Tout cela est vrai, mais là il s'agit plutôt des pontons espagnols, pas anglais...

Passionnants, tous ces détails, et merci pour les recommandations bibliographiques.
L'histoire de ma propre famille confirme l'insalubrité effarante de ces prisons flottantes. Un de mes ancêtres malouins, corsaire malchanceux (eh oui, tout le monde n'est pas Surcouf), a passé 40 mois à mijoter à bord de l'une de ces carcasses, à Chatam, et n'est rentré en France que gravement malade. Les Anglais étaient en tout cas très rigoureux quand ils tiraient le portrait de leurs prisonniers. Je sais ainsi que M. de Kerpoisson (puisque ce de lui qu'il s'agit) mesurait en gros 1.80m, avait les yeux bleus, les cheveux châtains, une tête bien ronde et des marques de petite vérole. Ce système de fiches très détaillées, semble-t-il, a été mis au point pour éviter les usurpations d'identité entre prisonniers.
Le pauvre homme a traîné sa mauvaise santé encore quelques années avant de décéder, le peu de prises qu'il avait faites ne lui ayant jamais été payées. En effet, il joignait à la tuile d'avoir été pris celle d'avoir un frère ardent royaliste, et le Premier Consul Bonaparte a donné personnellement des ordres au ministre de la Marine pour que l'argent dû ne soit jamais versé.

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Une épée n'a jamais tué personne.
Ce n'est qu'un outil dans la main de l'assassin.
Sénèque

Oh, le système d'identification"descriptive" existait à l'époque dans tous les pays...Pas seulement en Angleterre;Logique, d'ailleurs, comment reconnaître les gens avant la photo? On voit d'ailleurs que cela a duré fort longtemps même en france (en témoigne la fiche militaire de l'un de mes arrière-grand-père, établie lors de la guerre de 1914...)

Concernant l'île de Cabrera et de ses prisonniers :

5 mai 1809 : 2 979 officiers et soldats (selon le mémorialiste Gille)
- 1re et 5e Légions de Réserve.
- Marins de la Garde.
- Dragons et Garde de Paris.
- 122e de ligne, (83 morts en huit jours)

9-12 mai 1809 : 1 248 (dont le mémorialiste Ducor)

11 mai 1809 : 40 officiers (demeurés à Palma)
381 officiers (demeurés à Mahon)
178 (dirigés vers Minorque)
4 (remis à Valence)
125 (en provenance d'Alicante)
Au total : 5 337 hommes.

15 mars 1810 : 54 officiers et 12 hommes.

Fin d'été 1810 : 2 500 environ.

1810 : 800 officiers et sous-officiers sont rapatriés en Grande-Bretagne sur intervention de Marie-Adélaïde, veuve de Philippe-Égalité. 600 hommes (surtout des Suisses, Allemands, Italiens sont débauchés pour servir dans l'armée espagnole).

En résumé, environ 9 000 prisonniers débarquent à Cabrera entre 1809 et 1813. Si l'on retranche les prisonniers évacués ou débauchés, et une centaine d'évadés, on arrive au chiffre de 1 500, soit 7 500 hommes.
Il n'est rentré en France, le 6 juillet 1814, que 3 389 hommes, ce qui correspond à plus de 4 000 morts.

La littérature sur Cabrera est très riche. Les Mémoires sont nombreux, un peu comme pour la campagne de Russie. Cet épisode a très fortement marqué les esprits de ceux qui y furent prisonniers. On retiendra :

Caporal (X), De Madrid à Cabrera. Par un caporal de la division Mouton-Duvernet dit "L'Infatigable" (du 6e léger), Paris, 1899.

L.F.Gille, Les prisonniers de Cabrera. Mémoires d'un conscrit de 1808, Paris, 1892.

Louis-Joseph Wagré, Les prisonniers de Cabrera. Souvenirs d'un caporal de grenadiers (1808-1809) publiés par le comte Fleury, Paris, 1902 et réed.

Jean Chabanier, "Le drame de Cabrera", Revue Historique des Armées, 1964/1, pp. 109-122.

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"Passant, va dire à Sparte que trois cents héros sont morts pour elle."
Léonidas aux Thermopyles.

Dans le musée de la jolie ville de Rochester donc tout près des "hulks" , une reconstitution grandeur nature très réaliste d'un ponton qui fait froid dans le dos ....
Et aussi de nombreux objets confectionnés par les prisonniers , des chefs d'oeuvre , faits dans de tels conditions ...Il y en a beaucoup au musée de Peterborough ( camp de prisonniers de Norman Cross), même de petits meubles . Le musée Carnavalet a deux petites guillotines en os , une venant de la prison de Dartmoor

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"De tous les legs du passé qui commandent notre présent, le legs du XVIII siècle est un des plus importants". Pierre Chaunu.

Bonsoir,

Il apparaît que les pontons ne sont pas une exclusivité Britannique et nous pouvons également nous rappeler que des prêtres ont été déportés sur des pontons républicains, anciens vaisseaux négriers : Le "Washington" (sic) et "Les deux associés", ancrés entre l'Ile d'Aix et l'Ile Citoyenne (Ile Madame), entre mars 1794 et février 1795, 829 religieux ont été internés à bords de ces pontons, seuls 282 survivront. Les équipages jetaient les corps à la mer, mais celle-ci les rejetait vers la côte les autorités ont craint une épidémie et finalement c'est dans la vase qu'on a enterré les cadavres, puis après Thermidor le régime s'est assoupli et des inhumations ont pu avoir lieu sur les îles.

