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Message Publié : 08 Mai 2002 14:04 
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Philippe de Commines
Philippe de Commines

Inscription : 08 Mai 2002 9:54
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Sur ce débat important des responsabilités, concernant l'hécatombe de 1914 (et aussi, hélas- dans une moindre mesure, de celle de 1915), il faut citer un témoin essentiel : Paul Bénazet qui fut rapporteur à la commission du Budget à la Chambre des députés en 1914. Il prenait alors la défense de André Lefèvre qui s'était exprimé ainsi :

« Depuis trente ans, de 1882 à 1912, (les Allemands) ont dépensé 4 milliards 700 millions de francs et nous dépensions 2 milliards 751 millions dans l'intervalle .»

Paul Bénazet ajoutait : « les dépenses extraordinaires de la Guerre (entendre l'Administration de la Guerre aujourd'hui la Défense Nationale (marine en moins)- tombent de 137 millions en 1906 à 92 millions en 1907, puis à 60 millions en 1908, à 66 millions en 1909.

Et pour expliquer cette politique à courte vue à l'heure où le militarisme germanique menaçait, il avait le courage d'incriminer les gouvernements successifs qui s'étaient suivis de 1901 à 1912 (séance de la Chambre des députés du 26 mars 1914).

Il récidivait en quelque sorte, dans un article du Matin paru le 18 juillet 1914 :

« Aussi, quoi que l'on puisse prétendre, l'explication de notre insuffisante préparation matérielle réside évidemment, pour la plus grande part, dans la comparaison des crédits consacrés à la défense nationale.-« Alors que, depuis 1906, les Allemands dépensaient 1 400 millions (francs) pour leur armements, disait fort justement l'autre jour M. André Lefèvre, nous ne dépensions, nous, que 700 millions. Par conséquent, s'il y avait une surprise à avoir, ce ne serait pas que nous ne puissions pas posséder un matériel de guerre moins perfectionné : ce serait que nous fussions AUSSI BIEN MUNIS EN AYANT DEPENSE MOINS ! »
« Rogner sur les crédits de la défense nationale, pour équilibrer un budget, est un expédient facile. Pendant plusieurs années, il fut constamment adopté de ce côté-ci des Vosges, sans se demander si un jour prochain ne viendrait pas, où il faut combler en toute hâte, par des emprunts ou autrement, l'abîme qu'on laissait imprudemment se creuser.
« Car, pendant que nous réduisions nos dépenses, l'Allemagne augmentait les siennes. Pour s'en rendre compte, il n'y a qu'à jeter les yeux sur les graphiques qui font éloquemment ressortir, depuis 1900, les efforts respectifs des deux nations. Il sont, pour ainsi dire, L'EXPRESSION TANGIBLE DE NOTRE ERREUR.
« Chez nous, deux ondes successives, deux courbes descendantes, hélas !L'une qui s'étend de 1901 à 1905, et qui, brusquement, est interrompue par le coup de théâtre de Tanger.
« Puis, pendant deux ans, c'est une flèche. Les ministres Berteaux et Etienne sont obligés, avec l'approbation de la commission du budget, de dépenser plus de 200 millions, hors budget, pour précipitamment nous réapprovisionner.
« Cet avertissement si cruel aurait dû nous servir ; cependant, de 1906 à 1909, c'est de notre part, une nouvelle chute, à laquelle correspond, du côté allemand, une forte ondulation EN SENS CONTRAIRE.
« Les dépenses extraordinaires réelles de la Guerre tombent chez nous de 137 millions en 1906 à 92 en 1907, puis seulement à 60 en 1908 et à 66 en 1909.
« Ce n'est qu'en 1910 qu'elles se relèvent à 95 millions. Pendant ce temps, pendant ces trois années, l'Allemagne, loin de nous imiter dans nos réductions, dépensa :

En 1907. . . 193 millions, contre 92 de notre côté.

