J'ai lu Le Figaro Histoire, avril-mai 2020, no 49, "1940 La plus grande défaite de l'Histoire de France". La défaite de 1940 est couverte en 10 articles :
- Page 40, "La course à l'abîme" par Jean-Louis Theriot. Diverses considérations en désordre sur les traités et les décisions politiques entre 1871 et 1940. - Page 52, "Le combat des chefs" par Max Schiavon. Les présentations de Gamelin et de Weygand avec un fort parti-pris pour le second.
- Page 56, "Les clés du désastre" par Henri-Christian Giraud. Drôle de guerre, Narvik, ligne Maginot, communistes, Gamelin, l'Angleterre, l'armistice. Voir ma critique, ci-dessous.
- Page 68, "L'épopée de Montcornet" par Jean-Robert Gorce. La contre attaque du Général de Gaulle avec la 4e division cuirassée. - Page 74, "L'agonie de la IIIe république" par Jean-Paul Cointet. Laval, Pétain, Vichy.
- Page 82, "Une génération dans l'orage", par Frédéric Valloire. Daladier, Reynaud, Churchill, Georges, Giraud, Corap, Huntziger, Vautier, etc. - Page 92, "L'année terrible". Costumes.
- Page 94, "Les sentiers de la défaite". Bibliographie récente. - Page 97, "De Gaulle en toute intimité", par Geoffroy Caillet. Cinéma. - Page 98, "Le chant des armes", par François-Joseph Ambroselli. Chronologie.
Voici les points que je critique dans l'article, "Les clés du désastre", pages 56 à 67 :
- L'expression "drôle de guerre" est attribuée péremptoirement à Roland Dorgelès, alors que Wikipedia donne aussi une autre hypothèse plausible.
- Le "grand choc : la bataille de la Marne". C'est dommage d'oublier Verdun.
- "les Panzerdivisions". En allemand, c'est Panzerdivisionen ; en anglais, panzer divisions, sans majuscule et avec un espace ; en français, divisions de blindés ou divisions de panzers.
- "la Pologne assaillie par les Panzerdivisions". N'oublions pas l'infanterie et l'aviation.
- "Des éléments d'une dizaine de divisions françaises franchissent le 7 septembre, la frontière allemande à l'ouest des Vosges en direction de la Sarre". Wikipedia indique 41 divisions sur sa page "Offensive de la Sarre", mais ici, c'est Wikipedia qui se trompe. Wikipedia en allemand donne la date du 9 septembre pour le franchissement de la frontière avec une carte montrant 12 divisions. Les Vosges sont au sud de la frontière. Il aurait fallu dire "au nord-ouest des Vosges", ou prendre un autre point de repère plus simple, par exemple, "près de Forbach et de Sarreguemines". Ce n'est pas la direction de la Sarre en tant que cours d'eau puisqu'elle coule aussi en France. Ce n'est pas la direction de la région de la Sarre, mais directement dans la région de la Sarre.
- "263 tués du côté français, 198 du côté allemand". Aucun référence pour étayer ces chiffres qui ne sont pas tout à fait les mêmes que ceux de Wikipedia.
- "Au GCG, la section qui connait le plus d'activité est celle du ... Théâtre aux armées". Affirmation sérieuse ou boutade ?
- "les pluies [...] ont contraint à reporter la date de l'offensive [sur la France ...] novembre [...] décembre." Quid des raisons de l'absence d'offensive de décembre à mai ?
- "les U-Boote". Cette fois, le mot a son pluriel allemand en "e" comme il se doit.
- "but de l'opération de Narvik [...] Il s'agissait dans un premier temps de venir au secours de la Finlande attaquée [...] par l'Union Soviétique". En effet, cela fut dit. Mais était-ce la raison principale ? Le gouvernement de gauche de Daladier était plutôt favorable à l'URSS. D'ailleurs, aucune armée française n'y fut envoyée avant que l'Allemagne n'ait commencé à s'installer en Norvège et à menacer ce port très important pour le minerai de fer. Il est étrange d'avoir oublié de parler au paragraphe précédent de l'invasion de la Pologne par l'Union Soviétique. Et tant qu'à faire, pourquoi omettre aussi l'invasion de l'Islande par le Royaume Uni ?
- "la résistance finlandaise qui accumule les succès". Le malade meurt en étant guéri.
- "Daladier est remplacé le 21 mars par Paul Reynaud". Daladier est renvoyé le 20 mars et Reynaud arrive le 22 mars.
- "Narvik [...] la première et seule victoire française de la campagne 1939-1940". D'abord il est d'usage de ne pas répéter le siècle s'il ne change pas, donc d'écrire "1939-40". Ensuite, c'est oublier la victoire de l'offensive de la Sarre, qui, comme celle de Narvik, ne fut que temporaire.
- "4000 parachutistes du général Student sautent sur la Hollande". C'est 3000 selon la page de Wikipedia en néerlandais.
- "sept Panzerdivsions (le groupement blindé de von Kleist)". En réalité, Kleist avait 5 divisions (la 6e, la 8e, la 2e, la 1e, et la 10e). Hoth avait les deux autres (la 5e et la 7e).
- "Très vite surpris par le choc sur la Meuse". Pas un mot sur la manière dont ce "choc" eut lieu, bien que l'article s'intitule "Les clés du désastre" et que le franchissement fut réellement une clé.
- La carte de la page 63 est erronée pour les noms des responsables des unités, indiquant Rommel, Reinhard, Guderian, List, alors qu'en réalité, ils en sont pas au même niveau, puisque Rommel ne commande que la 7e division, mais Guderian commande la 2é, la 1e, et la 10e. En fait, le nom de Rommel doit être remplacé sur cette carte par le nom de Hoth.
- Le paragraphe "Quelles ont été les erreurs du commandement français ?" développe 5 points dont les 3 premiers n'expriment qu'une seule idée qui est la faute d'avoir mis ses meilleures troupes au nord. Gamelin est injustement jeté aux orties. En réalité, il prenait des décisions souvent en accord avec ses subordonnées, à qui il laissait aussi une certaine latitude, donc ce n'est pas lui le seul responsable. Reynaud pensait que l'erreur venait plutôt de Corap qui a mal défendu la Meuse. D'autres ont accusé Huntziger, qui lui aussi a mal défendu la Meuse, et qui, de surcroit, a menti plusieurs fois à sa hiérarchie.
Bref, ce Figaro-Histoire est décevant.
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