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Message Publié : 10 Fév 2012 13:35 
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Jean Mabillon
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Les Américains réfèrent habituellement à la Guerre d'Indépendance et à la naissance de leur nation sous les termes de "Révolution américaine"; cette expression m'a toujours semblé plus idéologique que factuelle.

Pour lancer le débat, je cite un extrait du livre "L'indépendance américaine, 1763/1789", présenté par André Kaspi:

"Personne ne met en doute le caractère révolutionnaire de la Révolution française. Mais la Révolution américaine, elle, a-t'elle eu lieu? Laguerre d'Indépendance a donné naissance à un nouvel Etat: a-t'elle créé une nouvelle société?
En 1926, J. Franklin Jameson publiait le texte de quatre conférences et choisissait un titre sans équivoques: "The American Revolution Considered as a Social Movement".
Un an plus tard, Charles et Mary Beard écrivaient dans "The Rise of American Civilization" : "La Révolution américaine fut plus qu'une guerre contre l'Angleterre. En vérité, ce fut une transformation économique, sociale et intellectuelle de première importance, la première de ces reconstructions modernes qui ébranlent le monde et dans lesquelles l'humanité s'est efforcée de défaire et de remodeler le tissu épais et résistant des faits pour l'adapter à ses rêves".

Cette interprétation est rejetée au lendemain de la Seconde guerre mondiale. Daniel J. Boorstin affirme qu'il n'y a pas eu de Révolution américaine, si l'on donne au mot "révolution" une signification européenne.
Robert E. Brown soutient que les Américains jouissaient avant 1775 de la liberté, de l'aisance matérielle et d'un régime démocratique, et qu'ils se sont battus pour préserver un acquis, que leur révolution a été conservatrice.
Les historiens se partagent aujourd'hui entre les deux écoles de pensée. "
Je pencherais plutôt vers la deuxième.

http://en.wikipedia.org/wiki/J._Franklin_Jameson
http://en.wikipedia.org/wiki/Daniel_J._Boorstin
http://en.wikipedia.org/wiki/Charles_A._Beard


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Message Publié : 10 Fév 2012 18:43 
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Je dirais qu'elle n'est pas une révolution marxiste mais qu'elle participe de la révolution libérale contre un régime conservateur et antilibéral, la monarchie anglaise.


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Message Publié : 10 Fév 2012 23:26 
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Salluste
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Sauf de très rares exceptions (ex: la révolution de velours), la révolution politique est un processus de renversement du pouvoir, réussi ou non (on connaît les questions relatives à la Commune: était-elle une révolution ?) s'accompagnant de violences physiques et symboliques plus importantes qu'au cours des années qui la précèdent. Dans la mesure où la révolution américaine s'accompagne d'une guerre et se conclut par la fin de la tutelle britannique, la terminologie en vigueur me paraît acceptable. En France, les révolutions de 1789, 1830 et 1848 répondent toutes à ces deux critères, même si la Révolution reste quantitativement bien plus forte que les deux suivantes.
En somme, je ne crois pas qu'une révolution politique aurait besoin d'être aussi sociale pour être véritablement révolutionnaire.


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Message Publié : 11 Fév 2012 9:23 
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Jean Mabillon
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En somme, je ne crois pas qu'une révolution politique aurait besoin d'être aussi sociale pour être véritablement révolutionnaire.


Alors, sur la base de ce critère, toutes les guerres d'indépendance seraient des révolutions?
Bien sûr, les Américains ont mis en place un système politique nouveau, quoiqu'inspiré par les libertés garanties en Angleterre par la Magna Carta et le Bill of Rights.
Cependant, le personnel politique dirigeant les 13 colonies--les élites possédantes britanniques--est resté le même.
En fait, on peut considérer que le nouveau système--très libéral économiquement et politiquement par rapport à la GB-- a été conçu en fonction des intérêts économiques de ces élites locales, qui sont simplement entrés en conflit avec ceux de leurs pairs restés en Grande Bretagne, d'où l'indépendance.


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Message Publié : 11 Fév 2012 10:25 
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Georges Duby
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Une révolution est un changement de régime politique. Or la guerre d'indépendance américaine a abouti d'une part à l'indépendance des 13 Etats mais aussi, d'autre part, d'une manière non inéluctable, au passage de la royauté à la république. Deux évènements totalement différents sur le plan juridique. Deux actes en un.
Par contraste, le Canada est devenu indépendant mais il a conservé la royauté et l'institution d'un représentant de la couronne britannique.

