Rapentat a écrit :
Bonsoir,
Que pensait Napoléon de Lasalle et ce malgré la journée de Weissensee.
L’affaire fit en effet quelque bruit.
La colère de l’Empereur avait été déclenchée par ce rapport de Murat en date du 17 octobre 1806 :
« Le général Klein a commis une grande faute, et à son exemple le général Lasalle en a fait une seconde : ils ont laissé passer hier, l'un à Weissensee le général Blücher avec 5 000 hommes, et l'autre une autre colonne à Tennstätdt, parce que le général Blücher leur a assuré qu'il y avait un armistice de six semaines. »
Deux jours plus tard, l’ordre du jour impérial fut sans appel :
« L'Empereur témoigne son mécontentement au général de division Klein et au général de brigade Lasalle, et Sa Majesté ordonne que cette marque de son mécontentement soit mise à l'ordre de l'armée, pour avoir laissé passer deux colonnes ennemies qui étaient coupées, ayant l'un et l'autre l'extrême simplicité de croire ce que le général ennemi Blücher leur a dit qu'il y avait un armistice de six semaines.
Depuis quand est-ce par le canal de l’ennemi que Sa Majesté fait porter ses ordres ?
L'Empereur se flatte que de pareilles erreurs ne seront plus commises ; les lois militaires prononcent les plus grandes peines contre ces officiers dans un cas pareil ; mais la peine la plus sensible pour un officier de la Grande Armée est de n'avoir pas concouru en tout point à l’entier succès des opérations. »
Le désarroi de Lasalle semble avoir été si grand qu’il songea, si l’on en croit Curély (itinéraire d'un cavalier léger de la Grande-Armée ), à « se brûler la cervelle ». On l’en empêcha et Lasalle alla s’expliquer auprès de Napoléon. Sans doute, lui répéta-t-il à cette occasion ce qu’il avait pu écrire dans son rapport à Belliard, le chef d’état-major de Belliard, le 16 octobre :
« En sortant de Lutzensonnern, je voulais prendre la route de Frankenhausen, où l'on disait que l'ennemi se retirait, mais mes avant-postes, en sortant de Greussen aperçurent une colonne de plus de 3000 hommes de toutes armes; un ruisseau et un étroit défilé étaient derrière moi, je le passais d'abord et me mettais en bataille, dans une bonne position, lorsqu'on vint m'instruire qu'un parlementaire se présentait. C'était un officier prussien qui assura de la part du général Blücher, qui commandait la colonne, qu'un armistice avait eu lieu. Sans trop y ajouter foi, j'en ai profité pour venir prendre position à Gebesse, en arrière d'un ruisseau nommé Unstrut, j'y ai rassemblé mes prisonniers et mes chevaux de prise et j'y attends impatiemment vos ordres. Il est pénible pour moi d'avoir la crainte d'avoir fait quelque chose qui ne soit pas dans vos intentions, mais, Monseigneur, j'ai cru bien faire en faisant ce mouvement dont le résultat est à peu près satisfaisant »
La disproportions des forces étaient en effet importante ; ce qui d’ailleurs n’empêcha pas Lasalle d’opérer un mouvement offensif (mais vain) dès le lendemain 17.
Curély rapporte ainsi la réponse de Napoléon :
« On m’avait trompé ; soyez tranquille et continuez à me servir comme vous l’avez fait jusqu’ici. »
Le 11e Bulletin du 19 octobre oublia finalement Lasalle et seul Klein fut égratigné.
Mais l’affaire de Greußen ne doit pas faire oublier toute l’estime que pouvait éprouver Napoléon vis-à-vis de Lasalle.
On peut se souvenir du célèbre propos tenu par le général en chef de l’armée d’Italie au soir de la bataille de Rivoli face aux drapeaux pris à l’ennemi :
« Couche-toi dessus, tu l’as bien mérité. »
(Colbert, Traditions et souvenirs ou, Mémoires touchant le temps et la vie du Général Colbert).
ou encore, pour cette même bataille, des mots élogieux de Bonaparte rapportés par Roguet (Souvenirs militaires) :
« C’est Masséna, Joubert, Lasalle et moi qui avons gagné la bataille de Rivoli »
Bonaparte a-t-il dit « Il suffit d’une signature pour faire un préfet, ce n’est pas de trop de vingt ans pour faire un Lasalle » après la gasconnade d'Agen ? toujours est-il que le bel hommage rendu dans le Bulletin du 8 juillet 1809, lui, n’est pas contestable :
« Le général de division Lasalle a été tué d'une balle. C'était un officier du plus grand mérite, et l'un de nos meilleurs généraux de cavalerie légère. »