Nous sommes actuellement le 28 Mars 2024 13:22

Le fuseau horaire est UTC+1 heure




Publier un nouveau sujet Répondre au sujet  [ 42 message(s) ]  Aller vers la page Précédent  1, 2, 3
Auteur Message
 Sujet du message : Re: Napoléon et la Prusse
Message Publié : 15 Mars 2017 1:01 
Hors-ligne
Grégoire de Tours
Grégoire de Tours

Inscription : 13 Mai 2006 22:36
Message(s) : 631
Localisation : Toulouse
Oliviert a écrit :
Skipp a écrit :
Concernant la Prusse, je pense que le partage la Prusse entre les pays voisins aurait permis de réduire les risques de guerres ultérieurs. La Prusse a toujours été en perpétuelle guerre (Bavière, Autriche, France, Pologne, etc...).
Cela me révolte, cette manière autoritaire de décider du sort d'une nation en la jugeant de loin, à la place du peuple qui vit sur place. Et cette insinuation, selon laquelle les Prussiens serait un peuple plus belliqueux que les autres, n'est pas correcte. Par exemple, ce ne sont pas les Prussiens qui sont allés se battre contre la France vers 1800, mais c'est Napoléon qui est allé à la conquête de l'est et a envahi la Prusse au passage, et non pas le contraire la Prusse qui aurait envahi la France. De même, les Suédois avaient précédemment envahi la Prusse, sans que les Prussiens n'aient envahi la Suède. Idem pour les Polonais avant, qui ont fait reculer les Chevaliers teutoniques. Bien sûr, il y eut aussi des cas où les Prussiens furent belliqueux, mais n'en faisons pas une généralité.

Skipp a écrit :
Comme le disait Mirabeau : « La Prusse n'est pas un État qui possède une armée, c'est une armée ayant conquis la nation »...
Que connait le jeune débauché Mirabeau de la Prusse ? Parlait-il allemand ? Avait-il rencontré des Prussiens et discuté avec eux ? Avait-il voyagé en Prusse ? Non. Il a juste fait un bon mot, basé sur un humour xénophobe et léger, qui n'est pas un jugement de valeur très sérieux.


Messieurs, je vois que ce sujet vous tient à coeur, raison de plus pour se garder des exagérations. Je suis toujours ébahi de voir les stéréotypes issus d’un histoire nationaliste du XIXème siècle (qu’elle soit polonaise, balte, prussienne, française ou autre) tenir lieu de raisonnement 200 ans plus tard.

Evidemment toute phrase du type « le peuple X est ceci ou cela » n’a pas sa place sur un forum dédié à l’histoire.
Rien ne démontre en effet que « le peuple » (quoi que ce terme recouvre) prussien ait été « par nature » (ibid. ) plus belliqueux que d’autres.
Cependant, pour reprendre votre raisonnement, je ne vois pas ce qui vous autorise à traiter Mirabeau de « jeune débauché », vous le connaissez personnellement pour le juger ainsi ? et en quoi cela influe-t-il sur son jugement ? Il est léger, il a de l’humour et en plus il est débauché, bref tout le contraire du solide et sérieux soldat prussien, est-ce le message que vous voulez nous faire passer ? Mais je m’égare...

Ce à quoi fait référence Mirabeau, ce n’est pas au peuple prussien, qu’il ne connaît pas, ni même à l’état teutonique (dont le modèle d’expansion ne se limitait pas à la mise en valeur pacifique de terres désertiques comme vous semblez le dire, mais incluait tout de même le mot « croisade ») mais à la Prusse, en tant qu’entité sur la scène internationale et donc à sa classe dirigeante. Et en l’occurrence la classe dirigeante prussienne à la fin du XVIIIème siècle est constituée d’une noblesse terrienne qui pratique encore à cette époque le servage à une échelle notable (elle résistera encore aux réformes des années 1806-1807), et qui constitue les cadres d’une armée que les derniers souverains (et en particulier Frédéric II) ont utilisée de manière particulièrement efficace et sans scrupule pour agrandir leur territoire aux dépens de leurs voisins.
Globalement sur la période 1740-1806 et même jusqu’en 1870, la Prusse (toujours en tant qu’Etat sur la scène internationale, et donc évidemment au vu des actes de ses monarques et de sa classe dirigeante) est en effet plutôt une puissance belliciste qui déclenche, provoque ou participe activement à de nombreux conflits dans un but clairement expansionniste.
Alors le paysan ou l’artisan prussien n’y est pour rien et subit tout cela, mais je pense que l’image de Mirabeau est assez juste.

