Voici une estampe représentant les feux d’artifice tirés à l’Etoile des Champs Elysées, le 14 juillet 1801.
En haut à droite, le fameux ballon détonnant :
Celui qui avait réalisé l’artifice était Claude-Fortuné Ruggieri (1777-1841). Dans « Eléments de pyrotechnie », ce dernier évoqua cet aérostat particulier.
Afin de mieux comprendre le texte, voici cette planche :
« [Garnerin] me chargea de composer l'artifice d'un ballon qui fut lancé à la fête du 14 juillet an 9 (1801) ; et dont voici la description :
Après un cercle de quatre mètres deux décimètres (douze pieds huit pouces) de diamètre, était suspendue, au-dessous du ballon , une étoile de même grandeur. Sous cette étoile, était encore suspendue une bombe sphérique de trois décimètres huit centimètres (quatorze pouces) de diamètre extérieur.
Voyez la fig. 1ère de la pl. 22.
L'étoile prit feu d'abord; elle était en lances de deux couleurs : lorsqu'elle eut terminé son effet, elle communiqua son feu au cercle, autour duquel étaient attachées près de cent chandelles romaines à double effet : dans le premier, elles représentaient des rayons de feu lumineux; dans le second, les étoiles qui s'échappaient de ces rayons, remplissaient dans l'air l’étendue d'un cercle de plus de quarante mètres (vingt toises environ) de diamètre.
Lorsque les chandelles romaines eurent terminé leur effet, elles donnèrent leur feu à la bombe, qui, en éclatant, le communiqua elle-même au ballon.
L'explosion de la bombe et la détonation du ballon produisirent dans l'air des feux variés que le public voulut bien honorer par de nombreux applaudissements, témoignage de sa satisfaction, et dont on se souvient assez.
La surprise des spectateurs fit connaître que ce n'était point un effet ordinaire, et les suffrages de ces mêmes spectateurs, furent la plus flatteuse récompense qu'on put m'offrir.
Manière de faire un Ballon qui puisse enlever de l'artifice, et semblable à celui qui fut lancé dans les Champs-Elysées, à la fête du 14 juillet an IX (1801).
Il faut d'abord construire un aérostat de forme sphérique, en taffetas gommé, à peu près du diamètre de dix mètres (trente pieds neuf pouces), et rempli de gaz hydrogène, obtenu par le mélange et la combinaison du fer et de l'acide sulfurique étendu d'eau, c'est-à-dire, affaibli par l'eau.
Ce ballon doit être revêtu d'un filet de forte ficelle, pour qu'on y puisse suspendre l'artifice. Ce filet se fait de même que ceux qu'on a pour prendre les oiseaux et les poissons ; mais on observe d'y faire de très petites mailles, à l'endroit qui pose au sommet du ballon, et de les agrandir à mesure que la circonférence augmente.
Ensuite on fait une bombe moulée en carton, du diamètre de trois décimètres huit centimètres (quatorze pouces).
On emplit cette bombe d'étoiles blanches.
Voyez l'article Bombettes, pour la manière de les remplir lorsqu'elles sont sans chasse ; voyez aussi l'article Bombes, puisque la bombe du ballon s'emplit de même que les autres bombes, et qu'au lieu d'y mettre une espolette, on la remplace alors par un fort conduit qui communique le feu à la bombe aussitôt que les effets qui doivent précéder sont terminés. Du reste, il faut toujours, dans ces occasions, bien s'assurer de la confection de la bombe, pour prévenir les accidents qui pourraient en résulter si elle retombait sans éclater.
On conçoit que si cette bombe n'a pas besoin de chasse, c'est qu'elle est portée à une grande élévation par l'ascension du ballon. Pour la suspendre au ballon, il faut avoir soin, en la construisant, de lui attacher des oreilles en cordage, telles que la lettre A de la fig. 5, A pl. 21.
