Inscription : 06 Fév 2004 7:08 Message(s) : 3532
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Citer : Pourquoi les traités successifs de Napoléon étaient souvent plus sévères que les précédents ? Essentiellement parce que ces royaumes vaincus étaient des récidivistes. A ce titre, on peut citer l’exemple de Naples : « Soldats, depuis dix ans, j'ai tout fait pour sauver le roi de Naples; il a tout fait pour se perdre. Après la bataille de Dego, de Mondovi, de Lodi, il ne pouvait m'opposer qu'une faible résistance. Je me fiai aux paroles de ce prince, et je fus généreux envers lui. Lorsque la seconde coalition fut dissoute à Marengo, le roi de Naples, qui le premier avait commencé cette injuste guerre, abandonné à Lunéville par ses alliés, resta seul et sans défense. Il m'implora; je lui pardonnai une seconde fois. Il y a peu de mois, vous étiez aux portes de Naples. J'avais d'assez légitimes raisons de suspecter la trahison qui se méditait et de venger les outrages qui m'avaient été faits. Je fus encore généreux. Je reconnus la neutralité de Naples ; je vous ordonnai d'évacuer ce royaume ; et pour la troisième fois la Maison de Naples fut affermie et sauvée. Pardonnerons-nous une quatrième fois ? Nous fierons-nous une quatrième fois à une cour sans foi, sans honneur, sans raison ? Non ! non ! La dynastie de Naples a cessé de régner; son existence est incompatible avec le repos de l'Europe et l'honneur de ma couronne. Soldats, marchez, précipitez dans les flots, si tant est qu'ils vous attendent, ces débiles bataillons des tyrans des mers. Montrez au monde de quelle manière nous punissons les parjures. Ne tardez pas à m'apprendre que l'Italie tout entière est soumise à mes lois ou à celles de mes alliés; que le plus beau pays de la terre est affranchi du joug des hommes les plus perfides; que la sainteté des traités est vengée, et que les mânes de mes braves soldats égorgés dans les ports de Sicile à leur retour d'Égypte, après avoir échappé aux périls des naufrages, des déserts et des combats, sont enfin apaisés. Soldats, mon frère marchera à votre tête; il connaît mes projets, il est le dépositaire de mon autorité, il a toute ma confiance ; environnez-le de toute la vôtre. »(Napoléon, 27 décembre 1805) Citer : Il faut quand même avoir bien présent à l'esprit que les guerres injustement dites napoléoniennes (mais on sait bien que c'est le privilège des vainqueurs anglais que de falsifier l'Histoire) ont toutes été déclenchées par les adversaires de la France. Les traités de paix n’étaient pourtant pas déchirés sans raison, et être le déclencheur d’une guerre ne veut pas forcément dire que l’on en soit le seul et unique responsable. Par exemple, l’Autriche porte certes une grande responsabilité dans la guerre de 1809 par le seul fait que c’est bien elle qui déclenche les hostilités ; mais la responsabilité de Napoléon n’est pas non plus négligeable ; la guerre en question tirant ses origines du désastreux et humiliant traité de Presbourg (qui, s’il établissait une paix glorieuse pour l’Empire, générait en même temps suffisamment de ressentiments pour être susceptible de mettre en péril la durabilité de cette même paix) et de la campagne d’Espagne, ouvrant certes une opportunité stratégique, mais en disant aussi long sur les ambitions de l’Empereur faisant craindre à Vienne de nouvelles visées expansionnistes. Citer : Les seules exceptions bien connues sont, sauf oubli de ma part, la guerre d'Espagne en 1808 et la guerre de Russie en 1812. On pourrait ajouter le Portugal et son dépeçage annoncé dans le traité de Fontainebleau (27 octobre 1807) : « Art. 1er. Les provinces entre Minho et Duero, avec la ville d'Oporto, seront données en toute propriété et souveraineté à S. M. le Roi d'Etrurie, sous le titre de Roi de la Lusitanie septentrionale. Art. 2. La Province d'Alentejo, et le Royaume des Algarves, seront donnés en toute propriété et souveraineté au Prince de la Paix, pour en jouir sous le titre de