disent ne faire rien d'autre que se défendre !
C’est parce que la puissance est davantage une dynamique qu’un état. C’est comme le vélo : si tu n’avances pas, tu tombes.
Karolvs a écrit :
Je ne sache pas que les pangermanistes du XIXème siècle aient considéré que l’Allemand était un surhomme.
Goya a écrit :
Peut-être pas encore . Mais biens persuadés que Dieu était avec eux....
Là-aussi : attention à l’erreur de traduction…
« Gott mit uns » ne signifie pas «Dieu
est avec nous», mais «Dieu
soit avec nous».
En tous cas, cela n’a rien à voir avec les théories racistes hitlériennes.
Karolvs a écrit :
Je dis seulement que l’Allemagne unifiée n’était pas plus agressive que les autres puissances impériales. Pourquoi trouvez-vous anormal que cette grande puissance économique et militaire (c’est ce que l’Allemagne unifiée était devenue) fasse ce que les autres faisaient ?
Goya a écrit :
A partir du moment oú l'on choisit la «puissance» et de développer les moyens militaires
Objectivement : ne pensez-vous pas que pour exister, il valait mieux -pour les Allemands comme pour les autres- être unis et puissants que, divisés et faibles. Attention SVP : je ne demande pas si c’est « juste » ou «bon pour la paix» ; je demande seulement si l’unité et la « puissance » n’étaient pas des facteurs propres à garantir aux Etats et aux peuples allemands une certaine sécurité, eu-égard aux événements qu’ils ont subis récemment (en l’occurrence, pendant la 1ère moitié du XIXème siècle.
A cette époque (et aujourd’hui encore) il n’y a pas de « puissance » sans d’importants moyens militaires. C’est un fait, une donnée objective.
Maintenant, si on veut aller au-delà du constat et porter un jugement objectif sur l’action du gouvernement impérial de l’Allemagne dans ce domaine, on doit le faire en prenant soin de mettre les faits en perspective par rapport à ce qui se passait autour de l’Allemagne, par rapport à ce que faisaient les autres puissances qui, pour autant que je sache, n’étaient pas forcément des agneaux.
Goya a écrit :
, et vise à bouleverser un équilibre existant , on n'est pas anormal , mais on est bel et bien aggressif.
Votre observation soulève des questions très importantes :
- l’unité allemande
visait-elle à bouleverser l’équilibre existant ?
- les peuples allemands avaient-ils le droit légitime à s’unir dans un ensemble politique unifié ?
- devaient-ils renoncer à cette unification sous prétexte qu’elle venait déranger un certain ordre établi ?
- le militarisme a-t-il fait de l’Allemagne des Kaisers une puissance plus aggressive que les autres puissances ?
etc…
Karolvs a écrit :
Et s'ils avaient commencé à oublier, il y avait de l'autre côté du Rhin un nouveau Napoléon... qui faisait la guerre en Crimée, puis à l'Autriche, et qui n'hésitait pas à envoyer une expédition au Mexique...
Goya a écrit :
Effectivement ils pouvaient se conforter dans leur point de vue en voyant ce qui se passait autour d'eux . Tous visaient à la " puissance " .
C’était ainsi en ce temps-là. Tout le monde préférait que son pays soit «puissant» plutôt que « faible ».
Nous avons vu ce que cela a donné : une escalade qui a fini par une déflagration mondiale, d’où est née –chez les Allemands et chez d’autres- une frustration qui portait en germe une seconde déflagration plus apocalyptique encore que la première.
Mais le « système des valeurs » n’a-t-il pas changé en Europe ? Qui a peur de l’Allemagne récemment réunifiée ?