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Echelle sociale au Moyen-Age
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Auteur :  Gin31 [ 29 Août 2012 12:41 ]
Sujet du message :  Echelle sociale au Moyen-Age

On m'a toujours dit que l'échelle sociale du Moyen-Age était telle : serf, homme libre, chevalier, baron ( seigneur ), roi.

Dans un premier temps, je voudrais savoir si cela est exact.

Ensuite, je voudrais savoir si un serf pouvait devenir un homme libre - il me semble que cela dépendait du seigneur auquel il appartenait - et s'il pouvait entre guillemets gravir les échelons de l'échelle sociale par sa bravoure ou son intelligence, par exemple. Un homme était-il condamné à rester pauvre ou pouvait-il s'élever socialement ? Et à l'inverse, un baron pouvait-il déchoir de son rang ?

Merci d'avance pour vos éclaircissements.

Auteur :  Jean-Marc Labat [ 29 Août 2012 13:38 ]
Sujet du message :  Re: Echelle sociale au Moyen-Age

C'est compliqué. Le serf peut être affranchi, le plus souvent moyennant finance. Il peut aussi "déguerpir" (c'est le mot employé), auquel cas le seigneur peut le faire rechercher pour le ramener manu militari, sauf certains cas, par exemple si il va dans une ville nouvelle où on ne regarde pas trop la qualité de l'arrivant, où s'il demeure un certain temps dans une ville, généralement un an et un jour.

Mais des régions entières n'ont pas connu le servage, ou très peu de temps, et les situations varient suivant chaque région.

On peut perdre la noblesse, par jugement royal, pour acte de lâcheté ou trahison, ou par dérogeance, exercer un métier manuel, ce qui est jugé infâmant.

Auteur :  Gin31 [ 29 Août 2012 14:43 ]
Sujet du message :  Re: Echelle sociale au Moyen-Age

Des régions entières n'ont pas connu le servage ? Je ne savais pas. Je pensais que c'était un fait avéré dans tout le royaume, mais j'avoue que je ne sais pas trop comment ça s'est mis en place. Je suppose que c'est une séquelle de l'esclavagisme chez les Romains qui s'est perpétré.

Après, à mon avis, un homme du peuple pouvait peut-être atteindre un certain " prestige " s'il pouvait entrer dans un ordre religieux, quoi qu'il me semble qu'il fallait apporter une contribution qu'elle soit de l'ordre de terres ou de monnaie trébuchante.

Un métier manuel pouvait sans doute apporter la richesse - comme les maçons par exemple, pour ceux qui sont passés maîtres bâtisseurs - mais est-ce qu'il pouvait pour autant accéder au rang de noble ? Est-ce que cela dépendait de son... mécène si je peux dire ? De son protecteur, plutôt. Ou de son commanditaire ? Car à cette époque, on ne peut pas parler de bourgeoisie, vu qu'à ce moment-là, le terme " bourgeois " est à prendre au sens premier du terme : celui qui habite le bourg.

Ce que je voudrais savoir en fait, c'est si un homme issu du peuple pouvait accéder à certains - tous ? - les privilèges de la noblesse : terres, éducation pour ses enfants, livres, etc.

Dans un premier temps - j'ai l'impression que ma requête et mon raisonnement sont flous, tout à coup - je parlerai de la noblesse " déchue " après.

Merci de me consacrer un peu de votre temps.

Auteur :  Jean-Marc Labat [ 29 Août 2012 15:16 ]
Sujet du message :  Re: Echelle sociale au Moyen-Age

C'est en effet assez compliqué. Des libres ont pu tomber dans le servage, mais il y a des graduations dans celui-ci. Celui qui est sur un manse ingénuile ne doit pas les mêmes redevances que celui qui est sur un manse servile, ses corvées ne sont pas les mêmes aussi. Un serf ingénuile peut être sur un manse servile et avoir les redevances attachées à sa terre et réciproquement. Enfait, le statut est lié à celui de la terre qu'on occupe.

Des régions comme la Normandie n'ont pas connu le servage, ou il a disparu avant l'an 1000, une grande partie de la Picardie aussi d'ailleurs.