Et puisqu’on est dans un sujet sur la campagne de 1806, je trouve votre affirmation sur l’agression napoléonienne assez bizarre.

Oliviert a écrit :
Par exemple, ce ne sont pas les Prussiens qui sont allés se battre contre la France vers 1800,

Vous avez raison, ils y étaient plus tôt que cela. En 1792, pour être précis, le duc de Brunswick (qu’on va retrouver à Iéna) est en Champagne à la tête d’une armée prussienne.

Oliviert a écrit :
mais c'est Napoléon qui est allé à la conquête de l'est et a envahi la Prusse au passage,

Là, pour le coup, on est dans un grand flou, précisez un peu : quel « est » Napoléon a-t-il voulu envahir ?
Si Napoléon s’est retrouvé à « l’est » comme vous dites, c’est parce que l’Autriche est entrée dans la coalition contre la France, sur l’instigation de l’Angleterre qui cherche à provoquer une guerre continentale pour le détourner de ses plans d’invasion du Royaume-Uni. Or loin de l’envahir « au passage », Napoléon cherche à attirer la Prusse dans son alliance et propose même de lui céder le Hanovre.

En 1806, la France et la Prusse signent même un traité d’alliance : où l’on voit bien que Napoléon, déjà en guerre contre l’Angleterre et la Russie, a autre chose à faire que la guerre à la Prusse. C’est la Prusse qui déclenche la mobilisation en août 1806 puis envoie un ultimatum à Napoléon en septembre.


Haut
 Profil  
Répondre en citant  
 Sujet du message : Re: Napoléon et la Prusse
Message Publié : 15 Mars 2017 7:26 
Hors-ligne
Salluste
Salluste
Avatar de l’utilisateur

Inscription : 08 Fév 2017 21:50
Message(s) : 223
Localisation : Liège (Belgique)
Dupleix a écrit :
En 1806, la France et la Prusse signent même un traité d’alliance : où l’on voit bien que Napoléon, déjà en guerre contre l’Angleterre et la Russie, a autre chose à faire que la guerre à la Prusse. C’est la Prusse qui déclenche la mobilisation en août 1806 puis envoie un ultimatum à Napoléon en septembre.

Mais Napoléon qui avait, selon vous, autre chose à faire que la guerre à la Prusse, va quand même faire la guerre à la Prusse.
Dupleix a écrit :
Napoléon cherche à attirer la Prusse dans son alliance et propose même de lui céder le Hanovre.

Mais après avoir proposé le Hanovre à la Prusse, Napoléon revient sur sa proposition afin de disposer du Hanovre comme monnaie d'échange dans les négociations qu'il veut mener avec l'Angleterre, ce qui n'est pas la manière la plus habile d'affermir son alliance avec la Prusse, dont il met ainsi en évidence qu'il lui attache peu d'importance.


Haut
 Profil  
Répondre en citant  
 Sujet du message : Re: Napoléon et la Prusse
Message Publié : 15 Mars 2017 8:51 
Hors-ligne
Modérateur Général
Modérateur Général
Avatar de l’utilisateur

Inscription : 10 Fév 2009 0:12
Message(s) : 9040
Avec le Hanovre, Talleyrand abat une carte maîtresse qui tient la Prusse à l'écart de la coalition austro-russe. "Restez neutres, et vous l'aurez gratuitement". Après cela, la Prusse ne voit rien venir : peut-on penser que Napoléon, mis au courant des atermoiements de Berlin et de ses liens avec la Russie, a été tenté de vider l'abcès, de voir ce qu'ils avaient dans le ventre ?
(On ne parle jamais de l'espionnage, mais Napoléon se renseignait magistralement, d'après Pierre Nord - une référence qui vaut ce qu'elle vaut, mais c'est un fait que tout au long de son aventureuse carrière Napoléon n'a jamais été surpris. Sauf peut-être par des initiatives anglaises style Walcheren, ou par des événements spontanés comme le soulèvement populaire espagnol, le Dos de Mayo.)

