Attention : un bijou...
Réalisé par Mikhail Kalatozov Avec Luz Maria Collazo, José Gallardo, Raul Garcia et Jean Bouise
1964 - 2h14
L'HISTOIREEn quatre vignettes, l’histoire du Cuba pré Castriste vue sous le prisme du cinéma de propagande russe. Mais avec un poète derrière la caméra, Mikhail Kalatozov, qui fait de son film un chant d’amour à l’île cubaine, son peuple et au cinéma. Quatre histoires édifiantes magnifiées par un cinéaste en état de grâce : la honte d’une jeune cubaine quand son courtisan découvre qu’elle vend son corps aux touristes américains pour vivre. La détresse d’un petit paysan qui apprend que son terrain a été vendu à une compagnie américaine, la United Fruit. Le destin d’un étudiant abattu par la Police alors qu’il distribue des tracts pro-Castristes. Un paysan rejoint la guérilla pour sauver son île et sa famille…http://www.dvdclassik.com/critique/soy-cuba-kalatozovCe film est/fut maudit.
Refusé pour raisons idéologiques, il ne fut même jamais montré en Urss.
C'es Martin Scorsese, ébloui par ses prouesses techniques (des plans séquences INCROYABLES
), ses immenses qualités picturales, sa dimension onirique, qui décida de lui donner une seconde vie. On passe au-delà du message politique pour se retrouver dans un univers poétique où la caméra est constamment maîtresse de la situation...
Une
symphonie visuelle, donc.
Scorsese lui-même, créateur des éblouissants travellings des Affranchis, en reste bouche bée. Dans les bonus du DVD, le réalisateur américain balaie d’une main la propagande du scénario pour s’attacher uniquement au génie visuel des deux russes. Ainsi, le mythique plan de l’hôtel qui voit une caméra de l’époque (plusieurs dizaine de kilos au bas mot) littéralement léviter. Où est le caméraman ? Comment fait-il ? Où est le truc ? De truc, il n’y en a tout simplement pas… Passant avec une rare fluidité d’un étage à son rez-de-chaussée dans un même mouvement, puis, toujours sans cut, plongeant dans une piscine, Urusevsky anticipe avec 20 ans d’avance les délires mouvementés d’un Sam Raimi ou d’un Paul Thomas Anderson (référence ouverte au plan susnommé dans Boogie Nights). Plusieurs fois, la caméra fait ainsi preuve d’une liberté ahurissante, tel ce travelling montant un étage d’immeuble, traversant une rue puis une usine à cigare pour mieux redescendre dans la rue se frotter à la foule dans un même plan éblouissant.“ Leçon de cinéma : comment hisser une oeuvre du rang de chronique assez propagandiste à celui d'épopée humaine universelle et astrale. ”