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Message Publié : 18 Mai 2012 14:01 
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Hérodote
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Inscription : 18 Mai 2012 13:49
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Les généraux allemands parlent, de Basil H. Liddell Hart


Commençons par le quatrième de couverture :
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Les succès spectaculaires et la longue résistance de la Wehrmacht demeurent un mystère. Pourquoi la campagne de France fut-elle aussi facilement gagnée ? Comment la guerre à l'Est fut-elle d'abord un succès éclatant avant de s'abîmer dans l'impasse de Stalingrad ? Le débarquement pouvait-il échouer ? La contre-offensive des Ardennes avait-elle une chance de réussir ? Pour raconter autrement l'histoire de la Seconde Guerre mondiale, Basil H Liddell Hart, officier et stratège hors pair, est allé à la rencontre des principaux chefs militaires allemands. Leurs témoignages sont insérés dans un récit limpide qui raconte l'ascension et la chute militaire du IIIe Reich. Derrière la personnalité omniprésente de Hitler, le lecteur verra à la manoeuvre les chefs de file, comme Rommel, Guderian et Manstein, ainsi que des généraux oubliés, comme Model ou Manteuffel. Ce livre majeur n'avait jamais été traduit dans son intégralité. Sa publication comblera tous les amateurs d'histoire militaire et de stratégie.


Le livre s’appuie sur des sources truquées par l’auteur. Le texte fourmille d’approximations, d’hypothèses non étayées, de rumeurs et de jugements arbitraires.
Une des affabulations éhontées de Liddell Hart résume bien l’invraisemblance des thèses exposées dans ce livre très étrange : il s’en est fallu de peu que l’armée reçoive l’ordre de marcher sur Berlin (fin 1939) pour renverser Hitler au lieu de marcher sur Paris.

Citer :
Voici un livre populaire dont la lecture demande un effort particulier: celui consistant à garder en tête, chaque page, chaque ligne, que tout ce que le livre raconte est faux, que les sources sont truquées, qu’on ne peut accorder aucun crédit à l’auteur.

De conversations menées juste après la guerre avec quelques généraux allemands emprisonnés, Liddell Hart fait un volume de 500 pages en ajoutant de larges sections narratives et ses propres commentaires. Le texte connaît un gros tirage, surtout son édition américaine, et marque la perception populaire de l’armée allemande. Il crée plusieurs mythes, à l’époque où les mémoires des militaires allemands commencent à être publiés.

Les premiers chapitres laissent pantois: écrits aujourd’hui, ils ne pourraient l’être que par un parti révisionniste. Laissez moi illustrer le point. A en croire Liddell Hart, les officiers allemands sont fondamentalement pacifistes, tentent par tous les moyens d’éviter la guerre. L’ensemble des généraux essaya vainement d’éviter l’entrée en guerre de l’Allemagne dans le second conflit mondial (p.24); ils ont été insensibles à la propagande nazie, ne s’occupant guère de politique et encore moins du reste du monde (p.299); et de toutes les façons, protester était futile: il se trouvait toujours un autre ambitieux pour prendre la place et approuver les plans d’attaque répétés de Hitler (p.29); mais ne nous méprenons pas, les hommes qui signent des ordres pensent souvent le contraire de ce qu’ils écrivent (p.354) et on a des raisons de croire que certains généraux s’apprêtaient à exécuter des ordres qu’ils estimaient aussi téméraires que sans espoir de réussite en ayant pour but de saboter les projets de Hitler et de hâter ainsi la fin de la guerre (p.29).
Comment quiconque a jamais pu croire cela ?

