je me demande s'il faut parler des causes de la fin de la guerre froide ou de la fin du communisme ?
Disons que Gorbatchev avait bien levé le pied sur la guerre froide lorsque le communisme s'est écroulé. (A noter que la fin du communisme et la fin de l'URSS sont simultanées - preuve que cet assemblage de nations ne tenait que par la contrainte.)
Barbetorte a écrit :
Il arrive parfois que l'histoire se précipite et que les évènements échappent à ceux qui les avaient déclenchés. Ceux-ci restent toujours difficiles à expliquer et font les délices des amateurs d'uchronie. On peut dire que le fruit mûr était près à tomber, que l'infériorité économique et technologique n'a pas permis à l'URSS de poursuivre la compétition quand Ronald Reagan eut lancé la Guerre des Etoiles, mais tout cela ressemble un peu aux théories des économistes qui sont très forts pour expliquer pourquoi les mesures qu'ils avaient jadis préconisées étaient nécessairement inopérantes.
La comparaison avec les économistes est amusante. De fait, très peu de gens avaient vu venir la chute du communisme, et la vision américaine (Reagan a fait plier économiquement l'URSS) est une vantardise.
En France il y a Emmanuel Todd qui avait vu juste, dès 1976 ( ! ) dans son ouvrage
"La chute finale." Son approche méthodologique est intéressante :
Citer :
Todd y prédit « la décomposition de la sphère soviétique » au moyen d'une approche historique. Puisqu'il était impossible d'obtenir des données fiables provenant d'URSS, ou de visiter ce pays dans des conditions satisfaisantes, il fallait analyser ce pays en historien, comme on étudierait l'histoire des paysans du Moyen Âge, c'est-à-dire avec des sources très limitées. Il suffisait pour cela de construire un modèle sur la base de quelques données statistiques, surtout démographiques, de témoignages et de contes. Ce n'est peut-être pas tant le thème de ce travail qui surprend que la méthodologie qui retient donc l'attention : la puissance de son analyse repose sur une interprétation anthropologique. [...]L'historien Marc Ferro considère rétrospectivement qu'il s'agit du « succès le plus mémorable de la clairvoyance dans l'analyse critique ».
Ses prédictions, au contraire de celles d'Hélène Carrère d'Encausse - fausses - sont passées relativement inaperçues à l'époque.
Il se fondait pourtant sur des faits tangibles : le plus fort taux de suicide parmi les pays développés, l'augmentation de la mortalité infantile (deux indicateurs que l'URSS avait cessé de publier en 74) ou plus amusant, la livraison par une usine d'une quantité invraisemblable de chaussures... uniquement du pied droit.
Le KGB, mieux renseigné, y ajoutera plus tard l'augmentation de la consommation d'alcool et la baisse de l'espérance de vie - entre autres indicateurs : on ne connaît pas leurs analyses économiques - avant de décider de lancer l'expérience Gorbatchev.
Il est d'ailleurs dommage qu'un putsch militaire ait mis fin à l'expérience Gorbatchev, dont le successeur, un ivrogne corrompu - Boris Eltsine - n'a eu qu'une politique : celle du tout-lâcher-et-laisser-faire, qui a entraîné 10 à 15 ans d'un désordre économique sans nom en Russie et une fin prématurée et non planifiée de l'URSS, avec quelques guerres entre nations soudain indépendantes. (Tout cela hors limite chronologique, mais les séquelles se retrouvent chaque jour dans l'actualité.)