Auteur :  Almayrac [ 29 Août 2012 15:27 ]
Sujet du message :  Re: Echelle sociale au Moyen-Age

Jean-Marc Labat a écrit :
Des régions comme la Normandie n'ont pas connu le servage, ou il a disparu avant l'an 1000, une grande partie de la Picardie aussi d'ailleurs.

Est ce qu'en Engleterre il y a eu du servage et en est-il de même pour les régions du Danelaw. N'est-ce pas à cause de la conception sociale nordique ou un esclave peut être rapidement libre et ou l'initiative privée d'ascension sociale est plutot favorisée. Même si sur le plan de la noblesse on reste dans la tradition germanique ?

Auteur :  Narduccio [ 29 Août 2012 15:29 ]
Sujet du message :  Re: Echelle sociale au Moyen-Age

Il me semblait que le servage de grande ampleur se met en place à l'époque carolingienne. Il y a une vieille discussion sur le sujet et il me semble me rappeler que Charlemagne avait fait plusieurs lois pour demander qu'on en transforme pas les hommes libres perclus de dettes en serfs.

Auteur :  Jean-Marc Labat [ 29 Août 2012 15:53 ]
Sujet du message :  Re: Echelle sociale au Moyen-Age

C'est surtout pour des questions militaires que Charlemagne édicte cela, mais le servage existe depuis très longtemps, depuis peut être la fin de l'empire romain. Les colons et les lètes ne sont ils pas des formes de serfs, même si le colon est un libre théoriquement, mais qui est rivé à sa terre. Les libres pauvres, les colons , les esclaves et les lètes ont fusionnés lentement dans le servage. Tout ceci fait l'objet de débats acharnés.

Il est effectivement probable que l'absence de servage en Normandie soit du à une influence noroîse, mais voir dans la noblesse une tradition germanique est à mon avis une erreur, la caste se ferme au cours du XIème siècle, avant on ne peut guère parler de noblesse, et on ne peut distinguer ses origines. Un noble toulousain suit il une tradition germanique ? J'en doute.

Auteur :  Jérémy76 [ 29 Août 2012 16:04 ]
Sujet du message :  Re: Echelle sociale au Moyen-Age

En plus, les "hommes libres" est très générique. On y trouve des vagabonds et mendiants, tout en bas, et on monte jusqu'aux riches négociants, qui, pour certains, s'achètent des seigneuries et des fiefs (voir les francs-fiefs). À la fin du Moyen-âge, on trouve parmi les hommes libres des citadins qui sont beaucoup plus riches qu'un nobliau de campagne reculée qui vit presque aussi pauvrement que ses paysans. On ne peut pas vraiment donc faire une échelle sociale en résumant comme vous le faites.

Auteur :  Gin31 [ 29 Août 2012 16:23 ]
Sujet du message :  Re: Echelle sociale au Moyen-Age

Je m'adresse tout d'abord à Mr Labat :

Je voudrais une petite précision, svp : quand vous parlez de " manse ingénuile ", qu'entendez-vous par là ? Je n'ai jamais entendu ce terme - ni lu d'ailleurs.

J'habite dans le Sud-Ouest, donc je m'intéresserais plus à cette région-là dans mes questions. L'Aquitaine a été très longtemps sous le joug anglais, donc faut-il voir tout ce qui relève de la loi, des mœurs, de la politique ou l'échelle sociale comme en Angleterre ?

Jérémy76 : les seigneuries s'achetaient ? Vous voulez dire qu'un marchand de vins - par exemple - pouvait devenir seigneur s'il en avait les moyens ?

ALMAYRAC : il y a eu du servage en Angleterre. On le voit dans [i]Un monde sans fin [i] de Ken Follett qui se base sur de vraies données historiques pour écrire ses fresques. Et je pense également que chez eux, la condition sociale du serf qui peut facilement être affranchi provient des Normands. Mais un serf pouvait posséder des terres et même en acquérir d'autres s'il payait une taxe appelée hériot. En est-il de même en France ?

Auteur :  Jean-Marc Labat [ 29 Août 2012 16:36 ]
Sujet du message :  Re: Echelle sociale au Moyen-Age

Je dois avouer que j'ignore à peu près tout de l'Aquitaine des Plantagenêt.

