Cher Alceste, je me permettrai de relever dans votre propos quelques termes qui sont à répondre.
Parler d'ayatollah de toute obédience est amusant, mais assez peu heureux dans les termes, dans la mesure ou les ayatollah sont des docteurs de la foi en Islam (et pas forcément des dictateurs) et que l'obédience, dans son sens moderne, ressort des diverses appartenances maçonnes, et certainement pas d'une quelconque appartenance religieuse.
Par ailleurs, votre propos est sympathique mais sujet à caution, dans la mesure ou votre critique de Rousseau vis-à-vis de Voltaire ne peut que nous rappeler le peu de bien que, précisément, Voltaire pensait de Rousseau, "un gueux qui voudrait tout voler aux riches pour le donner aux pauvres".
Je me lance, et vous donne mon avis :
Voltaire a inventé l'opinion publique.
Il a créé, de toutes pièces, le journalisme, le vrai, c'est-à-dire le journalisme d'opinion.
Il a aussi créé la recherche historique, la vraie, et ses deux ouvrages exceptionnels "le siècle de Louis XIV" et "l'histoire de Charles XII" en font foi.
Il a aussi été d'une mauvaise foi sans nom dans ses querelles, se révélant ainsi un vrai, et sans doute le premier des polémistes.
Il a également fondé une grande fortune, et est mort l'un des hommes les plus riches de France. Frédéric II de Prusse l'a chassé parce qu'il intriguait pour recueillir, pour ses amis traitants, les marchés d'uniformes de l'armée prussienne : et alors ?
Plus intelligent que beaucoup, partant de rien et désireux de s'assurer dans un monde qui était de classe, Voltaire n'a commis qu'une méchanceté : il a milité pour des causes dans lesquelles il ne croyait que par intermittence.
Mais le résultat est la : ses écrits, ses prises de position (souvent à géométrie variable mais peu importe) et surtout, surtout : sa langue !
Quand je suis fatigué, que j'en ai assez de lire des notes de services ou des analyses de cours aussi plates que miséreuses, je prend le siècle de Louis XIV de Voltaire : j'en lis dix pages et alors, par bonheur, je réapprend le français !
Je vais vous sembler peut-être méprisable dans la mesure ou je juge sa philosophie discutable, voire pernicieuse, mais son français, Monsieur, son français !
_________________ "Notre époque, qui est celle des grands reniements idéologiques, est aussi pour les historiens celle des révisions minutieuses et de l'introduction de la nuance en toutes choses".
Yves Modéran
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