Sujet restitué (mars 2007)
Citer :
Joel
On dit souvent que la médecine des occidentaux était inférieure à celle des Byzantins et des Musulmans, j'aimerai savoir sur quels points ?
Citer :
Res publica
Si vous parlez de la médecine durant le bas moyen âge, c'est plutôt d'antériorité des médecines byzantine et arabe par rapport à l'occident qu'il faut retenir. Partant des connaissances médicales de l'antiquité grecque, c'est d'abord le monde byzantin qui est en avance durant l'antiquité tardive puis le haut moyen âge avec Oribase, puis Alexandre de Tralles ou encore Paul Egine. Le monde arabe prendra la "relève" avec Rhazes, et surtout autour de l'an 1000 Avicene, l'auteur du canon (description de nombreuses pathologies); au XII ème siècle Avérroes décrit d'autres maladies encore. Mais, ce qui a contribué aussi à l'essor de la médecine dans ces deux mondes byzantin et arabes , outre ces grands médecins cités précédemment, c'est l'existante d'hopitaux,beaucoup plus rares en occident durant le haut moyen âge, il s'en créera durant le bas moyen âge). Autre spécificité de la médecine arabe, c'est la formation des futurs praticiens justement dans ces hôpitaux. Bien que cela soit moins évident, il me semble qu'il y a une plus grande reconnaissance de la chirurgie chez les arabes (onretrouve des noms de chirurgiens célèbres à Cordoue) que chez les occidentaux, qui méprisent un peu cette spécialité que les médecins laissent aux chirurgiens barbiers peu formés.
La grande innovation occidentale durant le bas moyen âge en occident sera la création des universités, qui permettra la diffusion des savoirs, notamment ceux issus de la médecine arabe, avec la traduction du Canon d'Avicenne, et bien sûr le développement des hôpitaux.
Mais durant le bas moyen âge, que se soit en occident ou ailleurs, il n'y a pas de découvertes majeurs en médecine; c'est une période de stagnation, qui ne se "débloquera" qu'avec les dissections qu'on ne pratiquera couramment qu'à partir du XV et plutôt XVI ème siècle. Il y a aussi la non remise en cause de la théorie d'Hippocrate ,complétée par Galien des quatre humeurs et des quatre éléments, des quatre complexions ou tempéraments, l'équilibre de cet ensemble conditionnant la santé ....théorie qui conduira au Moyen-Âge à la pratique d'une médecine "arithmétique" on essayait de compenser des supposés déséquilibres, quand il s'agissait le plus souvent de maladies infectieuses...mais on du attendre bien longtemps encore après le moyen âge pour le découvrir.
Citer :
Escalibure
La religion bloque le développement de la médecine médiévale en Europe. On est vite considéré comme hérétique dès qu'on sort du cadre fixé par les religieux. D'ailleurs souvent la médecine est une affaire de religieux, même s'il existe des médecins non religieux.
Citer :
Deshays Yves-Marie
Ces affirmations méritent d'être nuancées... La médecine, à l'époque considérée, est affaire de gens sachant lire et écrire (souvent en latin ou en grec...), en un mot, de "clercs" (majoritairement "religieux"). Le statut de médecin côtoyait aussi l'existence de nombreux charlatans.
Citer :
Res publica
Il y a l'interdiction religieuse de pratiquer des dissections, qui ralentira l'évolution de la médecine, bien que le médecin Gui de Chauliac chirurgien du pape Clément VI à Avignon,qui avait réalisé une trépanation pour traiter les migraines du pape, aura la première dérogation exceptionnelle pour disséquer afin de comprendre la grande peste européenne de 1348...ce qui en l'occurrence n'apporta sans doute que peu à la compréhension de l'origine de la maladie.
Sinon, profitant du passage de notre ami Yves-Marie Deshays, je voulais lui demander si l'affirmation ( de Saint Augustin je crois) "Nul ne souffre inutilement", pouvant faire apparaître la douleur et la maladie comme soit le châtiment de Dieu, soit "condition" en vue d’une récompense possible dans l’au-delà, n'avait pas était une sorte de frein pour la médecine de l'époque......je m'aventure dans un domaine (l'interprétation de textes religieux, que je connais mal)
Citer :
Deshays Yves-Marie
Vaste sujet... pour lequel je ne me reconnais pas de compétence particulière.
Petite contribution : j'ai participé hier soir au café philosophique mensuel de mon quartier sur le thème "Plaisir & Douleur"...
Sensation et sens contribuent au décodage des deux éléments. Il y a sûrement eu dans l'histoire une valorisation du dolorisme fondé sur une interprétation tendancieuse du message biblique (alors que la "bonne nouvelle" -- sens étymologique du mot "évangile" -- est essentiellement le primat de l'amour et du bonheur dans la vie, même dès ici-bas, mais pas forcément par les moyens prônés par certains).
L'Eglise a, au demeurant, de tout temps, beaucoup contribué à la multiplication des hôpitaux et des moyens de soulager la douleur de ceux qui souffrent.
Je suis parfaitement conscient du caractère parcellaire et frustrant de mon intervention... mais le thème central annoncé est "la médecine au Moyen-Âge" et une digression trop longue serait probablement mal venue.