Avec l'armée qui venait de gagner à Austerlitz, sans discussion possible la meilleur du monde, et peut-être le sentiment que l'armée prussienne - dont on avait tout de même enregistré la contre-performance de Valmy - était une armée en carton-pâte, il pouvait tester la Prusse en prenant le risque d'une guerre.

_________________
Les raisonnables ont duré, les passionnés ont vécu. (Chamfort)


Haut
 Profil  
Répondre en citant  
 Sujet du message : Re: Napoléon et la Prusse
Message Publié : 15 Mars 2017 12:22 
Hors-ligne
Grégoire de Tours
Grégoire de Tours

Inscription : 18 Avr 2015 15:58
Message(s) : 681
Localisation : Kaamelott
Pierma a écrit :
Avec le Hanovre, Talleyrand abat une carte maîtresse qui tient la Prusse à l'écart de la coalition austro-russe. "Restez neutres, et vous l'aurez gratuitement".

C'est le fruit d'une réflexion personnelle ou vous avez des sources ?

Citer :
Après cela, la Prusse ne voit rien venir : peut-on penser que Napoléon, mis au courant des atermoiements de Berlin et de ses liens avec la Russie...

"La Prusse ne voit rien venir" : c'est à dire ?
"Les atermoiements de Berlin" : c'est à dire ?

Citer :
Avec l'armée qui venait de gagner à Austerlitz...

Vous mettez l'épisode des échanges concernant le Hanovre après Austerlitz ?

_________________
"L'histoire remplit le vide du présent et se transforme elle-même en espérance !"


Haut
 Profil  
Répondre en citant  
 Sujet du message : Re: Napoléon et la Prusse
Message Publié : 15 Mars 2017 15:18 
Hors-ligne
Modérateur Général
Modérateur Général
Avatar de l’utilisateur

Inscription : 10 Fév 2009 0:12
Message(s) : 9040
ezio-auditore a écrit :
Pierma a écrit :
Avec le Hanovre, Talleyrand abat une carte maîtresse qui tient la Prusse à l'écart de la coalition austro-russe. "Restez neutres, et vous l'aurez gratuitement".

C'est le fruit d'une réflexion personnelle ou vous avez des sources ?

J'ai lu ça dans "Austerlitz" un récit captivant de la bataille (et de son cadre international) par Claude Manceron.

Citer :
Citer :
Après cela, la Prusse ne voit rien venir : peut-on penser que Napoléon, mis au courant des atermoiements de Berlin et de ses liens avec la Russie...

"La Prusse ne voit rien venir" : c'est à dire ?
"Les atermoiements de Berlin" : c'est à dire ?

Si la Prusse attend un accord sur le Hanovre, rien ne bouge.
On a vu dans les échanges précédents que la Prusse joue une sorte de double-jeu et balance entre deux tendances. Le mot "atermoiement" est mal choisi.

Citer :
Citer :
Avec l'armée qui venait de gagner à Austerlitz...

Vous mettez l'épisode des échanges concernant le Hanovre après Austerlitz ?

Dans l'hypothèse où Napoléon lanterne la Prusse pour voir comment elle évolue (mais c'est une question que je pose) les débats à Berlin sur la position à tenir ont lieu après Austerlitz.

_________________
Les raisonnables ont duré, les passionnés ont vécu. (Chamfort)


Haut
 Profil  
Répondre en citant  
 Sujet du message : Re: Napoléon et la Prusse
Message Publié : 15 Mars 2017 17:08 
Hors-ligne
Fustel de Coulanges
Fustel de Coulanges
Avatar de l’utilisateur

Inscription : 06 Fév 2004 7:08
Message(s) : 3532
Quelques réflexions sur le Hanovre.

