Caesar Scipio a écrit :
Une nuance tout de même : malgré cet avantage stratégique pour le Royaume-Uni, la victoire n'était pas garantie pour les britanniques. Car n'oublions pas que le R-U n'avait pas les moyens de battre directement Napoléon. Il pouvait juste solliciter et financer des coalitions de mécontents sur le continent. Or les ressources et la volonté d'en découdre de l'Autriche, de la Prusse et de la Russie n'étaient pas inépuisables non plus.
Si Napoléon était parvenu à conclure des accords acceptables avec les grandes puissances européennes, entérinant une domination française nette mais pas trop humiliante pour suffisamment d'entre elles, Londres aurait eu bien du mal à trouver encore des alliés qui acceptent de se ruiner pour elle.
Les erreurs de Napoléon (le bourbier espagnol et l'enchaînement d'erreurs avec la Russie) ont fait que l'empire français a chuté et a été submergé. Mais il aurait pu en être tout à fait différemment si Napoléon n'avait pas poursuivi la chimère russe et avait ressuscité un grand et viable royaume de Pologne en donnant des compensations à l'Autriche. Le triangle Paris-Vienne-Varsovie aurait tenu l'Europe continentale, garanti le refoulement de la Russie vers l'est et tenu la Prusse en respect. Et le Royaume-Uni aurait été beaucoup plus enclin à trouver un arrangement durable pour profiter commercialement en paix de son empire colonial et de la pacification de l'Europe.
Je suis globalement d'accord avec votre synthèse et avec la necessité de rechercher des accords raisonnables avec les puissance européennes : je crois que Jean Tulard par exemple estime que Napoléon avait atteint un niveau insurpassable en 1807 après avoir vaincu l'Autriche, la Prusse et la Russie - et avoir conclu à chaque fois un traité de paix relativement raisonnable qui affaiblissait mais ne détruisait pas le vaincu, le cantonant dan sune prudente neutralité (même si la Russie a laissé croire à une alliance de revers, dans les faits ce fut plutôt une neutralité favorable à la France) entre la France et l'Angleterre et laissant l'Empire dominer la moitié occidentale du continent. L'erreur de l'empereur fut à mon sens de "remettre sa mise sur le tapis" avec l'affaire espagnole. Mais à sa décharge on peut dire qu'il avait gravement sous-estimé la difficulté du sujet et la résistance espagnole.
Parallèlement je crois (et on revient là à Trafalgar) que l'empereur avait parfaitement pris conscience de la supériorité navale britannique. Mais au lieu d'en déduire la nécessité de négocier une paix (négocier implique que la france aurait du accepter des concessions sérieuses), il a fait le choix du blocus. Or le blocus obligeait les puissances européennes à choisir entre Paris et Londres, rendant la neutralité impossible et imposant à Napoléon de devenir le dictature du continent pour imposer ses douaniers sur toutes les côtes...bref générant au minimum une rancoeur constante contre la France et un risque sérieux de guerre continentale perpétuelle.
Si Napoléon avait dominé fermement la moitié ouest de l'Europe continentale avec le neutralité de la moitié est et aussi s'il avait effectué des concessions coloniales (sur le dos des Néerlandais éventuellement ...) et s'il avait renoncé à son rêve émediterranéen, il aurait sans doute pu trouver un accord avec Londres au bout de quelques années... Mais Napoléon n'aimait pas faire des convessions (tout au plus acceptait il le statu quo) et voulait garder les mains libres aux colonies et en Méditerannée...
En revanche je ne partage pas votre avis sur la Pologne (rétablir la Pologne était contradictoire avec toute perspective d'entente avec Vienne ou St Petersbourg) mais c'est peut-être un autre sujet ! je suis déjà trop long.