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c'est une énormité. Si en revanche, nous parlons d'exactions localisées que certains seigneurs isolés ont tenté de perpétuer, là, il est possible de parler, très prudemment, de droit de cuissage.
La notion de droit de cuissage a été indiscutablement une arme politique de la bourgeoisie contre la noblesse.
Elle s'inscrit dans le cadre d'une imagerie conventionnelle de la noblesse, présentée par la bourgeoisie, comme sexuellement débauchée et moralement pervertie--Cf Choderlos de Laclos, les caricatures et pamphlets contre Marie Antoinette, le cliché du ''grand seigneur méchant homme'' présent chez plusieurs auteurs des Lumiéres, etc.
Ces clichés péjoratifs--certes reflétant une réalité qui a sans aucun doute existé--sont volontiers repris par les historiens républicains du XIXe siècle, Michelet par exemple.
Face à ces nobles oisifs qui ne respectaient rien, à leurs femmes qui négligeait leurs devoirs de femmes et de mères, la bourgeoisie XVIIIe aimait se faire voir comme porteuse des valeurs familiales, de la pureté des moeurs et du travail.
Mais si on lit des textes concernant la condition des ouvrières--cf le livre de Marie Victoire Louis-- au XIXe siècle, on voit que les bourgeois et même les ouvriers ont repris le flambeau du droit de cuissage seigneurial en la personne du patron d'usine ou du petit chef harceleur sexuel.
Nombre d'entre eux considéraient en effet comme absolument normal, et faisant partie de leurs prérogatives professionnelles, le fait d'avoir des relations sexuelles avec leurs ouvrières, et ne s'en privaient pas.
Comme le souligne l'article que vous donnez en lien, il y a en quelque sorte continuité entre droit de cuissage et harcèlement sexuel.