Début 1940, Liddell Hart excuse l’invasion de pays neutres et l’agressivité allemande par les menaces alliées de "commencer la guerre"’ publiquement proférées par Winston Churchill. Pour lui, Hitler n’était plus maître des circonstances; la guerre elle-même, par sa vitesse acquise, commandait les événements (p.65). Personne n’est donc coupable... Ou alors, les alliés: En janvier 1940 la tension augmenta après le vibrant appel de Winston Churchill aux nations neutres, les engageant à se joindre à la lutte contre Hitler (p.66), où un discours a plus d’importance que des mouvements troupes. Et Liddell Hart enchaîne avec une étrange logique: comme les anglais n’ont pas hésité à violer la neutralité norvégienne pour délivrer des prisonniers, ils seront encore plus décidé à le faire pour couper le ravitaillement en fer (p.66). Tout d’un coup, qui peut le moins peut le plus...

Je peux reprendre chaque page, littéralement.

L’auteur a donc une vue très personnelle des événements et il ne faut pas s’attendre qu’il s’embarrasse de rigueur. Le texte fourmille d’approximations, d’hypothèses non étayées, de jugements arbitraires. A ce niveau, il n’est même plus la peine de demander, par exemple, la liste des généraux que Liddell Hart a rencontrés, pour ne pas parler d’indices méthodologiques sur les questions posées, des thèmes retenus lors de rencontres, voire - soyons fous - le verbatim des entretiens ou les références des documents mentionnés. Nous sommes ici dans un volume de pop history, sur lequel aucune recherche ne peut s’appuyer. Dans cet ouvrage, même les citations d’entretiens sont floues, des ’documents’ sont invoqués sans qu’il soit jamais précisés lesquels, les rumeurs sont prises pour argent comptant quand elles ne sont pas carrément lancées.
Et on relit en se tordant de rire la préface de l’ouvrage: Mon ouvrage présente l’essence (des entretiens) de la manière la plus objective possible, et présenter ce matériel de manière brute, par une interminable série de questions est de réponses aurait eu pour effet (...) d’embrouiller le lecteur

Car, en plus d’une empathie prononcée pour ses témoins, Liddell Hart a un but personnel: établir la légende comme quoi lui-même fut un précurseur de la doctrine blindée mise en oeuvre par les allemands. Il ne rate aucune occasion de souligner qu’il avait déjà pensé à tout dans ses articles et recommandations d’avant-guerre. Il se complait à noter toute allusion des généraux sur ce qu’ils doivent à la pensée militaire britannique (p.90) et boit les paroles de Guderian quand celui s’affirme un simple disciple (p.90). Il y a là une lecture comique de Liddell Hart. Car au-delà de la simple politesse conduisant un prisonnier à flatter son interlocuteur, on sait maintenant que les thèses de Liddell Hart n’ont rien anticipé de la blitzkrieg: Liddell Hart préconisait l’approche indirecte, cad une stratégie à l’opposée de l’offensive brutale et concentrée. Pire: Liddell Hart a sollicité ses interlocuteurs, comme Guderian, pour qu’ils aient la gentillesse de mentionner son nom dans les traductions anglaises de leurs mémoires...

Une fois cela dit, et si l’on parvient à surmonter la colère devant un tel torchon, qu’en retire-t-on? D’abord un exposé des mythes et justifications des militaires allemands. Avec insistance sont soulignées toutes les erreurs d’Hitler. Liddell Hart en est réduit à des contorsions, parfois, quand il se trouve que les militaires ont tort et Hitler raison - typiquement sur l’ordre ’pas un pas en arrière’ devant Moscou en décembre 41 -, ou encore pour ne pas blâmer son interlocuteur favori, Rundstedt - ainsi la discussion sur l’arrêt de Dunkerque est-elle embrouillée pour mouiller Rundstedt le moins possible. Mais si on reprend le texte point à point, on a une large liste des ’erreurs d’Hitler’. Le lecteur éduqué peut alors déterminer lesquelles ont été confirmées depuis, lesquelles tiennent du mythe. Pour comprendre la façon dont l’histoire s’est écrite, cela peut servir.

