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Message Publié : 17 Jan 2014 15:10 
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Pour en revenir plus directement au sujet et à la limite chronologique, tout en reprenant habilement ce que dit très justement Barbetorte ( :mrgreen: ), l'histoire de ce qu'on appelle l'Occident est effectivement imprégnée d'une certaine méfiance vis-à-vis de l'argent, méfiance véhiculée par le christianisme mais que l'on retrouve également dans des sociétés non chrétiennes. Les deux derniers siècles de la République romaine ont connu, après le début de la conquête romaine, une fameuse opposition entre les tenants de la vieille ligne austère traditionnelle (Caton l'Ancien, Caton le jeune qui se baladait pieds nus...) et les boulimiques de richesses et d'acculturation (les Scipions, Crassus, Pompée...)
L'argent est une valeur infiniment plus marquée en Asie orientale - je mets de côté le Japon que je connais mal sur ce point - qu'en Europe par exemple. En Asie, l'argent a toujours participé de la face, ce depuis la nuit des temps. Faire de la volonté d'enrichissement de l'Asie une occidentalisation est un contresens absolu.

Sinon, puisqu'on a parlé des concours, une autre différence fondamentale me vient à l'esprit entre la Chine et l'"Occident" : la relation entre professeur et étudiants. Dans la droite ligne du confucianisme (là, oui), un prof, en tout cas un bon prof peut presque demander à ses élèves de se jeter du haut d'une montagne qu'ils le feraient (c'est une image bien sûr). Il y a un respect et même un amour pour le prof qui n'a jamais existé en Occident, même du temps de Robert de Sorbon.


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Message Publié : 17 Jan 2014 16:53 
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Jules Michelet
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Altai Khan a écrit :
L'argent est une valeur infiniment plus marquée en Asie orientale - je mets de côté le Japon que je connais mal sur ce point - qu'en Europe par exemple. En Asie, l'argent a toujours participé de la face, ce depuis la nuit des temps. Faire de la volonté d'enrichissement de l'Asie une occidentalisation est un contresens absolu.

Il me semble que dans le cas de la Chine, il y'a eu des périodes de recherche de profit et des périodes où l'argent était perçues comme sale... C'est ce que j'ai pu lire dernièrement dans l'ouvrage "1493" de Charles C.Mann. Il y parle de la relation à l'argent qu'a put avoir la Chine entre le Xe et le XVIIIe siècle. Avec des périodes d'ouvertures au monde et de fermeture au monde, des périodes de rejet de la valeur de l'argent (considérée comme pouvant corrompre) et des périodes de valorisation de la recherche du profit.

Tout n'est donc pas si simple... Mais je suis d'accord sur le fait qu'il faut se méfier de nos à prioris.

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Message Publié : 17 Jan 2014 20:21 
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Skipp a écrit :
Il me semble que dans le cas de la Chine, il y'a eu des périodes de recherche de profit et des périodes où l'argent était perçues comme sale... C'est ce que j'ai pu lire dernièrement dans l'ouvrage "1493" de Charles C.Mann. Il y parle de la relation à l'argent qu'a put avoir la Chine entre le Xe et le XVIIIe siècle. Avec des périodes d'ouvertures au monde et de fermeture au monde, des périodes de rejet de la valeur de l'argent (considérée comme pouvant corrompre) et des périodes de valorisation de la recherche du profit.
Mais, mais, mais... l'Etat n'intervenait pas dans la vie des gens. Ces querelles sur l'argent concernent les mandarins. Et il y a eu de très vifs débats à la cour, comme toujours dans l'histoire chinoise (prenez par exemple la fameuse Querelle du sel et du fer au Ier siècle av JC). Mais la population n'était pas touchée par ces débats. Encore une fois, il y a en Chine un non-interventionisme fondamental de l'Etat dans la vie privée et le commerce local, non-interventionnisme renforcé d'ailleurs par la doctrine confucéenne. Lisez Gernet, Leys etc. D'ailleurs, en passant, Charles Mann n'étant ni historien ni sinologue mais journaliste (!), pas sûr que lire son bouquin soit la meilleure chose à faire pour connaître l'histoire chinoise...

- Les périodes d'ouverture ou de fermeture au monde n'ont rien à voir avec le rapport à l'argent.
- "L'argent pouvant corrompre" concerne, sous les Ming, la querelle entre les eunuques et les mandarins. Après le règne énergique des premiers empereurs Ming, leurs successeurs vont s'enfermer dans leur tour d'ivoire nouvellement construite - la Cité interdite (qui va couper du monde l'empereur comme Versailles a coupé Louis XV et Louis XVI du pays réel) - et laisser se développer le nombre et les attributions des eunuques qui s'enrichissent, perçoivent des pots-de-vin etc. En réaction à leur perte de pouvoir et à cet enrichissement scandaleux des eunuques, les mandarins vont lancer le mot d'ordre de "l'argent sale" et plus généralement ce qu'on va appeler un peu abusivement le néo-confucianisme. Mais ce sont des querelles "de clochers", des intrigues de cour qui ne concernent pas la population...


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Message Publié : 17 Jan 2014 20:42 
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J'aimerais citer un article de Jacques Gernet car ça devient parfois un peu pénible de lire que la modernité est forcément occidentale et de voir qu'on prend en compte les transferts qui se font dans un sens (Occident vers Chine) sans prendre en compte ceux qui vont dans l'autre sens. Donc un article pour remettre les choses en perspective...


L'idée qu'on se fait des transformations de la Chine contemporaine a été longtemps dominée par un schéma implicite : l'intrusion de l'Occident aurait provoqué dans ce pays une nette rupture avec son passé. Seul, en effet, par opposition aux sociétés dites "traditionnelles", l'Occident aurait connu une véritable évolution et, par ses idées, ses techniques et ses sciences, il aurait introduit en Chine les ferments d'une transformation radicale. L'histoire de la Chine ne serait donc qu'un cas particulier d'une évolution générale de toutes les sociétés pré-industrielles sous l'influence de l'Europe et de l'Amérique. La date retenue par les manuels scolaires, et adoptée sous notre influence par les Chinois eux-mêmes, est significative : c'est de la première guerre de l'Opium que date 1' "ouverture" de la Chine. Toutes les périodes antérieures aux transformations provoquées par l'impact de l'Occident appartiennent à une Chine dite "traditionnelle", terme qui évoque plus ou moins l'idée de continuité ou même d'un certain immobilisme. Qu'on fasse remonter les débuts de la Chine "moderne" à une date plus proche de nous ne change rien au schéma. Ce serait faire injure aux spécialistes de la Chine contemporaine de croire qu'ils aient une idée aussi simpliste de l'histoire de la Chine. Ils n'ignorent pas les liens innombrables qu'en Extrême-Orient comme ailleurs le présent entretient avec le passé, et ils savent que, depuis le néolithique, la Chine a connu une évolution comparable à celle de l'Occident. Mais peut-être le schéma qui continue à s'imposer dans l'esprit du grand public garde-t-il encore chez eux, du fait même de l'orientation de leurs études, une certaine autorité ?

Au fond, tout le problème tient à une représentation un peu trop cloisonnée de l'histoire du monde. Qui rappellerait que la statuaire japonaise s'inspire de la statuaire grecque par l'intermédiaire de l'art gréco-bouddhique des confins de l'Inde et de l'Iran, ou que les apports techniques de la Chine à l'Europe à l'époque de l'expansion mongole ne sont pas étrangers à l'essor économique de l'Occident à la fin du Moyen Age, ne ferait que rappeler une évidence : il n'y a jamais eu dans le monde un seul et unique foyer d'où seraient venus tous les facteurs de transformation ou de renouveau. Et il se pourrait que, contrairement au schéma scolaire, l'Occident moderne et contemporain doive plus à la Chine qu'il ne l'imagine. Tel est du moins le paradoxe qu'on pourrait soutenir avec des arguments assez sérieux et qui ne manquent pas de séduction.

L'auteur du volume de Science and Civilisation in China consacré à l'histoire de l'agriculture, Mme Francesca Bray, y rappelle l'émerveillement des Occidentaux des XVIIe et XVIIIe siècles devant les perfectionnements de l'agriculture chinoise et ses extraordinaires rendements par rapport à ceux que connaissait généralement l'Europe à leur époque. Elle rappelle aussi le grand succès du mouvement physiocratique, inspiré par l'exemple de la Chine, à la fin du XVIIIe siècle. Mais elle montre en outre, dans un paragraphe intitulé "Did China contribute to Europe's Agricultural Révolution ?" (1), que deux inventions chinoises semblent avoir modifié profondément les conditions de l'agriculture dans les grandes plaines de l'Europe du Nord à partir de la fin du XVIIIe siècle. Le labour traditionnel dans les terres lourdes de ces régions se faisait à l'aide de puissants attelages capables de déplacer de pesantes et incommodes charrues en bois à versoirs plats ou à peine courbés. Or toutes les charrues chinoises au XVIIe siècle, dans les régions de culture sèche comme dans celles de riziculture irriguée, étaient munies d'un versoir métallique dont la courbure retournait efficacement la terre en réduisant les frottements de façon considérable. Ce type de charrue légère s'était répandu au Japon et dans toute l'Asie du Sud-Est et il est plus que vraisemblable qu'il ait inspiré la construction des nouvelles charrues hollandaises aux XVIIe et XVIIIe siècles : la copie est en effet évidente.