Acheter les fiefs est chose tardive dans le Moyen-Age, c'est sur la fin que cela se produit.

Manse ingénuile, à l'origine manse confié à un homme libre.

Auteur :  Almayrac [ 29 Août 2012 16:41 ]
Sujet du message :  Re: Echelle sociale au Moyen-Age

Jean-Marc Labat a écrit :
voir dans la noblesse une tradition germanique est à mon avis une erreur, la caste se ferme au cours du XIème siècle, avant on ne peut guère parler de noblesse, et on ne peut distinguer ses origines. Un noble toulousain suit il une tradition germanique ? J'en doute.


La caste des nobles est bien issue des castes guerrières anterieures. Même si elle est relativement ouverte avant l'an mille ce n'est pas un moulin.
Le sang des carolingiens irrigue toutes ses familles sur un substrat Wisigoth à Toulouse, Lombard en Italie, Scandinave en Aquitaine, Normandie et Angleterre, Saxons, Burgondes etc... Tout cela c'est de la tradition germanique.
A part en bretagne et encore...
Mais peut être y a t'il des nobles de tradition arabe ou bizantine mais ça reste à prouver :mrgreen:

Ce que je voulais dire c'est que les tradition de la noblesse (ne pas travailler, ne pas mélanger son sang avec le bas peuple, indépendance avec l'économique et le religieux) dérivent en partie du statut de Foedus et en partis des lois germaniques (loi gombette, loi salique)qui résulte de ce statut. Statut bien ancré dans la tradition indo-européenne avec ses trois castes agriculteur/prêtre/guerrier.

Et pour cela le Noble Normand diffère assez peu du noble Toulousain dans son statut et son rôle social au XIIème siècle.

Auteur :  Jean-Marc Labat [ 29 Août 2012 16:47 ]
Sujet du message :  Re: Echelle sociale au Moyen-Age

Dire que ces castes sont d'origine purement germanique est une erreur. L'aristocratie sénatoriale romaine des Gaules ne sera pas évincée, se mélangera avec les nouveaux venus pour donner une fusion des deux. Les exemples abondent sous les Mérovingiens, et bien malin est celui qui arrive à discerner l'origine des aristocrates sous les Carolingiens.

C'est le discours entendu à la fin de la monarchie, comme quoi les nobles descendaient des conquérants et la roture des conquis. Il y a au moins un siècle et demi que plus personne n'y croit.

Auteur :  Almayrac [ 29 Août 2012 17:09 ]
Sujet du message :  Re: Echelle sociale au Moyen-Age

D'abord je n'ai pas dit population germanique mais tradition germanique.

Concernant la descendance germanique et le mélange des populations votre concept est certes séduisant mais c'est contredit par les textes de lois (gombette et salique) qui insistent sur la séparation des deux sociétés. On retrouve la mêmes choses chez les Wisigoth avec en plus le problème de l'arianisme. De plus si il y avait une élite guerrière romaine entre le IIème et le IVème siècle il n'y aurait pas eu besoin de les faire entrer dans l'empire.
Même si quelque cas sont attestés la proportion de gallo-romain chez les nobles doit être assez faible. Il faut assi tenir compte de la démographie des deux populations.
Est ce que vous avez des test ADN ou des sources un peu plus quantitatives pour me convaincre?

Auteur :  Jean-Marc Labat [ 29 Août 2012 17:19 ]
Sujet du message :  Re: Echelle sociale au Moyen-Age

La loi salique n'en parle pas. La loi Gombette et le bréviaire d'Alaric reprennent l'interdiction de mariage qui se trouve dans le code théodosien adopté par Valentinien III à la fin de l'empire. Le plus gros empêchement à la fusion est l'hérésie arienne, et une fois celle-ci disparue, le mélange se fera rapidement, comme les Francs avec les Romano-Gaulois, où la différence de religion ne joue pas.

Auteur :  Almayrac [ 29 Août 2012 17:28 ]
Sujet du message :  Re: Echelle sociale au Moyen-Age

mouais,
vous n'arriverez pas à me convaincre si facilement. Moi je trouve que cette théorie d'unité nationale avant l'heure est un peu connoté Michelet, non ?

Citer :
Il y a au moins un siècle et demi que plus personne n'y croit.

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