En 1908 . . . 241 ---- 60 -----

En 1909. . . 215 ---- 66 ------

« Au total, 431 millions de plus que nous. Avec cette somme, nous aurions pu, TOUT COMME ELLE ET EN MEME TEMPS QU'ELLE, construire un matériel moderne d'artillerie lourde analogue à celui qui établit sa supériorité présente !»

Et ces lignes sont du 18 juillet 1914 ! Et elles son écrites par un député -modéré- certes ! Mais néanmoins sincèrement républicain...

Alors, absence de cartes de la Belgique (oui, car Joffre n'avait pas prévu d'engager des troupes à l'ouest de la Meuse), tactique surannée et meurtrière, il n'empêche que l'absence de mortiers et de canons lourds fut un grave handicap pour l'armée française de 1914, sans compter l'absence de munitions, après la bataille de la Marne, ce qui contraignait à lancer les hommes à l'assaut des tranchées allemandes quasiment sans appui d'artillerie !

La responsabilité des généraux est une chose (dans ces colonnes, on ne se prive pas à juste titre de les dénoncer), celle des ministres en est une autre, incontestable, imparable et, -disons-le- gravissime ! Or, je trouve qu'elle a été passée -le plus souvent- par pertes et profit ! Pour ne pas dire sous silence !!!

Je n'aurais pas la cruauté d'en dresser la liste (celle des présidents du Conseil, des ministres de la Guerre et des Finances) ! D'autres s'en chargeront... Mais l'Histoire ne saurait l'ignorer !

Et je n'aurais garde de rappeler les démissions du généralissime Hagron en 1907 qui poussa un cri d'alarme ni celle du général Michel en 1911.


Dernière édition par Roy-Henry le 13 Août 2002 21:14, édité 1 fois.

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Message Publié : 13 Août 2002 21:21 
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Philippe de Commines
Philippe de Commines

Inscription : 08 Mai 2002 9:54
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Je suis étonné qu'il n'y ait pas eu davantage de réponses à ma "charge" contre les gouvernants de l'avant-première guerre mondiale !

Je vais jeter un peu d'huile sur le feu...

Qui était président du Conseil quand les crédits affectés à la Guerre retombèrent en dessous des 100 millions par an ?

CLEMENCEAU !!!

ça vous la coupe, hein ? :roll:


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Message Publié : 16 Août 2002 16:30 
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Tout le monde le sait, l'argent est le nerf de la guerre. Cependant, pour ce qui est de la guerre de 14, Clémenceau a certes diminué les budgets militaires mais on ne peut pas à mon sens le rendre responsbale des conséquences puisqu'il n'a pas souhaité officielement ni engagé la guerre. Ce qui est grave, c'est de déclarer la guerre et de se refuser les moyens de la mener... Mais c'est tout de même plutôt rare.


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Message Publié : 18 Août 2002 23:01 
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Grégoire de Tours
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En 14-18, même si la France ne possède pas d'artillerie lourde, elle dispose tout de même du 75mm qui lui permet de remporter la Marne et de dominer le 77mm allemand . De plus l'artillerie lourde Française fera ENFIN son apparition à Verdun et sur la Somme , c'est à dire en 1916, l'arrivée des chars Français et anglais permettront de ramener les prussiens ( ou allemands comme on veut!) à la frontière, ce qui va permettre à la France de remporter cette affreuse guerre de 14-18 . Cela dit je suis d'accord avec vous, les politiciens Français sont les vrais responsables des hécatombes de 1914-1915 .

_________________
Bien qu’on ait du cœur à l’ouvrage, l’Art est long et le Temps est court.

Charles Baudelaire


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Message Publié : 09 Juil 2003 9:33 
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Grégoire de Tours
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Maurras a écrit :
Réarmons !!! Je vois 400 000 français étendus pales et sanglants sur le sol de leur patrie mal défendue.
Ce Cher Maurras se trompait : ils furens 2 000 000 !!!

