Frédéric KISTERS a écrit :
Je crois qu'il faut relativiser les chiffres assénés par le député Bénazet. Rappelons nous que la France comptait 39 millions d'habitants contre 76 pour le IIe Reich. De surcroît, l'Allemagne était un pays plus industrialisé que la France. Dans ces conditions, il était pratiquement impossible que la République dépensât autant que la Germanie pour son armée. Toutefois, Bénazet avait peut être raison de souligner l'inscontance du budget qui nuisait aux programmes à long terme.
Relativiser ? Au nom de quelle doctrine ? A partir de quels concepts ? Vous vous trompez: l'Allemagne ne comptait pas 76 millions d'habitants en 1914, mais 67... Je suppose qu'il s'agit d'une inversion ! Quant à l'industrialisation, vous perdez de vue qu'elle démarre de moins haut en 1870 en Allemagne. Rien qui justifie un taux inférieur pour les dépenses militaires! Ce n'est sans doute pas en chiifres bruts qu'il faut raisonner, mais en proportion du budget global! Celui de l'Allemagne est bien plus fort!
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Il n'en reste pas moins que la France avait proportionnellement consenti à un effort important, faute d'être constant. Pour aligner un nombre comparable de divisions d'infanterie active (42 françaises contre 51 tudesques) la France pratiquait le service militaire de trois ans, contre deux en Allemagne, de plus elle appelait la majorité de ses classes tandis que l'Allemagne n'en recrutait que la moitié. De plus, elle recrutait dans les colonies. Tant au si bien, qu'en août 1914, la France alignait une armée presque aussi nombreuse que l'Allemagne.
En raisonnant sur les DI d'actives, on pourrait vous donner raison, mais la suite de votre démonstration sur les Ersatz divisionen, amoindrit votre démonstration. Si la France a accompli un effort important, il est bel et bien évident qu'il a été insuffisant, sans même parler de constance. Et la carence en artillerie lourde -si elle n'est pas trop grave durant la guerre de mouvement (encore que!)- devient probématique à partir de l'enterrement des armées...
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Les raisons de la défaite doivent être cherchées ailleurs.
La doctrine française priviliégeait l'offensive à outrance, la mobilité et sous-estimait les effets du feu. Raison pour laquelle elle ne développa pas une artillerie lourde considérée comme trop encombrante pour l'offensive. Cet état d'esprit, certes héroïque, mais pas vraiment pragmatique, entraîna la mort de nombreux soldats. Surtout qu'en face, les Allemands s'étaient pourvu d'une panoplie de calibres variés. Et comme proportionnellement, ils entretenaient deux fois moins de troupes que les Français, ils pouvaient s'offrir un plus grand nombre de pièces par divison et corps (par contre l'équipement en mitrailleuse était comparable).
Tout ceci est exact; cependant, on doit nuancer: il est bien évident que certains politiciens (voire Clémenceau lui-même) appréciaient cette doctrine qui permettait de justifier "militairement" les économies ainsi réalisées, en faisant l'impasse sur l'artillerie lourde! "Economies" d'ailleurs dépensées pour des fins "électoralistes", notamment dans la construction de voies ferrées souvent inutiles qui furent sacrifiées moins de 30 ans plus tard...
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Ensuite, les généraux français se méfiaient des réservistes. Ceux-ci étiaent regroupés dans des unités had hoc, chargées de défendre les arrières et les zones secondaires. Au contraire, les divisions de réserve allemandes étaient constituées autour d'un noyau de cadre active et devaient être utilisées à peu près de la même manière que les unités d'actives. C'est ce qui permit aux Allemands d'obtenir la supériorité numérique pendant la première phase de la campagne, malgré que le front de l'est distraient une partie de ses forces.
Enfin vient l'erreur stratégique : ne pas croire que le forces prussiennes envahiraient la Belgique (qui était vraiment sous-armée).
Au reste, la campagne fut sanglante pour les deux camps, personne n'avait prévu les conséquences des innovations techniques...
La surprise stratégique découle de l'erreur d'appréciation sur les fameuses divisions de réserves! Joffre et son état-major n'imagine pas une aile en marchante en Belgique au-delà de la Meuse, faute d'effectifs suffisants (croient-ils!)... Les rares officiers qui imaginent autre chose que cette manière de perdre les nouvelles guerres par les "crânes d'oeufs " de l'école de guerre, sont écartés des cénacles.
Par contre, il est erroné de soutenir que la campagne fut sanglante pour les 2 camps: elle le fut surtout pour les Français, les Allemands ayant prévu et utilisé à merveille la défensive et l'art d'enterrer les lignes: nos "grosses têtes" mettront plus d'un an à le comprendre, en lançant assauts sanglants sur assauts sanglants: et à cet instant, le manque de munitions et d'artillerie lourde se fait lourdement sentir: il faut la créer de toute pièce, car seule, l'artillerie lourde peut défoncer une position solidement enterrée! Les Allemands d'ailleurs n'y parviendront pas dans leurs dernières tentatives de percer dans les Flandres à Dixmunde en novemebre 1914! C'est là où ils enregistrent des pertes énormes afin de tenter si c'est possible de séparer Anglais et Français et d'atteindre Calais...
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Pour conclure je soulignerais que les Allemands possédaient encore une grande réserve d'hommes non mobilisés. Pendant la guerre, il doubleront les effectifs de leur armée, passant de 4 à 8 millions d'hommes. Au contraire, la France avait engagé toutes ses forces dès le début, elle parviendra à peine à maintenir ses effectifs en ligne. C'est la mobilisation de la Grande Bretagne et l'intervention de nouveaux alliés (Italie, Roumanie, Etats-Unis) qui a peu à peu permis de renverser la balance.
Frédéric
Oui, certainement, en tenant compte du sacrifice de 1 400 000 Français, "dépensés" sottement dans des conditions épouvantables et inhumaines... C'est là que les chiffres de Bénazet ne sont pas à relativiser: ils pèsent d'un poids énorme et retentissent toujours comme une formidable accusation, même si les "poilus-électeurs" n'auront -hélas- pas le front d'exiger la tête des coupables et une réforme indispensable de la république...
Pour celà, il faudra encore attendre un nouveau désastre en 1940 et que le pays soit conduit au bord de la guerre civile par des politiciens "pro forma", image conforme de ceux de 1914...