Prince des Algarves. Art. 3. Les Provinces de Beira, Tras los Montes, et l'Estremadure Portugaise, resteront en dépôt jusqu'à la paix générale, pour en être disposé suivant les circonstances, et suivant ce qui sera convenu entre les deux Hautes Parties Contractantes. Art.4. Le royaume de la Lusitanie septentrionale sera possédé par les descendants héréditairement et en suivant les lois de succession qui sont en usage dans la famille régnante de S. M. le Roi d'Espagne. Art. 5. La Principauté des Algarves sera possédée par les descendants du Prince de la Paix héréditairement, et en suivant les lois de succession qui sont en usage dans la famille régnante de S. M. le Roi d'Espagne. Art. 6. A défaut de descendants ou d'héritiers légitimes du Roi de la Lusitanie septentrionale ou du Prince des Algarves, ces pays seront donnés, par investiture, par S. M. le Roi d'Espagne, sans que jamais ils puissent être réunis sur la même tête ni à la Couronne d'Espagne. Art. 7. Le Royaume de la Lusitanie septentrionale et la Principauté des Algarves reconnaîtront pour protecteur, S. M.C. le Roi d'Espagne, et, dans aucun cas, les Souverains de ces pays ne pourront, faire ni la guerre ni la paix sans son intervention. Art. 8. Dans le cas où les Provinces de Beira, Tras los Montes, et l'Estremadure Portugaise, tenues en séquestre, seraient rendues à la paix générale à la Maison de Bragance en échange de Gibraltar,la Trinité, et autres colonies que les Anglais ont conquises sur l'Espagne et ses alliés, le nouveau souverain de ces provinces aurait par rapport à S. M. le Roi d'Espagne les mêmes liens que le Roi de la Lusitanie septentrionale et que le Prince des Algarves, et elles seront possédées par lui aux mêmes conditions. Art. 9. S. M. le Roi d'Etrurie cède en toute propriété et souveraineté le royaume d'Etrurie à S. M. l'Empereur des Français, Roi d'Italie. Art. 10. Lors de l'occupation définitive des provinces du Portugal, les différents Princes qui devront les posséder, nommeront de concert des commissaires, pour en fixer les limites naturelles. Art. 11. S. M. l'Empereur des Français, Roi d'Italie, garantit à S. M. le Roi d'Espagne la possession de ses États du continent de l'Europe situés au midi des Pyrénées. Art. 12. S. M. l'Empereur des Français, Roi d'Italie, s'engage à reconnaître et faire reconnaître S. M. le Roi d'Espagne comme Empereur des deux Amériques, lorsque tout sera préparé pour que S. M. C. puisse prendre ce titre, ce qui pourra être ou à la paix générale, ou au plus tard dans trois ans. Art. 13. Les deux Hautes Parties Contractantes s'entendront pour faire un partage égal des îles, colonies et autres possessions outre mer du Portugal. Art. 14. La présente convention demeurera secrète; elle sera ratifiée et les ratifications en seront échangées à Madrid, vingt jours au plus tard après la signature. »Au chapitre des opérations militaires, on pourrait aussi citer le cas de la république de Raguse. Suite à l’entrée des troupes françaises dans la ville, Lauriston, le 27 mai 1806, lançait cette proclamation : « Des concessions multipliées faites aux ennemis de la France avaient placé la république de Raguse dans un état d’hostilité d’autant plus dangereux, qu’il se déguisait sous les formes d’amitié et de neutralité. L’entrée des troupes françaises dans la Dalmatie, loin d’empêcher une pareille conduite, n’a été qu’une occasion pour nos ennemis, d’exercer davantage leur influence sur l’Etat de Raguse, et quels qu’aient été les motifs de la condescendance des magistrats de cet Etat, l’Empereur a dû s’en apercevoir ; il lui importait de mettre fin à ces menées aussi contraires aux lois de la neutralité ; En conséquence, au nom et d’après les ordres de l’Empereur des Français, Roi d’Italie, je prends possession de la ville et du territoire de Raguse. Je déclare néanmoins que l’intention de Sa Majesté Impériale, est de reconnaître l’indépendance et la neutralité de cet Etat, aussitôt que les Russes auront évacué