Ce territoire a vite pris une position importance dans les relations diplomatiques franco-prussiennes. Ainsi, le 22 août 1805, Napoléon écrivait à Talleyrand :
« La situation de mes armées et la position de mes forces ne me permettent aucune transaction de faiblesse. En donnant le Hanovre à la Prusse, je lui donne un bien qui, sans exagération, augmente ses forces de 40 000 hommes et améliore la situation de ses États, de la même manière que Gênes améliore le Piémont.
[…]
Le langage de M. Laforest [ambassadeur de France à Berlin] doit être simple et fier. C'est une offre que je fais à la Prusse; mais il faut nous entendre : c'est une offre que je ne referai point dans quinze jours. Si le cadeau du Hanovre à la Prusse, portant cette puissance à se déclarer pour moi, fait trembler la Russie et l'Autriche, et me laisse librement et sans inquiétude le maître de me livrer à ma guerre maritime, je croirai être indemnisé de ce grand accroissement de puissance que va prendre la Prusse. Mais une fois que j'aurai levé mon camp de l'Océan, je ne puis plus m'arrêter; mon projet de guerre maritime est tout à fait manqué ; alors je ne gagnerai plus rien à donner le Hanovre à la Prusse. Il faut donc qu'elle se décide sur-le-champ. »

Deux jours plus tard, Duroc, chargé de mener les négociations, recevait ses instructions et la lettre de l'Empereur qu’il devait transmettre à Frédéric-Guillaume. La question du Hanovre y était logiquement abordée :
« Je me réjouirai de tous les nouveaux liens qui resserreront nos États. Nos ennemis sont communs. L'acquisition du Hanovre est géographiquement nécessaire à Votre Majesté, surtout lorsque l'Europe se trouve partagée entre de si grandes puissances. »

Duroc arriva à Berlin le 1er septembre et y rencontra Hardenberg le 2 et le roi le 3. Il fit de suite son rapport à Talleyrand et y coucha l’avis de Frédéric-Guillaume :
« La possession du Hanovre était en effet d’un grand avantage pour la Prusse, mais que les avantages qu’elle en retirerait ne seraient que dans l’avenir, le pays étant épuisé dans ce moment, et qu’en cas de guerre les plus belles provinces et celles qui sont les plus fertiles étaient les plus exposées aux coups des ennemis. »

En somme, la Prusse avait plus à y perdre qu’à y gagner, et les pourparlers sur le Hanovre (pas plus que les projets d’alliance) n’allèrent pas plus loin et furent définitivement enterrés avec la violation d’Anspach et la signature de la Convention de Postdam le 3 novembre.

Ils reprirent suite à Austerlitz, alors qu’Haugwitz avait été envoyé à l’origine auprès de Napoléon afin de mener la médiation armée définie à Postdam. Un traité, rédigé le 15 décembre, établissait une alliance offensive et défensive entre la France et la Prusse. Dans ce cadre, le Hanovre était offert à Berlin.
Ledit traité ne fut pas ratifié par Frédéric-Guillaume, notamment au nom de l’alliance de 1800 entre la Prusse et la Russie. L’article concernant le Hanovre fut commenté en ces termes :
« Quant au pays de Hanovre, il fallait bien distinguer entre l’occupation et la propriété.
La première, même seule, est pour moi d’un très grand prix, comme le seul gage de la neutralité du Nord. L’autre ne peut être la suite que du traité de paix entre la France et l’Angleterre, si alors S.M. Britannique peut être contrainte au sacrifice. Je serais en guerre avec elle, d’envisager la chose autrement, et il faudrait pour cela que mon nouveau rapport m’eût jeté hors de tous les principes qui jusqu’à présent m’ont servi de règle. »

Haugwitz fut envoyé à Paris afin de renégocier le traité du 15 décembre. Il arriva le 1er février pour y être sévèrement tancé vis-à-vis de l’attitude de son souverain. Un nouveau traité fut finalement établi le 15. Là encore, le Hanovre était offert à la Prusse (à la différence du traité du 15 décembre, la Prusse devait à présent fermer ses ports aux Anglais). Haugwitz ne cacha pas ses craintes en cas de non-ratification :
« Votre Majesté jugera dans sa sagesse le parti pour lequel elle croira devoir se décider, mais je serais traître à la vérité et à ma patrie si je lui dissimulais un instant qu’il ne lui reste que le choix des deux partis suivants : la guerre ou la ratification du traité, et que, si elle se détermine à ratifier le traité, il importe qu’elle le fasse promptement et de manière à convaincre Napoléon de la sincérité de ses sentiments.
Pour le cas de la guerre, Votre Majesté doit s’attendre que tout y est préparé. Bernadotte et Augereau vont en avant. »

Le traité fut reçu le 23 février à Berlin et Frédéric-Guillaume le ratifia le 26.
On comprend la colère qui balaya la cour de Berlin quand on apprit en Prusse que Napoléon dans ses négociations avec l’Angleterre entendait, sans en avertir Frédéric-Guillaume, rendre le Hanovre prussien aux Britanniques.

