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Message Publié : 04 Jan 2018 18:31 
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Grégoire de Tours
Grégoire de Tours
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Inscription : 09 Déc 2013 19:33
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Localisation : Mon blason devrait vous en donner une petite idée...
Bonjour à tous, et mes meilleurs voeux pour cette nouvelle année!

Après une (trop longue) parenthèse peu intellectuelle sur Football Manager :mrgreen: , je reviens avec une de ces questions que personne ne se pose dont j'ai le secret lol .
21 mars 1152, le mariage de Louis VII de France et d'Aliénor d'Aquitaine est annulé. Tel que je le vois, annulé, ça veut dire qu'il est considéré comme nul, non valide...
...mais dans ce cas, quelqu'un peut-il m'expliquer par quelle pirouette légale les deux filles nées de ce mariage déclaré nul peuvent-elles rester légitimes?!
Et j'ai l'exemple des filles de Louis et d'Aliénor, mais la question se pose pour tous les enfants nés de mariages annulés.
Une explication?
Merci d'avance!

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Message Publié : 04 Jan 2018 19:23 
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Plutarque
Plutarque

Inscription : 10 Juin 2012 15:28
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Bonsoir,

Moi, je dirais quelles sont légitimes par la naissance et que le mariage annulé des parents n'abroge pas la naissance aux yeux de l'église. Le baptême ayant été célébré et celui ci n'ayant pas été "cassé". Ce n'est qu'une hypothèse n'étant pas un spécialiste


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Message Publié : 04 Jan 2018 22:15 
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Tite-Live
Tite-Live

Inscription : 14 Sep 2014 20:36
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Pas de réponse à ta question Camille, mais je te souhaite tout le meilleur pour 2018 !
(et que tu achèves la phase de documentation pour ton roman qui se passe en Europe centrale ;-) )


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Message Publié : 04 Jan 2018 22:44 
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Polybe
Polybe

Inscription : 14 Avr 2013 16:11
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La légitimité n'a rien à voir avec le baptême. Les enfants illégitimes ont toujours été baptisés au même titre que les légitimes.

La réponse à la question de Camille se trouve sur ces deux pages:
http://www.vatican.va/archive/FRA0037/_P40.HTM
et
http://www.vatican.va/archive/FRA0037/_P3S.HTM#9L

Voici les extraits concernés:
"Sont légitimes les enfants conçus ou nés d'un mariage valide ou putatif."
et
"Le mariage invalide est appelé putatif, s'il a été célébré de bonne foi au moins par une des parties, jusqu'à ce que les deux parties aient acquis la certitude de sa nullité."

Cela a un côté illogique mais c'est comme ça.
Le mariage de Louis VII et d'Aliénor d'Aquitaine entre donc dans la catégorie du mariage putatif.

Dans le même ordre d'idée (mais dans l'autre sens), on peut remarquer ça:
"Les enfants illégitimes sont légitimés par le mariage subséquent valide ou putatif de leurs parents, ou par rescrit du Saint-Siège."
Donc, un enfant né bâtard devient légitime si ses parents se marient plus tard.

De toute évidence, l'Eglise catholique essaie d'étendre au maximum la notion d'enfants légitimes. Genre, quand la légitimité d'un enfant est discutable, on est gentil et on dit qu'il est légitime.

Notons que nous avons failli avoir, en France, un roi né bâtard en la personne de César de Vendôme. En toute logique, il serait devenu dauphin si Henri IV avait épousé Gabrielle d'Estrées.
Et, si la monarchie était restaurée aujourd'hui (je sais, c'est plus qu'improbable), nous pourrions avoir un roi issu d'un mariage annulé en la personne de Louis de Bourbon, alias Louis XX.


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Message Publié : 05 Jan 2018 0:55 
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Pierre de L'Estoile
Pierre de L'Estoile

Inscription : 27 Déc 2013 0:09
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La validité du baptême d'une personne n'est en effet aucunement liée à la validité du mariage des parents de cette personne.
La réponse a été donnée par Libiusperseus. Mais il n'y a rien d'illogique.

La question du sort réservé aux enfants nés d'un mariage annulé s'inscrit dans la question plus générale des conséquences d'un acte annulé postérieurement. Ce qui est nul étant réputé n'avoir jamais existé, logiquement, tout ce qui a été accompli à la suite de cet acte nul devrait également être frappé de nullité. Mais cette logique formelle se heurte à la réalité : il est souvent impossible d'ignorer un fait qui s'est réellement produit et, généralement, le législateur prévoit des solutions pragmatiques. Lorsqu'il apparaît qu'une annulation en cascade est matériellement impossible, il n'y a qu'une solution : légitimer. Ainsi le régime de Vichy a-t-il été déclaré illégitime par l'article premier de l'ordonnance du 9 août 1944, ce qui invalidait tous ses actes législatifs et administratifs, mais il est précisé à l'article 2 de cette ordonnance que la nullité devait être expressément constatée, façon de valider toutes les décisions prises par Vichy autres que celles incompatibles avec les principes républicains énumérées aux articles 3 et suivants.