_________________
"Le droit du Prince nait du besoin du peuple." (Pierre BOUTANG)


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Message Publié : 11 Juil 2003 15:59 
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Plutarque
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Je crois qu'il faut relativiser les chiffres assénés par le député Bénazet. Rappelons nous que la France comptait 39 millions d'habitants contre 76 pour le IIe Reich. De surcroît, l'Allemagne était un pays plus industrialisé que la France. Dans ces conditions, il était pratiquement impossible que la République dépensât autant que la Germanie pour son armée. Toutefois, Bénazet avait peut être raison de souligner l'inscontance du budget qui nuisait aux programmes à long terme.
Il n'en reste pas moins que la France avait proportionnellement consenti à un effort important, faute d'être constant. Pour aligner un nombre comparable de divisions d'infanterie active (42 françaises contre 51 tudesques) la France pratiquait le service militaire de trois ans, contre deux en Allemagne, de plus elle appelait la majorité de ses classes tandis que l'Allemagne n'en recrutait que la moitié. De plus, elle recrutait dans les colonies. Tant au si bien, qu'en août 1914, la France alignait une armée presque aussi nombreuse que l'Allemagne.
Les raisons de la défaite doivent être cherchées ailleurs.
La doctrine française priviliégeait l'offensive à outrance, la mobilité et sous-estimait les effets du feu. Raison pour laquelle elle ne développa pas une artillerie lourde considérée comme trop encombrante pour l'offensive. Cet état d'esprit, certes héroïque, mais pas vraiment pragmatique, entraîna la mort de nombreux soldats. Surtout qu'en face, les Allemands s'étaient pourvu d'une panoplie de calibres variés. Et comme proportionnellement, ils entretenaient deux fois moins de troupes que les Français, ils pouvaient s'offrir un plus grand nombre de pièces par divison et corps (par contre l'équipement en mitrailleuse était comparable).
Ensuite, les généraux français se méfiaient des réservistes. Ceux-ci étiaent regroupés dans des unités had hoc, chargées de défendre les arrières et les zones secondaires. Au contraire, les divisions de réserve allemandes étaient constituées autour d'un noyau de cadre active et devaient être utilisées à peu près de la même manière que les unités d'actives. C'est ce qui permit aux Allemands d'obtenir la supériorité numérique pendant la première phase de la campagne, malgré que le front de l'est distraient une partie de ses forces.
Enfin vient l'erreur stratégique : ne pas croire que le forces prussiennes envahiraient la Belgique (qui était vraiment sous-armée).
Au reste, la campagne fut sanglante pour les deux camps, personne n'avait prévu les conséquences des innovations techniques...
Pour conclure je soulignerais que les Allemands possédaient encore une grande réserve d'hommes non mobilisés. Pendant la guerre, il doubleront les effectifs de leur armée, passant de 4 à 8 millions d'hommes. Au contraire, la France avait engagé toutes ses forces dès le début, elle parviendra à peine à maintenir ses effectifs en ligne. C'est la mobilisation de la Grande Bretagne et l'intervention de nouveaux alliés (Italie, Roumanie, Etats-Unis) qui a peu à peu permis de renverser la balance.

Frédéric


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Message Publié : 12 Juil 2003 8:40 
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Philippe de Commines
Philippe de Commines

Inscription : 08 Mai 2002 9:54
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Frédéric KISTERS a écrit :
Je crois qu'il faut relativiser les chiffres assénés par le député Bénazet. Rappelons nous que la France comptait 39 millions d'habitants contre 76 pour le IIe Reich. De surcroît, l'Allemagne était un pays plus industrialisé que la France. Dans ces conditions, il était pratiquement impossible que la République dépensât autant que la Germanie pour son armée. Toutefois, Bénazet avait peut être raison de souligner l'inscontance du budget qui nuisait aux programmes à long terme.