_________________
" Grâce aux prisonniers. Bonchamps le veut. Bonchamps l'ordonne ! " (d'Autichamp)


Haut
 Profil  
Répondre en citant  
 Sujet du message : Re: Napoléon et la Prusse
Message Publié : 15 Mars 2017 18:06 
Hors-ligne
Fustel de Coulanges
Fustel de Coulanges
Avatar de l’utilisateur

Inscription : 06 Fév 2004 7:08
Message(s) : 3532
Lei Ming Yuan a écrit :
Dupleix a écrit :
En 1806, la France et la Prusse signent même un traité d’alliance : où l’on voit bien que Napoléon, déjà en guerre contre l’Angleterre et la Russie, a autre chose à faire que la guerre à la Prusse. C’est la Prusse qui déclenche la mobilisation en août 1806 puis envoie un ultimatum à Napoléon en septembre.

Mais Napoléon qui avait, selon vous, autre chose à faire que la guerre à la Prusse, va quand même faire la guerre à la Prusse.


A noter que dans les jours précédant le traité du 15 février, Napoléon envisageait la possibilité de devoir se battre contre une Prusse (dont la cour était jugée par l'Empereur, dans sa lettre à Joseph du 7 février, "bien fausse et bien bête") alliée à la Russie.
Logiquement, après la ratification du traité, cette éventualité disparut.
La guerre avec la Prusse survint en octobre, entre les deux époques, de l'eau avait coulé sous les ponts...

Une réflexion sur l'ultimatum prussien du 1er octobre : on dit souvent que ce texte déclencha l'ouverture des hostilités. Pourtant, le 5 octobre, Napoléon ordonnait à Soult d'entrer à Bayreuth pour le 8. L'ultimatum ne fut connu de l'Empereur que le 7 au matin.

_________________
" Grâce aux prisonniers. Bonchamps le veut. Bonchamps l'ordonne ! " (d'Autichamp)


Haut
 Profil  
Répondre en citant  
 Sujet du message : Re: Napoléon et la Prusse
Message Publié : 15 Mars 2017 19:37 
Hors-ligne
Salluste
Salluste

Inscription : 29 Août 2009 19:30
Message(s) : 252
Localisation : METZ
Oliviert a écrit :
La Prusse existe depuis l'arrivée des Chevaliers Teutoniques au Moyen Age. Je connais un peu le sujet, comme le montre l'avatar que je me suis choisi, qui représente Nicolas Copernic, lequel était prussien.
Tient, j'ai toujours cru que Copernic était polonais. J'ai toute une série de timbres polonais de l'époque soviétique à son image.

Je pense qu'il faut bien distinguer la Prusse ducale et la Prusse royale. C'est de la Prusse royale qu'il est question ici, un marquisat qui s'appelait Brandebourg, et qui a changé de nom lorsqu'il a été érigé en royaume. Les chevaliers teutoniques n'ont qu'un lien très indirecte avec cette construction politique. D'ailleurs, ces derniers n'ont jamais digéré la sécularisation de la Prusse (au profit de la Pologne, puis du Brandebourg), et émettaient encore des protestations en ce sens au XIXe.

Ce n'est pas parce que Napoléon atomise la Prusse en 1806 que c'est lui l'agresseur. Lors de la campagne des sept torrents de 1805, un de ses corps d'armée traverse sans autorisation une petite partie du territoire prussien. C'est condamnable, mais courant à cette époque, et on ne peut pas parler d'invasion. C'est vrai que le même Napoléon ne livre pas le Hanovre promis, mais techniquement, il est encore en guerre contre la Russie.

Si la Prusse s'était tenu tranquille, on peut très raisonnablement supposer qu'elle n'aurait pas été envahie. Après, rien ne permet d'être sûr qu'elle aurait eu le Hanovre ;)

Quant à la question initiale, Napoléon donne la réponse. La paix avec le tsar était, comme la plupart des paix, une paix de compromis. Détruire la Prusse n'aurait probablement pas aboutit au traité de Tilsit, et donc la guerre contre un pays difficile à envahir (malgré la campagne de 1812, Napoléon en avait conscience) aurait continuer.

