Vous êtes à mon sens beaucoup trop dans la généralisation et l'approximation dans l'utilisation des termes de stratégie et de stratège. Hitler n'était pas selon moi un grand stratège ni même du tout un stratège. Il était mauvais sur ce plan. Certes pas pire que les japonais qui se sont lancés dans une guerre impossible, mais mauvais quand même.
N'importe quellle nombreuse armée aurait pu vaincre la Belgique, le Luxembourg et les Pays Bas en 1940. Les français étaient derrière leur ligne Maginot qui ne passait pas par la frontière orientale de la Belgique en raison du refus des belges.
La Tchécoslovaquie, qui était le seul pays d'Europe centrale à avoir une armée moderne et une bonne industrie lourde, a été trahie par les pays occidentaux. Point de stratégie là : juste de la diplomatie très efficace. Les français et les anglais ont obligé la Tchécoslovaquie à céder les sudètes sans combat parce qu'ils ne voulaient pas faire une guerre pour honorer les engagements qu'ils avaient pris envers ce pays mais s'estimaient incapables de tenir militairement (et ne voulaient pas la guerre).
Si vous voulez me faire reconnaître que la diplomatie de Hitler a été redoutablement efficace entre 1936 et 1939, je vous le concède bien volontiers. Mais diplomatie et stratégie, ce n'est pas la même chose.
L'Autriche ? Mais Hitler n'a pas conquis militairement l'Autriche. Il y est entré en organisant un coup d'Etat avec l'appui de l'immense majorité de la population autrichienne d'alors.
Sur le plan de la stratégie, je reconnais deux très bons coups à l'Allemagne nazie.
La campagne de France bien sûr. Mais là, il me semble que le plan, la percée des Ardennes, était de Von Rundstedt et Gudérian, pas de Hitler.
Et la campagne de Norvège, bien qu'elle ait surtout été suscitée par les anglo-français qui se sont les 1ers engagés là-bas pour couper la route du fer suédois.
Pour le reste, vous m'excuserez, mais Hitler ne s'est pas montré capable de tenir une bonne stratégie, ni même de la définir.
Tellement peu de constance stratégique qu'il est complètement tombé dans le panneau que lui ont tendu les anglais qui risquaient de ne pas tenir le coup dans la bataille d'Angleterre. Hop ! Géniale diversion : bombardons les sites civils allemands.
Et là, les allemands sur ordre de Hitler donnent à pieds joints dans le panneau et se mettent à leur tour à pilonner les villes anglaises plutôt que de concentrer le tir sur les installations militaires.
La Yougoslavie ? Mais cette attaque a fait perdre à l'Allemagne 6 semaines dans le déclenchement de l'opération Barbarossa. 6 semaines qui ont peut-être été décisives. On ne le saura jamais, fort heureusement.
A compter du moment où l'Allemagne a attaqué l'URSS, elle a perdu la maîtrise aérienne sur le front de l'ouest.
Je n'appelle pas grand stratège le dirigeant qui, voyant qu'il n'arrive pas à vaincre l'Angleterre, se lance en plus dans un conflit avec l'URSS parce que son programme idéologique prévoit de conquérir un espace vital aux dépens de peuples qu'il juge être des races inférieures. C'est du pur entêtement, c'est l'exemple même des ravages que l'idéologie produit chez un stratège qui doit être pragmatique.
Même chose pour un dirigeant qui se tire une balle dans le pied en traitant comme il l'a fait les territoires non-russes conquis en 1941 alors que l'Ukraine et les autres peuples de l'ouest de l'URSS ne demandaient qu'à se jeter dans les bras de l'Allemagne.
Je vois mal comment l'Allemagne, qui se trouve au plein centre de l'Europe, pouvait encercler l'adversaire en ouvrant un 2ème front.
Au contraire, la crainte de la guerre sur 2 fronts était la grande hantise de l'Allemagne.
On pourrait continuer encore longtemps dans l'énumération des erreurs ou aberrations stratégiques commises sur l'ordre express de Hitler.
Le vrai stratège, c'est celui qui s'adapte pour gagner. Napoléon, par exemple, qui disait qu'il se serait fait musulman si cela avait pu le servir. Même s'il a commis des erreurs stratégiques, lui aussi, et a fini vaincu.
Hannibal aussi a été vaincu. Personne ne nie qu'il fut un bon stratège.
Hitler n'était pas un militaire, ni un stratège ni un tacticien. Il s'est montré un redoutable manoeuvrier et joueur de poker sur le plan diplomatique, c'est vrai. Avant d'enchaîner erreur sur erreur.