De même, les propos des généraux sur leurs échecs construisent un ’mur des excuses’ intéressant à recomposer. La seule chose qui n’est jamais mentionnée est que les armées ont été battues par plus fortes qu’elles, que les militaires n’étaient pas au niveau, et surtout en URSS. Par contre, quand on ne met pas tout sur le dos d’Hitler, on blâme le fait d’avoir été prévenu trop tard du plan (tout en ayant évoqué qu’il était préparé dès l’été 1940...), l’état des routes en URSS (mais pas pour se plaindre de l’insuffisance des services de renseignement et de logistique), la tactique russe consistant à se dérober plutôt que combattre (tout en étant fier d’avoir encerclé des armées entières), les conflits de commandements (mais en aucun cas la résistance des troupes russes ou leurs contre-attaques) etc. Et aussi, Liddell Hart laisse un long développement à l’idée de la défense élastique, chère à Manstein, pour faire comprendre que cette technique aurait pu stopper les soviétiques. Il boit les paroles de Heinrici disant - tenez-vous bien - qu’il n’a pas subit une seule défaite pendant les 3 années de guerre défensive dont les plans appliquaient ces méthodes. De nouveau, le mythe.

Enfin, à mesure que l’on avance dans l’ouvrage, l’espace laissé aux témoignages augmente par rapport à celui que Liddell Hart prend pour noter ses commentaires et appréciations. Le court chapitre sur l’Armée Rouge est même bon: on y lit, et de façon plutôt pertinente pour 1948, une perspective sur les soviétiques, par exemple sur le choix d’avoir standardisé l’armement, et sur la capacité du commandement à monter en compétence à mesure des campagnes. Les lacunes et les erreurs sont intéressantes en elles-mêmes, par exemple le fait que les généraux allemands ne sont pas capables de citer plus de 2 généraux russes: ils ignorent largement comment fonctionne leur ennemi. Le dernier tiers du livre, malgré des lacunes béantes, est moins insupportable que le reste.

Au final, je ne peux recommander à quiconque de lire Liddell Hart, ne serait-ce que parce que vous devez nettoyer votre cerveau après l’avoir lu. Pour l’historiographie, ce texte reste, malheureusement, important.

Source : mapiledelivres.org http://www.mapiledelivres.org/dotclear/ ... ddell-Hart


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Message Publié : 18 Mai 2012 22:46 
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Philippe de Commines
Philippe de Commines

Inscription : 21 Sep 2008 23:29
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Margival,

d'abord bienvenu.

Sur le forum histoire BBC maintenant fermé, en cherchant pour le "Haltbefehl" d'Hitler à Dunkerque 1940 j'ai pour la première fois rencontré Liddell Hart et aussi au même temps sur le Histoforums (qui n'existe plus comme forum histoire maintenant) le site de François Delpla concernant Liddell Hart

J'ai mentioné alors après recherche: "The other side of the hill". Il semble maintenant que c'est le même livre que "The German generals talk".
Dans ce temps là (ça doit être en 2003? 2004?) je sentais déja une certaine réserve de la part de mes interlocuteurs anglais. Les commentaires sur l'internet concernant le livre ne disaient pas grand chose aussi, comme elles étaient un peu réticent et restent plutôt vagues.

J'ai fait maintenant de nouveau la recherche et à la première vue il n'est pas changé grand chose...?
http://www.amazon.com/German-Generals-T ... 0688060129
Mais lisez quand même le commentaire de M.G.Watson...

A noter que le livre date de 1948 le commencement de la guerre froide. Lisez aussi les commentaires intéressants dans le URL que vous avez donné. Entre autre celui d'un intervenant du forum concernant ce début de la guerre froide. J'ai aussi lu dans votre URL un commentaire qui cherche de poser la personnalité de Liddell Hart dans son vrai contexte, qui, si je l'ai bien compris, est plus clément envers lui.
Dommage que quand on tape sur le URL de rétrolien à la fin de la discussion, il semble qu'il y a une faute dans le http...