En droit civil, on essaie de minimiser la casse pour les personnes concernées. Autant que possible, on préserve les intérêts des tiers et ceux des parties de bonne foi parce qu'il serait inéquitable de sanctionner des personnes qui n'ont pas commis de faute. Or l'erreur dont être distinguée de la faute.

Louis VII et d'Aliénor d'Aquitaine sont réputés s'être mariés non par fraude mais par erreur, dans l'ignorance de leur degré de parenté qui leur interdisait le mariage. S'ils l'avaient su, ils ne se seraient pas mariés et ils n'auraient pas eu d'enfants. Mais ce qui est fait est fait et les enfants nés de cette union étaient censés être des enfants légitimes. Maintenir cette légitimité après annulation du mariage préservait les intérêts des enfants et correspondait aussi à l'intention initiale des parents laquelle mérite d'être prise en considération en raison de leur bonne foi. C'est pour cela que le droit canon n'assimile pas les enfants issus d'un mariage annulé à des enfants adultérins : ils n'ont pas été conçus dans le péché mais seulement dans l'erreur.


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Message Publié : 05 Jan 2018 4:04 
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Jean Froissart
Jean Froissart

Inscription : 19 Fév 2011 17:03
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Tout cela est aujourd'hui bien élaboré et finement documenté juridiquement comme l'explique Barbetorte.
Mais en était-il de même au XIIème siècle?
Car jusqu'au concile du Latran en 1215, le mariage est essentiellement une affaire privée. l'Eglise n'a pas encore fait prévaloir ses vues pour l'ensemble de la population, loin de là.
Selon Duby, seuls les mariages entre puissants -c'est évidemment le cas ici- étaient noués de manière à être indissolubles, car ils engageait la politique, le temps long et des peuples. C'était en fait les seuls mariages réels, entendons par-là, conformes aux aspirations de l'Eglise et au sens qui s'est imposé depuis.

Mais puisque l'Eglise qui mûrissait son modèle de son côté n'avait pu encore l'imposer, les répudiations étaient beaucoup plus souples. Par exemple, le théoricien du mariage l'évêque Hincmar est bien obligé de faire de la realpolitik et citer à contrecœur Assuerus dans l'A.T. qui répudie sa femme pour pouvoir épouser Esther!

C'est seulement à partir du Xème-Xiième que l'Eglise s'enhardit, forte de son poids dans la société et de sa doctrine maintenant ficelée, à dénoncer des répudiations chez les puissants, et même oser excommunier un souverain.
Et encore, cela ne se fit pas au nom de l'indissolubilité, concept trop éloigné des mœurs du temps, mais en utilisant le prétexte de la consanguinité. On est en plein dans le cas et la période relevés par Camille

Tout ça pour dire que, dans cette période encore floue, je ne pense pas qu'il y ait eu beaucoup de formalisme juridique dans la séparation de Louis et Aliénor, et que l'on se soit beaucoup préoccupé d'effets de droit. Ce qui a surtout dû faire bosser les conseillers, c'était le retour de l'Aquitaine sous l'autorité d'Aliénor!
Alors, dans ce contexte, les enfants... que des filles, en plus :rool:

Un article sur le sujet: Philippe Ariès, le mariage indissoluble, dans Sexualités occidentales, contribution à l'histoire et à la sociologie de la sexualité, p123-137, EHESS, 1982


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Message Publié : 07 Jan 2018 12:11 
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Grégoire de Tours
Grégoire de Tours
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Inscription : 09 Déc 2013 19:33
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Localisation : Mon blason devrait vous en donner une petite idée...
Bonjour à tous et merci pour vos réponses, je n'ai pas été déçue! Je trouve ça assez fascinant, ce cheminement intellectuel pour justifier la légitimité des enfants, c'est passionnant de voir comment, à cette période où l'église est encore liée avec l'État, on plaque les concepts religieux (faute, erreur...) sur le droit civil. Ils s'arrangeaient carrément pour que des décisions dictées par le simple bon sens aient quand même une apparente morale, très fort!
Nico69, je suis au regret de vous apprendre que mon roman est définitivement arrêté, j'ai perdu toute envie de l'écrire et je n'y pense même plus. Après 7 chapitres écrits, tout de même...

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