Les semailles traditionnelles à la volée faisaient perdre en Europe le tiers ou la moitié des semences, à la différence des semoirs à deux ou plusieurs conduits en usage en Chine depuis les Han, qui permettaient de semer en rangs et assuraient à la fois de meilleurs rendements et une grande économie de semences. Ces semoirs, observés sur place en Chine - ou en Inde où ils existaient aussi -, semblent bien avoir suggéré en Europe la fabrication de semoirs de plus en plus perfectionnés. Rappelons aussi que ces vieilles inventions chinoises qu'étaient le tarare et la houe tractée ont été empruntées par l'Europe au XVIIIe siècle.

La Chine aurait donc contribué au développement en Angleterre et aux Pays-Bas de la grande exploitation agricole créatrice de nouveaux rapports sociaux et productrice de profits, qui a libéré la force de travail nécessaire aux nouvelles manufactures. La Chine, où l'accroissement des rendements dans les régions de riziculture irriguée avait été obtenu tout différemment par un travail plus intensif à superficie égale, ne serait donc pas en fin de compte étrangère à l'essor du capitalisme en Occident.

Un ouvrage déjà ancien et qu'il faudrait récrire est celui que Virgile Pinot a consacré à l'influence de la Chine sur la philosophie des Lumières (2). Il montre comment la découverte de la Chine entre les XVIe et XVIIe siècles a contribué à l'évolution des idées en Europe, mettant en cause bien des croyances et des conceptions morales, religieuses et philosophiques. La Chine a servi d'arme contre l'emprise encore très puissante de la religion. On a commencé alors à douter que toute l'histoire de l'homme et de l'univers était dans la Bible ou qu'il existait un lien nécessaire entre la foi chrétienne et les moeurs. Mais l'exemple de la Chine a servi aussi d'arme contre les privilèges de la naissance et influencé le mouvement des idées qui a conduit à la Révolution française. Quoi qu'on ait dit du caractère élitiste du mandarinat chinois et des tendances à la reproduction des classes dirigeantes - les mêmes tendances existent dans nos démocraties occidentales -, l'idée chinoise de ne tenir compte que du talent et des mérites dans le choix des hommes contenait un ferment révolutionnaire qui était naturellement ressenti dans une Europe où les conditions sociales étaient si nettement distinguées. C'est bien d'ailleurs pour faire contrepoids à la puissance des familles aristocratiques qui avaient accaparé tous les postes de commande du IVe au VIe siècle et pour renforcer l'autorité du gouvernement central sur ses agents et sur les provinces que les Tang avaient eu recours à partir du VIIe siècle au système des concours. Du VIIe au IXe siècle dès conflits ont opposé en effet les fonctionnaires issus de la haute aristocratie et les hommes nouveaux recrutés par concours. La diffusion d'un moyen de reproduction rapide et courant de l'écrit et l'essor économique de la Chine du bas Yangzi ont permis à partir du XIe siècle une extension des classes lettrées et un recours à peu près exclusif aux concours. On est en droit de parler d'une certaine démocratisation du système socio-politique : rien n'interdisait à qui en avait les moyens de s'élever par l'instruction. Toute l'histoire de la Chine jusqu'à l'époque contemporaine en apporte la preuve.

Dans un article publié pendant la dernière guerre et passé à peu près inaperçu, Teng Ssu-yii a clairement démontré d'autre part que le système des concours de recrutement a été sciemment adopté par l'Occident à l'imitation de la Chine, après avoir été introduit en Inde par les Anglais pour le recrutement des agents du Civil Service (3). L'influence chinoise ne fait ici aucun doute et il n'y a aucun abus à dire qu'elle a contribué à la constitution de l'Etat bureaucratique tel que nous le connaissons aujourd'hui, d'autant que la Chine avait une bonne avance sur nous en cette matière : dès l'époque de nos Mérovingiens, son système politique et administratif se signalait par son caractère très élaboré et rationnel, par la spécialisation des tâches, la stricte délimitation des compétences, la claire distinction du public et du privé, la responsabilité des agents de l'Etat et l'existence d'un organisme permanent de contrôle de l'administration et des décisions politiques.

Nous voilà loin du cliché scolaire d'après lequel tout ce qui est moderne vient d'Occident. Mais on fera remarquer qu'il est d'autant plus facile de se convaincre de la supériorité de principe de l'Occident que l'histoire des autres parties du monde reste ignorée ou est tenue pour négligeable. A la suite d'une longue période coloniale qui s'étend des débuts du XVIe siècle au milieu du XXe siècle, l'image de l'Europe découvrant le monde et lui apportant la civilisation s'est profondément ancrée dans nos esprits. Elle fait partie du bagage mental enregistré dès le plus jeune âge, de même que l'idée qu'il n'y a eu de progrès qu'en Occident. On apprend aux enfants de nos écoles que Gutenberg a inventé l'imprimerie, invention qui marque le début des Temps modernes. On ne leur apprend pas que l'invention et l'usage des caractères mobiles ont été plus précoces en Extrême-Orient qu'en Europe, ni que les Chinois ont eu recours pendant cinq siècles avant Gutenberg à un procédé de reproduction de l'écrit plus fidèle, aussi rapide et moins coûteux que l'imprimerie, ce qui fait qu'on a probablement édité plus de livres en Chine que dans le reste du monde avant le milieu du XVIIIe siècle (4). Si ce ne sont pas des choses que l'on apprend, c'est que, par rapport à une "histoire universelle" qui reste centrée sur l'Occident, tout ce qui lui est extérieur ne peut avoir qu'un intérêt de curiosité. D'ailleurs, ce ne sont pas des données isolées qui pourraient changer les perspectives : pour que la comparaison soit valable, il faudrait montrer que la reproduction courante de l'écrit en Chine à partir de la fin du Xe siècle est indissociable d'un univers social, politique et mental tout à la fois très différent de celui de l'Europe de la fin du Moyen Age et beaucoup plus évolué à tous points de vue.

Voilà qui nous amène au problème de la rupture. Si la Chine contemporaine a rompu avec son passé, le moins qu'on puisse dire c'est qu'elle n'est pas seule dans ce cas. Nous aussi nous avons rompu avec notre passé, et nous sommes pris dans le même tourbillon de transformation accélérée. Et pourtant nos concepts, nos institutions, nos comportements, nos traditions religieuses et philosophiques plongent leurs racines dans un passé parfois très lointain et gardent des liens avec lui : notre image d'Occidentaux reste encore parfaitement reconnaissable. Ce qui est vrai pour nous est vrai pour les Chinois, malgré les influences occidentales. Il y a d'ailleurs dans la Chine la plus actuelle de curieuses résurgences. Des comportements sociaux et des traditions religieuses qu'on croyait disparus après trente ans de tourmente révolutionnaire refont surface comme s'ils avaient été simplement refoulés.

Il est encore de mode de porter aux nues le taoïsme et les traditions populaires et de ne voir dans le confucianisme qu'une doctrine artificielle imposée par l'Etat. Expression d'une conception hiérarchique et autoritaire de la société, idéologie "féodale" vilipendée par les étudiants chinois le 4 mai 1919, le confucianisme ou, pour être plus exact, cette synthèse bouddhico-confucéenne que fut le néo-confucianisme et qui a si profondément marqué les moeurs et les conceptions à partir des XIe- XIIe siècles, a été désigné comme un des freins les plus puissants à la modernisation de la Chine. Cette thèse commence pourtant à être remise en question. On s'est demandé (5) si le dynamisme actuel des anciens pays d'influence et de civilisation chinoises - le Japon tout d'abord (où la restauration de Meiji était déjà d'inspiration néo-confucéenne), Taiwan, la Corée du Sud et les colonies chinoises de l'Asie du Sud-Est - ne s'expliquerait pas en partie par la persistance de traditions sociales qui sont typiquement néo-confucéennes : le goût de l'étude, le sens de la discipline personnelle, celui des responsabilités sociales, la force des liens familiaux et des relations communautaires. C'est de façon analogue que Max Weber avait jadis mis en relation des comportements et des conceptions morales typiques du protestantisme avec l'essor du capitalisme dans l'Europe du Nord. Malgré toutes les critiques, son hypothèse n'a pas perdu toute valeur. Il reste à voir ce qu'il en sera de celle-là. Le dynamisme commercial des Chinois en tout cas n'est pas nouveau et les pays de l'Asie du Sud-Est le savent bien. Pas plus qu'on ne peut identifier modernité et Occident, on ne peut séparer, en Chine comme ailleurs, le moderne du traditionnel. La distinction entre Chine moderne et Chine traditionnelle n'est qu'une distinction commode. Elle n'a aucune justification théorique et il peut se faire que telle étude de périodes récentes soit plus inactuelle que certaines recherches sur un passé plus ancien qui peuvent mettre en lumière des aspects fondamentaux.

NOTES
1. Francesca Bray, Science and Civilisation in China, vol.VI, 2, Cambridge,
Cambridge University Press, 1984, pp. 558-587.
2. Virgile Pinot, La Chine et la formation de l'esprit philosophique en France
(1640-1740), Paris, Geuthner, 1932.
3. Ssu-yii Teng, "Chinese influence on the Western examination System",
Harvard Journal of Asiatic Studies, VII (1943), pp. 267-312.
4. Cette estimation a été faite par L. C Goodrich.
5. C'est l'hypothèse de Fujii Hiroshi.