PS: On dit Liddell Hart, Guderian mais on oublie Estienne...
http://fr.wikipedia.org/wiki/Jean-Bapti ... e_Estienne
(j'ai rencontré le nom pour la première fois dans la recherche pour mon fil sur le BBC: "En défendant les Français dans leur 1940 défaite")
http://usacac.army.mil/cac2/cgsc/carl/r ... /House.asp
Chapter Three: The interwar period: France:
"Not all Frenchmen held this view. Gen. Jean-Baptiste Estienne, commander of the World War I French tank corps before it was disbanded, was quite farsighted in his concept of mechanized warfare. In 1919, Estienne submitted a "Study of the Missions of Tanks In the Field" to Petain's headquarters. This remarkable document explained the need to provide armored, tracked vehicles not only for tanks, but also for reconnaissancep Infantry, artillery, and even battlefield recovery teams. Estienne's vision of this massed force, supported by air bombardment and attacking in-depth against a narrow enemy front, closely resembled the best mechanized icleal of World War II. In 1920, Estienne proposed a 100,000-man armored army with 4,000 tanks and 8,000 other vehicles. Instead of rejecting the use of infantry, he argued that armored infantry would again be able to attack using its organic weapons.37 Estienne's concept was not only radical militarily, but also seemed too offensively minded, too aggressive to be acceptable to French politicians. Nevertheless, Estienne remained Inspector of Tanks until his retirement in 1927."
Et au même temps j'ai trouvé sur ce site une réponse pour un autre fil de la rubrique "entre-les-deux-guerres" concernant la controverse entre le "close air support" et ceux qui supportaient le "bombardement stratégique" (je pense à la première vue)

Cordialement,

Paul.


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Message Publié : 20 Mai 2012 9:07 
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Bien que j'ai l'ouvrage, je ne l'ai pas encore lu.

Pour cet achat, je me suis fié à l'auteur et à une présentation avantageuse. Pour ce qui est de l'auteur, il est connu pour ces analyses stratégiques (voir son Stratégie), matière où il fait référence. Il n'est pas exclu effectivement qu'il profite de l'ouvrage pour rappeler à ses concitoyens qu'il faisaient partie de ceux qui avaient vu juste sur l'emploi du char. Le fait que l'ouvrage soit écrit après la Seconde Guerre Mondiale et au début de la Guerre Froide influencent aussi sans doute la teneur des propos. Son compatriote Fuller tombe dans le même travers : brillante analyse stratégique, esprit de synthèse indéniable, aigreur de n'avoir pas été reconnu à temps... et même animosité envers Churchill et les Russes.

En ce qui concerne les généraux allemands, on sait que ceux qui étaient prisonniers dans ce fameux château anglais (dont je ne me rappelle plus le nom :oops: ), entièrement sous écoute des Alliés, ne se sont pas toujours illustrés par leur honnêteté intellectuelle sur les causes de leur défaite.

Liddell Hart, Fuller, les généraux allemands, à chaque fois quelques libertés prises avec les faits, tout cela est bien humain.

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"Lisez, éclairez-vous, ce n'est que par la lecture qu'on fortifie son âme." - Voltaire
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Message Publié : 20 Mai 2012 11:38 
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Polybe
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PaulRyckier a écrit :
J'ai mentioné alors après recherche: "The other side of the hill". Il semble maintenant que c'est le même livre que "The German generals talk".


C'est le même ouvrage. Le titre a été changé pour l'impression aux USA. L'édition américaine ajoute aussi un grosse croix gammée sur la couverture...

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Message Publié : 20 Mai 2012 11:45 
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Polybe
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Inscription : 12 Avr 2011 22:02
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Clio a écrit :
Pour cet achat, je me suis fié à l'auteur et à une présentation avantageuse. Pour ce qui est de l'auteur, il est connu pour ces analyses stratégiques (voir son Stratégie), matière où il fait référence.


Dès qu'on se penche d'un peu plus près sur ce Stratégie, on prend conscience qu'il n'a pas grande valeur non plus.

On y trouve les faiblesses de LH: pas de rigueur historique (par exemple, citer ses sources), pas de rigueur (la stratégie "indirecte" n'est surtout pas définie afin de pouvoir, justement, la mettre à toutes les sauces) et multiples "raisonnements" faux. Seule un lecteur superficiel s'y laisserait abuser.

