La guerre soviéto-afghane (1979-1989) est assez mal connue et alimente pas mal de fantasmes qui brouillent la compréhension de ce conflit et de ses conséquences. Pourtant, elle fut fondamentale pour la création d'
Al-Qaida, en 1988 (selon
Fabrizio Calvi), organisation qui devait continuer et exporter le djihad dans le monde entier. Le conflit sovieto-afghan trouve ses racines dans les années 60.
I.
L'Afghanistan, région tampon entre l'impérialisme russe et anglais.
L'
Afghanistan, au 19eme siècle, est un "état-tampon" entre l'impérialisme russe qui désirait une route vers l'océan indien et l'impérialisme britannique qui voyait l'
Afghanistan comme une marche pour protéger le joyau de la Couronne, l'Empire des Indes. Le "
Grand Jeu" entre Russes et anglais était à somme nulle, les deux impérialismes se neutralisant, un peu comme le
Siam qui faisait le tampon entre français et anglais.
Deux guerres anglo-afghanes (1839-1842 et 1878-1880) se terminent par le retrait des troupes anglaises du pays, mais par le contrôle des régions nord-ouest, limitrophes avec l'Empire des Indes.
L'indépendance du pays est reconnue par les britanniques après le traité de
Rawalpindi, le 8 août 1919, au terme d'une 3eme guerre qui n'a de guerre que le nom.
http://fr.wikipedia.org/wiki/Guerres_anglo-afghanesLes britanniques vainqueurs de la faible armée afghane délaisse ce territoire qui a peu d'intérêt pour eux, puisque sans ressources et très difficile à contrôler, à cause de la topographie très montagneuse et du déficit en infrastructures de transports.
II.
L'Afghanistan dans l'orbite soviétique.
A°)
L'antagonisme afghano-pakistanais.
Dans le cadre de la guerre froide, l'
Afghanistan va choisir de s'allier avec les soviétiques à cause de son antagonisme envers le
Pakistan, alors principal allié des USA dans l'Asie du Sud. En effet, afghans et pakistanais ne se sont jamais entendus sur le tracé de la frontière entre leurs deux pays, cette
Ligne Durand tracée en 1893, séparant
Afghanistan et Empire des
Indes, et coupant en 2 les régions pachtounes.
http://fr.wikipedia.org/wiki/Ligne_DurandB°)
Daoud Khan et l'alliance avec les soviétiques.
Or lorsque les américains créent l'OTASE en 1954, alliance militaire, pendant de l'OTAN en Asie du sud-est, les afghans du roi
Zaher refusèrent d'intégrer cette alliance militaire à cause de la présence du
Pakistan, ennemi régional et en décembre 1955, une visite officielle de
Boulganine, à
Kaboul, se scelle par une alliance entre les deux pays. L'
Afghanistan entra donc dans l'orbite soviétique, sous l'action de son premier ministre
Mohammed Daoud Khan, surnommé le "Prince Rouge", qui fut écartée le roi en 1963.
Daoud reviendra au pouvoir en 1973 à l'issue d'un coup d'état militaire, avec l'aide des soviétiques. A noter que les américains restèrent indifférents à ces secousses politiques, ils avaient acté que le pays était sous l'influence des soviétiques et qu'il n'avait pas d'importance stratégique pour eux.
C°)
Le coup d'état communiste ou la Révolution de Saur.
Daoud se sentit à l'étroit dans l'étau soviétique et trouvait son mentor politique un peu trop présent. Ses tentatives de modifier les alliances régionales, comme sa visite et un accord financier avec le Shah d'
Iran ou ses rencontres avec
Ali Bhutto, alors chef du
Pakistan, indisposèrent les soviétiques qui s'appuyèrent sur le parti communiste afghan, le PDPA, pour renverser
Daoud et prendre le pouvoir, en avril 1978.
Les communistes
Nour Mohammed Taraki et
Babrak Karmal, devinrent président et vice-président du pays, lançant un programme révolutionnaire (réforme agraire, évolution du statut de la femme, scolarisation) qui va heurter un pays rural et très traditionaliste qui montera la population afghane contre les communistes et aboutit à l'intervention soviétique.
III.
La montée de l'islamisme politique en Afghanistan.
L'islam politique en
Afghanistan remonte aux années 60, avec le développement d'organisations musulmanes comme le
Jamiat e-Islami qui pénètrent dans les universités via les élections étudiantes et s'oppose aux étudiants communistes.
Daoud Khan au pouvoir, s'attaqua aux islamistes qui n'acceptaient pas ses réformes et les
Hekmatyar,
Rabbani ou
Abul Rasuf Sayaf, 3 noms que l'on retrouva dans la résistance afghane, prirent alors le chemin de l'exil, au
Pakistan.
Dès le 10 juillet 1978, 3 mois après le coup d'état communiste du PDPA, la révolte gronda dans l
'Hindou Kouch. Des casernes furent attaquées et des soldats afghans se retournèrent même contre les conseillers soviétiques, comme à
Djelalabad.
Le PDPA, aidé des soviétiques, se lança dans une sévère répression et la ville d'
Herat fut même bombardée par l'aviation soviétique, après le soulèvement de la ville, en mars 1979, faisant plus de 50 000 morts. Le pouvoir à Kaboul ne tenait qu'avec l'aide du grand voisine du Nord.
IV.
L'intervention soviétique de décembre 1978.
A°)
Khalqis contre Parchamis.
Le PDPA, parti communiste afghan était profondément divisé entre les pachtouns du
Khalqi de
Taraki le président et les parchamis persanophones de
Babrak Karmal. Guerre larvée entre les 2 factions/ethnies qui se double d'un coup d'état au sein du
Khalqi, puisque
Taraki, revenant d'une visite à
Moscou, se fit occire par son adjoint et ministre de la Défense
Hafizullah Amin, en septembre 1979.
Brejnev et ses conseillers n'apprécièrent pas trop ce règlement de compte interne ...
B°)
Les soviétiques interviennent le 27 décembre 1979.
Devant le chaos au sein du PDPA, un parti qui ne gouvernait plus rien et qui était proche de l'effondrement face à la guérilla islamiste, les soviétiques intervinrent, protégeant leur pré-carré afghan d'un risque de contamination islamiste qui aurait pu donner des idées à leur république soviétique musulmane d'Asie Centrale.