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Heureux celui qui a pu pénétrer les causes secrètes des choses. Virgile.


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Message Publié : 11 Fév 2012 10:38 
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Jean Mabillon
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Or la guerre d'indépendance américaine a abouti d'une part à l'indépendance des 13 Etats mais aussi, d'autre part, d'une manière non inéluctable, au passage de la royauté à la république


Est-ce qu'un passage de la royauté à la République constitue en soi une révolution?
Je ne le pense pas: si la GB décidait d'abolir la royauté et passait en république, cela ne serait pas une Révolution: le pouvoir est depuis longtemps hors des mains du monarque.
C'était aussi assez le cas dans les colonies américaines, qui vu l'éloignement, fonctionnaient sous des administrations locales ayant acquis une large autonomie.
C'est précisément une maladroite tentative du gouvernement anglais de revenir sur ces libertés , notamment économiques, dont jouissaient les colons américains par rapport à la métropole qui a mis lefeu aux poudres.


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Message Publié : 11 Fév 2012 11:11 
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Georges Duby
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Tonnerre a écrit :
Je ne le pense pas: si la GB décidait d'abolir la royauté et passait en république, cela ne serait pas une Révolution: le pouvoir est depuis longtemps hors des mains du monarque.
Vous oubliez l'essentiel, la violence qui constitue le propre des révolutions et qu'on observe aux EU. Il y a bien deux actes juridiques en un, d'une manière successive d'ailleurs.
L'indépendance américaine a été une révolution pour son régime politique, une révolution incluse dans les évènements.
Au sens large du mot révolution, un peu plus qu'une évolution (révolution des moeurs, des esprits ...), il est incontestable par ailleurs que les américains ont bâti un système original, très nouveau à beaucoup d'égards par son adoption des principes des Lumières, avec par exemple l'élection des magistrats, des policiers, une constitution fédérale très nouvelle dans ses modalités, un calvinisme civique ...

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Message Publié : 11 Fév 2012 11:13 
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Thucydide
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Certes, mais les colons ne se sentaient pas moins anglais. L'idée d'indépendance ne s'est imposée que lentement dans les esprits, après qu'une série de crises (et pas uniquement économiques) ait provoqué une rupture de la confiance avec la métropole.

Il me semble bien qu'on puisse parler de revolution américaine, au sens d'affrontement armé, de révolte, qui amène à un basculement total des institutions. Un brutal changement de paradigme politique, passant par l'éviction de l'autorité légitime.

Les institutions américaines ont bien été inventées après la guerre d'indépendance. Comme en France après 1789, les jeunes Etat-Unis ont du repenser leur pacte social, et ce ne fut pas sans peine jusqu'en 1815. Tout était à faire, et les solutions n'allaient pas de soi - les modèles proposés par Hamilton et Jefferson étaient des modèles de sociétés originales, qui ne se contentaient pas de valider une réalité antérieure.

Si l'on adopte le point de vue des gouvernants, il y a, à mon avis, un avant et un après. Pour le petit peuple, les gens du commun, Howard Zinn a montré que le changement n'était pas aussi radical.

EDIT : Alain.g à posté son message alors que je rédigeais le mien. Presque un doublon du coup. Ma réponse allait à Tonnerre.


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Message Publié : 11 Fév 2012 11:34 
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Jean Mabillon
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Vous oubliez l'essentiel, la violence qui constitue le propre des révolutions


Il y a eu très peu de violences, hormis celles de la guerre d'Indépendance.
Le "massacre de Boston" a fait cinq victimes, et durant la Boston Tea Party, les patriotes "Mohawks" de Samuel Adams se sont contentés de jeter des ballots de thé à la mer.
Avec l'affaire de Lexington, qui a marqué le début de la guerre, lorsque les troupes anglaises ont ouvert le feu (en réponse aux tirs des patriotes? ), il y a eu ,selon les chiffres américains, 8 morts.
Et c'est tout.


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Message Publié : 11 Fév 2012 11:55 
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Thucydide
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Je trouve surprenant cet argument. L'idée de valider ou non une révolution par le nombre de morts ne me semble pas très pertinent, sans vouloir vous offenser. L'important est qu'une révolte à chassé l'autorité légitime, par la violence, et l'a remplacé par un système de gouvernement original.

