jovien a écrit :
Les Européens ont certainement perçu la baisse de la population amérindienne aux Caraïbes puisque les Amérindiens ont à peu près disparu de celles-ci en très peu de temps.
Ont-ils perçu la baisse de toutes les populations de l'Amérique ? Comme les populations amérindiennes ont subsisté partout ailleurs longtemps après la découverte, et qu'à part ça les connaissances sur l'Amérique étaient très limitées, que de toute façon les estimations de population étaient très mauvaises (je crois qu'au XVIIIème siècle en France l'opinion des gens éclairés était que la population française diminuait), et qu'on ne disposait pas des connaissances modernes sur les épidémies, je suppose que la baisse générale a été peu ou pas perçue, et que, même si elle a été perçue, ça a été comme une hypothèse et non comme un fait avéré et indiscutable.
Il semble que l'hécatombe relevée en Amérique centrale a été rapidement extrapolée au reste des Amériques. Par ailleurs, les relevés de populations des Amériques (hors Caraïbes et Mexique) sont eux-mêmes des extrapolations datant des décennies suivantes. Toutes les estimations de l'hécatombe amérindienne dérivent de cette estimation assez fantaisiste et restent, en conséquence, elles-mêmes très fantaisistes.
jovien a écrit :
Les Européens ont bien perçu une partie du recul démographique des Amérindiens : ils ont tous perçu que les Caraïbes étaient fortement peuplées quand les Européens sont arrivés, et que peu de temps après la population amérindienne s'y était effondrée.
Dans les Caraïbes, l'impact des épidémies et surtout des exactions des conquérants espagnols est mieux documenté que dans le reste des Amériques.
jovien a écrit :
On sait maintenant que, quelles que soient les cruautés des conquérants, le recul est essentiellement dû aux maladies apportées par les Européens.
Ca semble réel au Mexique et dans le reste de l'Amérique centrale. En ce qui concerne le reste des Amériques, une éventuelles hécatombe due aux épidémie reste hypothétique. C'était une thèse des défenseurs espagnols des Amérindiens, qui extrapolaient au reste des Amériques la population mexicaine et le dépeuplement correspondant.
jovien a écrit :
Mais chez Montesquieu par exemple il est affirmé que les Amérindiens ont été exterminés.
Des témoins contemporains ont permis d'estimer les morts violentes d'Amérindiens (conquêtes, exactions, travaux forcés...) à 13 ou 14 millions de morts entre 1492 et le XXe siècle).
Les extrapolations relatives aux pertes par épidémie tourneraient autour d'une moyenne de 36 millions de morts sur la même période.
jovien a écrit :
Quand est-ce qu'on a commencé à comprendre ce qui s'est passé ? Est-ce que des gens avaient vu ou supposé correctement le phénomène avant que la médecine moderne permette de bien le comprendre ?
Aux Caraïbes, les conséquences des exactions ont été immédiatement pesées, avec la disparition des populations autochtones en quelques décennies.
Au Mexique, Cortès a rapidement constaté l'hécatombe épidémiologique en prenant Mexico, aussi bien dans ses rangs d'Amérindiens que dans ceux des Aztèques. Quand ses éclaireurs partirent vers le sud de l'Amérique centrale, ils en revinrent bien vite, faute de ravitaillement : les villages traversés étaient éradiqués par les maladies.
Au Pérou, la mortalité due aux travaux forcés ne faisait pas mystère.
Pour le reste des Amériques, avant l'arrivée des Européens, les hécatombes d'Amérindiens restent hypothétiques, même si de nombreux auteurs et essayistes les tiennent pour réelles. Le cas de l'Amérique du Nord, avec des estimations moyennes d'environ 8 millions de disparus plusieurs décennies avant que les premiers colons anglais et hollandais ne débarquent, laisse particulièrement songeur, surtout quand il est imputé aux USA qui n'existeront que trois siècles plus tard...