Bonsoir,

Petit nouveau sur ce site, je viens de m'inscrire car j'ai la chance d'avoir le témoignage écrit de l'aïeul de mon épouse, engagé "presque" volontaire lors de la levée en masse le 30 juillet 1792 au sein du 3ème bataillon de la garde nationale de la Marne. Pour faire court avec le post qui nous intéresse, il a été capturé en mer alors qu'avec son unité il avait été embarqué pour un exercice d'invasion de l'Angleterre. A la suite de ceci il a fait de nombreuses années sur des pontons anglais. Voici le détail de son histoire pour la période considérée :

Caporal fourrier Julien Pinard - à la 11ème Cie de la 63 1/2 brigade qui forme la 7ème Cie du 2ème bataillon depuis la fin Floréal An 8.

Dans le secteur de Quiberon avec le 1er Rgt Suisse, le 24ème de Ligne, les 44ème et 63ème de Ligne après un embarquement maritime depuis le Sud-Ouest.

Le navire le transportant ne pouvant identifier à temps un vaisseau anglais se retrouve capturé par celui-ci le 2 Brumaire An XIII au large de Brest du côté des côtes d'Ouessants.

Fait prisonnier sur le Windsor Castle (3 ponts 200 canons, 700 hommes d'équipage et 60 d'armes). Transféré sur le Liberty (12 canons) à Torkay. Interné le 15 Brumaire à Plymouth sur le Bien-faisant jusqu'au 14 avril 1805. Transféré jusqu'au 11 novembre 1805 sur le Généreux (80 canons) à Bristol. Transfert de Plymouth à Bristol à pied avec 250 autres prisonniers en traversant le Sommerset et le Devonshire.

Suite à Trafalgar, arrivé de nombreux prisonniers français avec 4 navires sur Bristol et transfert vers Veibridge le 11 juillet 1805 (3 lieues et 1/2 de Bristol (?)). Interné ensuite à la prison de Strapleton.

Libéré en 1814 avec solde de pension de 150 Francs suite à blessure par coup de sabre à la main gauche et usure due aux privations lors de la captivité.

Campagne du Nord 1792-93, an II, III, IV et V,
Campagne du Rhin an VI, VII, VIII, IX et X,
Camp de Bayonne an XI, flotille impériale an XII et XIII.

Je possède des reproductions des dessins de ses campagnes, dont une de Strapelton et une d'un bateau ponton. Les originaux sont en possession des descendants directs de cet homme.

Fils de notable, il avait appris à écrire car il devait reprendre le domaine de son père, propriétaire récoltant de vin de Champagne. Ce que je ne comprend pas vraiment c'est qu'il soit resté caporal fourrier malgré son degrè d'instruction.

Cordialement,

Nicolas

Merci, Dragon .Interessant.Incroyables les capacités de survie des hommes ...Vous serait-il possible de nous mettre ici le dessin du ponton ?

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"De tous les legs du passé qui commandent notre présent, le legs du XVIII siècle est un des plus importants". Pierre Chaunu.

Bonjour,

Je vais faire une photo des dessins en question sous peu.

@+

Nicolas

Voici les deux dessins pour la période qui nous intéresse. La qualité de ma photo est moyenne mais c'est à partir d'une photo des originaux qui est de plus sous verre...

@+

Nicolas

"Antre de misère" ....Pauvres gars
Merci beaucoup, c'est très émouvant .

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"De tous les legs du passé qui commandent notre présent, le legs du XVIII siècle est un des plus importants". Pierre Chaunu.

Effectivement, mais cependant et pour le bonheur de sa famille il est mort de vieillesse bien après !

J'ai travaillé personnellement sur les marins bretons durant cette période. Voici mes résultats:

Dans le quartier de Port-Louis et Riantec (quartier près de Lorient) dans le Morbihan, le taux de mortalité pour les marins pris sur les vaisseaux de l’état est de 17 %.

Pour les marins « civils », 13% décèdent en prison ou des séquelles de la détention.

Des pertes aussi élevées sont aussi provoquées par la longueur de la détention.

J'en avais tiré cette conclusion:

A la vue de tels chiffres, on peut parler d’une véritable politique de destruction des populations maritimes de l’adversaire (alliée à une véritable haine provoquée par la peur de la France conquérante) qui répond à deux objectifs : la suprématie navale par l’asphyxie des réserves de matelots adverses (le manque chronique de matelots nous le dévoile durant la période) et, accessoirement, un avantage économique en supprimant une main d’œuvre qualifiée qui pourrait alimenter la machine commerciale concurrente (Pêcheurs de terre-neuve, équipage de long cours). L’absence d’une réelle politique d’échanges de prisonniers illustre cette forte volonté politique et stratégique.

Bonsoir,

Merci pour ces précisions dont je n'avais même pas idée. Au-delà du simple fait de garder des prisonniers de guerre, il y avait donc bien la volonté d'affaiblir la France en la privant de ses gens de mer.

Cordialement,

Nicolas

Chiffres et déductions intéressantes ,merci , Gemmi.
Rule Britannia !

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