_________________
Une fable à découvrir :
http://www.edilivre.com/doc/16397


Haut
 Profil  
Répondre en citant  
 Sujet du message : Re: Napoléon et la Prusse
Message Publié : 15 Mars 2017 19:40 
Hors-ligne
Marc Bloch
Marc Bloch

Inscription : 10 Fév 2014 7:38
Message(s) : 4404
Localisation : Versailles
sans vouloir jouer à l'expert, je crois me souvenir (:-)) qu'en 1806 eurent lieu des négociations franco-britanniques. N'était il pas logique pour la France de rendre aux Anglais le Hanovre comme cela avait été fait lors des guerres précédentes (1748 de mémoire) ?

Napoléon se serait il dès lors emmêler les pinceaux en promettant le même Hanovre aux Prussiens et aux Anglais ? ou bien aux Prussiens puis aux Anglais ?

Ou Talleyrand avait il perdu son savoir faire ?


Haut
 Profil  
Répondre en citant  
 Sujet du message : Re: Napoléon et la Prusse
Message Publié : 15 Mars 2017 20:11 
Hors-ligne
Grégoire de Tours
Grégoire de Tours

Inscription : 18 Avr 2015 15:58
Message(s) : 681
Localisation : Kaamelott
Pierma a écrit :
J'ai lu ça dans "Austerlitz" un récit captivant de la bataille (et de son cadre international) par Claude Manceron.

Je n'ai rien à ajouter : Cyril a cité ce que j'avais en tête.
Peut-être remettre le contexte pour ne pas trop charger FG.
Les armées d'Alexandre 1er étaient aux frontières de la Prusse et semblaient obliger le roi à faire partie de la coalition (Metternich). Alexandre insiste via Dolgorouki :
"Retournez auprès de l'empereur votre maître, annoncez lui ma résolution inébranlable. Je vous enverrai sans délai une lettre confirmative." (Metternich)

FG veut rester neutre. Il apprend que les troupes de Napoléon sont entrées à Anspach le 3 octobre :
"Les choses ont changé de face. Allez de ce pas chez le prince Dolgorouki. Je le chargerai d'une lettre par laquelle j'annonce à l'empereur que je lui ouvre les frontières de mon royaume" (Metternich).

A Berlin, l'arrivée des Français à Anspach déchaîne les passions, les militaires veulent défendre le territoire de la patrie.

7 octobre : il est décidé (Conseil des Ministres) que la Prusse est déliée de tout engagement vis à vis de la France, libre passage sera accordé aux troupes russes.

9 octobre : le conseil se prononce pour la neutralité armée.

Hardenberg à Laforest : "SM ne sait si elle doit s'étonner davantage des violences que les armées françaises se sont permises dans ses provinces ou des arguments inconcevables par lesquels on prétend les justifier. Le roi se considère comme libre de toute obligation antérieure au moment présent. Il n'a plus d'autres devoirs que sa propre sûreté et de la justice universelle..."

Hardenberg ordonnait dans le même moment à Brunswick de s'emparer du Hanovre. Raté. FG est encore plus décontenancé. Le tsar se rend à Berlin pour pousser la Prusse.
C'est ensuite que Napoléon propose de donner le Hanovre au roi de Prusse. L'offre n'est valable que deux semaines.