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Message Publié : 20 Mai 2012 12:56 
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Jean-Pierre Vernant
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Inscription : 17 Oct 2003 18:37
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Clio a écrit :
Liddell Hart, Fuller, les généraux allemands, à chaque fois quelques libertés prises avec les faits, tout cela est bien humain.


C'est toujours la même histoire : beaucoup de lecteurs ne sont pas forcément bien informés sur tout ce contexte, qui fait que ce bouquin n'a rien d'une synthèse fiable sur le sujet.
En revanche, il est justement intéressant de par ce contexte (sans quoi il ne serait qu'un livre périmé) : on y décèle divers camps qui ont intérêt, en cet immédiat après-guerre, à propager une certaine vision (très biaisée) de la 2e GM. Ce livre est un témoignage historique, plutôt qu'un documentaire, j'ai envie de dire, comme le Journal de Goebbels. Il gagnerait à être publié en édition critique.


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Message Publié : 20 Mai 2012 14:21 
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Georges Duby
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L'ouvrage est passionnant, il apporte beaucoup d'éléments d'information, de réflexion et des chiffres. Il me semble qu'on ne peut pas le condamner aussi brutalement.
Bien sur les généraux interrogés après la guerre prenne des postures mais il appartient à chacun de relativiser ou de retenir l'information selon l'analyse critique habituelle. Qui parle, de qui et de quoi ?
A lire ne serait-ce que par les questions que LH aborde avec souvent plusieurs thèses, comme pour l'arrêt devant Dunkerque, entre lesquelles il choisit en avançant ses raisons. Le livre fait progresser dans la connaissance du détail de plusieurs sujets, spécialement de Barbarossa. Il fait vivre et connaitre les généraux d' Hitler. il y a des anecdotes

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Heureux celui qui a pu pénétrer les causes secrètes des choses. Virgile.


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Message Publié : 20 Mai 2012 16:53 
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Polybe
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Inscription : 12 Avr 2011 22:02
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Alain.g a écrit :
L'ouvrage est passionnant, il apporte beaucoup d'éléments d'information, de réflexion et des chiffres. Il me semble qu'on ne peut pas le condamner aussi brutalement.


Si, si, on peut, on doit le condamner aussi brutalement.

Tu dis que ce livre "apporte beaucoup d'éléments d'information", mais oublies leur un défaut essentiel: elles sont fausses.

Alain.g a écrit :
Bien sur les généraux interrogés après la guerre prenne des postures mais il appartient à chacun de relativiser ou de retenir l'information selon l'analyse critique habituelle. Qui parle, de qui et de quoi ?


Hum ! Qui parle ? Mais voyons, ce texte étant essentiellement le narratif, et non des citations, celui qui parle, c'est Liddell-Hart. Or il se présente comme un "passeur" neutre et objectif, et est tout sauf ça: il y a tromperie délibérée. Le témoin est complice.

On ne peut trouver aucune excuse.

Alain.g a écrit :
A lire ne serait-ce que par les questions que LH aborde avec souvent plusieurs thèses, comme pour l'arrêt devant Dunkerque, entre lesquelles il choisit en avançant ses raisons.


C'est en fait l'unique cas où LH aborde différentes options, mais de façon embrouillée, emmêlant les témoignages et les faits. On n'est pas en train de lire une analyse pas à pas de la décision, comme ce sera le cas avec Frieser. LH aurait dû conclure ce qui était à sa portée: que les témoignages sont contradictoires et qu'il n'a pas les moyens de conclure.

Et s'il "choisit", ce n'est surtout pas en "avançant ses raisons". La seule explication qu'il ne donne pas est qu'il est impressionné par Rundstedt, qu'il a trop d'admiration pour lui pour envisager qu'il ait pu faire une erreur...

Alain.g a écrit :
Le livre fait progresser dans la connaissance du détail de plusieurs sujets, spécialement de Barbarossa.