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Message Publié : 17 Jan 2014 21:28 
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Jules Michelet
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Altai Khan a écrit :
Mais, mais, mais... l'Etat n'intervenait pas dans la vie des gens. Ces querelles sur l'argent concernent les mandarins. Et il y a eu de très vifs débats à la cour, comme toujours dans l'histoire chinoise (prenez par exemple la fameuse Querelle du sel et du fer au Ier siècle av JC). Mais la population n'était pas touchée par ces débats. Encore une fois, il y a en Chine un non-interventionisme fondamental de l'Etat dans la vie privée et le commerce local, non-interventionnisme renforcé d'ailleurs par la doctrine confucéenne. [...]
- Les périodes d'ouverture ou de fermeture au monde n'ont rien à voir avec le rapport à l'argent.

Sauf que le commerce d'un pays n'est pas que local est interne... mais touche également le commerce inter-nation et là par contre vous ne pourrez pas dire que l'État chinois n'était pas interventionniste. Il y'a eu des périodes où le simple fait pour un bateau chinois d'avoir commercé avec un pays étrange faisait que les personnes ayant commercées étaient exécutées.

Altai Khan a écrit :
"L'argent pouvant corrompre" concerne, sous les Ming, la querelle entre les eunuques et les mandarins. Après le règne énergique des premiers empereurs Ming, leurs successeurs vont s'enfermer dans leur tour d'ivoire nouvellement construite - la Cité interdite (qui va couper du monde l'empereur comme Versailles a coupé Louis XV et Louis XVI du pays réel) - et laisser se développer le nombre et les attributions des eunuques qui s'enrichissent, perçoivent des pots-de-vin etc. En réaction à leur perte de pouvoir et à cet enrichissement scandaleux des eunuques, les mandarins vont lancer le mot d'ordre de "l'argent sale" et plus généralement ce qu'on va appeler un peu abusivement le néo-confucianisme. Mais ce sont des querelles "de clochers", des intrigues de cour qui ne concernent pas la population...

Ce mot d'ordre de "l'argent sale" ne va pas toucher directement la population... sauf qu'elle va influer sur la politique monétaire des mandarins ce qui donnera à certaines périodes des résultats catastrophiques pour la population.

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Message Publié : 18 Jan 2014 7:40 
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Skipp a écrit :
Sauf que le commerce d'un pays n'est pas que local est interne... mais touche également le commerce inter-nation et là par contre vous ne pourrez pas dire que l'État chinois n'était pas interventionniste. Il y'a eu des périodes où le simple fait pour un bateau chinois d'avoir commercé avec un pays étrange faisait que les personnes ayant commercées étaient exécutées.
Là je suis d'accord, le contrôle du commerce extérieur était généralement très fort et même érigé en monopole d'Etat.
Mais que représente le commerce extérieur par rapport au commerce intérieur? Le point du débat était que le commerce et l'enrichissement étaient des valeurs profondément ancrées dans la culture et l'histoire chinoises, et non une importation du modèle occidental. C'est d'ailleurs un point qui trouble beaucoup les théoriciens de la suprématie du modèle occidental de libre-échange : comment expliquer qu'une nation pouvait être très libre de commercer et de s'enrichir sur le plan intérieur tout en subissant un monopole étatique sévère sur le plan des échanges extérieurs ? C'est incompréhensible pour certains théoriciens occidentaux du "tout ou rien" (liberté totale de commercer, intérieure et extérieure, ou rien du tout).
D'une certaine façon, on retrouve cette incompréhension actuellement devant les modèles de développement de plusieurs pays d'Asie : pouvoir fort, parfois dictatorial, qui contrôle certains pans de l'économie tout en lâchant la bride dans d'autres. La Corée de l'après-guerre, Singapour, la Chine depuis trente ans... Il y a bien un modèle asiatique de développement (d'ailleurs très hétérogène) qui est différent du modèle occidental, ce qu'ont du mal à accepter les théoriciens de la suprématie de ce dernier.

PS : Ca n'est pas vraiment le sujet mais le fait qu'à certaines périodes, la mise à l'eau de navires était interdite au particulier vient surtout du problème de la piraterie ! Les côtes, notamment dans la moitié sud, étaient infestées de pirates qui s'en prenaient au navires marchands de l'Etat. Les autorités prenaient donc des mesures allant jusqu'à l'interdiction totale de prendre l'eau !

Citer :
Ce mot d'ordre de "l'argent sale" ne va pas toucher directement la population... sauf qu'elle va influer sur la politique monétaire des mandarins ce qui donnera à certaines périodes des résultats catastrophiques pour la population.
Oui mais alors là c'est autre chose, on part dans une discussion beaucoup plus vaste, et certes intéressante, sur les conséquences des politiques économiques...


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Message Publié : 18 Jan 2014 10:34 
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Altai Khan a écrit :
Skipp a écrit :
Sauf que le commerce d'un pays n'est pas que local est interne... mais touche également le commerce inter-nation et là par contre vous ne pourrez pas dire que l'État chinois n'était pas interventionniste. Il y'a eu des périodes où le simple fait pour un bateau chinois d'avoir commercé avec un pays étrange faisait que les personnes ayant commercées étaient exécutées.

Là je suis d'accord, le contrôle du commerce extérieur était généralement très fort et même érigé en monopole d'Etat.
Mais que représente le commerce extérieur par rapport au commerce intérieur? Le point du débat était que le commerce et l'enrichissement étaient des valeurs profondément ancrées dans la culture et l'histoire chinoises, et non une importation du modèle occidental. C'est d'ailleurs un point qui trouble beaucoup les théoriciens de la suprématie du modèle occidental de libre-échange : comment expliquer qu'une nation pouvait être très libre de commercer et de s'enrichir sur le plan intérieur tout en subissant un monopole étatique sévère sur le plan des échanges extérieurs ? C'est incompréhensible pour certains théoriciens occidentaux du "tout ou rien" (liberté totale de commercer, intérieure et extérieure, ou rien du tout).
D'une certaine façon, on retrouve cette incompréhension actuellement devant les modèles de développement de plusieurs pays d'Asie : pouvoir fort, parfois dictatorial, qui contrôle certains pans de l'économie tout en lâchant la bride dans d'autres. La Corée de l'après-guerre, Singapour, la Chine depuis trente ans... Il y a bien un modèle asiatique de développement (d'ailleurs très hétérogène) qui est différent du modèle occidental, ce qu'ont du mal à accepter les théoriciens de la suprématie de ce dernier.

On est d'accord. Il faut se méfier de ce qui parait trop simple car cela peut cacher une complexité certaine.

Altai Khan a écrit :
le fait qu'à certaines périodes, la mise à l'eau de navires était interdite au particulier vient surtout du problème de la piraterie ! Les côtes, notamment dans la moitié sud, étaient infestées de pirates qui s'en prenaient au navires marchands de l'Etat. Les autorités prenaient donc des mesures allant jusqu'à l'interdiction totale de prendre l'eau !

L'auteur du livre que je lis "1493" affirme le contraire... ce serait face à l'interdiction des bateaux commerçants chinois de commercer avec les pays étrangers que les marins chinois se seraient tournés vers la piraterie (en s'alliant parfois à des pirates indonésiens, philippins, voir même des éléments portugais et "hollandais") pour vivre. Après... cet ouvrage est écrit par Charles C. Mann qui est journaliste de formation...

Altai Khan a écrit :
Citer :
Ce mot d'ordre de "l'argent sale" ne va pas toucher directement la population... sauf qu'elle va influer sur la politique monétaire des mandarins ce qui donnera à certaines périodes des résultats catastrophiques pour la population.

Oui mais alors là c'est autre chose, on part dans une discussion beaucoup plus vaste, et certes intéressante, sur les conséquences des politiques économiques...

Dans l'ouvrage "1493" (dont je n'arrête pas de parler désolé mais c'est surtout ma référence sur mes infos à la Chine... j'espère donc que son auteur est une référence), l'auteur parle d'une période d'émission galopante de billets... suivit de pièces de monnaies ayant perdues quasiment toute valeur... suivit d'une demande du métal argent... ce qui va alors commencé à lancer le commerce entre la Chine demandeuse du métal argent et le sud de l'Amérique où de grandes mines d'argent commençaient à être exploitées.

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Message Publié : 18 Jan 2014 12:59 
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Skipp a écrit :
L'auteur du livre que je lis "1493" affirme le contraire... ce serait face à l'interdiction des bateaux commerçants chinois de commercer avec les pays étrangers que les marins chinois se seraient tournés vers la piraterie (en s'alliant parfois à des pirates indonésiens, philippins, voir même des éléments portugais et "hollandais") pour vivre. Après... cet ouvrage est écrit par Charles C. Mann qui est journaliste de formation...
Moui, je sais pas trop... Je ne fais pas confiance à Mann, qui est journaliste et ne connaît pas grand chose ni à l'histoire ni à la Chine, mais je n'arrive pas non plus à retrouver mes références :oops: Au XVème siècle, les pirates japonais infestaient littéralement les côtes chinoises, provoquant cette réaction du pouvoir. Du moins, je crois avoir lu ça dans Gernet, mais je ne peux rien affirmer. En attente de confirmation? :wink:

De toute façon, il y a une fermeture certaine du pouvoir à ce qui touche à l'outre-mer. On le contrôle souvent, on le barricade parfois, mais on ne laisse jamais la liberté d'échanger librement avec l'extérieur, c'est certain. J'ai la sensation que ça dépasse le pouvoir politique, la méfiance vis-à-vis de l'extérieur est un trait culturel profond que l'on retrouve tout au long de l'histoire chinoise, dans sa littérature... et même aujourd'hui.