Relativiser ? Au nom de quelle doctrine ? A partir de quels concepts ? Vous vous trompez: l'Allemagne ne comptait pas 76 millions d'habitants en 1914, mais 67... Je suppose qu'il s'agit d'une inversion ! Quant à l'industrialisation, vous perdez de vue qu'elle démarre de moins haut en 1870 en Allemagne. Rien qui justifie un taux inférieur pour les dépenses militaires! Ce n'est sans doute pas en chiifres bruts qu'il faut raisonner, mais en proportion du budget global! Celui de l'Allemagne est bien plus fort!

Citer :
Il n'en reste pas moins que la France avait proportionnellement consenti à un effort important, faute d'être constant. Pour aligner un nombre comparable de divisions d'infanterie active (42 françaises contre 51 tudesques) la France pratiquait le service militaire de trois ans, contre deux en Allemagne, de plus elle appelait la majorité de ses classes tandis que l'Allemagne n'en recrutait que la moitié. De plus, elle recrutait dans les colonies. Tant au si bien, qu'en août 1914, la France alignait une armée presque aussi nombreuse que l'Allemagne.


En raisonnant sur les DI d'actives, on pourrait vous donner raison, mais la suite de votre démonstration sur les Ersatz divisionen, amoindrit votre démonstration. Si la France a accompli un effort important, il est bel et bien évident qu'il a été insuffisant, sans même parler de constance. Et la carence en artillerie lourde -si elle n'est pas trop grave durant la guerre de mouvement (encore que!)- devient probématique à partir de l'enterrement des armées...

Citer :
Les raisons de la défaite doivent être cherchées ailleurs.
La doctrine française priviliégeait l'offensive à outrance, la mobilité et sous-estimait les effets du feu. Raison pour laquelle elle ne développa pas une artillerie lourde considérée comme trop encombrante pour l'offensive. Cet état d'esprit, certes héroïque, mais pas vraiment pragmatique, entraîna la mort de nombreux soldats. Surtout qu'en face, les Allemands s'étaient pourvu d'une panoplie de calibres variés. Et comme proportionnellement, ils entretenaient deux fois moins de troupes que les Français, ils pouvaient s'offrir un plus grand nombre de pièces par divison et corps (par contre l'équipement en mitrailleuse était comparable).


Tout ceci est exact; cependant, on doit nuancer: il est bien évident que certains politiciens (voire Clémenceau lui-même) appréciaient cette doctrine qui permettait de justifier "militairement" les économies ainsi réalisées, en faisant l'impasse sur l'artillerie lourde! "Economies" d'ailleurs dépensées pour des fins "électoralistes", notamment dans la construction de voies ferrées souvent inutiles qui furent sacrifiées moins de 30 ans plus tard...

Citer :
Ensuite, les généraux français se méfiaient des réservistes. Ceux-ci étiaent regroupés dans des unités had hoc, chargées de défendre les arrières et les zones secondaires. Au contraire, les divisions de réserve allemandes étaient constituées autour d'un noyau de cadre active et devaient être utilisées à peu près de la même manière que les unités d'actives. C'est ce qui permit aux Allemands d'obtenir la supériorité numérique pendant la première phase de la campagne, malgré que le front de l'est distraient une partie de ses forces.
Enfin vient l'erreur stratégique : ne pas croire que le forces prussiennes envahiraient la Belgique (qui était vraiment sous-armée).
Au reste, la campagne fut sanglante pour les deux camps, personne n'avait prévu les conséquences des innovations techniques...


La surprise stratégique découle de l'erreur d'appréciation sur les fameuses divisions de réserves! Joffre et son état-major n'imagine pas une aile en marchante en Belgique au-delà de la Meuse, faute d'effectifs suffisants (croient-ils!)... Les rares officiers qui imaginent autre chose que cette manière de perdre les nouvelles guerres par les "crânes d'oeufs " de l'école de guerre, sont écartés des cénacles.