Après la guerre de sept ans, il y a bien eu un raidissement de la couronne britannique dans les colonies, alors que les colons attendaient justement que la métropole leur accorde plus d'autonomie. Le basculement ne s'est pas fait par la négociation, mais par la révolte armée. Une autre voie que la révolte était possible.

On peut, à mon avis, à partir de là, trouver une certaine parenté d'esprit avec la Révolution Française.


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Message Publié : 11 Fév 2012 12:27 
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Jean Mabillon
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Citer :
Je trouve surprenant cet argument. L'idée de valider ou non une révolution par le nombre de morts ne me semble pas très pertinent, sans vouloir vous offenser. L'important est qu'une révolte à chassé l'autorité légitime, par la violence, et l'a remplacé par un système de gouvernement original.


Relisez svp les posts précédents :wink: : ce n'est pas moi qui valide la notion de révolution par la magnitude des violences, c'est alain.

Citer :
On peut, à mon avis, à partir de là, trouver une certaine parenté d'esprit avec la Révolution Française.


Ne serait ce parce que , au moins par la présence des ambassadeurs américains en Europe (Jefferson, Adams, Franklin), les idées circulaient entre les deux continents.


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Message Publié : 11 Fév 2012 13:22 
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Thucydide
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Tonnerre a écrit :
Relisez svp les posts précédents :wink: : ce n'est pas moi qui valide la notion de révolution par la magnitude des violences, c'est alain.


Je les avais lus avec attention. Mais ce n'est pas ainsi que j'ai compris l'intervention d'Alain.g. Il parle de la violence comme moteur de changement. Le basculement d'un système à l'autre par la révolte armée. C'est un argument d'ordre général. Ce n'est pas la négociation qui fait passer du système des colonies aux Etats-Unis d'Amérique, mais bien la violence.

Quand à vous, vous comptez les morts, en opposant à son argumentaire le faible nombre de victimes avant la guerre proprement dite. Ce qui est juste, mais ne change en définitive pas grand chose.

15 mort ou 200 ne changent rien quand à la nature de l'affaire. Ce qui est important, c'est l'impact dans les représentations des uns et des autres. Le massacre de Boston (dont le nom montre bien la façon dont cela a été ressenti) a choqué les colons, et la Tea Party a fortement heurté l'opinion anglaise quand bien même l'événement n'a fait aucune victime.


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Message Publié : 11 Fév 2012 15:24 
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Jean Mabillon
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Citer :
15 mort ou 200 ne changent rien quand à la nature de l'affaire. Ce qui est important, c'est l'impact dans les représentations des uns et des autres. Le massacre de Boston (dont le nom montre bien la façon dont cela a été ressenti) a choqué les colons, et la Tea Party a fortement heurté l'opinion anglaise quand bien même l'événement n'a fait aucune victime


Oui, le massacre de Boston a choqué les colons, mais il y a eu de la démesure dans la réaction. Voire même chez certains, une volonté de dramatiser et de radicaliser la situation.
Ma réserve a adopter le terme de révolution ici vient de la nature conservatrice de ce mouvement: à l'origine du moins, il s'agissait de défendre des avantages acquis, en particulier le statut de "paradis fiscal" des colonies.
Est-ce que le terme de révolution conservatrice n'est pas un oxymoron?
Est-ce que par exemple le fait d'avoir baptisé "Révolution nationale" le régime de Vichy n'était pas autre chose qu'un abus de langage à visée propagandiste?


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Message Publié : 11 Fév 2012 16:05 
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Georges Duby
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La "Révolution américaine" n'est conservatrice qu'au début des évènements de toutes manières, elle n'est d'ailleurs pas encore une Révolution pour être exact, mais elle le deviendra ensuite quand ses promoteurs inventeront un cadre juridique très original, novateur et mettront en application des principes aussi peu conservateurs que les principes des Lumières qui sont d'esprit révolutionnaire en leur temps, à tous égards.

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Message Publié : 11 Fév 2012 17:52 
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Salluste
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Alain.g a écrit :
et mettront en application des principes aussi peu conservateurs que les principes des Lumières qui sont d'esprit révolutionnaire en leur temps, à tous égards.


Quels principes ? Très peu de philosophes étaient révolutionnaires, la grande majorité étaient des progressistes, des réformistes, qui voulaient une société différente, pas une société nouvelle.

Tonnerre a écrit :
Alors, sur la base de ce critère, toutes les guerres d'indépendance seraient des révolutions?


Des révolutions politiques en effet, dans la mesure où elles sont violentes, et cherchent à renverser un ordre établi.


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