Citer :
Dans l'ouvrage "1493" (dont je n'arrête pas de parler désolé mais c'est surtout ma référence sur mes infos à la Chine... j'espère donc que son auteur est une référence), l'auteur parle d'une période d'émission galopante de billets... suivit de pièces de monnaies ayant perdues quasiment toute valeur... suivit d'une demande du métal argent... ce qui va alors commencé à lancer le commerce entre la Chine demandeuse du métal argent et le sud de l'Amérique où de grandes mines d'argent commençaient à être exploitées.
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Qui manipulait l’économie globale au 17e siècle ?

Par Philippe Norel

Nous savons tous que les Espagnols ont extrait de l’argent (et marginalement de l’or) aux Amériques. Nous nous souvenons également que ces apports de métaux précieux ont permis une véritable restructuration des économies européennes. N’investissant pas productivement cet argent, les Espagnols financent leur guerre contre le protestantisme, mais consomment aussi des céréales originaires d’Europe orientale et achètent des textiles néerlandais et anglais. Dans ce dernier pays, le débouché espagnol permet d’entamer la révolution des enclosures : en clôturant les prairies, autrefois d’usage semi-communautaire, on y développe le mouton pour la laine, source de fructueuses exportations de laine brute et de textiles. Parallèlement, les paysans privés de ressources par les enclosures sont en partie réutilisés comme ouvriers tisserands à domicile et approvisionnés en laine brute par un marchand qui leur reprend ensuite le produit fini : c’est le putting-out system qui amorce la proto-industrialisation en Europe. Les Néerlandais, pour leur part, vendent aussi céréales et textiles aux Espagnols et financent ainsi, avec l’argent obtenu, leur flotte maritime et leur fructueuse pénétration dans l’océan Indien du 17e siècle. Quant à l’Europe orientale, elle fournit des céréales à l’Ouest quitte à réinstaurer un servage partiellement disparu. L’Italie, pour sa part, bénéficie de l’argent espagnol via le remboursement, par les rois catholiques, des avances consenties par les Génois. Bref, c’est une véritable division internationale du travail (mais aussi une hiérarchisation des économies) qui est mise en place sur le continent européen [Wallerstein, 1974], apparemment stimulée par la seule alimentation américaine en métaux précieux. Par le biais de la conquérante Espagne, l’Europe serait donc la première bénéficiaire d’un jeu économique inédit qu’elle maîtriserait parfaitement…

La réalité est sans doute plus complexe. On sait en effet que si les Européens sont allés chercher des métaux précieux au loin c’est qu’ils en manquaient cruellement au 15e siècle, victimes consentantes d’un déficit commercial récurrent avec l’Orient [Findlay et O’Rourke, 2007]. Les importations, notamment grâce aux Vénitiens et aux Génois, de produits asiatiques (encens et parfums d’Arabie, textiles et épices de l’Asie du Sud, épices de l’Asie du Sud-Est, ou encore soie, laque et porcelaines de Chine) n’étaient nullement compensées par des exportations occidentales encore très frustes aux yeux de l’Orient… Et dès lors, une grande partie de l’argent reçu d’Amérique va permettre de continuer à financer ce déficit durable. De fait, Frank [1998, p.146-149] estime qu’entre 1550 et 1800, sur 98 000 tonnes d’argent arrivées d’Amérique en Europe, 39 000 tonnes seraient reparties pour gagner in fine la Chine, soit environ 40 %. Dès lors, on voit que les métaux précieux d’Amérique sont insérés dans une économie globale plus large que l’Europe et dans laquelle cette dernière semble plutôt en position de faiblesse économique…

Flynn et Giraldez [1995] vont plus loin dans l’interprétation de cette conjonction des économies. Ils montrent que l’histoire traditionnelle néglige le transfert direct d’argent, du Mexique vers l’Asie, via la fameuse route maritime reliant Acapulco et Manille. Cette route permettait aux Espagnols (plus tard aux Néerlandais) d’acheter directement des produits de luxe asiatiques, et notamment chinois, inondant ainsi l’empire du Milieu de métaux précieux. Or il apparaît probable que le volume de ce transfert ait été, au moins vers 1600, du même ordre que celui des envois d’argent de l’Europe vers l’Asie (soit 120 à 150 tonnes par an), peut-être bien davantage si l’on se fie aux estimations du volume de contrebande (de l’ordre de 300 tonnes par an pour l’année 1597 par exemple [Flynn et Giraldez, p. 204]). Notre appréciation de l’importance de l’économie chinoise se trouve donc renforcée par ce constat d’une réalité trop souvent oubliée. Mais l’histoire ne s’arrête pas là ! Non seulement la Chine importait beaucoup de métal-argent par ces deux voies, européenne et mexicaine, mais encore recevait du Japon, qui en produisait lui-même, un volume au moins équivalent à chacune de ces deux routes (peut-être de l’ordre de 200 tonnes par an jusque vers 1650). La Chine semble donc avoir fonctionné comme un véritable siphon de l’argent métal produit, dans l’ensemble de l’espace mondial, au cours de cette période.

Ce constat conduit évidemment à revoir complètement le rôle joué alors par la Chine dans l’économie globale. Pourquoi tenait-elle tant à recevoir cet argent métal ? Ne serait-ce qu’un effet secondaire de l’attirance, alors universelle, pour ses produits ? Ou existait-il une spécificité chinoise qui expliquerait cette soif ? De fait, si l’on regarde le prix relatif de l’or vis-à-vis de l’argent, il était couramment de 1 pour 6 en moyenne à Canton, vers 1600, contre 1 pour 13 environ en Espagne. Cela signifie qu’un gramme d’or s’échangeait contre 6 grammes d’argent en Chine, mais 13 grammes à Séville [ibid., p.206]. Autrement dit, l’argent valait environ deux fois plus cher en Chine qu’en Espagne. Dans ces conditions que devaient faire des acteurs économiques rationnels ? Par exemple acheter de l’or en Chine (avec 6 g d’argent ils en obtenaient 1 g), le faire sortir et l’échanger à des étrangers contre 13 g d’argent. En tenant compte des frais de transport, l’opération, réalisée sur des montants suffisants, devenait hautement lucrative. Plus simplement, un commerçant européen avait tout intérêt à acheter des biens chinois, d’autant moins coûteux en équivalent argent que le cours de ce métal était élevé. Pour un bien valant 1 gramme d’or, il ne versait en Chine que l’équivalent de 6 g d’argent et pouvait revendre ce bien plus à l’Ouest pour l’équivalent de 13 g d’argent, et ce sans même tenir compte évidemment de la désirabilité du produit à l’Ouest et de la plus-value ainsi permise. En clair, avec de tels ratios bimétalliques, l’or devait fuir de Chine et l’argent nécessairement y pénétrer. « C’est précisément ce qui s’est passé du milieu du 15e jusqu’au milieu du 17e siècle, cette valeur élevée de l’argent à l’intérieur de la Chine déterminant les opportunités de profit tout autour du globe [ibid., p. 206].»

Cette situation vient évidemment ruiner l’hypothèse d’un « pur déficit courant » de l’Europe vis-à-vis de l’Asie et de la Chine. Si telle était l’explication, ce déficit pouvait être réglé en n’importe quel métal précieux. Or non seulement l’or ne sortait pas d’Europe, mais au contraire il y rentrait ! Ce qui est bien la preuve que c’est la différence, entre les deux extrémités de l’Eurasie, des ratios de valeur entre or et argent, qui expliquait les mouvements et non une quelconque incapacité commerciale ou avidité consumériste de l’Europe.

Reste à savoir pourquoi la Chine accordait tant de valeur relative à l’argent. Ce sont en fait les premières tentatives d’émission de papier monnaie, entamées avec succès sous les Song, mais qui avaient commencé à dégénérer sous les Yuan, au début du 14e siècle, qui en sont responsables [Von Glahn, 1996]. La dévalorisation totale du papier monnaie qui était manifeste dès 1360 imposait des réformes et, peu à peu, le métal argent, moins coûteux que l’or et plus facilement testable que le cuivre s’imposait dans la circulation. Après la décision impériale, sous les Ming, en 1430, de percevoir les taxes en argent, la soif de ce métal ne pouvait que s’accroître pour alimenter une économie, par ailleurs fort dynamique. Et il est évident que ce marché de l’argent ne pouvait, à partir du 16e siècle, qu’attirer massivement les premiers acteurs européens à traiter en Asie. En ce sens, les commerçants portugais, néerlandais ou britanniques, ne furent que de simples « intermédiaires » au comportement dicté, voire manipulé, par les besoins de l’immense Chine. Ce ne furent que des agents dans un marché profitable et certainement pas des conquérants sûrs d’eux-mêmes et maîtrisant une situation qu’ils auraient contribué à créer… Bien au contraire, la demande chinoise de métal argent « assurait des profits prodigieux pour les individus ou les institutions les mieux placés ; des mines andines ou japonaises jusqu’aux rues de la Chine, le profit constituait la force motrice à chaque étape de ce commerce » [Flynn et Giraldez, p. 209].

