Les causes de la forte chute démographique de l'Amérique hispanique après la conquête espagnole sont diverses.
Les guerres en elle-mêmes ne sont pas responsabls de beaucoup de morts. Dans le cas du Pérou, la guerre civile qui a précédé l'arrivée de Pizarro est sûrement responsable de plus de morts que la conquête elle-même. Les seules zones où les conflits ont été âpres furent les zones marginales, face aux "indios bravos" (Auracans au sud du Chili, peuplades du nord de la Nouvelle-Espagne), et les pertes ne furent jamais importantes. En revanche, l'asservissement des Indiens (système de l'encomienda) ont causé beaucoup de morts.
Les Espagnols ont amené avec eux plusieurs maladies (la grippe, la variole, sans doute la peste, quoique les maladies décrites dans les sources d'époques soient difficilement identifiables), qui ont fait de terribles ravages. Le peuplement précolombien était peu touché par les épidémies, car les populations voyageaient peu. Avec les mouvements de populations consécutifs à la conquête, cet état de fait change, et les Indiens sont véritablement décimés. Les maladies touchent souvent les régions avant même l'arrivée des conquistadors : c'est le cas dans l'Empire Inca (l'Inca lui-même meurt touché par l'épidémie, ouvrant la crise de succession qui permet ensuite aux Espagnols de faire tomber cet Etat en deux temps trois mouvements), mais aussi au Rio de la Plata.
Puis il y a la "desgana vital", la désappêtance vitale. Ce phénomène est la réaction des vaincus au choc de la conquête. Il est à remettre dans le contexte mental précolombien : rapports entre la vie et la mort, cultes sanglants, mythes de la fin du monde avec le retour d'un personnage légendaire identifié aux Espagnols. Les Espagnols tentent de substituer leur religion au paganisme précolombien. Les Indiens voient donc leurs dieux "mourir". Cela est consécutif à l'effondrement des structures sociales mises en place sous les grandes constructions étatiques. A cela s'ajoute la mise en servitude. Concrètement, cela se manifeste par l'alcoolisme (auparavant réservé à l'élite pour des rituels, il est désormais accessible à tous, en dépit des interdictions), l'infanticide (on refuse de laisser des enfants naître dans un tel contexte), le suicide, la perte de volonté, ... Cela explique pourquoi les pays où se trouvaient les grands Empires (Mexique central, Pérou, mais aussi Yucatan) ont moins bien tenu que les zones plus marginales.
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