Le thème des
Neuf Preux apparaît sous la plume du Lorrain
Jacques de Longuyon en 1312 dans les
Voeux du Paon, un roman de chevalerie écrit en vers. Ce texte apparaît comme une continuation du
Roman d'Alexandre, oeuvre très en vogue à la fin du Moyen âge.
Les
Neuf Preux incarnent l'idéal chevaleresque entre le XIVe et le XIVe siècles, date à laquelle disparaît la prouesse singulière au profit de l'action de l'armée dans son ensemble.
L'auteur du roman regroupe parmi ses personnages des héros nés à des époques très différentes : trois personnages de la Bible (
Josué,
David et
Judas Maccabée), trois personnages de l'Antiquité grecque et romaine (
Hector,
Alexandre et
César) et trois personnages incarnant le merveilleux chrétien du Moyen âge (
Arthur, personnage central des romans de la Table ronde,
Charlemagne, héros des chansons de geste et
Godefroy de Bouillon, qui figure souvent dans les chansons de croisade). La tradition leur attribue des armoiries.
Le chiffre 9, carré de 3, évoque bien sûr la Trinité. C'est aussi un chiffre aimé des poètes pour la beauté de son harmonie.
Voici une représentation des Neuf Preux sculptée dans la vieille mairie de Cologne :
On y reconnaît, de droite à gauche : Alexandre le Grand, Hector et Jules César ; puis Judas Maccabée, David et josué ; et enfin Godefroid de Bouillon, le roi Arthur et Charlemagne.
Ce thème fut très populaire au Moyen âge. Citons par exemple une enluminure au folio 125 v. du livre du XIVe
Le chevalier errant de
Thomas de Saluces, l'
Armorial de la Toison d'Or, la très belle série de tapisseries du Château de Langeais, réalisées au XIVe siècle par les ateliers de la Marche.
Au château de Coucy (aujourd'hui malheureusement détruit), sur la cheminée, les
Neuf Preux devinrent dix car Charles d'Orléans y adjoignit
Bertrand du Guesclin.
Plus tard apparaissent en France les
Neuf Preuses, probablement créées par
Jean Le Fèvre, procureur au Parlement de Paris et auteur entre 1373 et 1387 du
Livre de Lëesce, où il défend les femmes contre les auteurs misogynes de son temps. Dame Lëesce, qui incarne la joie, présente ces preuses femmes comme plus audacieuses, courageuses, et vertueuses que les hommes.
On retrouve le même groupement de personnages appartenant à des époques disparates : les reines légendaires
Sémiramis,
Thamyris,
Teuca et
Déiphyle, les Amazones
Sinopé,
Hippolyté,
Ménalippe,
Lampeto et
Penthésilée.
Mais cette liste, à l'inverse de celle des Neuf Preux, ne fut jamais véritablement fixée. Dans les pays germaniques, on substitue aux Amazones et reines de l'Antiquité une triade juive avec
Esther,
Judith et
Yael, une triade païenne avec
Lucrèce,
Veturia et
Virginie, et une triade chrétienne avec Sainte
Hélène, Sainte
Brigitte, et Sainte
Elisabeth.
Les Preuses sont aussi représentées en guerrières casquées, avec armure, armes, et écus armoriés.
Le thème des
Neuf Preuses fut lui aussi très en vogue, citons par exemple les Preuses de l'
Armorial de la Toison d'Or, celles du
Chevalier Errant, les Preuses de la cheminée du Château de Pierrefonds (sculptées sous la direction de Viollet-le-Duc en leur donnant pour traits ceux de personnalités du Second Empire), la tapisserie de la Reine Penthésilée au château d'Angers, etc.