On a donc ici un exemple particulièrement parlant de la myopie propre à l’eurocentrisme, qui empêche de percevoir où sont les autres moteurs possibles d’une économie globale. D’une certaine façon, il est sans doute possible de dire que toute l’activité néerlandaise et britannique du 17e siècle avait d’abord pour but l’obtention de l’argent espagnol, afin de tirer parti du marché chinois de ce métal. Que la disposition de ce métal permette en retour d’acquérir des produits exotiques, hautement valorisés à l’Ouest, ne faisait qu’ajouter à la profitabilité de l’opération et accentuait la prééminence en Europe des puissances les plus efficaces. Mais en aucun cas la vente d’argent à la Chine, pour ses propres besoins, ne peut être éludée dans l’analyse de l’économie globale de cette époque.


FINDLAY R., O’ROURKE K. [2007], Power and Plenty: Trade, War, and the World Economy in the Second Millenium, Princeton, Princeton University Press.
FLYNN D., GIRÁLDEZ A. [1995], “Born with a Silver Spoon: The Origin of World Trade in 1571”, Journal of Economic History, vol. 6, n° 2.
FRANK A.-G. [1998], ReOrient: Global Economy in the Asian Age, Berkeley, University of California Press.
NOREL P. [2009], L’histoire économique globale, Paris, Seuil, dont cet article reprend les pages 25-29 légèrement modifiées.
VON GLAHN R. [1996], Fountain of Fortune – Money and Monetary Policy in China, 1000-1700, Berkeley and Los Angeles, University of California Press.
WALLERSTEIN I. [1974], The Modern World System, tome I, New York, Academic Press.


http://blogs.histoireglobale.com/qui-manipulait-leconomie-globale-au-17eme-siecle_244


[Je note juste en passant que le 1er paragraphe aborde l'un des thèmes annexes abordés dans ce fil, à savoir que le décollage économique de l'Europe à l'époque moderne vient en partie de l'argent d'Amérique, et l'on avait rétorqué que cette idée était ridicule. Pas si ridicule que ça apparemment, puisqu'il y a débat... On peut peut-être en parler dans un nouveau fil]


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Message Publié : 18 Jan 2014 15:53 
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Georges Duby
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Extrait d'un résumé d'une étude du professeur d'histoire de l'économie Angus Maddison sur " l'Economie chinoise, une perspective historique ":

En dehors de l’agriculture, le système bureaucratique a empêché l’émergence d’une bourgeoisie commerciale et industrielle indépendante comme ce fut le cas en Europe. La recherche de rentes était l’occupation principale des fonctionnaires et de la petite noblesse de la Chine impériale. Leurs privilèges légaux et coutumiers définissaient leur statut social, leur style de vie et leur comportement. C’était le groupe social qui dominait la vie urbaine. Ils avaient tendance à tout réglementer. L’activité entrepreneuriale était précaire dans un cadre où la protection de l’activité privée était si mal assurée. Toute activité qui promettait d’être lucrative était « pressurée » par l’administration. Parmi les grandes entreprises, il n’y avait que des monopoles publics ou des monopoles agréés par l’État. Les marchands, les banquiers et les négociants ne bénéficiaient pas des chartes et de la protection juridique qui étaient accordées aux marchands des villes européennes. Les échanges et les contacts intellectuels avec l’étranger étaient extrêmement restreints. Cet isolement volontaire constituait aussi un obstacle pour la croissance.
Entre le XVIe et le XVIIIe siècle, la Chine a perdu son hégémonie économique au profit de l’Europe de l’Ouest. Cette perte d’hégémonie n’était pas due à une situation particulièrement défavorable en Chine, mais aux circonstances exceptionnelles qui prévalaient en Europe. Pour différentes raisons, l’Europe était mieux placée pour favoriser la naissance du capitalisme moderne.
L’élément le plus fondamental était la reconnaissance du fait que l’homme pouvait transformer les forces de la nature par l’étude rationnelle et l’expérience. Avec la Renaissance et le siècle des Lumières, les élites occidentales ont progressivement abandonné les superstitions, la magie et la soumission à l’autorité religieuse. La tradition scientifique occidentale qui sous–tend l’attitude de l’homme moderne à l’égard du progrès technique et de l’innovation remonte clairement au XVIIe siècle, où elle a commencé à imprégner le système éducatif. En Chine, le système d’enseignement était imprégné par les classiques anciens et l’orthodoxie bureaucratique. Ce système a été incapable de jeter les bases fondamentales de la science moderne.
L’Europe reposait sur un système d’États–nations qui avaient de grandes affinités. Ces nations étaient tournées vers l’extérieur, elles entretenaient des liens commerciaux importants et les échanges intellectuels étaient relativement faciles. Tout cela stimulait la concurrence et l’innovation.
Entre 1820 et 1952, l’économie mondiale a fait un énorme bond en avant dans tous les domaines. La production mondiale a été multipliée par huit, et le revenu mondial par habitant a été multiplié par 2.6. Le revenu par habitant a été multiplié par huit aux États–Unis, par quatre en Europe et par trois au Japon. Dans les autres pays d’Asie, sauf au Japon, la croissance économique a été très modeste, mais, en Chine, le produit par habitant a en fait diminué. La part de la Chine dans le PIB mondial a chuté d’un tiers à un vingtième. "

Un extrait du texte lui-même:
" Needham (1969) estime que la bureaucratie chinoise relevait du despotisme éclairé et qu’elle était plus rationnelle que la chrétienté européenne ; avec une concentration des esprits les plus cultivés dans les postes de responsabilité, elle était plus solidement ancrée sur le mérite et donc plus favorable au progrès du « savoir naturel » que le système européen, qui se fondait sur le pouvoir militaire aristocratique. Après la Renaissance et le développement des sciences galiléennes et newtoniennes en Europe, l’avantage changea de camp. Pour Needham, la Chine n’a jamais été capable « de développer les bases fondamentales de la science moderne, telles que l’application des hypothèses mathématiques à la Nature, la parfaite maîtrise et l’utilisation de la méthode expérimentale, la distinction entre les qualités primaires et secondaires, et l’accumulation systématique de données scientifiques ouvertement publiées » (Needham, 1981, p. 9). Il ajoute cependant que l’avance européenne était due aux « conditions sociales, intellectuelles et économiques particulières qui prévalaient en Europe à l’époque de la Renaissance, et qu’elle ne saurait être expliquée par une déficience quelconque de l’esprit chinois ou de la tradition intellectuelle et philosophique de la Chine ».

La Chine n’a pas su relever de façon appropriée le défi occidental avant le milieu du XXe siècle, essentiellement parce que l’idéologie, la mentalité et le système de formation de la bureaucratie favorisaient une optique ethnocentrique, indifférente à ce qui se passait à l’extérieur de la Chine. Il y eut des érudits jésuites à Pékin pendant près de deux siècles. Certains, comme Ricci, Schall et Verbiest, entretenaient des relations étroites avec la classe dirigeante, mais l’élite chinoise était peu curieuse de l’évolution de la pensée intellectuelle ou scientifique en Occident. A l’époque des dynasties Ming et Ch’ing, la Chine se ferma pratiquement aux échanges extérieurs. En 1792–93, Lord Macartney passa toute une année à transporter 600 caisses de présents offerts par George III. Elles contenaient entre autres un planétarium, des globes, des instruments mathématiques, des chronomètres, un télescope, des instruments de mesure, des instruments chimiques, du verre à glaces, des pièces de dinanderie et d’autres objets (Hsü, 1975). Après qu’il eut présenté ces cadeaux à l’Empereur Ch’ien–lung à Jehol, la réponse officielle vint en ces termes : « nous ne manquons de rien ... Nous attachons peu de prix aux objets bizarres ou ingénieux, et nous n’avons pas besoin non plus d’autres objets fabriqués dans votre pays » (Teng, Fairbank et al. , 1954). Cette mentalité profondément ancrée contribua à empêcher la Chine de s’engager dans la voie du développement protocapitaliste empruntée par l’Occident de 1500 à 1800, et de participer par la suite à des processus de croissance économique beaucoup plus dynamique "

_________________
Heureux celui qui a pu pénétrer les causes secrètes des choses. Virgile.


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Message Publié : 18 Jan 2014 18:53 
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Salluste
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Inscription : 16 Déc 2013 13:24
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Tiens, la supériorité du modèle occidental est de retour, sans que l'on comprenne très bien le rapport avec les échanges entre Chine et Occident. Pourquoi je ne suis pas étonné ? lol

Dans un autre article, Maddison avance sans rire que le PNB par habitant chinois avait été dépassé par le PNB par habitant européen en... 1500 ! Actuellement, malgré les techniques modernes de recensement de la population et la surveillance très stricte du gouvernement chinois dans sa politique de l'enfant unique, on ne sait même pas combien il y a d'habitants en Chine - les estimations vont de 1,3 milliard à 1,6 milliard, avec au bas mot des dizaines de millions de naissances cachées. Alors comment oser prétendre connaître le nombre d'habitants en 1500 pour calculer le PNB/habitant ? C'est assez ridicule... Bairoch donne des chiffres radicalement différents et on peut lui faire le même reproche. Par contre, il y a accord pour dire que c'est seulement à partir du XIXème siècle, au moment où l'on commence d'ailleurs à avoir des chiffres plus sérieux, que la Chine va "décrocher", du fait à la fois de la révolution industrielle européenne qui va propulser l'Europe au sommet et des empiètements (Guerres de l'opium...) des Occidentaux en Chine. Il faut donc peut-être arrêter de gloser à l'infini sur tel ou tel modèle et d'essentialiser le débat.
D'autant que Francesca Bray montre les emprunts à la Chine qui ont permis à l'Occident d'engager sa révolution agricole. Et Norel montre l'importance de l'échange triangulaire entre Amérique, Europe et Chine. Toutes ces lectures intéressantes et un peu contradictoires montrent que l'histoire globale en est encore, malgré tout, à ses prémices et que la part de l'idéologie y est réelle, malheureusement.

