Jean-Marc Labat a écrit :
Je viens d'achever le dernier ouvrage de Dumézil qui, je dois bien l'avouer, bouscule beaucoup de ce que j'avais lu précédemment.
Il y affirme que la Renaissance carolingienne est très exagérée, qu'elle concerne finalement fort peu de monde, que les corps intermédiaire de la "fonction publique" étaient bien plus lettrés sous les Mérovingiens que sous Charlemagne. C'est bien sûr étayé, mais j'ai beaucoup de mal à l'avaler, question de génération probablement.
Et vous, qu'en pensez vous ?
Le livre de Dumézil est une synthèse de 1000 ans d'histoire actualisant les informations sur la période sous la forme d'un essai assez réussi et qui est de lecture agréable.
La thèse de l'auteur sur l'époque carolingienne est qu' après une époque mérovingienne injustement décriée, les chroniqueurs carolingiens ont volontairement décrié les mérovingiens, "conspuant" la dynastie renversée; "attribuer au règne de Charlemagne les qualités d' une Renaissance demeure à ce titre excessif: pour que la culture antique renaisse aux temps carolingiens, encore aurait-il fallu qu'elle meure à l'époque mérovingienne."
Il montre ensuite la puissance de la dynastie franque, Charles Martel, Charles le grand, leurs qualités guerrières exceptionnelles. Mais il observe que
la capitale est une très petite ville de 20 Ha, moins de 2000 personnes y résident, le palais modeste, le soutien des nobles étroit et fragile, l'empereur n'a plus de ressources fiscales régulières et sa manière de financer ses guerres en concédant le recouvrement des impôts sera source de corruption à des nobles qui sont en chemin vers la féodalité. "
Moins de 3000 hommes administrent l'empire de Charlemagne", ce qui est insuffisant.
Pour la culture, elle est réduite à une seule ville note Dumézil, mais il reconnait qu'il y a eu Renaissance, naissance de villes, de marchés, des écoles , construction de nombreuses cathédrales.
C'est la fragilité de l'empire qui le frappe le plus, qui aboutit à une crise, à des invasions, des pillages, à une faiblesse militaire qui fait que chaque noble "défend son petit territoire", ce qui développe le morcellement féodal et la rend héréditaire. Et c'est finalement la division de l'empire et l'émancipation des grands nobles qui tiennent le souverain.
Finalement
l'empire de Charlemagne a surtout existé par la guerre. Il éclate victimes de tensions internes. "C' est un temps de synthèse et pas de création" écrit Dumézil.
La thèse est intéressante, elle réhabilite les mérovingiens qui semblent à l'auteur bien plus importants que les carolingiens derrière lesquels la souveraineté éclate parce qu'ils n'ont en réalité pas créé un Etat mais une construction fragile.
Pas mal vu !