Par contre, il est erroné de soutenir que la campagne fut sanglante pour les 2 camps: elle le fut surtout pour les Français, les Allemands ayant prévu et utilisé à merveille la défensive et l'art d'enterrer les lignes: nos "grosses têtes" mettront plus d'un an à le comprendre, en lançant assauts sanglants sur assauts sanglants: et à cet instant, le manque de munitions et d'artillerie lourde se fait lourdement sentir: il faut la créer de toute pièce, car seule, l'artillerie lourde peut défoncer une position solidement enterrée! Les Allemands d'ailleurs n'y parviendront pas dans leurs dernières tentatives de percer dans les Flandres à Dixmunde en novemebre 1914! C'est là où ils enregistrent des pertes énormes afin de tenter si c'est possible de séparer Anglais et Français et d'atteindre Calais...

Citer :
Pour conclure je soulignerais que les Allemands possédaient encore une grande réserve d'hommes non mobilisés. Pendant la guerre, il doubleront les effectifs de leur armée, passant de 4 à 8 millions d'hommes. Au contraire, la France avait engagé toutes ses forces dès le début, elle parviendra à peine à maintenir ses effectifs en ligne. C'est la mobilisation de la Grande Bretagne et l'intervention de nouveaux alliés (Italie, Roumanie, Etats-Unis) qui a peu à peu permis de renverser la balance.

Frédéric


Oui, certainement, en tenant compte du sacrifice de 1 400 000 Français, "dépensés" sottement dans des conditions épouvantables et inhumaines... C'est là que les chiffres de Bénazet ne sont pas à relativiser: ils pèsent d'un poids énorme et retentissent toujours comme une formidable accusation, même si les "poilus-électeurs" n'auront -hélas- pas le front d'exiger la tête des coupables et une réforme indispensable de la république...

Pour celà, il faudra encore attendre un nouveau désastre en 1940 et que le pays soit conduit au bord de la guerre civile par des politiciens "pro forma", image conforme de ceux de 1914...


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Message Publié : 15 Juil 2003 12:23 
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Plutarque
Plutarque

Inscription : 01 Juil 2003 14:45
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Comte Roy-Henry,

Mon propos n'était pas d'amoindrir le sacrifice des soldats français ni de trouver des excuses aux politiciens de l'époque. Mais, je maintiens que la France a fourni un effort militaire important, même s'il ne fut pas constant. D'ailleurs, si on se base sur les propres chiffres de Bénazet pour la période 1882-1912, on obtient presque la même somme dépensée par tête d'habitant. Il serait évidemment intéressant de connaître, le PNB, la proportion consacrée à l'armement et le montant en chiffres bruts des budgets. Si quelqu'un possède ces renseignements, pourrait-il nous les fournir afin d'alimenter le débat ?
D'autres pays avaient négligé leur armée. La Belgique, par exemple, qui n'alignait que 200000 hommes après mobilisation. Elle n'avait instaurer le service militaire universel qu'en 1913, sous l'impulsion d'Albert Ier, auparavant on appliquait le vieux système du tirage au sort et du remplacement. Elle ne possédait pas d'artillerie lourde, manquait de mitrailleuses, de munitions etc. Bref, elle comptait sur ses voisins pour protéger sa neutralité.
En effet, la population du IIe Reich était de 67 millions.
Pour les divisions alignées, je complète :
France Allemagne
42 DI d'active 51 DI actives
25 DI de réserve 25 DI de réserve
10 DI de territoriale 6 DI d'ersatz
10 DC 11 DC
Les DC allemandes étaient plus grosses que les françaises, les DI territoriales de piètres valeurs, mais les Allemands devaient laisser des unités face à la Russie. Normalement les brigades de landwehr ne seraient pas au front. Dès l'automne, les Allemands ont mis en ligne de nouvelles divisions de réserve et d'ersatz.
Si les Français avaient eu une autre doctrine d'emploi des unités de réserve, ils auraient obtenu la parité de nombre (sans oublier les 6 DI britanniques).
Même si les Français ont perdu plus d'hommes que les Allemands en 14, je maintiens que la campagne fut sanglante pour les deux camps, surtout à partir de la Marne. Le sang germanique a aussi coulé et des massacres comme Langemarck sont restés dans la mémoire colllective. Personne n'avait prévu un carnage pareil. Personne n'avait imaginé que les deux armées s'enterreraient sur un front courant de la Suisse à la mer (sauf peut être quelque visionnaires méconnus...).
Après la guerre, des "poilus-électeurs" ont réclamé des réformes et la reconnaissance de leurs sacrifices, au travers des associations d'anciens combattants, qui avaient un poids électoral. Le mouvement des Croix de Feu est le plus célèbre, mais il ne fut pas le seul. Et ils ne ménageaient pas les politicards !

