Pour Helios, Eginhard, Châtillon, madame de Punkadour Vous regrettez l’absence de biographie de Diane de France. Il en existe une, non publiée, écrite par Claude Troquet, décédé maintenant, et moi-même après plusieurs années de recherches. Cette biographie a été relue et appréciée par un professeur de l’Ecole des Chartes, qui a porté lui-même le manuscrit à l’un des grands éditeurs parisiens. En réponse, beaucoup de compliments, mais un refus : la vie d’une personne inconnue écrite par des auteurs inconnus ne trouverait pas de lecteurs ! Je peux au moins répondre aux questions que posent Eginhard, Helios, Mmedepunkadour, et Châtillon, que je remercie pour ses compliments à propos du texte de la SIEFAR, écrit par moi. Les mauvaises relations entre Catherine de Médicis et François de Montmorency sont plus tardives que son mariage secret. Elles sont liées à la réprobation de François devant le massacre de la Saint-Barthélémy, et en particulier, de son cousin Coligny. De plus, quand après le départ du futur Henri III pour la Pologne, la cour est reçue chez les Montmorency, les plus acharnés des « Malcontents » se retrouvent autour du plus jeune fils d’Henri II, François d’Alençon et complotent contre l’autorité royale. François d’Alençon, une tête brûlée, veut se déclarer « chef des Etats opprimés de la chrétienté ». Sans être mêlé à ce complot, Montmorency est soupçonné de l’appuyer. Il est alors convoqué à Vincennes par la famille royale, et s’y trouve presque prisonnier. Diane devine l’arrestation imminente de son mari. Elle va à Vincennes et propose à son mari une ruse : en quittant le château, elle simulera un malaise, pour que François vienne la secourir et en profite pour s’enfuir. Indécision, fatalisme ? Il refuse et lui fait répondre « qu’il est trop tard et qu’il faut attendre la volonté de Dieu ». Le lendemain, il est arrêté et embastillé. Le nom de Diane disparaît cette année-là de la liste des dames d’honneur de la reine. Montmorency doit attendre deux mois pour recevoir une première visite de sa femme et de sa mère. Faute de pouvoir se faire écouter de Catherine de Médicis, Diane décide de s’adresser à Henri III. Après son départ clandestin de Pologne, et son séjour enchanteur à Venise, il est à Lyon. Diane connaît son goût de l’exhibitionnisme et du drame. Elle attend donc un jour où il doit se montrer en public, se met en grand deuil, et le guette, suivie de toutes ses femmes habillées de noir elles aussi. Elle se jette à genoux, et le supplie d’avoir pitié de son mari. Henri III est ému, mais fait une réponse dilatoire. François reste encore de longs mois en prison, sans obtenir de procès, malgré ses supplications. C’est finalement François d’Alençon qui, après sa fuite de la cour, sera à l’origine de la libération de Montmorency, car la reine mère craint que ce jeune homme, qui a beaucoup d’affection et d’estime pour le prisonnier, ne ranime les troubles fomentés par les « Malcontents » et crée un contre-pouvoir. Ne vient-il pas de se proclamer « Gouverneur général pour le roy et protecteur de la liberté et bien public en France » ? Affolée, Catherine se rend à la Bastille et supplie Montmorency d’écrire au fugitif pour le ramener à la raison. Tout se terminera par la « paix de Monsieur », la libération du mari de Diane et sa réhabilitation. Les rapports de Diane avec la reine Marguerite de Navarre n’ont pas été très bons. Elles ont passé ensemble des semaines difficiles au siège de Saint-Jean d’Angély. Mais lors de sa description de cette période pénible et de sa maladie, Marguerite ne fait aucune allusion à Diane, pas plus que dans le reste de ses Mémoires. Ce n’est qu’à l’occasion de son « démariage » avec Henri IV que des traces de leurs relations sont connues : en 1599, Diane donne à Marguerite quelques conseils de bon sens pour obtenir ce démariage. Cinq années plus tard, lorsque le roi Henri IV accepte que Marguerite revienne à Paris, il demande à Diane d’aller à sa rencontre à Longjumeau, d’où Diane emmène Marguerite près du faubourg Saint-Jacques, puis sur le chemin du château de Madrid. Leur sujet de discorde est Charles de Valois, fils naturel de Charles IX et de Marie Touchet. Diane a une grande affection pour ce jeune homme séduisant, mais peu recommandable. Il a beaucoup comploté, en particulier avec sa sœur utérine, Henriette d’Entragues, maîtresse d’Henri IV, et fille de Marie Touchet. Ayant trahi la France au profit du roi d’Espagne, Charles a été condamné à mort, mais, sur les instances de Diane, sa peine a été commuée en un long emprisonnement. Or, la reine Catherine de Médicis a légué à Charles le comté d’Auvergne, et Marguerite de Navarre affirme avoir été frustrée de cet héritage. Elle gagne son procès qu’elle a intenté, mais connaissant l’affection que Diane porte à Charles de Valois, elle craint que cette dernière ne cherche à se venger. Après le meurtre de son favori, Dat de Saint-Julien, par le fils de madame de Vermont, elle imagine que Diane veut protéger « cette meschante fame, qui a si bien instruit des anfans au meurtre et a la magie » . Dernière action publique de Diane : le corps du roi assassiné, Henri IV, est entouré d’honneurs extraordinaires, mais Diane n’oublie pas que celui d’Henri III reste en souffrance à Compiègne, depuis vingt et un an, et demande pour lui une sépulture définitive. Une cérémonie pitoyable se déroule le 23 juin, en présence de Diane, malgré la coutume excluant les femmes des enterrements. Les moines de Saint-Denis ont refusé de se déranger, et ce sont des valets de pied qui portent les restes d’Henri III. Arrivés au milieu de l’église, ils laissent tomber le cercueil ! Le corps est placé à grand peine, car il y a peu de place, dans le caveau où reposent Henri II et Catherine de Médicis. Malherbe, qui a précisé ce détail, conclut par une phrase désabusée : « La fortune se joue des rois en leur vie et en leur mort afin qu’ils se souviennent qu’ils sont du nombre des hommes ».
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