Le témoignage d'un homme politique local (Seitlinger, député de la Moselle à l'époque).

Jean Seitlinger est un député MRP battu aux élections législatives de 1962 à l'occasion d'une vague gaulliste lors de l'affrontement entre de Gaulle et des députés centristes fortement opposés à l'élection au suffrage universel et à la position européenne en retrait du chef de l' Etat.
Lors des obsèques de R. Schuman, il n'est plus député et probablement pas invité au déjeuner préfectoral qui ne peut avoir d'aspect officiel pour plusieurs raisons. Il tient sa version des faits de Jean Monnet tout comme les personnalités de l'opposition à de Gaulle qui ont choisi de ne pas se rendre en préfecture et ignorent comme lui qui a été invité et qui ne l'a pas été.
Déclarer que c'est sur instructions supérieures que le préfet n'a pas invité Monnet au déjeuner me semble être une supposition de cet ancien député, car on ne voit pas qui aurait pu le lui dire! On ne sait jamais ce genre de chose.
Aussi je doute du fondement de l'affaire, d'autant que le déjeuner en question n'avait aucune importance. il est fréquent que d'anciens ministres ou députés s'étonnent de ne pas être conviée à des déjeuners en préfecture, le préfet n'ayant convié que des officiels. En général ils ne font pas d'histoire et vont à plusieurs dans un bon restaurant de la ville. C'est toujours ainsi dans les obsèques.
J'ai connu de nombreuses obsèques de HP ( Quueille, Michelet, des députés marquants), il n'y avait pas de déjeuner du préfet. Après la messe et éventuellement des discours, ou après le cimetière dans certains cas, tout le monde se dispersait. Les obsèques ne sont pas une fête.

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Heureux celui qui a pu pénétrer les causes secrètes des choses. Virgile.

On a cette liste d'invité de la part du préfet ?

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« Étudiez comme si vous deviez vivre toujours ; vivez comme si vous deviez mourir demain. » Isidore de Séville

Non, ces listes établies par le cabinet du préfet en fonction de ses directives et qu'on lui présente une fois avant l'envoi des invitations, sont dans les archives et jamais montrées.
Les préfets sachant combien leurs invitations ou non invitations déclenchent de susceptibilités, il y a toujours des histoires, s'arrangent en général par faire des choix indiscutables hors des repas amicaux. Les anciens ne sont le plus souvent pas conviés, surtout s'ils ne résident pas dans le département, comme Monnet. Il y a déjà trop plein.

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Concernant la non-présence d'Adenauer aux obsèques de Robert Schuman et le choix d'obsèques simples, outre le choix personnel de Schuman dans ce sens, il est possible aussi que de Gaulle se soit rappelé le Robert Schuman de 1939-40 pour ne pas vouloir de chefs de gouvernement aux obsèques, lui même ne souhaitant pas s'y rendre:
" En mars 1940, Robert Schuman est nommé sous-secrétaire d'État pour les Réfugiés dans le gouvernement Reynaud. Après l'offensive allemande du 10 mai 1940, Robert Schuman estime dès le 12 juin qu'il « faut mettre bas les armes ». Le 16 juin 1940, il est confirmé à son poste de sous-secrétaire d'État et fait ainsi partie du premier gouvernement Pétain. Le 10 juillet 1940, avec 568 autres parlementaires il vote pour les « pleins pouvoirs » au maréchal Pétain. "

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Mais Schuman n'est pas repris dans le nouveau gouvernement de Pétain.
Il rentre dans son foyer à Metz (annexée au Reich) où il sera arrêté par la Gestapo en septembre, et placé en résidence surveillée en Allemagne, d'où il s'évadera en 1942 pour entrer dans la clandestinité.

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Oui, mais de Gaulle a pu lui en vouloir alors qu'ils étaient tous deux Sous-Secrétaire d'Etat de Reynaud, de le voir se rallier à l'armistice dès le début, contre lui et Reynaud, Mandel, puis entrer dans le 1er gouvernement Pétain.
Certes Schuman n'est pas dans le second gouvernement Pétain, mais c'est parce que celui-ci écarte la plupart des politiques de la 3è République pour faire entrer des militaires et des gens à lui.

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Précisons que le poste qu'il a occupé dans les gouvernements Reynaud et Pétain, était celui de sous-secrétaire d'Etat aux réfugiés.

Ne faut il pas évoquer le contexte de 1963 ? les caciques démo-chrétiens eurolâtres de la IVè république acceptent encore très mal le nouveau régime et son chef. Tout pretexte leur est bon pour faire passer le pouvoir gaulliste pour non républicain.

A ma connaissance Monnet n'a jamais été ministre : il n'avait rien à faire à un déjeuner auxquels seuls les anciens présidents du conseil et non les simples anciens ministres (si j'ai bien compris l'interview du député Seitlinger) étaient conviés.

Monnet était detesté par de Gaulle qu'il combattait par tous les moyens - en particulier en encourageant Washington à rejeter ses demandes (réforme de l'OTAN, arme atomique, ...). Il avait agi de même auprès de Roosevelt vers 1943. De Gaulle devait le tenir pour un traître. Cela se savait il ? probablement. Raison de plus pour le préfet de s'en tenir à la tradition et à ne pas innover en faveur d'un personnage aussi contestable.

Les 5 anciens présidents du conseil qui protestent contre l'absence de Monnet sont Guy Mollet, René Pleven, René Mayer, Antoine Pinay et Pierre Pflimlin. Mis à part le dernier, où sont les caciques démocrates chrétiens ?

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"Denken heisst überschreiten" : Penser signifie faire un pas au-delà. Ernst Bloch (1885-1977)

vous avez raison : ce sont juste des défenseurs du régime parlementaire, de l'OTAN et de l'europe. Bref des adversaires du régime tel qu'il fonctionne à partir de 1962 et de sa politique européenne et atlantique.

Juste une question : en 1963 , être un ancien président de la CECA, "valait"il moins qu'être ancien ministre ?

C'est moins qu'être ancien Président du Conseil. A des obsèques comme celles de Robert Schuman, les anciens ministres et anciens ceci et celà devaient être légion, surtout à un carrefour de l'europe: Quelque chose comme une trentaine, en plus d'une trentaine d'officiels en activité et inévitables pour le préfet: parlementaires, invités de Paris, de Bruxelles.

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