Frédéric


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Message Publié : 19 Oct 2003 12:23 
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Jean-Pierre Vernant
Jean-Pierre Vernant

Inscription : 17 Oct 2003 18:37
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Je suis toujours surpris de lire qu'en 1914, la quasi-impossibilité de forcer une ligne de tranchées par une simple charge d'infanterie ait constitué une découverte. N'y avait-il pas eu la guerre de Sécession ? Celle-ci, en-dehors de quelques batailles spectaculaires - qui avaient déjà démontré la puissance d'une ligne défensive équipée de fusils modernes - n'avait-elle pas aussi consisté, pour une bonne part, en une guerre de siège sans issue, notamment dans ses derniers mois ? Avec en plus, la généralisation de la mitrailleuse, qui avait elle aussi fait ses premiers tristes pas pendant la "Civil War", comment se fait-il que personne n'ait pu imaginer que la guerre en Europe puisse tourner exactement comme celle d'Amérique : lancée comme une guerre de mouvement "fraîche et joyeuse" :roll: , s'écraser contre des lignes défensives imprenables ?
A la rigueur, on le comprend côté allemand où l'on pouvait compter sur sa puissante artillerie pour détruire ces lignes. Mais côté français, où l'on s'était précisément passé de ces canons lourds...

Enfin...

Sinon, concernant l'effort de guerre, la France de 1914 était tout de même, par rapport à l'Allemagne, encore fort agricole et moins peuplée. Pouvait-elle produire un effort de guerre similaire avec la même efficacité ? A voir. Encore en 1940, Saint-Exupéry dans "Pilote de guerre" souligne cette infériorité, et voit dans le conflit l'affrontement de quarante millions d'agriculteurs contre un Etat puissamment industrialisé !

Enfin, petite remarque sur ces fameux chemins de fer qui couvrent littéralement la France, en effet, en ce début de XXe siècle. Il est cruel de constater que cette dépense faite aux dépens de l'armement aurait provoqué le massacre des forces vives des campagnes françaises, après leur avoir tant apporté en temps de paix. Par contre, ce très dense réseau ferré, au voisinage du front, a tout de même rendu d'éminents services à l'armée française, comme lors des offensives allemandes de 1914 et 1918 où les uns étiraient sans cesse leurs lignes de communications tandis que les autres pouvaient toujours s'appuyer sur la toile des chemins de fer d'intérêt local et "tacots" de tout métal. ;)


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Message Publié : 24 Mai 2005 21:55 
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Philippe de Commines
Philippe de Commines

Inscription : 08 Mai 2002 9:54
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Cuchlain a écrit :
Citation:
Lacunes de notre défense nationale en 1914 (on préférait construire des petites lignes de chemin de fer pour satisfaire les électeurs, plutôt que de se doter d'une artillerie lourde !

C'est une parenthèse dans le débat, mais, ce réseau ferré a été bien utile pendant le conflit par ailleurs. De plus, déjà que le pays restait très agricole, si en plus on ne l'avait pas désenclavé avec ces fameux Chemins de fer d'intérêt local...
L'un empêchait-il vraiment l'autre par ailleurs ?