l’Albanie, l’île de Corfou, et les autres îles ex-vénitiennes, et que l’escadre russe laissera libre les côtes de la Dalmatie. »Deux ans plus tard, le 30 janvier 1808, le colonel Delort lisait finalement cette autre proclamation devant le Sénat ragusain : "Le général en chef, commandant de la Dalmatie, ordonne ce qui suit : la république de Raguse a cessé d'exister, le Gouvernement et le Sénat sont dissous ainsi que les tribunaux."Rome me vient aussi à l’esprit. A ce sujet, le décret du 17 mai 1809 : « Considérant que lorsque Charlemagne, empereur des Français et notre auguste prédécesseur, fit donation de plusieurs comtés aux évêques de Rome, il ne les leur donna qu'à titre de fiefs et pour le bien de ses États, et que par cette donation Rome ne cessa pas de faire partie de son empire ; Que, depuis, ce mélange d'un pouvoir spirituel avec une autorité temporelle a été, comme il l'est encore, une source de discussions, et a porté trop souvent les pontifes à employer l'influence de l'un pour soutenir les prétentions de l'autre ; qu'ainsi les intérêts spirituels et les affaires du ciel, qui sont immuables, se sont trouvés mêlés aux affaires terrestres, qui par leur nature changent selon les circonstances et la politique des temps ; Que tout ce que nous avons proposé pour concilier la sûreté de nos armées, la tranquillité et le bien-être de nos peuples, la dignité et l'intégrité de notre Empire avec les prétentions temporelles des papes, n'a pu se réaliser, Nous avons décrété et décrétons ce qui suuit : Art. 1er. Les Etats du Pape sont réunis à l'Empire français. Art. 2. La ville de Rome, si célèbre par les grands souvenirs dont elle est remplie, et premier siège de la chrétienté, est déclarée ville impériale et libre. Le gouvernement et l'administration de ladite ville seront organisés par un statut spécial. »L’annexion fut justifiée par l’Empereur le même jour dans une note à Champagny : « L'intention de l'Empereur est de faire communiquer au Sénat, du 5 au 10 juin, avec un rapport du ministre des relations extérieures, les deux décrets ci-joints pris par sa Majesté au sujet des États du Pape. Sa Majesté désire que ce rapport développe les motifs établis dans les considérants; qu'il prouve que lorsque Charlemagne fit les papes souverains temporels, il voulut qu'ils restassent vassaux de l'Empire ; qu'aujourd'hui, loin de se croire vassaux de l'Empire, ils ne veulent même pas en faire partie ; que Charlemagne, dans sa générosité envers les papes, eut pour but le bien de la chrétienté, et qu'aujourd'hui ils prétendent s'allier avec les Protestants et les ennemis de la chrétienté ; que le moindre inconvénient qui résulte de semblables dispositions est de voir le chef de la religion catholique en négociation avec les Protestants, lorsque, d'après les lois de l'Eglise, il devrait s'éloigner d'eux et les excommunier (il y a sur cet objet une prière qui se récite à Rome). Les armées françaises sont à Naples et dans la haute Italie ; elles se trouvent coupées par les Etats du Pape. La première pensée de Sa Majesté fut de laisser au Pape sa puissance temporelle, ainsi que l'avait fait Charlemagne, en lui demandant de contracter, comme souverain, une alliance offensive et défensive avec le royaume de Naples et celui d'Italie, pour l'intérêt de la presqu'île. Le Pape refusa. Il aurait alors fallu se résoudre à voir les Anglais se placer entre les armées françaises de Naples et d'Italie, couper leurs communications, établir à Rome le centre de leurs complots, et cette ville devenir le refuge des brigands suscités ou vomis par les ennemis de Sa Majesté dans le territoire de Naples. De là vint la nécessité de l'occupation militaire de Rome. Cette mesure indispensable excita des réclamations sans fin et des hostilités permanentes, contre le prince le plus puissant de la chrétienté, par le chef de la religion. Ce n'était pas comme chef de la religion que le Pape s'élevait contre les mesures de prudence adoptées par une nation