Chef chaudard a écrit :
Quand aux plans d'émigration, il y a déjà les précédents du Libéria, et ceux issus du redécoupage de l'Europe en 1918 (il y en aura d'autres en 45), me semble-t-il, qui ne semblent pas destinés particulièrement à nuire aux populations, mais à stabiliser les rapports de force entre états.
Bref, un plan d'émigration, même s'il est critiquable, ne part pas forcément d'une intention malveillante.
Le Libéria est destiné à un peuplement volontaire et les redécoupages de territoires après un conflit ne visent jamais à transporter au loin des populations, elles restent souvent sur place.
Quand à rassembler des populations éparses sur un critère racial pour les extraire et les envoyer au loin, sans qu'elles aient créé de problème pénal à leur collectivité, le procédé est assez inhabituel et clairement criminel.
Selon le procureur général près la Cour de Cassation, Pierre Truche, une déportation de population est un crime contre l'humanité, ainsi qu'il l'a écrit:
"
Le crime contre l'humanité est la négation de l'humanité contre des membres d'un groupe d'hommes en application d'une doctrine. Ce n'est pas un crime commis d'homme à homme, mais
la mise à exécution d'un plan concerté pour écarter des hommes de la communauté des hommes. [... 1 On distingue ce qui singularise le crime contre l'humanité des autres crimes: il est commis systématiquement en application d'une idéologie refusant par la contrainte à un groupe d'hommes le droit de vivre sa différence, qu'elle soit originelle ou acquise, atteignant par là même la dignité de chacun de ses membres et ce qui est de l'essence du genre humain. Traitée sans humanité, comme dans tout crime, la victime se voit en plus contestée dans sa nature humaine et rejetée de la communauté des hommes. [... 1 Une seule disposition lui confère [au crime contre l'humanité] un régime [légal] particulier: il est imprescriptible, c'est-à-dire que ses auteurs peuvent être poursuivis jusqu'au dernier jour de leur vie. "
il semble donc bien qu'une déportation de juifs polonais à Madagascar, si elle avait été plus ou moins imposée, aurait constitué le délit de crime contre l'humanité.
Non imposée elle revêt un caractère tout de même raciste, il s'agit bien de débarasser un pays d'une population bien précise.
C'est ce qui explique qu'aussitot connu le point de vue d'un ministre du Front Populaire acceptant l'idée du plan polonais de Madagascar, une maladresse, Léon Blum et son gouvernement ont immédiatement dénié tout accord, dès qu'ils ont compris la signification et la portée de l'opération.
Pour mieux comprendre le projet, imaginez sa transposition, même sur la base du volontariat, à des populations africaines. On leur suggère de quitter la France pour un pays d'accueil, en Guyane par exemple, où elles seront regroupées entre membres d'une même race.