Je m'aperçois que j'avais laissé sans réponse votre argument.

Vous êtes bien sérieux ? Je ne suis pas du tout persuadé que les chemins de fer d'intérêt local aient pu contribuer à la victoire. Trop près du front, ils étaient bombardés et n'avaient donc aucune efficacité. Disons, dans une zone de 15 km en arrière de nos 1ère lignes !

Au-delà, encore fallait-il qu'ils conduisent à des destinations exploitables militairement (ou "logistiquement")! Ils devaient être assez peu nombreux en ce cas. Leur rôle dans la victoire a donc été -au mieux- marginal ! Moindre en tout cas que nos grandes lignes et voies de traverses, absolument nécessaires !!!

Au surplus, vous ne tenez pas compte de l'étendue de ce réseau loin du front, dans toute la France. A part aller facilement à la foire du chef-lieu de canton, ils ne servaient à rien ! Sauf à faire réélire le candidat républicain qui avait obtenu les crédits et présidé son inauguration ! Quelle démagogie... :twisted:

L'un empêchait-il l'autre ? C'est une bonne question: au vu de nos finances, évidemment OUI !

Cet argent qui n'a pas été dépensé pour nos canons lourds, où donc a-t-il été ? Dans le financement de ces réseaux très secondaires et qui ont été abandonnés progressivement entre 1930 et 1950...


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Message Publié : 25 Mai 2005 13:59 
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Jean-Pierre Vernant
Jean-Pierre Vernant

Inscription : 17 Oct 2003 18:37
Message(s) : 5364
Citer :
Vous êtes bien sérieux ? Je ne suis pas du tout persuadé que les chemins de fer d'intérêt local aient pu contribuer à la victoire. Trop près du front, ils étaient bombardés et n'avaient donc aucune efficacité. Disons, dans une zone de 15 km en arrière de nos 1ère lignes !

Au-delà, encore fallait-il qu'ils conduisent à des destinations exploitables militairement (ou "logistiquement")! Ils devaient être assez peu nombreux en ce cas. Leur rôle dans la victoire a donc été -au mieux- marginal ! Moindre en tout cas que nos grandes lignes et voies de traverses, absolument nécessaires !!!


C'est déjà pas mal. La plupart des auteurs signalent le rôle du réseau ferré dans la bataille de la Marne. Après, je n'ai pas étudié la question en détail, pas au point de distinguer un tacot d'intérêt local d'une voie de traverse.

Citer :
Au surplus, vous ne tenez pas compte de l'étendue de ce réseau loin du front, dans toute la France. A part aller facilement à la foire du chef-lieu de canton, ils ne servaient à rien ! Sauf à faire réélire le candidat républicain qui avait obtenu les crédits et présidé son inauguration ! Quelle démagogie...


Ben si, j'en tiens compte. Pour exister près du front, il fallait qu'il existe un peu partout :wink: Et puis, de chef-lieu en chef-lieu, on va travailler en ville dans les industries d'armement... Tiens, sans le Tacot, Roanne par exemple ne se serait pas industrialisée de la sorte. Et maintenant que l'autoroute passe à bonne distance, il n'y a pas de second souffle.

Citer :
L'un empêchait-il l'autre ? C'est une bonne question: au vu de nos finances, évidemment OUI !

Cet argent qui n'a pas été dépensé pour nos canons lourds, où donc a-t-il été ? Dans le financement de ces réseaux très secondaires et qui ont été abandonnés progressivement entre 1930 et 1950...


Parce que dans ces années, d'autres moyens de transport ont pris le relais, et surtout que la 1ere GM avait largement achevé de dépeupler les campagnes.


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Message Publié : 27 Mai 2005 10:33 
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Philippe de Commines
Philippe de Commines

Inscription : 08 Mai 2002 9:54
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Je ne pense pas que la remise en cause des réseaux ferroviaires d'intérêt local soit vraiment discutable.