Je tombe de l'armoire... Je serais bien curieux de savoir en quoi on progresse au sujet de Barbarossa. Tout ce qui est avancé dans le livre se révèle plus tard ou bien mineur, ou bien faux. Le texte est une régression: il a fallu une génération d'historien pour d'abord en déconstruire les thèses, avant de pouvoir avancer rigoureusement...

Alain.g a écrit :
Il fait vivre et connaitre les généraux d' Hitler


De nouveau, je dois être sur une autre planète... Comme on n'a pas les questions que pose LH, et encore moins le texte des réponses, la perception qu'on peut avoir des interlocuteurs de LH est bien floue. (En fait, LH ne donne même pas la liste de ceux qu'il rencontre; c'est qu'il faudrait expliquer pourquoi Manstein l'a envoyée de faire m...).

Et en aucun cas LH ne pose les questions qui fâchent (le lien entre militaire et politique, comportement des officiers en territoire conquis...). Il ne teste même pas l'idéologie. Il aurait pourtant été facile de se rendre compte de ce que ses interlocuteurs retenaient du nazisme...

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Message Publié : 21 Mai 2012 10:00 
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le lecteur a écrit :

Si, si, on peut, on doit le condamner aussi brutalement.
[...]

Hum ! Qui parle ? Mais voyons, ce texte étant essentiellement le narratif, et non des citations, celui qui parle, c'est Liddell-Hart. Or il se présente comme un "passeur" neutre et objectif, et est tout sauf ça: il y a tromperie délibérée. Le témoin est complice.

On ne peut trouver aucune excuse.


Témoin complice ? Tromperie ? On frise le procès stalinien, en sorcellerie. A quand l'autodafé ?

J'ai cru comprendre que vous étiez un grand lecteur, curieux alors que vous pensez encore qu'UN ouvrage puisse être un parangon, LA référence en la matière. Même les ouvrages universitaires (souvent bien ch...) n'échappent pas à la critique. Il n'y a pas de vérité révélée, de livre saint, y compris en Histoire. Je lirai ce bouquin, par principe.

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Message Publié : 21 Mai 2012 11:19 
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Diable, diable ! :mrgreen: Une excommunication en vue ? :mrgreen: Non, sérieusement, j'ai lu le livre de LH (il y a quand même quelques années :wink: ). Il m'a laissé dubitatif ! Pour plusieurs raisons ! D'abord s'adresser à des généraux qui ont perdu une guerre, c'est toujours risqué. Ca me rappelle la réaction qu'avait eu Joffre au retour de permission d'un des ses officiers d'Etat-Major :

- "Alors que dit on à Paris ? "
-"Mon général certains prétendent que ce n'est pas vous qui avez gagné la bataille de la marne"
-"Bah ! Il n'y rien de nouveau sous le soleil. Par contre je sais très bien qui l'aurait perdue, si elle l'avait été"

Et c'est là le problème ! L'esprit de corps des officiers allemands a rejeté sur Hitler et ses acolytes toutes les erreurs commises durant cette guerre. L'EM allemand aurait conquis le monde si on l'avait laissé faire :wink: Hitler étant mort ne pouvait pas les contredire ! :mrgreen: et c'était un bouc émissaire commode. De même pour les crimes de guerre ! La wehrmacht était restée propre et ceux ci étaient l'oeuvre des nazis en général et des SS en particulier. Vous admettrez que pour admettre celà, il faut être de bonne composition lol

En outre l'ouvrage date de 1948. Or que ce passait il en 1948 ? le blocus de Berlin ! La guerre avec L'URSS était proche et dans ce cas les allemands seraient aux premières loge et il imoprtait de ménager ces généraux allemands dont ont pouvait avoir besoin et qui avaient prouvé leur compétence. Et naturellement LH en était conscient et il a sans doute été sélectif dans l'orientation des discussions

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C'est l'ambition qui perd les hommes. Si Napoléon était resté officier d'artillerie, il serait encore sur le trône.