Maddison n'est pas sinologue, ne lit pas les sources chinoises et semble confondre, de par son approche globale, le grand commerce, soumis à l'Etat, et l'activité économique quotidienne, où l'Etat ne peut intervenir. De plus, il plaque son modèle occidental sur les banques et la finance, sans comprendre que le principal financement en Chine et ailleurs en Asie est la tontine. Quand on ignore ça, comme le fait Maddison, on ignore à peu près tout du mode de financement de l'activité économique. Evidemment, il faut être sinologue pour connaître et étudier cet aspect...

Par contre, il a raison quand il dit que la Chine s'est fermée à l'époque Ming. Il y a consensus des historiens là-dessus. Autant l'époque Song avait été marquée par une grande ouverture intellectuelle, une émulation, des débats sur la politique à suivre etc., autant la dynastie Ming a vraiment été en dessous de tout. Peut-être qu'il faut voir dans cette fermeture les séquelles de la terrible invasion mongole, qui a été un véritable traumatisme en Chine. La peur qui a découlé de cette invasion a traversé les siècles et une partie des recettes de l'Etat est allée au renforcement de la Grande Muraille sous toute la dynastie Ming. On n'imagine pas le poids du péril que les nomades ont fait peser sur la Chine. C'est comme si l'Europe avait été victime des raids viking, non pendant un siècle, mais pendant 2 000 ans ! Yongle, le deuxième empereur Ming, a même bâti un palais-talisman afin de protéger magiquement le trône du fils du ciel, faisant appel à toute la symbolique et aux croyances traditionnelles (je parle bien sûr de la Cité interdite). Une sorte de "plus jamais ça" avant l'heure... Dans ce palais, ses successeurs vont se couper du réel.

Un extrait du bon article de Jean-Pierre Duteil :

Autoritaires mais énergiques, les premiers Ming semblent avoir redressé l'économie de la Chine et développé son rayonnement. Ils sont toutefois à l'origine de maux profonds et durables.

Dès le règne de Hongwu, le fonctionnement normal de l'administration se trouve modifié par le développement du nombre des eunuques, chargés à l'origine du gynécée et, en général, des affaires touchant à la vie privée du souverain. La confiance que leur porte l'empereur leur permet de contrôler aussi les gardes du palais et, par là, d'accéder au rang de mandarins militaires sans avoir été lauréats des concours de recrutement.

Sur le plan institutionnel, les eunuques constituent une anomalie dans la mesure où ils sont amenés à intervenir dans des affaires qui relèvent normalement de fonctionnaires. C'est pour cela que Hongwu avait modifié les institutions en créant pour eux le neige, une sorte de conseil restreint qui peut remplacer celui des mandarins. Le neige en arrive très vite à contrôler la police secrète, puis la diplomatie ; à ce titre, les eunuques se voient nommés à la tête des ambassades ou des expéditions maritimes. Ils s'enrichissent en percevant les tributs ou des pots-de-vin de royaumes vassaux, et flattent les « épouses secondaires » du souverain, sachant jouer sur les rivalités de famille. Ils s'appuient également sur le clergé bouddhiste et propagent cette religion de salut qui s'oppose au confucianisme des fonctionnaires, évincés et désormais plus accessibles à l'idée de corruption. Après la mort de Yongle, le groupe des eunuques a tendance à s'institutionnaliser : rentrer dans cette catégorie est de plus en plus considéré comme un moyen de réussite pour de jeunes garçons qui ont des capacités mais n'appartiennent pas aux grandes familles lettrées, d'où est issue la plus grande partie des promotions de lauréats des concours. À terme, cette catégorie de serviteurs forme un véritable écran entre la personne de l'empereur et le reste du monde : reçu au palais impérial en 1601, Matteo Ricci ne rencontrera que les eunuques.

Sur le plan des relations internationales, les Ming restent obsédés par les dangers venus du nord, des « peuples de la steppe » qui semblent incarner aux yeux des Chinois d'alors toute forme de barbarie. Les difficultés viennent pourtant du sud : aux XVe et XVIe siècles, les Vietnamiens chassent les gouverneurs chinois et installent à leur place Lê Loi, fondateur des Lê, en 1427 ; les Japonais ravagent les côtes des provinces méridionales par l'intermédiaire des pirates wokou. Les premiers Ming n'en font pas moins porter les principaux efforts sur la construction de Grandes Murailles qui reprennent d'anciens tracés du VIe siècle de notre ère. (...) Au XVIe siècle, les Ming tentent de conserver l'intégrité de leur territoire, protégés par des remparts dont l'efficacité n'a jamais été totale et sans doute moindre que celle des digues édifiées à la même époque pour protéger le Zhejiang des pirates. La Grande Muraille a parfois été comparée à la ligne Maginot ; il serait sans doute préférable de la mettre en parallèle avec le limes romain, dissuasif sans être étanche.

Les Ming ont contribué à figer la personne impériale, tant sur le plan idéologique que par le biais des réalisations administratives et architecturales. La position prise par les eunuques – ils étaient vingt mille à l'avènement de Wanli, en 1573 – conduit les fonctionnaires à imposer de plus en plus le confucianisme, qui suppose l'exaltation de la personne impériale et, en même temps, sa mise à l'écart du pouvoir réel.
(...)
Ce hiératisme compassé contraste étrangement avec l'impression de morne ennui qui se dégage des journées passées dans le palais impérial. Tous les jours, rythmée par les claquements de fouet des censeurs prêts à punir tout manquement au protocole, a lieu l'audience de la cour, face à la salle des cérémonies. Rite immuable, pendant lequel l'empereur ne dit pas grand-chose et n'apprend rien non plus ; le reste de sa journée est consacré à recevoir l'adieu des fonctionnaires qui partent en province ou à la retraite. Le dixième empereur Ming, Zhengde (1505-1521), rompt avec la tradition, s'absente de la capitale et fait même scandale en proposant de tenir l'audience le soir. Son successeur Jiaqing, pendant son long règne (1521-1566), s'acquitte avec soin des affaires publiques et, à la fin de sa vie, s'évade grâce à l'alchimie taoïste. (...) Esprit ouvert et curieux, Wanli est fort intrigué par les descriptions que lui font ses eunuques, en 1601, d'un lettré venu de l'ouest et porteur de surprenants cadeaux. Le père jésuite Matteo Ricci a réussi, après un long séjour à Macao, à pénétrer en Chine en se mêlant à la foule des marchands qui fréquentent les foires de Canton. Il a réussi à s'installer légalement dans l'empire, a fondé une résidence à Nankin, puis est remonté vers le nord dans le but de convertir l'empereur, ou du moins son entourage. Les eunuques s'opposent à une entrevue entre les deux hommes et c'est donc à eux que Ricci présente ses livres, ses peintures à l'huile, ses cartes géographiques et surtout ses horloges. Les eunuques apprennent à les remonter, à les nettoyer et éventuellement à les réparer : ces objets fascinent l'empereur et Ricci obtient le droit d'aller et venir dans le palais, mais sans jamais avoir la possibilité de rencontrer Wanli. L'empereur se trouve donc absent de la confrontation avec l'Occident, alors que la Chine voit se développer des productions artisanales de haute qualité, symbolisées par les filatures de Songjiang ou les fours à porcelaine de Jingdezhen.