Dans la plupart des cas, ils ne servirent pas l'intérêt général. Le contre-exemple de Roanne n'est pas déterminant. c'est bien une voie normalisée qui aurait dû être mise en place. Mais je ne connais pas assez cette question spécifique pour en dire plus. Un centre industriel comme Roanne méritait une ligne de gabarit national...

Je note que dans aucun pays omparable à la France, ces réseaux n'atteignirent cette densité. Il y a donc là une spécificité bien française, explicable par la démagogie républicaine de l'époque... C'est ainsi que l'on sacrifie l'intérêt général à des intérêts mineurs pour des calculs bassement électoralistes...


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Message Publié : 27 Mai 2005 10:43 
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Jean-Pierre Vernant
Jean-Pierre Vernant

Inscription : 17 Oct 2003 18:37
Message(s) : 5364
Citer :
Je note que dans aucun pays omparable à la France, ces réseaux n'atteignirent cette densité. Il y a donc là une spécificité bien française, explicable par la démagogie républicaine de l'époque... C'est ainsi que l'on sacrifie l'intérêt général à des intérêts mineurs pour des calculs bassement électoralistes...


Ou explicable par une répartition différente de la population (c'est toujours le cas) et un statut de pays largement agricole aux campagnes enclavées, gênant dans l'optique de se frotter (militairement ou pas) aux grandes puissances industrielles ? Je ne connais pas assez le sujet pour juger de l'efficacité, mais je vois mal comment ces préoccupations auraient pu être complètement absentes.


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Message Publié : 27 Mai 2005 13:01 
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Philippe de Commines
Philippe de Commines

Inscription : 08 Mai 2002 9:54
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Cuchlainn a écrit :
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Je note que dans aucun pays omparable à la France, ces réseaux n'atteignirent cette densité. Il y a donc là une spécificité bien française, explicable par la démagogie républicaine de l'époque... C'est ainsi que l'on sacrifie l'intérêt général à des intérêts mineurs pour des calculs bassement électoralistes...


Ou explicable par une répartition différente de la population (c'est toujours le cas) et un statut de pays largement agricole aux campagnes enclavées, gênant dans l'optique de se frotter (militairement ou pas) aux grandes puissances industrielles ? Je ne connais pas assez le sujet pour juger de l'efficacité, mais je vois mal comment ces préoccupations auraient pu être complètement absentes.


Pas vraiment, si l'on compare à l'Allemagne, même si elle était plus industrielle avec une population plus urbaine. La campagne allemande était encore peuplée avant 1914... Je ne vois pas l'intérêt militaire avant 14, attandu que personne n'avait songé à un conflit avec des fronts enterrés et quasi-inviolables. Cette préoccupation n'a donc jamais effleuré nos bons députés. Au contraire ! On leur disait qu'il ne fallait pas s'encombrer d'artillerie lourde. Alors, pourquoi s'en faire ? Mais les généraux choyés par les gouvernements ne précisaient pas s'ils étaient vraiment impartiaux ou s'ils disaient ce que les ministres leur suggéraient de dire... :(


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Message Publié : 27 Mai 2005 13:18 
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Jean-Pierre Vernant
Jean-Pierre Vernant

Inscription : 17 Oct 2003 18:37
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Pas vraiment, si l'on compare à l'Allemagne, même si elle était plus industrielle avec une population plus urbaine. La campagne allemande était encore peuplée avant 1914... Je ne vois pas l'intérêt militaire avant 14, attandu que personne n'avait songé à un conflit avec des fronts enterrés et quasi-inviolables. Cette préoccupation n'a donc jamais effleuré nos bons députés.

Je parle de l'intérêt socio-économique bateau de désenclaver les campagnes, je ne suis plus sur l'intérêt militaire immédiat. Dans l'absolu, désenclavement implique dynamisme, d'où l'intérêt à terme pour un pays qui se veut une puissance.


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