Mr Prudhomme


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Message Publié : 24 Mai 2012 21:53 
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Polybe
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Inscription : 12 Avr 2011 22:02
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Clio a écrit :
J'ai cru comprendre que vous étiez un grand lecteur, curieux alors que vous pensez encore qu'UN ouvrage puisse être un parangon, LA référence en la matière. Même les ouvrages universitaires (souvent bien ch...) n'échappent pas à la critique. Il n'y a pas de vérité révélée, de livre saint, y compris en Histoire. Je lirai ce bouquin, par principe.


Oui, lisez-le, dîtes-nous ce que vous y trouvez. Dîtes-nous où les thèses présentées sont pertinentes. Dîtes-nous ce que vous pensez de la méthode. Dîtes-nous où vous le trouvez objectif. Dîtes-nous si à aucun moment il ne vous vient une certaine nausée.

(Le traducteur des passages ajoutés à cette nouvelle édition, lui-même gêné de ce qu'il retranscrivait, n'a pu se retenir de quelques notes en bas de page rectificatrices).

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Message Publié : 24 Mai 2012 22:04 
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Polybe
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Inscription : 12 Avr 2011 22:02
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Elgor a écrit :
En outre l'ouvrage date de 1948. Or que ce passait il en 1948 ? le blocus de Berlin ! La guerre avec L'URSS était proche et dans ce cas les allemands seraient aux premières loge et il imoprtait de ménager ces généraux allemands dont ont pouvait avoir besoin et qui avaient prouvé leur compétence. Et naturellement LH en était conscient et il a sans doute été sélectif dans l'orientation des discussions


Oui, cet argument revient naturellement quand on parle de la façon dont ce livre présente l'histoire. Il est paru en 1948, donc a été écrit en 1947, alors que la guerre froide n'était qu'en train de se lancer.

On peut se demander - la poule et l'oeuf - si cet ouvrage ne fait que reprendre la posture des généraux nazis affirmant, en gros, qu'ils auraient été bien plus performants sans Hitler, ou si au contraire cet ouvrage est essentiel à la propagation de ces mythes. J'aurais tendance à penser que le texte de Liddell-Hart a influencé plutôt qu'il a été influencé: populaire, il a été très largement vendu; il bénéficiait de la caution de sérieux de Liddell-Hart; il parait enfin avant que les généraux aient publié leurs mémoires (celles de Guderian, qui se sont beaucoup vendues, sortent en 1950 seulement, et sont traduites en anglais en 1952; celles de Halder, moins connues, datent de 1949; celles de Manstein sont publiées bien plus tard, en 1955).

En d'autres termes, le texte de Liddell-Hart est le premier ouvrage à diffusion populaire sur le sujet. Toutes les désinformations et les mythes qui s'y trouvent ont eu la vie dure.

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Message Publié : 24 Août 2012 16:22 
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Plutarque
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Inscription : 19 Mars 2012 22:54
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Parmi les généraux interrogés par Liddel Hart figure Blumentritt. Il indique que trois généraux étaient fermement opposés à l'offensive de Barbarossa : en premier lieu Rundstedt le plus décidé à l'empêcher, Brauchitsch commandant en chef et son adjoint Halder.

Après la guerre, certains officiers étaient amnésiques (-lol-). C'était le cas de Blumentritt. Quelques semaines avant le déclenchement de l'opération Barbarossa, il avait exprimé son optimisme béat. Il exultait.
Interrogé après la guerre, il a indiqué que Halder et Brauchitsch étaient opposés à l'invasion de la Russie. Il croyait que les historiens n'auraient pas le courage de vérifier la véracité de ses propos.

Halder et Brauchitsch étaient favorables au plan "Otto" qui prévoyait d'attaquer la Russie avant l'automne 1940. Selon Brauchitsch, 80 divisions de première ligne et 20 divisions en réserve suffiraient pour l'opération. Les Russes, soutenait-il, ne possédaient que 50 à 75 bonnes divisions.

Deux semaines après le déclenchement de l'opération Barbarossa, Halder parade en disant que la Russie soviétique est sur le point de s'effondrer. Il est fou de joie. Il considère que la guerre à l'Est est terminée.