catholique, c'était comme souverain ; et ou ne tarda pas à voir le pouvoir spirituel, influencé par les ennemis de l'Eglise romaine, soutenir l'autorité temporelle. Il en résulta une source d'inquiétudes et des germes de dissensions dans l'intérieur même des vastes Etats de Sa Majesté. Pour couper court à ces discussions, si contraires au bien de la religion, si contraires au bien de l'Empire, Sa Majesté n'a qu'un seul moyen, c'est de révoquer la donation de Charlemagne et de réduire les papes à ce qu'ils doivent être, en mettant le pouvoir spirituel à l'abri des passions auxquelles l'autorité temporelle est sujette. Jésus-Christ, né du sang de David, ne voulut point être roi. Pendant des siècles les fondateurs de notre religion n'ont point été rois. Il n'est aucun docteur, aucun historien de bonne foi qui ne convienne que la puissance temporelle des papes a été funeste à la religion. Si des dissensions ont si longtemps agité l'intérieur de la France, la cause en était, non dans le pouvoir spirituel, mais dans le pouvoir temporel de Rome. Si de grandes nations se sont séparées de l'Église, la cause en était encore dans l'abus du pouvoir de Rome. Lorsqu'un Jules donnait ses armées pour couper la retraite à Charles VIII, ce n'était pas pour l'intérêt des papes comme pontifes, mais pour l'intérêt des papes comme souverains. De cette confusion de l'un et l'autre pouvoir, de cet appui qu'ils se prêtaient réciproquement pour favoriser leurs usurpations mutuelles, naquit la nécessité où se trouvèrent nos ancêtres d'établir les libertés de l'Église gallicane, et naît aujourd'hui celle de séparer ces deux pouvoirs. Dans le dernier siècle, le moyen, souvent employé, de mettre les papes à la raison, fut de s'emparer d'Avignon. On voyait sans cesse à Rome les intérêts de l'Eglise, ces intérêts qui devraient être immuables et indépendants de toute considération terrestre, négligés par des considérations d'intérêt temporel. Le pape, comme chef de la chrétienté, doit avoir dans tout le monde chrétien une égale influence, et cependant cette influence doit varier au gré des circonstances et de la politique des États. Aucun intérêt personnel ne devrait gêner les affaires spirituelles. Et comment ne les gênerait-il pas, lorsque le pape souverain et le pape pontife peuvent avoir des intérêts contraires ? « Mon empire n'est pas de ce monde », a dit Jésus-Christ, et par cette doctrine il condamnait à jamais tout mélange des intérêts de la religion et des affections mondaines. L'intérêt de la religion et celui des peuples de France, d'Allemagne, d'Italie, ordonnent également à Sa Majesté de mettre un terme à cette ridicule puissance temporelle, faible reste des exagérations des Grégoire, etc., qui prétendaient régner sur les rois, donner des couronnes et avoir la direction des affaires de la terre comme de celles du ciel. Que, dans l'absence des conciles, les papes aient la direction des choses de l'Église, en tant qu'elles ne toucheront pas aux libertés de l'Église gallicane, à la bonne heure ; mais ils ne doivent se mêler ni des armées ni de la police des États. S'ils sont les successeurs de Jésus-Christ, ils ne peuvent exercer d'autre empire que celui qu'ils tiennent de lui, et son empire n'était pas de ce monde. Si Sa Majesté ne fait pas ce que seule elle pourrait faire, elle laissera à l'Europe des semences de discussions et de discordes. La postérité, en la louant d'avoir rétabli le culte et relevé les autels, la blâmera d'avoir laissé l'Empire, c'est-à-dire la plus grande majorité de la chrétienté, exposé à l'influence de ce mélange bizarre, contraire à la religion et à la tranquillité de l'Empire. Cet obstacle ne peut être surmonté qu'en séparant l'autorité temporelle de l'autorité spirituelle, et en déclarant que les États du Pape font partie de l'Empire français. »
_________________ " Grâce aux prisonniers. Bonchamps le veut. Bonchamps l'ordonne ! " (d'Autichamp)
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