Ingelrii a écrit :
J'ai l'impression que le Japon a tenté plusieurs fois de se regrouper sous l'égide d'un souverain suprême, mais que les clans et les seigneurs n'ont jamais accepté une transition des plein pouvoirs vers une seule personne. Il me reste encore énormément à lire, je me hâte surement de tirer des conclusions, mais j'ai la sensation qu'un souverain avec une autorité équivalente à ce qu'on a connu avec un Philippe le Bel, un Louis XI ou un Louis XIV n'a jamais été possible au Japon.
Vous avez raison de soulever ce problème, qui est celui plus largement de l'adaptation du système chinois à la société japonaise. Très vite (avant les shogun), le pouvoir a été confisqué par l'entourage de l'Empereur, la famille Fujiwara : le rôle de l'Empereur était alors déjà symbolique (ce qui s'est vu aussi dans l'histoire chinoise bien sûr, mais qui a eu tendance à se systématiser au Japon). A partir du XIe-XIIe siècle, l'idée d'un pouvoir centralisé à la chinoise (qui se maintenait) vole en éclats, ce qui est dû à la puissance et à la volonté d'autonomie de cette aristocratie militaire. Les élites japonaises ont résisté au modèle chinois : après tout, malgré leur pérennité, les caractères chinois sont eux aussi inadaptés à la langue japonaise...
Cela dit, pour reprendre votre comparaison avec la monarchie absolue à la française, on peut quand même se poser la question pour les contemporains de Louis XIV, les Tokugawa : ne détenaient-ils pas un pouvoir semblable ? (bien que dépourvu de la dimension sacrée de la monarchie française...du moins de leur vivant). C'est un débat historiographique assez vif : jusqu'où ce régime des Tokugawa est-il "féodal" ou "centralisé" (par extension : ces catégories européocentrées sont-elles valides pour le Japon ?). Mais ce sont des questions qui nous emportent vers d'autres débats!
Jerôme a écrit :
Les Portugais au XVIe siècle avaient traduit Shogun par Roi et Tenno par ... Pape !
Pour être un peu pointilleux
: le shogun était appelé Empereur par les Portugais comme les Hollandais, les "rois" étaient les daimyô ! (les "seigneurs féodaux", comme on les appelle généralement).