Plus généralement, un grand nombre de généraux allemands étaient impatients de se lancer à l'assaut de la Russie bolchévique. La perspective d'une grande guerre à l'Est suscitait beaucoup d'enthousiasme (Lemay, 2006). Le 22 juin ils étaient fiers de lancer leurs troupes à l'assaut.

Tietie apporte quelques précisions utiles :
Citer :
Lemay aborde les préparatifs de Barbarossa, dans son Manstein, Perrin, 2006, entre dans les pages 199 à 203. Et l'historien affirme que le général Halder, chef d'état-major général de l'OKH, dès fin mai, alors que la défaite de la France se précise, lance une étude, sans en parler à Hitler, sur l'invasion de l'URSS. Le plan Otto est achevé le 19 juin, prévoyait une guerre contre l'URSS, dès la fin de l'été 40, avec 80 divisions. L'objectif était d'envahir, avant les boues automnales, les pays baltes, l'Ukraine et la Biélorussie, en, tout au plus, 9 semaines. D'ailleurs, dès le 25 juin, la 18eme armée était redéployée en Prusse Orientale. Hitler n'apprit l'existence de ce plan que le 21 juillet, de la bouche de Brauchitsch.
Cela signifierait que la légende d'Hitler, seul responsable de l'attaque à l'Est, ne serait pas valide, et que l'armée de terre, après-guerre, notamment par le biais de ses généraux encore vivants, aurait chargé le Führer, comme seul responsable de l'opération.


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Message Publié : 31 Août 2012 23:58 
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Localisation : Alsace, Zillisheim
Dans le dernier Guerres & Histoire, il y a un encadré qui parle de Liddell Hart (et ils ne sont pas tendres avec lui) :
Citer :
Liddell Hart, le manipulateur

En 1945, un homme élégant déambule dans les prisons où sont internés les généraux allemands : Basil Liddell Hart, théoricien militaire britannique discrédité pas ses thèses parfois visionnaires, souvent fantaisistes, toujours excessives. Durant cinq ans, il se fait le champion des vaincus. En privé, il leur envoie des colis, leur trouve des avocats, aide leurs familles. En public, il clame leur innocence. En 1948, dans The German Generals Talks, il relaie les clichés du groupe Halder : si Hitler avait laissé faire ces techniciens omniscients, l'issue aurait été autre. Mais au-delà de l'empathie qu'il éprouve pour ces généraux, Liddell Hart cherche à restaurer sa réputation et quoi de mieux pour y parvenir que de convaincre qu'il est le père de la Blitzkrieg.

En échange de son soutien, il espère obtenir de ces généraux qu'ils se présentent comme ses fils spirituels. Rien de moins facile face à de tels égo. Manstein refuse de déclarer que son offensive des Ardennes lui a été inspirée par le capitaine anglais. Maladroit, Bayerlein reconnait avoir été influencé, hélas aucun des titres qu'il cite n'a de lien avec la Blitzkrieg. La mauvaise fortune de l'anglais tourne en 1951 quand il persuade Guderian d'accepter un amendement à l'occasion de la traduction de Panzer Leader; amendement n'attribuant à l'Anglais rien de moins que la paternité des Panzerdivisonen et des pénétrations en profondeur. Dans une nouvelle version de General Talk, Guderian se dit même simple disciple. Enfin, lors de la parution de The Rommel Papers, Liddell Hart obtient de sa famille qu'elle convienne qu'il était un de ses "pupilles". Par ces "Gentlemen agreements, Liddell Hart a puissamment contribué à la construction d'u mythe qui lui a bien profité.

_________________
Une théorie n'est scientifique que si elle est réfutable.
Appelez-moi Charlie


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Message Publié : 01 Sep 2012 14:00 
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Pierre de L'Estoile
Pierre de L'Estoile

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Voilà plus 40 ans que Liddell Hart est mort. Autant l'oublier !

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"L'histoire serait une chose merveilleuse si seulement elle était vraie."
Léon Tolstoï.


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