La dynastie des Ming allait être emportée en 1644, un peu plus de vingt ans après la mort de Wanli. L'un des gros problèmes de la Chine est alors l'endettement des campagnes, due au fait que depuis Hongwu s'était développée une catégorie de paysans assez fortunés pour faire office de prêteurs, à une époque où l'on recherche avidement la monnaie d'argent. Cet endettement, devenu chronique sous Wanli, est à l'origine d'un soulèvement général qui éclate en 1627-1628.


http://www.clio.fr/BIBLIOTHEQUE/la_dyna ... lement.asp

Quelques commentaires :
- Le pouvoir politique dans la Chine des Ming a donc été miné par les rivalités entre eunuques (tellement puissants qu'ils refusent le droit à l'empereur de rencontrer Ricci ! 8-| ) et les mandarins. A une époque où le monde se décloisonne, la Chine se cloisonne. Ce n'est pas une question de modèle supérieur à un autre, c'est une question qui est expliquée par des événements historiques bien précises.
- De cette lutte entre eunuques bouddhistes et mandarins confucéens est né ce qu'on a appelé le néo-confucianisme.
- Bien loin des deux premiers Ming, la figure de l'empereur s'est peu à peu figée. Dans son nouveau palais, le fils du ciel était coupé du monde comme Louis XV et Louis XVI l'ont été à Versailles, et il a peu à peu perdu le pouvoir alors que les temps requéraient un dirigeant énergique.
- On voit que la menace des "barbares" su nord continue à peser, comme elle l'a fait pendant deux millénaires, sur la Chine qui emploie une part non négligeable de ses ressources à se prémunir du danger.
- Surtout, et c'est peut-être le plus important, on voit à quel point le développement, qu'il soit économique ou autre, est tributaire de l'histoire. Certains voudraient coller des grilles de lecture toutes faites pour comprendre l'évolution du monde en un clin d'oeil, savoir pourquoi tel pays a décollé et pas tel autre. Cette approche systémique relève en réalité d'une grande paresse intellectuelle : c'est tellement plus facile de tout expliquer par de grands modèles culturels ("les protestants sont forts sur le plan économique", "les confucéens sont fermés, bouh les méchants", "les Occidentaux sont les meilleurs", "les bouddhistes sont mous"), c'est tellement facile de refuser d'entrer dans les détails, de faire vraiment de l'histoire...


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Message Publié : 18 Jan 2014 19:49 
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Pierre de L'Estoile
Pierre de L'Estoile

Inscription : 27 Déc 2013 0:09
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Nous sommes en présence de deux textes rédigées par deux personnalités éminentes dont les analyses sont très divergentes.
Jacques Gernet est un spécialiste de la civilisation chinoise.
Angus Maddison est un économiste qui s'est plongé dans l'histoire de l'économie. Que connaît-il de la Chine ? Quelles sont ses sources ? Que connaît-il des sciences et des techniques ? Il calcule des PIB, des volumes d'échanges, compare des niveaux de vie, pour cela on peut lui faire confiance. Pour le reste, je crois que c'est plus douteux. Le constat qu'entre 1750 et 1850 l'Europe et son appendice les Etats-Unis d'Amérique aient fait de considérables progrès dans les sciences pures, dans les techniques ainsi que dans les sciences humaines (sciences politiques, droit, économie notamment), que sa puissance économique se soit durant cette période considérablement accrue tandis que la Chine stagnait dans tous ces domaines est indéniable. Reste à expliquer pourquoi et Angus Maddison laisse perplexe sur bien des points.

Citer :
le système bureaucratique a empêché l’émergence d’une bourgeoisie commerciale et industrielle indépendante comme ce fut le cas en Europe.
En 1850, y avait-il une bourgeoisie en Chine ? Au Japon, oui, il y en avait une, très dynamique. Elle se trouvait à peu près dans la situation de la bourgeoisie commerçante ou industrielle française sous l'Ancien Régime méprisée par la noblesse et lourdement imposée mais pouvant malgré tout prospérer.

Citer :
L’activité entrepreneuriale était précaire dans un cadre où la protection de l’activité privée était si mal assurée.
En quoi une activité entrepreneuriale était-elle précaire ?

Citer :
Parmi les grandes entreprises, il n’y avait que des monopoles publics ou des monopoles agréés par l’État.
En France, les premières grandes entreprises ont été créées par Colbert. Jusqu'à la Révolution, on ne comptait guère comme grandes entreprises que les arsenaux d'Etat et les manufactures royales.

Citer :
Les marchands, les banquiers et les négociants ne bénéficiaient pas des chartes et de la protection juridique qui étaient accordées aux marchands des villes européennes
Chartes utiles à certains égards mais malgré tout si contraignantes qu'on y a mis fin sous la Révolution par la loi Le Chapelier.

Citer :
L’élément le plus fondamental était la reconnaissance du fait que l’homme pouvait transformer les forces de la nature par l’étude rationnelle et l’expérience.
La méthode scientifique a attendu le 19 ème siècle pour être appliquée de façon utile dans l'industrie. On n'avait pas attendu Bernouilli et ses recherches sur la mécanique des fluides pour fournir à Christophe Colomb des navires capables de traverser l'Atlantique et de remonter le vent. On n'avait pas attendu Poisson et son traité de mécanique pour édifier, sans grands calculs, le dôme de la basilique Saint-Pierre à Rome. Toutes les prouesses techniques antérieures au 19 ème siècle sont dues à des savoir-faire acquis et lentement améliorés sans processus rationnels élaborés.

Citer :
Avec la Renaissance et le siècle des Lumières, les élites occidentales ont progressivement abandonné les superstitions, la magie et la soumission à l’autorité religieuse
Chinois et Japonais restent très superstitieux. Cela ne semble pas être un frein à leur créativité. Sait-on que Newton s'est plongé dans l'alchimie après avoir accompli les travaux pour lesquels il s'est rendu célèbre ? L'autorité religieuse n'a jamais entravé le progrès technique ni les échanges commerciaux. Elle s'est seulement opposée à certaines théories scientifiques sans portée pratique. Du reste, il n'y avait pas en Chine de vérités révélées et donc pas d'autorités religieuses chargées de les défendre.

Citer :
La tradition scientifique occidentale qui sous–tend l’attitude de l’homme moderne à l’égard du progrès technique et de l’innovation remonte clairement au XVIIe siècle, où elle a commencé à imprégner le système éducatif
Le système éducatif jusqu'à la fin du 18ème siècle ne s'intéressait qu'aux matières littéraires, à l'histoire, au droit, à la théologie et un peu aux mathématiques (algèbre élémentaire et géométrie d'Euclide). Un enseignement plus technique n'était diffusé que dans les écoles militaires pour les besoins de la marine et de l'artillerie. Les savoir-faire étaient transmis de maître à apprenti.

Citer :
L’Europe reposait sur un système d’États–nations qui avaient de grandes affinités. Ces nations étaient tournées vers l’extérieur, elles entretenaient des liens commerciaux importants et les échanges intellectuels étaient relativement faciles. Tout cela stimulait la concurrence et l’innovation.
Elles avaient de grandes affinités mais ne cessaient de se faire la guerre. Cela n'empêchait cependant pas les échanges. Mais sur quel rayon ? La superficie de la Chine est celui de toute l'Europe. Il faudrait, pour que la comparaison ait un sens, ne tenir compte que des échanges de l'Europe avec le reste du monde.

Citer :
l’accumulation systématique de données scientifiques ouvertement publiées
C'est un fait qu'en Chine et au Japon la recherche mathématiques ne faisait l'objet que d'échanges très restreints. Les différentes écoles gardaient jalousement leurs secrets.

Citer :
Nous attachons peu de prix aux objets bizarres ou ingénieux, et nous n’avons pas besoin non plus d’autres objets fabriqués dans votre pays » (Teng, Fairbank et al. , 1954). Cette mentalité profondément ancrée contribua à empêcher la Chine de s’engager dans la voie du développement protocapitaliste empruntée par l’Occident de 1500 à 1800, et de participer par la suite à des processus de croissance économique beaucoup plus dynamique "
C'était l'attitude du moment. Peut-on dire qu'il s'agissait d'une mentalité profondément ancrée ? Au Japon, où le système de pensée était similaire, les études hollandaises étaient suivies avec intérêt.


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Message Publié : 18 Jan 2014 20:23 
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Altai Khan a écrit :
- Surtout, et c'est peut-être le plus important, on voit à quel point le développement, qu'il soit économique ou autre, est tributaire de l'histoire. Certains voudraient coller des grilles de lecture toutes faites pour comprendre l'évolution du monde en un clin d'oeil, savoir pourquoi tel pays a décollé et pas tel autre. Cette approche systémique relève en réalité d'une grande paresse intellectuelle : c'est tellement plus facile de tout expliquer par de grands modèles culturels ("les protestants sont forts sur le plan économique", "les confucéens sont fermés, bouh les méchants", "les Occidentaux sont les meilleurs", "les bouddhistes sont mous"), c'est tellement facile de refuser d'entrer dans les détails, de faire vraiment de l'histoire...

Vous caricaturez la position d'Alain.g, dont le message précédent est intéressant, alors même que vous indiquez très bien quelles ont pu être les rigidités de la Chine.

En particulier je ne vois pas où se trouve dans son intervention l'à priori idéologique que vous dénoncez.

Il me semble difficile de comprendre pourquoi la révolution industrielle est née en Europe sans invoquer - entre autres - des facteurs culturels.

Citer :
on ne sait même pas combien il y a d'habitants en Chine - les estimations vont de 1,3 milliard à 1,6 milliard, avec au bas mot des dizaines de millions de naissances cachées.

C'est HS mais je suis un peu surpris par la largeur de la fourchette : environ 20% !

Spontanément, j'aurais imaginé une précision de l'ordre de 50 millions, 100 millions maxi.

Je vous rejoins sur le fait qu'une évaluation du PIB chinois en 1800 est illusoire. Par contre on peut peut-être avoir une approximation sur une région donnée, sachant que l'évaluation du PIB européen à la même époque est également un exercice de haute voltige...

Plutôt que sur des chiffres où la précision va probablement du simple au double, on peut se fier davantage au savoir-faire technique et aux produits effectivement manufacturés.