FG hésite toujours et se voit en médiateur. Metternich à Hardenberg, le 17 octobre : "Laquelle (médiation) ? Celle que nous avons proposée dans le sens du traité du 11 avril ? Le roi a donc l'air de vouloir être médiateur dans sa propre cause ?"
Bataille d'Ulm. Napoléon à Duroc, 2 brumaire An XIV :
[Le but pour lequel vous restiez à Berlin est manqué puisqu'il n'est plus question d'alliance. Je ne suis pas au fait de ce qui se fait à Berlin étant depuis 15 jours sans nouvelles de M. Talleyrand et des vôtres ; mais j'entends dire partout que la Prusse est fort mal pour moi, qu'elle veut arracher mes aigles du bord de l'Elbe. Laissez entrevoir, avec ménagements, que mes aigles n'ont jamais souffert d'affronts et que nous sommes encore la même nation qui a résisté à la Prusse, à l'Autriche, à la Russie et à l'Angleterre réunies ; ne dites cela que lorsqu'il le faudra ... Dites au roi en prenant congé :
"Sire, l'Empereur me mande près de lui. Il voulait écrire à VM pour l'informer de ses succès mais il n'ose plus étant vaguement instruit, par les bruits de l'Allemagne, que ses ennemis lèvent la tête à Berlin ... Sire vous avez en l'empereur un ami capable de venir des extrémités du monde à votre secours. L'Empereur est peu connu en Europe ; c'est plus un homme de coeur encore qu'un homme politique.
Serait-il possible que VM voulût, par une conduite douteuse, aliéner un homme d'un si grand caractère et qui lui est si attaché ? L'affaire d'Anspach n'est qu'un vain prétexte ; le territoire de cette province n'est pas compris dans le traité ; ce motif a suffi au prince Ferdinand qui s'est échappé par là..."
Dites-lui ces mots d'une parole claire ... Vous y ajouterez que l'Empereur ne tient pas au Hanovre mais qu'il faut qu'on y mette les formes ... que l'empereur est l'homme du monde sur lequel les menaces ont le moins d'effet et qui s'en irrite le plus ; qu'il sait bien que Frédéric, avec la Prusse, a résisté à l'Europe entière et que tout le monde sait que l'empereur a des armées différentes de celles du Comité de Salut Public.

Le 27 octobre, Napoléon rappelle au roi de Prusse qu'il avait lui-même proposé d'accroître ses Etats de l'Electorat : "... depuis, j'ai consenti à lui (l'Angleterre) donner le Hanovre en dépôt, et si toutes les conditions n'ont point eu son assentiment, Sire, elles n'ont point été imaginées ... tout ce qui m'offrira les moyens de regagner l'amitié et la confiance de VM, je suis prêt à le faire..."

Alexandre Ier et Metternich sont à Berlin, le 3 novembre le traité de Postdam est signé.

Citer :
Dans l'hypothèse où Napoléon lanterne la Prusse pour voir comment elle évolue (mais c'est une question que je pose) les débats à Berlin sur la position à tenir ont lieu après Austerlitz.

Il semble que l'Empereur avait déjà "évalué" la capacité de la Prusse non pas à "évoluer" mais à "se positionner". Il semble que ce soit la pire difficulté à surmonter en tant que souverain.
Après Austerlitz :
"Laforest voyait fort bien que le roi de Prusse ne voulait point s'immiscer entre la France et l'Autriche, qu'il désirait traiter de ses intérêts particuliers et qu'il voulait obtenir des avantages en compensation qu'il se montrait disposé à donner" (Rapport du 18 décembre 1805).
:wink:

_________________
"L'histoire remplit le vide du présent et se transforme elle-même en espérance !"


Dernière édition par ezio-auditore le 15 Mars 2017 20:23, édité 1 fois.

Haut
 Profil  
Répondre en citant  
 Sujet du message : Re: Napoléon et la Prusse
Message Publié : 15 Mars 2017 20:20 
Hors-ligne
Grégoire de Tours
Grégoire de Tours

Inscription : 18 Avr 2015 15:58
Message(s) : 681
Localisation : Kaamelott
Jerôme a écrit :
Napoléon se serait il dès lors emmêler les pinceaux en promettant le même Hanovre aux Prussiens et aux Anglais ? ou bien aux Prussiens puis aux Anglais ?

Cf. : le post de Cyril.

_________________
"L'histoire remplit le vide du présent et se transforme elle-même en espérance !"


Haut
 Profil  
Répondre en citant  
 Sujet du message : Re: Napoléon et la Prusse
Message Publié : 15 Mars 2017 20:34 
Hors-ligne
Fustel de Coulanges
Fustel de Coulanges
Avatar de l’utilisateur

Inscription : 06 Fév 2004 7:08
Message(s) : 3532
Jerôme a écrit :
Napoléon se serait il dès lors emmêler les pinceaux en promettant le même Hanovre aux Prussiens et aux Anglais ? ou bien aux Prussiens puis aux Anglais ?


