Bonjour,
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... la majorité des Philosophes des Lumières étaient monarchistes. Ils remettaient en cause pratiquement la même chose que le roi remettait en cause...
Plus que "monarchistes", avaient-ils du mal à conceptualiser une autre forme de société ?
Ou alors une société faite -au final- avec les lambeaux du régime existant ?
Montesquieu, dans
"L'esprit des lois", en vient à considérer la royauté comme une puissance autonome, au même titre que la noblesse ou le peuple. Il cautionne ainsi l'idée du roi-arbitre et si le mot "despote" est détestable, "monarque éclairé" demeure la solution la plus souhaitable.
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Une grande majorité des philosophes se seraient je pense contenté d'un régime à l'Anglaise modernisé... un parlement composé de nobles et notables mais ouvert aux " capacités " ... une sorte d'Habeas Corpus qui aura garantie les libertés individuels de chacun ... un carcan religieux un peu moins pensant (mais encore capable de jouer son rôle de gardien de la moral). Tout ça bien sûr dans le respect des rangs et des capacités, et assurant la sécurité des fortunes et des situations.
Votre première phrase fait preuve d'un aveuglement étrange. A combien s'élève la plus grande majorité de philosophes en France ? Un pays peut-il être gouverné par le contentement de deux voire trois philosophes enragés bien souvent de ne pas avoir eu de particule ? C'est passer d'une aberration à une autre. A l'onction de Reims, il conviendrait la bénédiction de Ferney avec le "contrat social" comme catéchisme, un "esprit des lois" sans oublier la fibre paysanne : "bien cultiver le jardin".
Il y a sous Louis XV des réactions nobiliaires épidermiques, le roi n'est plus le suzerain, chef d'une aristocratie guerrière puis foncière qui coiffe le système féodal et le souverain n'est pas dupe :
"... Je ne souffrirais pas qu'il se forme en mon royaume une association ... la magistrature ne forme point un corps ni un ordre séparé ... c'est en ma personne seule que réside la puissance souveraine ... c'est à moi seul qu'appartient le pouvoir législatif sans dépendance et sans partage..." (Louis XV au Parlement de Paris - 6 mars 1766).
La monarchie pouvait-elle trouver un rôle d'arbitrage, renoncer à l'absolutisme, réconcilier les élites -celles du passé et celles à venir- dans le cadre d'une
"gentry" ? C'est lui supposer une indépendance qu'elle n'avait pas ; c'est sous-estimer l'importance de l'attaque menée contre l'Ancien régime social et politique, par les forces montantes de la bourgeoisie. Il faudrait donc une unité de culture, de goûts, de sensibilité, d'options et de programme... mais la France n'est plus la France !
Ici c'est la philosophie des Lumières qui apparait comme un programme formulé, comportant quels que soient les antagonismes un corpus commun. Malgré Rousseau, elle se définit en termes d'optimisme, de foi au progrès et à la raison ; un rationalisme conquérant qui veut se défaire du passé : absolutisme, abus, superstition ; un système de valeurs nouvelles dont "Liberté" est le mot clé.
Un liberté d'expression, un carcan religieux moins "pesant" (j'imagine que c'était le mot voulu) mais gardien de la morale, le tout dans un respect des fortunes et des situations bref une église qui n'étouffe pas mais qui soit "chrétienne", un respect qui obère tout espoir, une continuation de société encore plus stratifiée : voici ce que serait une monarchie "à l'anglaise", retaillée pour les Français. Et tout ceci sans redistribution des richesses : la belle affaire d'avoir des biens garantis lorsque l'on ne possède rien. Que peut donner une "
sorte" d'Habeas Corpus "à la française" ?
Une France à l'heure anglaise aurait demandé tellement d'ajustements que ceci aurait pu passer pour une révolution.
Pour ce qui est des relations entre Voltaire et certains "despotes éclairés", il faut un peu s'écarter des clichés : reçu pour la causette au coin du feu lors des soirées d'ennui, c'est tout. Les rois peuvent s'offrir Voltaire et le fauteuil que va avec. Echange de bons procédés : nourri, blanchi, logé, la mode n'étant plus aux bouffons, il fait office de causeur-correcteur des copies royales et si d'aventure, il se permet un caprice, c'est la porte.