Michel Antoine, à propos des bâtards de Louis XV a écrit :
[...] Il n'entrait ni dans son caractère, ni dans ses vues politiques de les légitimer. Ses premiers actes de majesté, ses premiers lits de justice avaient servi à humilier ses oncles, les fils adultérins de Louis XIV et toute sa minorité avait été troublée par les légitimés ou à cause d'eux. Le mot bâtard ayant frappé désagréablement ses oreilles dès son âge le plus tendre, il resta marqué par ses impressions d'enfance et ne voulut pas voir resurgir de semblables embarras : il ne créerait pas de nouveaux princes légitimés, ces satellites mineurs et encombrants de la famille royale !
S'il ne put se retenir d'avoir des enfants naturels, s'il se refusa à les délaisser, en contrepartie, il s'interdit de les reconnaître, de les légitimer et de les mettre entre les mains de quelque Maintenon.
Une fois cependant, mais une seule, il fit bénéficier un de ses bâtards d'une quasi reconnaissance : lorsque naquit le 13 janvier 1762 le fils que lui donna Mlle de Romans, il permit que, "sous le secret de la confession", on le baptisât comme "fils de Louis de Bourbon" et qu'on révélât au curé l'identité du père. [...]"
Citer :
[...] En prenant tous ces arrangements, Louis XV suivait certes une ligne de conduite personnelle, à la fois instinctive et réfléchie. Mais celle-ci correspondait aussi à l'évolution des moeurs en son temps. Les siècles passés avaient exhibé les bâtards sans nulle fausse honte, en particulier dans les maisons princières et la haute aristocratie. Louis XIV fut le dernier à se comporter de la sorte. La stupeur et les réserves qui se firent jour en 1714 losqu'il déclara sa postérité légitimée apte à succéder éventuellement à la couronne, l'abrogation de cette mesure après sa mort attestent que l'opinion publique affectait la pruderie et ne considérait plus la bâtardise du même oeil que naguère. Non que le XVIIIème siècle ait été plus vertueux que les précédents, mais l'on constate que l'illégitimité de la naissance y prit un caractère plus honteux que dans le passé. Etait-ce le recul d'une morale aristocratique devant une morale bourgeoise enfarinée de jansénisme ? [...]"