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Message Publié : 18 Jan 2014 21:13 
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Barbetorte a écrit :
Citer :
L’élément le plus fondamental était la reconnaissance du fait que l’homme pouvait transformer les forces de la nature par l’étude rationnelle et l’expérience.
La méthode scientifique a attendu le 19 ème siècle pour être appliquée de façon utile dans l'industrie. On n'avait pas attendu Bernouilli et ses recherches sur la mécanique des fluides pour fournir à Christophe Colomb des navires capables de traverser l'Atlantique et de remonter le vent. On n'avait pas attendu Poisson et son traité de mécanique pour édifier, sans grands calculs, le dôme de la basilique Saint-Pierre à Rome. Toutes les prouesses techniques antérieures au 19 ème siècle sont dues à des savoir-faire acquis et lentement améliorés sans processus rationnels élaborés.

Cela va plus loin que ça. Une bonne partie de la mécanisation du début du 19ème siècle est réalisée de façon empirique. Dans l'industrie des "cotonnades" qui est la première étape de la révolution industrielle en Angleterre, on parle encore de machines en bois. Par la suite, la production dans des bâtiments de fortune, éventuellement sur plusieurs étages, où plus de 50% de la main d'oeuvre est affectée à des tâches de manutention est très loin de la représentation qu'on se fait d'une usine, et n'a rien de scientifique. Mais si c'est un cauchemar pour ingénieur d'aujourd'hui, c'est malgré tout un saut qualitatif décisif par rapport à un atelier artisanal.

Si l'essentiel est empirique, par contre le fait qu'il y ait une amélioration continue des techniques de production et des machines implique l'apparition d'un nouveau métier : celui de technicien, puis plus tard celui d'ingénieur, ce qui suppose une formation mathématique - même si elle ne va pas chercher très loin - et même quelques bases scientifiques, plus tard, disons autour de 1850, pour l'industrie lourde et évidemment pour la chimie. C'est une nouveauté de cette époque que pour être ingénieur il faille alors aussi être quelque peu savant.

Il est exact que toute la phase de départ de la révolution industrielle se fait de façon empirique, sans que ses acteurs aient réellement des connaissances scientifiques. En revanche, elle suppose l'existence d'une catégorie de population scolarisée et disposant d'un bagage de connaissances techniques enseignées, éventuellement sur le tas. Dès la fin des guerres napoléoniennes on s'arrache en Europe les spécialistes anglais de ces nouvelles techniques de production, à qui on fait des ponts d'or pour leur savoir-faire.

Au total, si on peut minimiser l'apport de la science dans la naissance de ce phénomène, je pense qu'on aurait tort de sous-estimer l'aspect scolaire de la révolution industrielle : elle ne peut apparaître que dans un pays ayant une population "éduquée" significative.

Sans parler de scolarisation massive, cela suppose tout de même une société où le savoir et l'éducation sont valorisés - y compris le savoir technique -et non pas réservés à une élite traditionnelle ultra-minoritaire, comme cela semble être le cas en Chine.

On pourra me rétorquer que les commerçants chinois savent compter, à l'évidence, mais cela est vrai partout depuis le haut moyen-Age, et il y a une différence entre savoir compter et savoir mesurer et en tirer des applications pratiques, ce qui est un problème tout différent.

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Message Publié : 18 Jan 2014 21:28 
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Pierma a écrit :
Vous caricaturez la position d'Alain.g, dont le message précédent est intéressant, alors même que vous indiquez très bien quelles ont pu être les rigidités de la Chine. En particulier je ne vois pas où se trouve dans son intervention l'à priori idéologique que vous dénoncez.
Non, je parlais d'auteurs essentialistes comme Needham, Landes ou Maddison, souvent critiqués pour leur européo-centrisme, position qu'ils revendiquent d'ailleurs eux-mêmes. Ces auteurs relativement discutables, pas toujours historiens d'ailleurs (Landes), qui de plus ne connaissent pas grand chose au détail de l'histoire des pays dont ils parlent (aucun de ces trois-là n'a de connaissance de l'histoire chinoise par exemple, ils se contentent, dans leurs explications, de généralités assez confondantes), sont malheureusement sans cesse cités par Alain G., et on se doute bien pourquoi :wink:

Citer :
Il me semble difficile de comprendre pourquoi la révolution industrielle est née en Europe sans invoquer - entre autres - des facteurs culturels.
D'abord, la révolution industrielle n'est pas née en Europe, elle est née dans un pays européen, c'est assez différent. Sans l'Angleterre, et peut-être la France qui suivait de pas trop loin, la révolution industrielle aurait très bien pu naître sur un autre continent, auquel cas on ne parlerait pas de supériorité de tel ou tel modèle.
Mais surtout, il y a des causes historiques aux évolutions, et ce sont ces causes que les auteurs essentialistes refusent de voir quand ils se cantonnent aux grandes explications structuralo-culturelles. Je passe même sur le danger de ce genre de vision qui mène, à terme, droit au racisme, c'est de toute façon stupide car c'est du prêt-à-penser, de la paresse intellectuelle. On utilise une grille générale qu'on colle sur le monde et hop ! plus besoin de réfléchir, tout s'explique par le modèle culturel ou politique... :rool:

Pour donner un exemple concret, prenons la puissance économique comparée de la Chine et de l'Europe. On considère généralement, mais nous sommes d'accord tous deux que c'est à prendre avec des pincettes, que :
- la Chine devance l'Europe vers 500 av JC
- l'Europe romaine devance la Chine (embringuée dans de multiples guerres)
- la Chine devance l'Europe sous les Tang et les Song (700-1200)
- l'Europe devance la Chine (qui est sous le joug mongol) vers 1300
- la Chine repasse devant l'Europe (Guerre de cent ans) au début des Ming
- l'Europe redépasse la Chine avec la révolution industrielle à partir de 1800.
- quant au XXIème siècle, nous savons que la Chine va redevenir la première puissance économique du monde et va re-re-redépasser l'Europe...

C'est un chassé-croisé permanent. Pourtant le modèle culturel dans chacune de ces entités ne change pas, c'est toujours le même ! C'est donc bien qu'il y a d'autres causes beaucoup plus importantes, des causes historiques et non culturelles. Et c'est ce que les auteurs essentialistes et leurs lecteurs refusent de voir. C'est de la pure paresse intellectuelle...

Et c'est aussi d'une malhonnêteté invraisemblable. Car prendre la période 1800-1950 au cours de laquelle l'Europe connaît sa révolution industrielle et la Chine stagne, prendre donc cette période historique extrêmement courte à l'échelle des temps, pour prouver que le modèle culturel occidental est intrinsèquement supérieur, c'est se moquer du monde. C'est pourtant ce que font plus ou moins les Landes, Needham, Maddison et compagnie. On pourrait faire l'inverse pour s'amuser : prendre la période 1400-1500 et en conclure que le modèle chinois confucianiste et tout et tout est intrinsèquement supérieur au modèle occidental. C'est ridicule, enfin... :rool:

Citer :
C'est HS mais je suis un peu surpris par la largeur de la fourchette : environ 20% ! Spontanément, j'aurais imaginé une précision de l'ordre de 50 millions, 100 millions maxi.
Tout le monde s'accorde à reconnaître que le chiffre de 1,3 milliard est assez largement sous-évalué, le gouvernement est le premier à le reconnaître ! En Chine, d'après ce qu'on peut lire dans certains journaux qui sont moins menteurs que les autres, l'estimation serait entre 1,45 et 1,5 milliard. Ce qui est sûr, c'est qu'il y a des dizaines voire des centaines de millions de naissances cachées, à la campagne dans la totalité des cas.


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Message Publié : 18 Jan 2014 21:35 
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Georges Duby
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Barbetorte a écrit :
Nous sommes en présence de deux textes rédigées par deux personnalités éminentes dont les analyses sont très divergentes.
Jacques Gernet est un spécialiste de la civilisation chinoise.
Angus Maddison est un économiste qui s'est plongé dans l'histoire de l'économie. Que connaît-il de la Chine ? Quelles sont ses sources ?

Wiki: " Pendant les vingt dernières années, il (Roddison)s'est particulièrement concentré sur l'élaboration de séries longues de données économiques. Il a par exemple publié en 1998 Chinese Economic Performance in the Long Run, 960-2030 AD, une étude minutieuse de la croissance en Chine sur plus de mille ans. Cette étude, mise à jour en 2007 (cf. site de l'OCDE), a permis un débat historique considérable sur les forces et faiblesses comparées de la Chine et de l'Europe. "

La Chine a été en avance sur l'occident, puis elle a été rattrapée et largement dépassée, non pas au 19è siècle (arrivée des occidentaux en force) mais au 17è siècle, l'écart s'accroissant ensuite, pour des raisons qu'on doit pouvoir donner comme Roddinson, sans qu'on jette le doute sur ses travaux qui sont très connus sur le plan international; il a écrit 18 ouvrages et dans de nombreuses revues.
C'est un économiste. Gernet est "plus à l'aise dans l'histoire intellectuelle de la Chine que dans son économie" précise le commentateur d'un de ses ouvrages sur le site de Persée qui relève des lacunes. Cet auteur fait partie des auteurs qui ménagent la Chine.

Pour l'apparition de grandes entreprises, avant le colbertisme en France il en existe de nombreuses dans les villes italiennes, dans la laine notamment. Le capitalisme y est né.

_________________
Heureux celui qui a pu pénétrer les causes secrètes des choses. Virgile.


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