(On peut de même, si l'on veut, donner toute autre forme à cette bombe : par exemple, celle d'un vase. ) Ensuite, on construit une étoile comme celle dont je viens de parler : pour cela on fait refendre de longues planches : de celles que l'on nomme voliges, afin d'en tirer des tringles de vingt-sept millimètres (un pouce) d'équarrissage. Ces tringles refendues et apprêtées, on les assemble pour en faire une étoile, fig. 7. pl. 21.
Cette étoile doit être à lignes-doubles; c’est-à-dire que les lignes extérieures sont pour être mises d'une couleur, et les lignes intérieures d'une autre. Cette diversité de couleurs est pour faire sentir et ressortir l’étoile du dedans, qui sans cela serait confondue avec l'autre.
Quand l'étoile est faite, on attache sur un cercle des chandelles romaines. (Il y en avait quatre-vingt-seize sur le ballon dont il est question.) Ce cercle doit être en bois léger, et de quatre mètres, environ (douze pieds), de diamètre extérieur. On a soin d'y adapter huit ou dix rayons d'une épaisseur inférieure pour qu'il ne puisse casser quand on l'attache au ballon. Lorsque les chandelles romaines sont
attachées sur ce cercle, on les communique l'une à l'autre, etc.; ensuite, par le moyen d'un conduit qui se trouve communiqué à la fin d'une chandelle romaine, on fait prendre feu à la bombe et au ballon : ainsi donc, l'étoile
est le premier effet, les chandelles romaines le second, et la bombe le troisième.
La fig. 1ère de la pl. 22, représente le ballon garni d'artifice et prêt à partir. On y met le feu au moment même où on va le lancer, et on a soin de mettre à la communication un retard pour laisser au ballon le temps de s'élever un peu, avant que l’entrée prenne feu. A, est le ballon recouvert d'un filet qui reçoit des fils ou cordages auxquels on suspend l'artifice : ces cordages sont marqués B ; au-dessus de C, est l'orifice du ballon ; D, est le cercle portant les chandelles romaines; E, est l'étoile; F, est la bombe.
On peut adapter de l'artifice aux montgolfières (qui ne s'enlèvent que par la chaleur), comme on le fait aux ballons de gaz hydrogène de M. Charles ; mais il faut observer qu'une montgolfière, de même grandeur a beaucoup moins de force d'ascension que les ballons remplis de gaz hydrogène; et ce qui rend l'usage des premiers doublement embarrassant, c'est qu'ils ont besoin d'un réchaud sans cesse animé pour prolonger ou entretenir leur ascension : sans cela, la chaleur venant à se dissiper, et l'air atmosphérique la remplaçant immédiatement, le ballon retombe aussitôt. Ces inconvénients font qu'il est difficile de placer de l'artifice aux montgolfières : ils n'empêchèrent cependant pas M. Garnerin de l'entreprendre et même d'y réussir plusieurs fois, au petit Trianon, dans le parc de Versailles ; ce sont même ces essais qui l'ont déterminé à tenter la chose plus en grand au 14 juillet an 9 (1801), où elle obtint le succès le plus complet.
La fig. 10 de la pl. 22, représente une montgolfière. A, est l'ouverture ou l'orifice par on l'on chauffe cette sorte de ballon.
Autour de cette ouverture, on voit des petites ficelles collées qui tiennent toute la hauteur du ballon : elles servent à suspendre l'artifice qu’on y veut mettre, ainsi que le réchaud, pour le soutenir dans l'air. Cette espèce de ballon est exempte de filet.
La fig. 11 de la même planche est un assemblage de deux ronds en cerce de bois de boisselier.
Ces deux ronds sont tenus par des petits montants: c'est sur cette espèce de construction qu'on peut mettre des fusées volantes, afin de faire un bouquet de surprise en l'air. Le rond inférieur sert à soutenir en dedans les queues, des baguettes de fusées volantes, afin que les fusées, en s'élevant, ne puissent attraper le ballon. »