J’ai du mal à comprendre ce que vous entendez comme promesse faite à la Prusse. Le Hanovre fut bien donné à Berlin en vertu du traité de Paris du 15 février 1806 :
« Art. 1er. S.M. le roi de Prusse prendra possession des Etats que le Roi d’Angleterre possède en Allemagne, pour les posséder en toute souveraineté »

Suite la ratification du roi de Prusse, un édit fut rendu le 1er avril suivant :
« Le désir d'assurer à nos fidèles sujets, ainsi qu'aux États voisins de nos provinces du nord de l'Allemagne, les bienfaits de la paix pendant la durée de cette guerre, a été l'unique objet de nos soins. Nous nous flattions d'atteindre ce but désiré par le parti que nous primes, à la suite de ces derniers événements, et que nous fîmes connaître par notre patente du 27 janvier 1806, d'après laquelle les États de la maison électorale de Brunswick-Lunebourg en Allemagne seraient occupés par nos troupes et garantis par nous. Mais, comme depuis la cession de trois provinces de notre monarchie, faite dans l'intention d'assurer une tranquillité durable à nos sujets ainsi qu'aux États limitrophes, nous avons conclu une convention avec S. M. l'empereur des Français et roi d'Italie, par laquelle, en cédant trois de nos provinces, et en vertu de garanties réciproques et solennelles, S. M. I. nous a cédé les droits légitimes qu'elle a sur les États de Brunswick-Lunebourg en Allemagne, et qui lui étaient dévolus par droit de conquête;
En conséquence, nous déclarons par la présente que dès ce moment les États de la maison électorale de Brunswick-Lunebourg en Allemagne sont considérés comme nous appartenant et comme soumis à notre autorité. A dater de ce jour, ces États sont gouvernés et administrés en notre nom. Nous enjoignons à toutes les autorités du pays de continuer leurs fonctions en notre nom et sous la direction suprême de notre commissaire administrateur, le général de cavalerie comte de Schulenbourg-Kehet, et de la commission établie par lui. Nous espérons que la noblesse, les prélats, les bourgeois et tous les sujets du pays se soumettront volontairement à un ordre de choses qui sera pour eux une nouvelle époque de tranquillité et de prospérité, et qu'ils prouveront l'amour qu'ils ont pour la patrie en nous témoignant les sentiments qui doivent les attacher à notre personne. De notre côté, nous ne négligerons aucune occasion de leur prouver notre sollicitude paternelle et le désir que nous avons de les rendre heureux. »


En revanche, concernant l’Angleterre, il ne s’agissait que de projet. Ainsi, il était dit :
« S. M. l'Empereur Napoléon reconnaît S. M. le roi du royaume uni de la Grande-Bretagne et d'Irlande comme souverain du Hanovre. Cette souveraineté comprend toutes les possessions de Sadite Majesté Britannique dans le nord de l'Allemagne avant la présente guerre. »

Dans ses observations concernant ledit traité, Napoléon ajoutait (lettre à Talleyrand, 6 août 1806) :
« Les deux hautes parties contractantes s'engagent à réunir leurs efforts pour que S. M. le roi de Prusse restitue le Hanovre à l'Angleterre, sans délai, moyennant, 1° une restitution de toutes les prises, etc. comme à la fin de l’article second ; 2° une indemnité prise autour de lui et équivalant à 400 000 âmes. »

Comme déjà dit, le projet n'aboutit pas et provoqua la colère de Berlin, qui, à cette date, s'était déjà tourné franchement du côté de la Russie.

_________________
" Grâce aux prisonniers. Bonchamps le veut. Bonchamps l'ordonne ! " (d'Autichamp)


Haut
 Profil  
Répondre en citant  
Afficher les messages publiés depuis :  Trier par  
Publier un nouveau sujet Répondre au sujet  [ 42 message(s) ]  Aller vers la page Précédent  1, 2, 3

Le fuseau horaire est UTC+1 heure


Qui est en ligne ?

Utilisateur(s) parcourant ce forum : Aucun utilisateur inscrit et 15 invité(s)


Vous ne pouvez pas publier de nouveaux sujets dans ce forum
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
Vous ne pouvez pas éditer vos messages dans ce forum
Vous ne pouvez pas supprimer vos messages dans ce forum
Vous ne pouvez pas insérer de pièces jointes dans ce forum

Recherche de :
Aller vers :  





Propulsé par phpBB® Forum Software © phpBB Group
Traduction et support en françaisHébergement phpBB